Chapter Text
Jour 1
La journée avait été longue pour Louis, très longue même. A présent, il n’avait qu’une hâte : rentrer à la maison où il pourrait manger un pot de glace devant une rediffusion de Gossip Girl ou n’importe quelles autres séries stupides sur laquelle il pourrait se morfondre. Il rangea méthodiquement les dossiers du lendemain sur le bureau de son patron, et verrouilla son ordinateur avant de se diriger vers l’entrée principale où il salua rapidement Derek, l’un des veilleurs de nuit et également ami de longue date. Une fois au volant de sa voiture, il s’étira et se frotta vigoureusement le visage. Dernièrement, la fatigue ne le quittait plus et la fin prématurée de son contrat n’apaisait pas ses nuits : dans quelques jours seulement, il se retrouverait sans travail avec le poids des dettes de jeux que son ex mari lui avait laissé ainsi que le crédit de la maison sur le dos. Pour être honnête, il ne savait foutrement pas comment se sortir de cette merde. Il alluma le contact et jeta un œil à la petite pendule lumineuse au dessus du poste radio ; cette dernière affichait deux heures du matin passées. Au fond de lui, il avait l’infime espoir que ses heures supplémentaires puissent faire changer l’avis de son patron mais là encore, il faudrait un miracle et il avait depuis peu perdu foi. Après quelques minutes, il s’engagea dans la circulation avec la ferme détermination de ne plus ressasser ses problèmes, au moins pour ce soir. C’était sans compter sur celui qui se présentait maintenant à lui.
Il avait d’abord pensé à une hallucination, quelle personne saine d’esprit sortirait nue et qui plus est si tard dans la nuit ? Cependant, après quelques mètres la vision qui s’offrait à lui était on ne peut plus nette : il y avait là, sur le bord de la route, un grand brun de sa tranche d’âge abordant un air désespéré alors qu’il s’approchait, ayant surement repérer les phares de sa voiture au loin. Louis sentit son cœur battre la chamade, l’idée d’offrir son aide au garçon ne lui semblait pas particulièrement bonne, mais il n’avait pas envie de découvrir son visage en première page des faits divers demain matin. Ne voulant prendre cette décision à la légère, il ralentit en l’approchant et le détailla quelques instants : il n’avait pas l’air dangereux, ni même de vouloir faire du mal à qui que ce soit. De plus, il était quasiment impossible que l’inconnu ait une arme sur lui, mais la situation était tellement grotesque qu’elle le fit douter.
Il stationna finalement la voiture et prit une longue inspiration en ouvrant la fenêtre. Ses mains devinrent moites à l’approche de l’homme et il fut pris de violent frisons dans l’échine « Je t’accorde que la situation est surréaliste, mais je ne te veux aucun mal d’accord ? » affirma alors le garçon en s’approchant, guitare en main. Louis déglutit et hocha silencieusement la tête « De quoi as-tu besoin ? » se surprit-il à demander d’une voix tremblante « Tu es du coin ? » commença-t-il en se grattant l’arrière du crane, « parce que j’ai aucune idée d’où on est ». Louis observa ses pupilles d’un air perplexe mais dans la pénombre, il n’aurait su distinguer si l’homme était dopé « Madison, dans le Wisconsin » répondit-il. Le bouclé cracha un flot de jurons en se frottant frénétiquement le visage « C’est à genre, deux heures de Chicago c’est ça ? » hésita-t-il en abordant maintenant une mine contrite « plutôt trois quand la circulation est dégagée » bredouilla Louis en observant le visage de l’homme se décomposer. Il était beau, c’était indéniable : une peau sans impureté, une mâchoire structurée, des lèvres fines, un nez légèrement épaté, et des yeux d’un vert Hooker si précieux. Louis aurait pu l’admirer toute la soirée, même si sa nudité le mettait mal à l’aise vis-à-vis de ses propres complexes. Le garçon se décida finalement à reprendre la parole « As-tu un téléphone portable ? » « Je- Non, je n’en ai pas » articula Louis en sentant le regard curieux du brun sur lui « Quoi ? Tu n’as pas… Putain, tu parles d’une poisse » se mécontenta-t-il.
Louis avait abandonné l’idée de s’adonner aux nouvelles technologies après le départ d’Halian, alias le bassiste de l’un des groupes de pop rock les plus en vogue. Après une relation de quatre ans, celui-ci avait soudainement mis les voiles pour parcourir le monde ; Louis avait d’abord suivit ses moindres faits et gestes via le net mais lorsque le comportement d’Halian avait changé du tout au tout passant par des soirées très arrosées, des abus de drogues, des bagarres ou encore des relations à n’en plus finir, il avait pris la décision de se couper du monde pour s’obliger à ne plus penser au garçon qui lui avait brisé le cœur. Ainsi, il vivait à présent avec le minimum, autrement dit sans connexion internet ni téléphone portable, et s’était fait la promesse de ne plus jamais fréquenter de musiciens.
« Tu es toujours avec moi ? », dubitatif, Louis reporta son attention sur le jeune homme dehors « Oh, oui. Pardonne-moi, tu disais ? » reprit-il. Le brun l’observa un instant avant de secouer légèrement la tête en affichant un sourire moqueur « Est-ce qu’il y aurait par hasard des hôtels de nuit pas trop nazes par ici ? ». Louis ne se souvenait même pas de la dernière fois qu’il avait fréquenté un hôtel, il n’était pas d’une grande aide. Il secoua négativement la tête « Me voilà dans une merde sans fin » opina-t-il, replaçant la guitare devant lui en essayant de se cacher derrière celle-ci. Louis se rappela avoir laissé une veste à l’arrière de la voiture mais pour une raison évidente, il n’avait pas envie d’échapper à la vue qui s’offrait à lui. Il regarda une dernière fois l’horloge : elle n’était plus très loin des trois heures du matin. Il n’y avait aucune chance qu’il trouve un hôtel ou même un taxi à cette heure là. Sans réellement penser à la portée de ses paroles, Louis lui proposa de venir passer un coup de fil chez lui et sans la moindre hésitation, le brun accepta et grimpa côté passager.
***
« Le téléphone est ici, à côté de la bibliothèque et si tu as besoin de quoi que ce soit je suis à côté » indiqua Louis en faisant un geste en direction de la cuisine. Avant qu’il ne passe la porte, le brun l’interpella « Est-ce que tu aurais quelque chose que je puisse porter ? » questionna-t-il en désignant sa nudité. Louis détourna le regard en essayant tant bien que mal de contrôler l’éclat rosé de ses joues alors qu’il le contournait pour finalement se diriger vers son dressing. Le bouclé le suivit en jetant un regard particulièrement admirateur aux œuvres accrochées aux murs de la bâtisse « Elles n’ont pas de réelle valeur si ce n’est que sentimental, un ami les a peint » précisa Louis en répondant à sa question muette. Il trouva un jogging appartenant probablement à Liam et le lui tendit, ainsi qu’un tee-shirt étiré par ses nombreux lavages. Il n’avait pas beaucoup à offrir, mais c’était un minimum.
De retour dans le salon, il laissa de l’intimité au brun et se confina comme prévu dans la cuisine où il prépara deux tasses de thé noir. Il profita de ce moment de calme pour décompresser et relâcher toute la pression accumulée depuis le début de cette folle journée. Sur le plan de travail, une pile de lettres annonçant probablement de nouvelles factures s’ajoutant à celles qu’il n’avait pas encore payées. Il les observa d’un œil mauvais comme si cela pouvait soudainement les faire disparaitre, mais non elles étaient bel et bien là à le narguer. Il détourna le regard lorsqu’il aperçut dans l’encadrement de la porte la posture de son invité, maintenant débarrassé de sa guitare et couvert de ses maigres vêtements. Ce dernier s’avança en réunissant grossièrement ses cheveux dans un chignon à l’aide d’un élastique et Louis le trouva étonnement charmant ainsi. Il poussa la seconde tasse de l’autre côté de l’îlot en lui proposant silencieusement de s’asseoir, ce qu’il fit « Merci. J’ai appelé mon manageur mais sans succès alors je lui ai laissé un message vocal. Je sais que c’est beaucoup te demander mais ça te dérange si je reste encore un peu ? C’est malheureusement le seul numéro de téléphone que je connais, ça me servira de leçon » ricana-t-il amèrement en s’emparant de la tasse crachant une fine fumée blanche. Louis opina par instinct avant que ça ne fasse tilt dans sa tête « ton manageur ? » « Ouais la guitare, c’est pour ça. Je fais partie d’un groupe, on en est à nos débuts mais on assure grave » se vanta-t-il. Le sourire de Louis se crispa, évidement tous les beaux mecs qu’il rencontrait étaient musiciens : Halian, et maintenant lui. Il réalisa soudainement qu’il ne s’était pas clairement présenté alors il le fit brièvement et apprit en retour que le garçon s’appelait Harold, qu’il était anglais et qu’il approchait la trentaine « On a formé le groupe il y a quelques années, mais on commence tout juste à se faire une place, ce n’est pas comme si nous étions à la hauteur pour une tournée mondiale » Louis remarqua une pointe d’ironie dans la façon qu’Harry avait d’énoncer les choses mais ne s’en formalisa pas. Il ne connaissait ni l’homme, ni sa musique, ni son groupe ; qui était-il pour juger ?
Lorsqu’ils eurent finis leur thé, le téléphone n’avait toujours pas sonné. Il se faisait tard ou plutôt tôt alors Louis prit la décision de préparer le divan au plus confortable possible afin qu’Harry puisse s’y reposer en attendant l’appel ; quant à lui, il troqua sa chemise et son bas de costume contre un large tee-shirt et un boxer. Après s’être excusé mille fois auprès de son invité pour l’abandonner ainsi, il rejoignit sa chambre et plus particulièrement son lit où il sombra dans le sommeil de suite avec la quasi-certitude de se réveiller en un seul morceau le lendemain matin.
Cependant, son sommeil fut de courte durée. Effectivement, quelques temps après, il entendit perceptiblement son convive batifoler dans la cuisine. Il considéra tout d’abord l’idée de se rendormir et de laisser ledit Harry à son sort mais il possédait malgré ses faibles économies quelques objets de valeurs et le garçon restait un inconnu à ses yeux. Il prit donc la décision de découvrir la source de ce vacarme ; avec une difficulté étonnante il sortit de ses draps douillés et surprit Harry près du plan de travail, anormalement penché sur l’évier « Harry ? » questionna-t-il en baillant. Comme un enfant prit sur le fait, le bouclé sursauta et laissa échapper quelque chose dans le conduit d’évacuation en jurant « Qu’est-ce que tu fais ? » s’inquiéta Louis en s’approchant prudemment. Le brun jeta un coup d’œil septique en direction de l’évier et s’y adossa, bloquant la vue à Louis « J’avais seulement soif, désolé de t’avoir réveillé » s’excusa-t-il en affichant un sourire charmeur. Louis considéra le fait de l’interroger sur ce qu’il venait de surprendre mais il était réellement trop tôt et une confrontation matinale passait très clairement après la chaleur et le confort de son lit. Remettant son interrogatoire à plus part, il hocha simplement la tête aux dires d’Harry et le suivit prudemment du regard lorsque ce dernier s’approcha de lui « Bonne nuit Louis » murmura-t-il en déposant un rapide baiser sur la joue du mécheux, le laissant seul dans la cuisine, troublé, surpris et les joues rougies.