Chapter 1: On est pas sorti du sable.
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Chapitre 1 : « On est pas sorti du sable. »
« Techniquement, j’ai tout. » se félicita Denki en observant d’un œil critique le large cercle de sel et les sigils délicatement tracés par ses soins, selon des indications suivies à la virgule près.
Rapidement, il refit la liste, vérifia que tout était en place – et en quantité adéquate, pas comme la fois où il avait complètement oublié de checker le nombre d’œils du tigre sur sa décoction de nénuphars, et qu’il avait fait exploser la moitié de la salle de classe. Même si pour être d’une honnêteté parfaitement honnête, Present Mic avait été un brin sadique de leur donner la construction d’un sortilège en trois temps alors qu’ils venaient à peine d’entamer l’apprentissage de ceux en deux temps. Mais là, non. La limaille de fer était nickel, les perles de quartz fumées bien au centre de chaque petit tas et pas un seul trait de sigil ne dépassait du cercle de sel. D’ailleurs, histoire d’être vraiment sûr et certain de ne pas faire de connerie, il vérifia ce dernier en s’accroupissant, se penchant plus que de raison vers le sol.
« On peut savoir ce que tu fous ? »
Denki faillit hurler, perdit l’équilibre jusqu’à se reprendre de justesse sans s’épargner un sursaut de pure panique et, dans le même mouvement, essaya tant bien que mal de dissimuler le sol derrière lui. Peine perdue : Hitoshi referma calmement la porte pour considérer d’un coup d’œil les sigils, sourcil haussé d’un amusement tranquille :
« Un sort ? »
« Non ! »
« Du tricot, peut-être ? » ironisa alors son camarade en s’adossant au chambranle, un vague sourire aux lèvres. Débraillé comme à son habitude, avec les cheveux en pagaille et des cernes qui témoignaient d’insomnies à répétitions, il était visiblement amusé de l’expression de Denki en dépit de sa nonchalance habituelle.
« Je révise. » siffla celui-ci, d’un aplomb qu’il ne possédait pas. Katsuki aurait été bien meilleur que lui niveau mensonge, sauf que l’explosion ambulante n’avait pas voulu être associée à « ses conneries de magicien de seconde zone » et le platine se contenta de croiser les bras, faussement indigné. « Je révise pour le cours d’Aïzawa ! »
« Tu veux dire, le cours que t’es en train de louper de manière si magistrale qu’on m’a envoyé te chercher ? »
« Mais il est qu’à seize heures ! » blêmit Denki, encore plus effaré de voir son camarade réfuter d’un signe de tête décontractée :
« Avancé en raison d’un empêchement du prof. Ça fait trois semaines que c’est sur le tableau d’affichage. »
« Fait chier ! » jura violemment Denki, avec un coup d’œil pour son ouvrage. Techniquement, tout pouvait rester en l’état – fallait juste qu’il trouve un moyen de verrouiller la porte, mais ça, c’était pas insurmontable. Le seul problème, c’était la fraîcheur de certains ingrédients, particulièrement la sauge que le sort exigeait comme « coupée depuis moins d’une demi-heure », ce qui allait le forcer à retourner dérober une poignée de feuille chez Midobro. Faute d’assiduité dans leur entretien, ses plantes à lui crevaient toujours en un temps record.
« Sauge et sucre ? Tu fais une infusion géante ? » glissa Hitoshi et Denki réalisa que son immobilité lui laissait tout loisir d’analyser la construction de son sort à ses pieds. Il haussa les épaules, avant d’opter pour une demie-vérité :
« J’essayais un truc. J’y peux rien si la recette est conçue avec de la sauge « pour purifier l’intention » et du sucre « en guise de paiement » ! Tu parles d’une magie… »
« Et t’as trouvé ça où ? »
« Dans un vieux bouquin, dans la bibliothèque. Je voulais juste profiter de l’aprem de libre pour essayer autre chose que nos cours ! » s’agaça Denki, déçu de devoir abandonner son projet en cours de route. Mais il n’avait pas réellement le choix : il n’avait tout simplement pas d’assez bonnes notes pour sécher le cours de « Liens et Répercussions magiques » qu’Aïzawa enseignait ce semestre.
Hitoshi lui adressa un sourire compatissant, presque désolé de l’avoir débusqué si vite, et désigna d’un coup d’œil le travail de tissage du sort :
« Tu t’en fous, tu peux laisser tout ça comme ça et reprendre après le cours. »
« Presque tout… Je vais devoir recouper de la sauge, il faut qu’elle soit fraîche. Enfin, coupée depuis moins de trente minutes, très exactement ! »
« Mmm. » fit mine d’acquiescer Hitoshi, gardant ensuite un silence pensif devant l’agitation effrénée de Denki en pleine tentative désespérée de ranger manuels, fioles d’ingrédients et diverses sacoches, ainsi que sa trousse, dans son sac à dos. Il s’acharnait à plier en deux une minuscule sacoche qu’il avait lui-même brodé de fils rouge pour se rappeler de ne surtout pas ingurgiter la moindre feuille contenue dans le tissu, quand Hitoshi soupira, sans bouger de la porte :
« Il prend longtemps, ton sort ? »
Éperdu de reconnaissance, Denki lui dédia le sourire le plus lumineux de son vocabulaire et chantonna presque, ravi :
« J’en avais pour deux minutes, pas plus ! »
« T’en as trois. » lui accorda bien généreusement Hitoshi.
Plus qu’il ne lui en fallait ! Denki jeta son sac dans un coin, non sans y récupérer au passage une pincée de sel pour se nettoyer les mains. Vu qu’il venait de toucher ses affaires de cours, et donc, ses réserves de première nécessité, il aurait été stupide d’emmener avec lui des fragments d’ingrédients étrangers à son sort. Ça aussi, il l’avait appris grâce à une explosion – même si celle-là avait plutôt fait fondre une partie de sa table d’expérience, sous le fou rire d’Eijirô.
Une étincelle attira son attention sur sa gauche, illuminant le visage d’Hitoshi une fraction de seconde lorsqu’il alluma sa clope d’une flammèche au creux de sa paume.
« T’es sérieux ? La surveillante Mirko va te tuer si elle l’apprend. »
« Ah ouais ? De la même manière qu’elle va te tuer si elle apprend que tu utilises une annexe de la salle d’entraînement pour un sort privé ? » lui retourna Hitoshi en tirant sa première taffe, et Denki haussa les épaules. Un partout, la balle au centre.
En parlant de centre, il se plaça dans celui de son cercle, débarrassé de sa veste d’uniforme d’un geste. Ignorant royalement l’odeur douceâtre de clope qui ne relevait pas que du tabac, comme beaucoup d'objets améliorés magiquement par leur utilisateur, il ferma les yeux, inspira profondément avant de se lancer.
Chacun avait sa méthode pour initier le processus magique, selon les affinités personnelles : comme toujours, Denki craqua subitement sa nuque pour utiliser l’impulsion électrique de son organisme en guise de signal de départ. La vague de magie se rua dans ses nerfs, y volant chaque signal électrique en échange d’un fourmillement familier, jusqu’à ce qu’il rouvre les yeux et décharge d’un coup l’énergie accumulée. Une vibration sourde ébranla chaque ingrédient, le long de son cercle de sel et l’espace d’un bref instant, tout s’illumina d’un halo éclatant, presque aveuglant, au moment où la magie ponctionnait son dû. Avant de s’évanouir, laissant le silence reprendre le dessus. Exception faite de la taffe qu’Hitoshi prit, lui qui avait eu la courtoisie de retenir son souffle lorsque Denki s’était lancé.
« Pas mal. »
« Merci ! » salua Denki avec une courbette dramatique, ravi d’avoir mené son expérience sans explosion ni incendie inopiné, pour une fois. Dans son mouvement, un éclat métallique accompagna la courbe de ses mains, le faisant tendre ses doigts devant lui pour contempler l’assortiment de bagues ouvragées subitement apparues sur sa peau.
« Oh… Intéressant. »
Les bagues, sans doute les restes de la limaille de fer qu’il avait déversé à côté de la sauge en guise de « sang et chair du sortilège », formaient un zigzag entre ses mains. Trois d’un côté, deux de l’autre et à chaque pouce, deux anneaux si fins qu’on les aurait dits tatoués à même sa peau.
Donc techniquement, une partie du sort avait marché. Restait à savoir laquelle, et ça, il n’avait aucune idée de comment le vérifier. À vrai dire, le manuel ne précisait pas exactement comment faire fonctionner le sortilège, et il avait naïvement cru qu’il y aurait quelques indications visuelles ou même sensorielles pour aider, mais rien, bernique, rien que les bagues pour seul changement. Un peu léger comme explication.
« Denki. » commença Hitoshi, d’une voix sourde que le platine n’avait pas souvent entendue, « Que devait faire ton sort ? »
« Heu… ba je… C’était une tentative, ça n’a pas marché, de toute façon... » grimaça Denki en essayant de ne surtout pas penser au but réel dudit sort, de peur que ça se lise sur son visage. « Pourquoi tu demandes ? »
Pour seule réponse, Hitoshi leva ses mains où brillait l’exact même motif de bagues ouvragées et anneaux fins, aux exactes mêmes emplacements. Ah.
« Ah. » répéta Denki, surpris. Normalement, vu qu’il était seul dans le cercle au moment où il avait enclenché le processus, le sort n’aurait pas dû inclure Hitoshi, ils ne se touchaient pas et il n’avait rien lancé en direction de son camarade. Il se pencha subitement vers le cercle de sel, qu’il avait pourtant disposé avec toutes les précautions d’usage, comme il l’avait appris dès la primaire, et dont rien n’aurait pu sortir sous aucun prétexte, sauf si… Ah. Ba voilà.
« J’ai brisé le cercle de mon genou, quand tu es rentré. En sursautant. » précisa Denki face au regard noir de son camarade. « Et selon la loi de Kardam... »
« … Tout sort non-contenu dans un cercle tracé selon les règles de l’art affectera l’entièreté de la pièce dans laquelle il a été créé, je sais nos cours, merci. Ce que je veux savoir maintenant, c’est qu’est-ce que ton putain de sort est censé faire ? »
C’était logique qu’Hitoshi s’interroge, bien sûr, mais il était absolument hors de question que Denki avoue quoi que ce soit. Absolument pas.
En désespoir de cause, il chercha derechef une explication aussi fausse que valable, paniqué. Sucre et sauge, avec de la limaille de fer et de la grenade, ça rentrait dans un certain nombre de sortilèges dédiés à la conservation des plantes, sauf qu’en l’absence de pot de fleurs, l’excuse tombait à l’eau. Un sort de son invention pour appuyer ses talents naturels dans la magie électrique, peut-être ? Une sorte de batterie organique, le concept pourrait éventuellement être assez crédible pour lui offrir une porte de sortie, mais il n’eut pas le temps d’ouvrir la bouche sur sa connerie. Hitoshi frappa dans ses mains en faisant disparaître ainsi sa clope achevée et une lueur indigo se glissa subrepticement dans le mouvement de ses doigts :
« Hey, je sais pas ce que t’as trouvé comme sort à la bibliothèque, mais comme je suis affecté, j’aimerais bien savoir à quoi m’att… » et il s’interrompit soudainement, en reculant les mains comme s’il s’était brûlé alors que Denki blêmissait en face de lui.
« J’ai touché quelque chose, dans les airs. »
Denki le croyait. Denki le croyait même très bien, genre sur parole, parce que s’il n’avait eu aucun signe visuel entre les doigts fins d’Hitoshi, lui, il avait très très très bien senti quelque chose. Mais pas dans les airs. Du tout.
« C’est un portail de contact ? » déduisit Hitoshi, lequel n’avait pas volé son excellente place au sein du classement par niveau des élèves. « Au niveau des mains ? J’imagine que le sort a un rapport avec les bagues ? »
Denki se contenta d’opiner du chef, occupé à réfréner le doute affreux qui était en train d’envahir son esprit, présentement. Un doute qui n’en était pas réellement un et plus il y songeait, plus les probabilités que ce doute soit certitude augmentaient. Ses joues perdirent quelques teintes de couleurs supplémentaires, à en croire la redescente de sang et la chute de tension légère qui l’accompagna. Il était dans la merde. Tellement dans la merde.
« Pour quoi faire, ce portail de contact ? » relança Hitoshi, perplexe, mais avec le bon sens de ne pas bouger d’un millimètre pour éviter que le phénomène recommence. « Denki ? »
Le platine secoua la tête une fois de plus, cherchant ses mots dans une tentative pour gagner du temps. Parce qu’au final, c’était tout ce dont il avait besoin, juste du temps, d’une lichette de temps supplémentaire pour comprendre le fonctionnement et défaire le sort. C’était l’histoire de quelques heures, pas plus ! Enfin, oui, bon, d’accord, quelques heures si il trouvait un contre-sort efficace, voir un mécanisme d’annulation, mais il devait bien y avoir un bouquin là-dessus chez Midobro ! Denki pourrait aller le…
Lassé de ses hésitations, Hitoshi avança à nouveau ses doigts, avec un grognement agacé et une pression bien plus appuyée sur la résistance qu’il rencontra – et Denki jappa, un réflexe envoyant ses mains sur son entrejambe pour se débarrasser des mains fantomatiques d’Hitoshi. Devant la réaction et la scène absurde de Denki mains sur le pantalon, en train de frotter frénétiquement pour le faire reculer, l’expression d’Hitoshi passa de la surprise absolue à la contrariété. Sans oublier la gêne, une fraction de seconde avant qu’il ôte ses mains en vitesse.
« Denki. » averti Hitoshi, deux octaves en moins dans la voix et sourcils si froncés qu’il commençait à ressembler traits pour traits à Aïzawa. Denki pesa une seconde le pour et le contre, puis abandonna, de toute façon réaliste sur ses chances inexistantes d’arriver à sortir de cette pièce sans cracher le morceau. La mort dans l’âme, il baissa le nez vers ses chaussures pour bredouiller, affreusement gêné :
« C’était… c’était un sort de... pour… Un sort de contact qui permet de… d’avoir accès aux sous-vêtements de… d’autre personne... »
« Et dans quel but exactement on lance un sort de contact qui permet d’avoir accès aux sous-vêtements d’autrui ? »
« Pour pouvoir passer les mains sous les jupes des filles… sans me faire attraper... »
Il n’osa même pas lever les yeux vers Hitoshi, dont le silence prolongé ne pouvait être que de mauvais aloi, et à peine entendit-il le murmure circonspect de son camarade :
« Sous les jupes des filles ? »
Denki fit un « oui » misérable de la tête, bien conscient qu’il n’avait strictement aucune porte de sortie convenable dans cette affaire – la sauge censée « purifier l’intention » devait en réalité servir de miroir, renvoyant le sort au jeteur. Il s’était bien fait avoir et quelque part, une minuscule partie de son esprit arrivait à apprécier toute l’ironie et l’humour de la situation. Minuscule partie. Infime même.
« Alors comment ça se fait que c’est sous ta « jupe » que je peux toucher ? »
« Le sort… Le sort précisait bien qu’il fallait être… être seul pour le jeter, seul dans le cercle comme tout sortilège extra-corporel à cible indépendante de soi, et comme j’ai pas vu que le cercle était… était brisé, j’ai pas... »
« Et il disait les conséquences, s’il y a plusieurs participants au sort ? »
Hitoshi allait le tuer.
« Oui… Si l’on est deux… »
« Si l’on est deux ? »
« Ça… ça devient un sort mutuel... »
« Je vais te tuer. » annonça Hitoshi sans grande surprise, d’une relative tranquillité dans l’affirmation.
« Attends, attends, je suis sûr qu’on va trouver une solution ! » couina Denki en le voyant s’avancer dans la pièce d’un pas fort décidé. Instinctivement, le platine leva les mains devant lui et la même lueur indigo se faufila soudainement entre ses phalanges, redessinant celles-ci d’une auréole couleur de nuit. L’effet était indubitablement classe, mais avant qu’il n’ait le temps de toucher quoi que ce soit du côté de son camarade, il s’immobilisa tel une statue, bras levés et mains écartées, sous le regard tétanisé d’Hitoshi.
« Je bouge plus ! » hurla Denki, conservant son immobilité absolue, un brin d’angoisse dans la gorge à l’idée de ce qui risquait de se passer s’il bougeait le moindre muscle. « Je bouge pas d’un iota, regarde, je suis une statue ! »
« Au contraire, bouge. »
« De quoi ? »
« Essaie. »
« Pour me faire tuer plus vite, non merci ! »
« Essaie, je te dis, qu’on voit si c’est vraiment à double sens ! »
La remarque était logique, certes, et à ce stade d’emmerde, toute information était bonne à prendre sur le sort dans l’espoir de dénicher un moyen de le dénouer rapidement, mais Denki ne fit pas le moindre mouvement. Il fallut qu’Hitoshi le relance d’un regard appuyé pour qu’il se résigne, nez plissé d’appréhension, à rapprocher ses mains l’une de l’autre.
Vu là où la tentative d’Hitoshi l’avait emmené, Denki choisit une approche plus… latérale, histoire d’éviter une zone… sensible. Ce qui ne l’empêcha pas de se tendre, en posant effectivement les mains sur la peau chaude de son camarade, sans que le mètre les séparant se soit envolé d’une quelconque manière. La sensation était en tout point semblable à un contact « réel » : la pression sous ses doigts, qui semblaient posés sur des hanches s’il ne s’abusait, lui aurait permis de les empoigner s’il l’avait voulu. La chaleur, le grain de la peau, la moindre contracture et tension, tout était retranscrit à la perfection par le sort. Ce qui semblait logique, si l’on prenait en compte la nature de portail portatif du sortilège, lequel reliait sans doute les deux surfaces de contact avec l’immensité de possibilité qu’offrait la magie. Denki avait bel et bien accès à l’intérieur du caleçon de son camarade d’une simple pression des doigts pour activer le système lié aux bagues.
Et en plus, ce sort leur faisait la courtoisie de se signaler grâce au très discret halo d’une couleur proche de la chevelure d’Hitoshi.
D’ailleurs, s’il en croyait la faible luminosité et la manière dont la lumière se contrastait, c’était presque possible de déceler un liseré de lueur bleu, redessinant les contours du corps d’Hitoshi dans les airs, devant lui. Une esquisse infime, mais suffisante pour voir où il posait les mains. Il testa sa théorie en remontant son pouce sur le haut de la cuisse qu’il devinait à peine, parcouru le décrochage de l’aine et son camarade frissonna d’un coup :
« Ça ira, merci ! »
Rouge de honte, Denki secoua les mains, incapable de dissiper la chaleur d’Hitoshi sous ses doigts, dans le creux de sa paume et le frisson ressentit du bout des doigts.
« Comment on l’annule, ce truc ? »
« Aucune idée. Je… Il n’y a pas d’instruction à ce sujet et... »
« Attends, attends, une seconde, qu’on soit clairs : tu lances un sort dont tu ne connais rien... sans savoir comment y mettre fin ? »
L’incrédulité d’Hitoshi, pourtant magistrale, fut largement dépassée par le dépit absolu dans sa voix, quand il vit Denki hocher la tête pour approuver, sans trouver de justification.
« Hé ba… On n'est pas sorti du sable. »
***
« Arrête. »
« Je fais pas exprès ! »
« Ba bouge plus les mains. »
« Bouge plus, bouge plus, t’es mignon toi, et comment je fais pour écrire ?! » s’agaça Denki, plus agacé encore de voir Hitoshi tendre négligemment la main vers lui sans même quitter son livre des yeux, saisir son poignet gauche et l’écarter fermement de sa main droite en train de noter une remarque.
« C’est pas confort ! » ronchonna-t-il en écrivant de manière fort maladroite un « supposé temporaire » supplémentaire, dans sa colonne.
« Avoir tes mains sur ma queue n’est pas confort non plus, pourtant je fais avec. » lui fit remarquer Hitoshi en réussissant le tour de force de ne pas sourire une seule fois dans l’improbabilité de la phrase.
« Ça va, je te touche pas tant que ça ! Quoi ? » rajouta le platine devant le regard dubitatif que son camarade releva enfin de son bouquin. « C’est vrai ! »
« On en parle, du cours d’Aïzawa, ou tu finis de dire des conneries pour continuer d’écrire à quel point on trouve pas ? »
La simple évocation du cours précédent, que Denki avait passé mains écartées, soigneusement posées à plat sur le bois de son bureau, sans réussir à tenir la position plus de deux minutes d'affilée, le fit rougir. C’était pas sa faute si cette saloperie de sortilège s’enclenchait sitôt ses bagues à moins de deux centimètres les unes des autres, le faisant même renoncer à sa tentative d’ôter lesdites bagues, de toute façon terriblement ajustées sur ses doigts. Écrire le cours en essayant de ne pas trop rapprocher ses mains avait été une gageure - pas autant que celle de ne surtout pas oublier de ne jamais croiser les doigts ou jouer avec une des bagues par mégarde.
« J’ai pas fait exprès ! J’ai un mal de chien à garder les mains suffisamment écartées ! »
« Je sais. » confirma sobrement Hitoshi, avec une résignation presque comique dans sa voix. Denki lui adressa un plissement de lèvre en guise de compassion, reliant mentalement l’affirmation de son camarade avec la situation :
« Comment tu fais toi, pour que je te sente jamais ? »
« Je fais attention. »
« Mais je fais attention aussi ! » réfuta Denki, presque vexé de se voir renier ses efforts héroïques.
« Non, ce que je veux dire, c’est que je n’ai pas tes troubles de l’attention. C’est plus facile pour moi. Et puis je bouge moins, aussi. » conclut Hitoshi comme s’il s’agissait d’une évidence absolue.
« Tu es trop calme, si tu veux mon avis. » bougonna Denki, refermant d’une main un bouquin dont l’inutilité le dépita une seconde. Rien que le troisième dans le genre.
« Ça dépend dans quel domaine. »
Denki lui jeta un coup d’œil suspicieux, mais Hitoshi conserva sa concentration tranquille sur son paragraphe et il suivit son exemple. Avec une profonde inspiration, il reprit sa prise de notes en maudissant, pour la millionième fois, sa curiosité et son incapacité à réfréner ses propres conneries, jurant devant le dérapage de son stylo. Il tenta de rectifier le tir en repoussant d’une main la pile de livre responsable du manque de place et donc de sa rature, et bien évidemment, bien entendu, rapprocha suffisamment ses mains dans le geste pour que la lueur bleue redessine à nouveau ses doigts. Si son bras repoussa bien la pile de bouquins, distraitement, sa main lui renvoya immédiatement la chaleur d’Hitoshi contre sa paume, la courbe de sa cuisse qu’il remonta dans le mouvement. Terriblement douce, terriblement sexy contre ses doigts.
En face de lui, son camarade ferma les yeux, lassé, et un rougissement digne de Midobro envahit les pommettes de Denki qui se retira d’un sursaut, pire que gêné.
« Pardon, pardon, pardon, pardon, pardon... »
Une situation presque familière désormais, puisqu’à la fin du cours, il avait dû toucher Hitoshi au moins quinze fois. Et encore, il était persuadé d’avoir perdu le compte au bout de la douzième fois, laissant le reste dans une approximation un brin floue. Hitoshi avait été assez généreux pour lui lancer un regard réprobateur qu’à une seule et unique occasion, quand ses mouvements avaient envoyé ses mains tâter malencontreusement un truc fort… sensible.
Denki : 0, la queue d’Hitoshi : 12.
Rien que d’y repenser, il avait la sensation de ressentir le grain de peau d’Hitoshi sur ses doigts et il les frotta machinalement contre le premier manuel de protection élémentaire qu’il avait emprunté à Midobro.
« T’as de la chance que je sois d’un naturel patient, parce que perdre ma soirée à chercher un moyen d’annuler ta connerie... »
« Merci de m’aider ! » grinça Denki, agacé de devoir reconnaître qu’il n’arrivait à rien seul, et Hitoshi haussa les épaules :
« C’est ça, ou avoir tes mains dans mon caleçon ad vitam æternam. Tiens, au fait, » ajouta-t-il en déposant une pile de bouquins sur la table dans un bruit sourd, sous un nuage de poussière et d’une odeur chaude de vieux livres, de papier un peu élimé que Denki huma au passage. Presque l’odeur de Midobro, la touche de sucre brûlé que Katsuki laissait sur son mec en moins. « J’ai emprunté ça, à la médiathèque et Midnight m’a conseillé cet ouvrage en particulier, sur les principes de base du dé-tissage de sort. »
« Tu lui as dit la vérité ?! » s’indigna Denki, comme s’il pouvait être libre de ses mouvements si la plus petite parcelle de vérité avait atteint les oreilles d’un prof. Même pour une simple plaisanterie, un sort de contact sans consentement lui aurait valu une dizaine d'heures de colle, minimum.
« Non, j’ai explicité que j’étais victime d’un sort donnant accès à mon sous-vêtement à un pervers en puissance, mais bizarrement, elle a considéré que je venais de faire la vanne la plus hilarante du monde. »
Sans savoir si c’était du lard ou du cochon, Denki le dévisagea longuement, triturant machinalement son index et bien évidemment, le halo bleu réapparut immédiatement entre ses mains. Il secoua les bras en les écartant d’un coup, sifflement d’agacement aux lèvres alors que la lueur s’évanouissait enfin :
« J’en ai ras le cul. »
« Et moi donc… On devrait peut-être simplement aller demander de l’aide, non ? »
« Non ! Ça va pas ?! Tu veux que je me fasse coller ? »
« Pour avoir échoué à jeter un sort ? »
« Est-ce que je dois te rappeler le but initial du sort en question ? Je vais me faire trucider ! »
« Et tu mériterais, si tu veux mon avis. Quelle idée de vouloir farfouiller sous les jupes des filles ? »
« Je voulais tenter ! J’aurais jamais… Enfin j’aurais jamais fait quelque chose de vraiment répréhensible ! »
« Et c’était quoi le but, alors ? Juste voir si tu pouvais le faire ? »
« En partie. Et juste un pincement par ci ou par là, ça aurait pu être drôle ! »
Hitoshi le regarda avec un air qui frôlait la pitié, jugeant si sévèrement son sens de l’humour que Denki prit la mouche :
« Ça vaaa, on a tous le droit de faire des blagues nulles de temps en temps ! Et je suis sûr que ça t’aurait fait rire, de voir Ochako ou Mina sursauter en plein milieu d’un exposé ! Ou se précipiter sur Mineta pour le massacrer, alors qu’il n’aurait rien fait ! »
Mais dans tout son discours explicatif, Denki avait accidentellement frappé ses mains pour souligner le côté humoristique qu’un pincement de cul pouvait avoir, réactivant le sort – et foutant une fois de plus ses mains sur l’entrejambe d’Hitoshi. Lequel le laissa généreusement jurer et désactiver le sort avant de continuer, d’un calme presque fissuré à présent :
« Denki, je t’apprécie, vraiment, mais je vais aller demander de l’aide, et tant pis si t’es collé. »
« Non ! » refusa de nouveau Denki, paniqué devant la moue d’excuse que lui dédia Hitoshi et il plissa le nez de colère : « Si tu me dénonces, je te balance aussi en disant que tu fumes dans l’enceinte de l’école ! »
« Hey ! »
« Aaahaaa, on fait moins le malin maintenant ! » triompha Denki – sans aucun instinct de survie, vraisemblablement, vu l’éclat de colère dans le regard de son camarade.
« Mais t’es sérieux là ? D’abord, tu veux jeter un sort qui doit sans doute être illégal, que je suis obligé de me coltiner aussi, et maintenant tu menaces de me dénoncer quand je propose de demander de l’aide ? »
« Exactement ! » le rembarra Denki, assuré de son coup. « Après, si ça te fait rien qu’on sache que tu fumes, tu peux toujours aller la chercher, ton aide ! »
« T’es vraiment dégueulasse quand tu t’y mets ! »
« Dixit celui qui s’en fout que je sois collé ! »
« Putain, mais tu l’as cherché, ta colle, avec ton idée à la con ! Assume les conséquences, merde ! »
« Hé ba j’assume, je te signale, je suis en train de chercher une solution et ça irait plus vite si tu voulais bien mettre la main à la pâte toi aussi au lieu de songer à aller pleurnicher dans le sac de couchage d’Aïzawa ! »
Hitoshi prit une brusque inspiration pour s’empêcher de hurler ou de lui sauter à la gorge, rassembla manifestement toute la patience, le calme et la sérénité dont il pouvait faire preuve afin d’expirer longuement. Et recommencer, histoire d’être sûr et certain de ne pas céder à la tentation de l’étrangler, perceptible rien qu’à la crispation de ses doigts. Une réaction extrême, pour quelqu’un d’aussi posé.
« C’est quoi ton prochain bouquin, sur ta liste ? » s’enquit-il dans un effort si visible pour garder un ton courtois que Denki décida de ne pas pousser sa chance. À la place, il glissa le manuel en question vers son camarade, et se replongea dans le sien en priant l’univers pour que la solution se manifeste.
Deux heures plus tard, épuisé et échevelé, Denki s’affala sur son lit en grognant, démoralisé. Lassés de recherches restées vaines, puisque tous les textes soulignaient l’activation temporaire d’un sort de contact de manière systématique, ils avaient repris les bases de la purification et du dé-tissage de sort, sous la houlette soigneuse d’Hitoshi, plus alerte que lui. Et surtout plus calé en magie.
Avaler des poignées de sel, brûler de la sauge, s’enfumer par la même occasion, sauter dans un cercle de brisure, avaler une décoction de thym et romarin, faire rouler un clou rouillé sur leurs paumes, essayer six incantations différentes, finir par tenter d’arracher les bagues avec un filament d’énergie pure passé sous le chaton d’un anneau… Aucune putain de méthode n’avait fonctionné. Rien.
« Va falloir qu’on trouve quelque chose de plus agressif, peut-être... » avait conclu Hitoshi, se frottant une tache de rouille sur la mâchoire alors que Denki passait sa colère en piétinant allègrement un peu de sauge. C’était la faute de cette dernière, après tout.
« Maudite soit la sauge sur six générations et autant de continent ! »
D’un second grognement, Denki regarda l’heure, sur le réveil et gémit de fatigue. Ils avaient un cours sur l’impact de l’heure à laquelle les ingrédients étaient prélevés qui se tenait à cinq heures du matin, pour étayer une thèse, et s’il voulait grappiller six heures de sommeil, il aurait dû s’endormir sur le champ, mais l’odeur nauséabonde de fumée et de rouille sur sa peau lui retroussait trop le nez.
« Allez, une douche, au lit. » s’encouragea-t-il en se dirigeant vers la salle de bain, ensommeillé au possible.
Et réveillé de plein fouet quand il fit mine d’ôter son pantalon sans voir le retour du halo bleuté autour de ses mains aux alentours de la bride de sa ceinture, la chaleur de la peau d’Hitoshi le ramenant immédiatement à la réalité.
« Pardon ! Pardon ! » s’exclama-t-il, comme si Hitsohi pouvait l’entendre depuis sa chambre, en écartant les mains dans un mouvement panique pour désactiver le sortilège.
Bon. Hé bien… Il allait devoir faire plus attention, n’est-ce pas ? Avec un luxe de précaution, il réussit à déboutonner d’une main son pantalon, enlever t-shirt et caleçon, essaya d’ôter ses bijoux ordinaires pour finir par abandonner devant l’activation constante du bleu. S’attacher les cheveux ? LoL, lui répondit le sort, s’activant derechef en l’empêchant de joindre les deux mains sans toucher une toute autre chose que ses mèches électrisées de la journée. Une fois de plus brûlé par la douceur de la peau d’Hitoshi – le haut de ses cuisses, pour le coup, dangereusement proche de l’intimité de ce dernier – Denki lâcha définitivement les mèches après deux tentatives avortées. En désespoir de cause, il résolut l’affaire d’un serre-tête piqué à Mina, abandonna purement et simplement l’idée d’utiliser ses mains pour plus de sécurité. Après tout, des tas de gens vivaient sans l’usage de leurs mains, et en plus, la magie pouvait pallier certaines tâches.
Ne pas utiliser ses mains, d’accord, mais comment il faisait pour pisser, maintenant ?
« Génial, manquait plus que ça... »
Soupirant d’agacement, après trois essais malheureux, Denki dût se résoudre à s’asseoir, dépité de s’incliner face au sortilège. Il n’était tout simplement pas possible de rapprocher ses mains sans activer le sort, et pour l’instant, la limite était entre cinq et dix centimètres, sans qu’il arrive à déterminer exactement comment le curseur se plaçait. Ni s’il fallait nécessairement que la distance change, d’ailleurs, mais il était lessivé de la journée et n’avait aucune foutre envie de se lancer dans un protocole d’essai minutieux.
À la place, il se glissa dans la douche, savoura l’eau brûlante une bonne poignée de minutes avant de commencer à se savonner avec un soin méticuleux sur l’emplacement de ses mains. Et puisque la journée avait été une purge absolue, il avait bien le droit à une petite compensation, non ? Le genre de truc qui se faisait que d’une main.
Peine perdue. Et peine perdue de très loin. Il réalisa avec horreur que la distance entre ses mains servait de déclencheur, certes, mais n’était pas un impératif. En réalité, rien que penser à des choses salaces – en l’occurrence, essayer de se branler, comme toute personne qui se respecte dans une douche – réussissait à activer le sort.
« Ha non hein ! » hurla-t-il dans sa douche dans un total mépris du silence à respecter à une heure pareille, mais il eut beau réitérer et tenter d’attraper son érection, il se retrouva auréolé de bleu et les mains dans le caleçon d’Hitoshi.
« Quelle saloperie ! »
Ah ça, il s’était putain de bien fait avoir ! Le type ou la meuf qui avait inventé cette saloperie pouvait être fier·e, vraiment ! Empêcher les gens de se branler pour les punir d’avance d’avoir tenté de foutre les pattes sous les jupes des filles, c’était et un coup de génie, et du pur sadisme en puissance !
Il suffisait qu’il tente d’approcher la main de son entrejambe pour que la fine lueur réapparaisse sur ses doigts, comme pour mieux le narguer. Denki avait beau tenter et retenter de se saisir de sa queue, bernique, à chaque fois, il se retrouvait les doigts sur une peau qui n’était pas la sienne et qu’il relâchait en vitesse, en essayant de ne surtout pas songer à ce qu’il avait tenu une fraction de seconde plus tôt. L’absence de sensation émanant de sa queue était troublante, d’autant plus qu’il sentait parfaitement celle d’Hitoshi sous ses doigts, troublant son cerveau d’une frustration monstrueuse. C’était genre… À portée de main, littéralement ! Et pourtant inatteignable ! Par pure rage, il finit par tenter un aller-retour de poignet, histoire de réellement tester l’inutilité de la chose, et force lui fut de constater que le sort était d’une efficacité redoutable, parce que rien ne filtrait de son érection désormais douloureuse.
Il détestait vraiment ce sort. De toute son âme.
« Je hais ma vie. » s’agaça le platine, achevant sa douche par une station prolongée sous l’eau glacée pour se débarrasser de toute excitation, et il sortit en pestant une suite d'injures qui aurait fait la fierté de Katsuki.
Une suite de coup frappé à sa porte le fit lâcher un « QUOI ?! » plus agressif qu’il ne l’aurait voulu, aussitôt honteux de passer ses nerfs sur un de ses camarades. Devant l’absence de réaction, il ajouta un « Une seconde ! » histoire d’adoucir sa réponse initiale, tout en se grouillant de se sécher sur une suite de « merde », « connerie », et pour le plaisir, un « bâtard d’enculé », avant de sortir en trombe de la salle de bain.
Ça tambourinait sévère, à sa porte, et il enfila t-shirt et short en quatrième vitesse – sans doute Katsuki prêt à l’entraîner dans une dispute sans queue ni tête pour qu’il départage qui, entre lui et Midobro, avait mieux réalisé tel exercice. Rien que pour avoir la paix, Denki décida d’avance que quelle que soit la demande, il répondrait Midobro, et se dépêcha d’ajuster son short :
« C’est bon, j’arrive ! »
Comme si l’on pouvait raisonner un Katsuki sûr d’avoir raison, s’amusa-t-il en déverrouillant d’un tapotement au rythme connu de lui seul, avec une pointe d’énergie magique pile là où il fallait pour que la porte s’ouvre d’elle-même. Et il se retrouva nez à nez avec une silhouette un brin plus haute que Katsuki et chose étonnante, voire surréaliste, une expression plus effrayante encore que celle de son meilleur ami.
« On s’amuse bien, Denki ? » grinça Hitoshi, d’un calme si sarcastique qu’une coulée de glace s’infiltra le long de la colonne vertébrale de Denki devant l’absence de chaleur du sourire décidé en face de lui.
D’autant plus glaçante qu’il n’avait pas songé une seule fois, dans toutes ses tentatives absurdes pour trouver un moyen de se branler, que ses mouvements se répercutaient directement sur son camarade, passablement échaudé par les allers-retours de sensations s’il fallait en croire sa respiration courte. Et son air échevelé. Sexy, ça d’ailleurs.
Mais, dangereux. Le calme à la limite du flegme dont se paraît habituellement Hitoshi avait totalement disparu de son expression, ne laissant qu’un éclat oscillant entre agacement et désir de revanche dans son regard - une combinaison pire qu’inquiétante qui assécha la bouche de Denki :
« J’ai merdé. »
« Tu as remarqué ? » siffla l’indigo, à deux doigts de l’hystérie et Denki révisa tout jugement sur le comportement habituel de son camarade, savamment travaillé plutôt que naturel. Il était temps de faire de soi une prudente carpette, donc.
« Hitoshi, je suis désolé, j’ai pas pensé à... »
Avec un rictus, son camarade le saisit à la gorge et le repoussa en douceur dans sa chambre, sans doute pour éviter de s’engueuler en plein milieu du couloir sans pour autant entrer complètement. Un gage de survie, songea Denki avec soulagement avant que des crocs brillent à quelques centimètres de sa bouche, vicieux d’amusement :
« C’est quoi que tu cherches à faire, en foutant tes mains sur ma bite, que je te rende la pareille ? »
« Mais pas du tout ! J’ai pas fait exprès ! » tenta de se justifier Denki, catastrophé de la tournure des événements et plus anéanti encore de n’avoir pas réalisé les conséquences de ses actions. Une fois de plus.
« Mon cul, comment tu peux « ne pas faire exprès » ? »
« En étant distrait ! Ça peut arriver à tout le monde, ça va, je t’ai dit que j’étais désolé ! Quoi ? Ça m'arrive tout le temps d’être distrait ! » se défendit Denki comme il put, de plus en plus paniqué devant l’expression d’Hitoshi en face de lui.
« Je t’en foutrais, de la distraction. T’as un jean large ? »
« Hein ? » sorti Denki, perdu, avant de froncer les sourcils d’angoisse. « Comment ça, « je t’en foutrais de la distraction » ? Et pourquoi tu me demandes si j’ai un jean large, qu’est-ce qu’un jean vient faire là, ça n’a rien… » et les doigts fins d’Hitoshi se crispèrent une seconde sur sa gorge, rien qu’une pression pour le faire taire et instiller dans le même mouvement une pointe infime d’excitation dans les reins du platine. Ça, il l’avait pas vu venir, pas plus que le murmure vengeur qu’Hitoshi lui déposa presque sur les lèvres :
« T’as intérêt à t’en trouver un, trésor, parce que je vais pas te laisser passer une seule putain d’heure de la journée de demain sans te foutre la trique ! »
Chapter Text
Chapitre 2 : « … C'est pas faux. »
« Denki ! Qu’est-ce que tu fous ?! »
Denki regarda un instant les épines de porc-épic entre ses doigts, vraisemblablement pas ce qu’il fallait faire à en croire le regard suspicieux d’Hanta, heureusement assez vif pour avoir glissé sa main sur la sienne avant qu’il n’ajoute sa poignée à leur poudre.
« Je… C’est pas des épines de porc-épic, qu’il faut ? »
« Si, mais pas cinquante ! Une et demie ! Tu suis encore moins que d’habitude, réveille-toi, mon vieux ! »
Il s’apprêta à lancer une connerie, un truc bien salé sur leur différence d’âge réelle pour taquiner Hanta, arrêté net par une caresse lente, étourdissante de pression et d’adresse, sur une partie fort sensible de son anatomie. À la place de la plaisanterie acide, il bredouilla une excuse en tentant de dissimuler son trouble, sans grand succès, et capitula en baissant le nez vers son plan de travail, souffle court.
À la paillasse d’à côté, Hitoshi lui adressa un clin d’œil.
Pour la millionième fois, au moins, Denki lui retourna un regard de supplique, cherchant à l’apitoyer avec un minois de pauvre petite chose apeuré. Le seul résultat qu’il obtint fut une seconde caresse, cette fois descendante jusqu’à effleurer ses couilles, et le sourire d’Hitoshi s’agrandit en le voyant frissonner, incapable d’échapper à ses mains pourtant dissimulées sous le bureau. Nom de dieu, il le détestait.
« Une et demie, Denki, tu peux le faire, ou je dois tout finir moi-même ? » s’agaça Hanta devant son immobilité, laquelle bloquait le passage, en plus.
« Oui, oui, je le fais ! Excuse-moi ! »
Les nerfs aux martyrs, les larmes aux yeux, Denki pila soigneusement l’épine et demie, broyant le peu de sérénité qui lui restait dans le même temps. Et dans son jean, Hitoshi s’amusait à plier ses nerfs de désir, de plaisir, d’une savante composition de son cru en l’enserrant entre son pouce et son index, sadique au possible.
Le pire, c’était qu’il n’avait même pas besoin de le toucher pour arriver à ses fins ! Il suffisait qu’il fasse mine d’activer ses bagues, d’un geste subtil à la seule attention de Denki, pour que le corps de celui-ci le trahisse aussitôt. La simple suggestion d’une des caresses sadiquement parfaites d’Hitoshi et son entrejambe se réveillait, piquant ses nerfs d’un désir qu’il jugeait déraisonnable au possible vu la situation.
Et pourtant, il se serait damné pour que la main actuellement en train de redessiner d’un mouvement de pouce nonchalant le haut de sa queue ne quitte jamais sa peau, continue d’imprimer cet exact même geste jusqu’à le faire mourir sous le plaisir. Dix ans de sa vie pour s’enfermer quelque part dans un placard et laisser Hitsohi ravager son corps sans craindre de se faire choper.
« Denki, tu rêvasses. » soupira Hanta avec autant d’agacement que de résignation, obligeant Denki à puiser dans la moindre parcelle de retenue à sa disposition pour ne pas ouvrir la bouche sur le son bloqué dans sa gorge.
Un truc entre gémissement et plainte, un truc aussi obscène que la lenteur qu’Hitoshi déroulait en parcourant du bout des ongles son érection, alternance parfaite avec la chaleur de la paume de sa main une fraction de seconde plus tard.
Il allait en crever.
« Heu… Ça va ? T’as pas l’air en forme, en vrai ? » s’inquiéta enfin Hanta, en vrai ami qu’il était, ce brave homme !
« Je suis juste… Un peu barbouillé, j’ai envie de vomir. »
« T’as pas mangé hier soir, aussi. »
« Si j’ai mangé ! J’ai pris un sandwich avec Hitoshi. On bossait sur un des projets d’Aizawa. » menti éhontément Denki, inventant une excuse au débotté en croisant les orteils pour que ça passe. Hanta le dévisagea, ayant trop l’habitude de ses habituelles salades pour le croire sur parole. Le brun lui releva le menton pour mieux observer ses traits, et Denki retint son souffle en sentant une caresse plus légère qu’un souffle sur son érection, en train de déformer son jean. Pourtant le plus large de sa garde-robe.
« T’es un peu pâle. T’es sûr que tu veux pas aller à l’infirmerie ? »
L’idée d’expliquer à l’infirmière le pourquoi du comment il se tenait plié en deux l’étouffa sur place, l’envoya dans une telle quinte de toux d’angoisse qu’Hanta dû lui tapoter le dos jusqu’à ce qu’il se dégage les bronches. Hélas, dans le mouvement, il cracha quelques trucs dans leur préparation et la poudre se mit à siffler de manière inquiétante, obligeant une fois de plus la classe à évacuer jusqu’à ce que leur professeur sécurise la salle.
« C’est que la troisième fois cette semaine, tu sais. Tu t’améliores. » le consola Hanta lorsqu’ils sortirent définitivement en pause déjeuner, un regard dubitatif pour seule réponse de la part d’un Denki dépité :
« Mouais. Va dire ça à mon bulletin. Bon, bon appétit, j’vais bosser avec Hitoshi – oui, je vais manger quelque chose, et pas que des sucreries, t’inquiète papa ! »
Le juron hispanique de Hanta l’accompagna jusqu’à ce qu’il rattrape Hitoshi, déjà en marche vers la bibliothèque, qu’il aborda d’un très sobre :
« Pas une seule remarque. »
« On s’étouffe en cours ? Distrait, peut-être ? » lui lança tout de même Hitoshi en guise de bonjour, insupportable de satisfaction.
Finalement, Denki n’était pas réellement sûr d’avoir envie de passer la pause de midi à faire des recherches à côté du type qui lui valait une trique si monumentale qu’il devait se résoudre à porter son sac en bandoulière devant lui. Il avait hélas échoué à trouver un jean assez large pour dissimuler ce genre de problème et il leva un index en guise d’avertissement, essayant de se faire aussi sérieux qu’un homme s’étant fait allumer toute la matinée pouvait l’être :
« C’est bon, tu t’es vengé ? Tu acceptes mes excuses et on peut passer à autre chose ? » grinça-t-il sans pour autant réussir à ôter le côté supplication de son ton, tirant un rire à son camarade :
« Je croyais que j’avais dit toute la journée ? »
« Je te file trente balles pour que t’arrêtes, par pitié ! »
« Garde ton fric, je te taquinais. Alors, on continue de chercher une solution, ou tu nous laisses enfin aller demander de l’aide à un prof ? »
« On continue de chercher ! On y a pas pensé hier, mais ça se trouve y’a une astuce, sur internet. Après tout, google est notre meilleur ami ! » sourit le platine, fier de sa connerie et amusé de voir le dépit sur la moue d’Hitoshi.
« Mouais. Pas convaincu, mais je te suis. T’as encore du crédit, sur ton compte étudiant ? »
« Plus rien. J’ai tout dépensé pour finir de regarder ma série. Quoi ? Y’a des dragons ! » se justifia Denki face au regard réprobateur d’Hitoshi. D’accord, leur crédit d’internet étudiant était censé servir pour leurs études, mais des dragons ? Dans une série ? Impensable de rater ça.
« Putain, faut vraiment que je t’apprécie pour gaspiller du crédit pour une connerie pareille. Donne-moi deux secondes, j’ai un projet à rendre à une amie et après, on ira chercher ça sur ma session internet. »
Denki acquiesça bien volontiers, rassuré de voir s’éloigner la perspective d’être collé. Au moins pour l’après-midi ! Ça valait bien d’attendre deux secondes le retour d’Hitoshi, même s’il n’avait rien à faire à part poser son cul contre le mur et patienter à peu près sereinement le temps qu’il file son projet à l’étudiante fine au bout du couloir.
Mais deux secondes se transforma en deux minutes, puis en cinq, en dix, et à la douzième, toujours planté contre le mur avec Hitoshi en ligne de mire, vingt mètres plus loin et en grande conversation avec son amie, Denki commença à trouver que dépiauter les bouloches sur sa sacoche n’était plus assez distrayant. Il tritura trois fils, ponça des marques noires laissées par des semelles sur le lino du bout de sa chaussure, et comme vraiment, il s’emmerdait trop, et qu’Hitoshi ne faisait pas mine de revenir, décida de s’occuper utilement.
« Present Mic dit toujours qu’une observation visuelle amène parfois des solutions… » marmonna-t-il entre ses dents, avec un coup d’œil alentour pour vérifier que personne ne prêtait trop attention à lui. Entre la fatigue de la veille et les… distractions de la matinée, il ne s’était pas penché plus que ça sur le sort, mais là... Il avait cinq minutes, n’est-ce pas ?
Denki activa discrètement le portail de contact, prenant soin de ne pas toucher les liserés bleu constituant les contours du corps d’Hitoshi et commença un examen visuel plus minutieux. C’était admirablement bien fait, parce que ça reproduisait en temps réel les mouvements de la personne. Il arrivait à voir quand Hitoshi faisait passer son poids d’un côté de son corps ou de l’autre, selon ses positions. Ah, il pouvait même faire « tourner » la « projection » entre ses mains, s’il faisait mine de se saisir d’un plateau sur lequel l’imperceptible silhouette d’Hitoshi était posée, et de le faire pivoter. Intéressant, ça lui aurait bien servi pour pincer le gras d’une cuisse féminine, de pouvoir accéder ainsi au cul des ge…
Denki était coutumier des pensées intrusives. Non pas ces pensées identifiées comme intrusives et qui ne nécessitaient somme toute que d’y regarder une seconde pour se dissiper, non. Lui, il avait droit aux pensées intrusives qui prenaient toute la place et occultaient absolument tout son esprit, sans lui laisser une once de réflexion ou de retard pour réellement s’interroger sur ce qu’il était en train de faire. Les pensées intrusives qui lui hurlaient de se couper un doigt quand il épluchait une carotte, de mettre les mains dans le yaourt tout juste ouvert, de jeter le drap par la fenêtre lorsqu’il tentait de l’étendre.
Ou, en l’occurrence, de foutre la plus grande claque de sa vie sur le cul d’Hitoshi.
Avant de pouvoir enregistrer chacune des actions nécessaires, son bras partit sur le côté et dans un élan vertigineux, Denki claqua une fessée magistrale sur la projection devant lui. De l’autre côté du couloir, Hitoshi bondit en jappant, si surpris qu’il renversa à moitié son interlocutrice dans un bordel impossible. Tétanisé par ce qu’il venait de faire, Denki le regarda redresser l’étudiante avec moult excuses, inventer une excuse au débotté qu’il agrémenta d’un sourire rassurant pour noyer le poisson, jusqu’à ce que l’agitation retombe. En tout cas, assez pour permettre à Hitoshi de se décaler légèrement afin de sortir du champ de vision de l’étudiante, et se retourner pour fusiller Denki du regard.
Fuir, donc.
« DÉSOLÉ ! » hurla le platine sur une volte-face, enquillant un sprint le long du couloir. Bien lui en prit, car il entendit immédiatement une course derrière lui, Hitoshi ayant vraisemblablement abandonné l’idée de gérer la situation en toute discrétion.
À fond de train, Denki jaillit dans le hall d’entrée dans un dérapage, se rattrapa de justesse pour se précipiter sur la cage d’escalier, un « Denki ! » furieux derrière lui. Et comme ce con avait de plus grandes jambes, aucun espoir de lui échapper ! Putain de pensée intrusive de merde !
Rattrapé avant même qu’il pose un pied sur l’escalier, il sentit sans grande surprise une main le saisir par la nuque et le diriger manu-militari vers un décroché de couloir. Le tout agrémentant ses bredouillements d’excuses d’un « Shhh. Shhh. Tais-toi! », en sourdine. Ce qui ne l’empêcha pas de continuer à baragouiner :
« Nan, mais je sais pas ce qui m’a pris, je te jure ! J’ai pas réfléchi, j’ai pas eu le temps de réfléchir ! »
« Ba bien sûr ! »
« Je te jure !! Je m’ennuyais et j’ai étudié le sort et ça m’a échappé ! »
« T’es bien la seule personne au monde qui peut tenter de sortir un truc de cet acabit. « Désolé, j’étais distrait, je t’ai touché une heure durant sans le voir ! », « Désolé, la fessée m’a échappée » ! » se moqua Hitoshi, nez plissé d’agacement, mais, Denki aurait été prêt à parier, avec une pointe d’amusement dans la ligne de ses lèvres.
« Ça m’a vraiment échappé ! Je te jure ! Sur la vie de Sa Majesté Éviscération ! »
« Jure pas sur l’animal de compagnie de quelqu’un d’autre, c’est immoral ! »
« Mais j’en ai pas moi ! » protesta Denki, soulignant un point essentiel et Hitoshi se pinça brièvement l’arrête du nez de sa main libre, se rappelant à lui-même qu’il ne pouvait pas encore tuer le platine sans conséquences.
« Et t’as une vraie explication pour ton geste, en revanche ? »
« Je suis désolé pour ce que j’ai fait, vraiment… C’était vraiment pas cool, alors que tu étais avec ta pote... » s’excusa piteusement Denki. La prise sur sa nuque se relâcha et il continua sur sa lancée, soulagé : « Je voulais juste… Je m’ennuyais sévère, en t’attendant, j’ai voulu nous avancer en examinant le sort à tête reposée et… et ça a… Dérapé ? »
« Dérapé ? » reprit Hitoshi, à deux doigts d’éclater de rire.
« Dérapé. Genre je me demandais comment attirer ton attention pour te dire de faire vite, et puis j’ai vu que je pouvais faire tourner la projection et… et paf. » conclut Denki, conscient qu’il était absolument ridicule dans son explication. Le sourire sur les lèvres d’Hitoshi, il ne l’aimait pas, mais pas du tout, trop d’amusement par anticipation et il frémit lorsque celui-ci se pencha sur lui, glissant son murmure dans ses mèches :
« Oh, mais tu l’as, mon attention. Tu l’as. »
Ça ne présageait rien de bon.
« C’est vraiment dommage, que tu te sois pas trouvé un pantalon large. »
Et merde.
***
Premier cours de l’aprem, une torture d’histoire de la ramification des branches de la magie contemporaine, option voix soporifique – rien.
Deuxième cours de l’aprem, un bête cours de géographique classique, si l’on omettait la manie du prof à faire flotter ses cartes et à effectuer des projections un peu partout dans l’espoir d’animer un peu plus ses élèves – rien.
Au dernier quart du troisième cours, qui se déroulait dans l’une des rares salles à disposition en U pour leur permettre d’admirer la confection d’un sort sous tous les angles, Denki commença à sérieusement perdre pied dans son angoisse. L’idée affreuse qu’il allait payer la fessée accidentelle plus tard le fit déglutir d’appréhension, en voyant l’heure tourner. Hors de question de passer une nuit sans dormir, avec les mains d’Hitoshi dans son pyjama pour le garder éveillé ! Ou d’endurer la torture absolue de ses caresses lors d’un contrôle ! Oh putain, lors d’un contrôle ?! Déjà qu’il avait un mal de chien à se concentrer, là, c’était fini, il serait renvoyé direct pour avoir été le premier élève avec un – 20 sur 20 de toute l’histoire de l’Académie Magique de UA !
« T’es censé regarder le sort, pas gribouiller. » le taquina gentiment Eijirô, avec sa manie adorable de le remettre sur le droit chemin en douceur à chaque écart. Denki le remercia d’un plissement de nez, et puisqu’il était censé regarder le sort, il profita de l’alignement parfait de la salle pour examiner Hitoshi au passage, de l’autre côté.
Pile en face de lui, ce qui hérissa la nuque de Denki d’appréhension, mais son camarade lui rendit un regard somme toute banal en le voyant l’observer. Hitoshi avait l’air presque normal, assis sur son dernier rang et silencieusement attentif au cours, son air serein sur le visage à moitié dissimulé par sa posture, coudes sur la table pour apposer son menton contre ses mains jointes. L’image parfaite de l’étudiant studieux. Si l’on omettait évidemment la manière dont il souriait comme un sadique en puissance, de l’avis de Denki. À se demander comment il faisait pour rester discret, même si ça aidait forcément d’avoir les mains devant le visage ainsi, et ça, ça garantissait aussi la sécurité de Denki puisqu’il ne pourrait...
Pas les mains devant le visage. Les mains devant la bouche.
Souffle arrêté net par la réalisation et toutes couleurs gommées de son visage, Denki fit « non » de la tête, tétanisé de voir que son expression de terreur ne faisait qu’agrandir le sourire d’Hitoshi d’un centimètre de vice supplémentaire. Il refit « non ! », plus fébrilement encore, et de l’autre côté de la classe, Hitoshi leva un sourcil moqueur. L’air de dire « Dommage, mon gars. »... Une remarque sarcastique que Denki aurait pu presque entendre, n’eut été le discret mais appuyé coup de langue qu’il sentit remonter très lentement le long de son érection. Bien dissimulé derrière les doigts entrecroisés de son camarade.
Le plaisir lui remonta d’un coup dans la gorge, d’autant plus intense que la situation exigeait de lui une impassibilité totale et que l’adrénaline dans ses veines envoyait un tourbillon de pensée pour tenter de le distraire. S’ils avaient évoqué le sujet, lors de leur recherche, Denki aurait pu jurer, sur l’honneur et le petit doigt, que c’était impossible. Que le sort ne prévoyait qu’un portail de contact et qu’une fois celui-ci appliqué, il était impossible de l’ôter ou de le déplacer à sa guise – mais Hitoshi était en train de lui prouver qu’impossible n’était pas Hitoshinien. Une minuscule pensée se faufila dans le mélange d’angoisse et de luxure, celle que si on léchait sa propre main avec le sort activé, techniquement, ça marchait, et puis un second tracé de la pointe de sa langue anéantie toutes réflexions chez lui.
Impossible de faire quoi que ce soit d’autre que des lichettes de chat vu les circonstances, mais Hitoshi se débrouillait à merveille pour parsemer son érection de la chaleur de sa langue, sans suivre aucun schéma ni aucune logique. Rien que des pointes brûlantes, humides, délicieuses qui tiraillaient à chaque fois les nerfs du platine d’une envie absurde que jamais le mouvement ne s’arrête. Et bien sûr, être incapable de prédire où son camarade allait s’amuser à lécher à la seconde suivante intensifiait le plaisir à l’extrême.
À la merci totale d’Hitoshi et de sa détermination à lui faire la misère, Denki retint son souffle aux infimes mouvements sur lui, anéanti de l’incertitude distillée à la pointe de la langue. Il n’arrivait même pas à cerner une logique dans l’alternance entre aplat et pointe de la langue, caresses courtes ou longues, souffle chaud ou froid, tout semblait relever du plus pur hasard. La seule conviction encore debout dans son corps en équilibre entre plaisir et retenu, c’était qu’Hitoshi était bien trop doué à ce jeu-là.
Lorsque ce dernier remonta sa langue jusqu’à l’extrémité de son érection, Denki était à deux doigts de se mordre le poing pour ravaler le gémissement coincé dans sa gorge. Sous ses doigts blanchis de la force avec laquelle il serrait, sa trousse se rebiffa en lui enfonçant une pointe de crayon dans la paume, qu’il ignora royalement parce qu’en face de lui, Hitoshi s’arrêta une seconde. Le temps de laisser son souffle souligner l’humidité laissée sur la queue de Denki d’une esquisse de froid, à moins que ça ne soit d’une chaleur telle qu’elle semblait geler la peau. Et dans un timing parfait, alors que ce dernier ouvrait la bouche pour reprendre une respiration, la langue d’Hitoshi s’enroula autour de lui.
Denki hoqueta, mortifié d’être à ce point incapable de contrôler ses réactions, mais bordel, que c’était bon ! Il ne fallait qu’un pauvre demi-centimètre de langue à Hitoshi pour s’amuser à redessiner toute son anatomie, s’attarder à redéfinir le concept même de plaisir d’un léger cercle dans un sens puis l’autre. Enfermer le bout de sa queue dans une caresse presque tournoyante qui lui broya les nerfs sous l’excitation infernale de chaque tour de langue.
C’était un cauchemar. Un cauchemar de se faire à ce point allumer par Hitoshi, avec une subtilité et une maestria pour lesquelles il se serait damné, en pleine classe.
« Fin du cours, vous pouvez ranger vos affaires ! »
Denki sursauta si fort que sa trousse lui échappa et une pluie de crayons roula sur le sol, sous le regard habitué de la classe – prof compris. La langue d’Hitoshi disparue aussitôt et il faillit hurler.
« Pas de devoirs pour la prochaine fois, mais pensez à bien réviser, certains d’entre vous n’ont pas encore acquis la structure interne obligatoire pour les sorts en deux temps ! » gourmanda leur professeur, sans préciser qui vu que Denki dissimulait déjà sa gêne sous une moue boudeuse. Et agacée.
Les traces du plaisir sur sa queue lui faisaient mal, son corps réclamant sa dose de cette drogue déposée de la pointe de la langue par Hitoshi, dont le timing ignoble de cruauté le laissait à bout de souffle et de nerf, frustré à en pleurer. En face de lui, Hitoshi lui adressa un clin d’œil salace, ravi de son effet, et le temps que Denki se penche pour évaluer les dégâts, il avait déjà foutu le camp.
« Je te le ferais payer comme t’as pas idée. » siffla-t-il entre ses dents, enragé au point d’en être à deux doigts de fumer.
Contourner le bureau pour ramasser ses effets tout en dissimulant la trique de sa vie ne fut pas aussi pénible que de réaliser d’un coup, alors qu’il pestait à qui mieux mieux en fourguant ses affaires dans son sac, qu’il en avait ras la casquette. Sort de merde. Connard d’Hitoshi ! D’accord il était responsable de ce désastre, et oui, il ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même, sauf que là… Là, il avait besoin de pouvoir tirer un coup de suite.
Non. Il avait pas besoin de tirer un coup, il avait envie d’Hitoshi, nuance. Et nuance absolue, même. Une envie viscérale et à rendre cinglée, une envie de ses mains sur lui ou sa bouche sur sa queue, au choix, et Hitoshi pouvait s’amuser, se venger et le chauffer à sa guise, Denki s’en foutait, il avait largement remboursé ses conneries. Bien assez pour qu’au final, rien ne s’opposait au fait d’avoir son camarade dans son lit d’ici cinq minutes, n’est-ce pas ??
Sortilège ou pas, d’ailleurs !
En refourguant manu-militari sa trousse dans son sac, Denki décida sur le champs que dans la vie, il existait des moments où réfléchir davantage ne peut que nuire à la situation. De toute façon, il n’avait ni la patience ni les neurones nécessaires pour soupeser sa décision une seule fraction de seconde de plus.
Il se releva donc d’un bond et sortit en trombe de la salle, affaires sous le bras. Heureusement pour lui, Hitoshi se repérait fort facilement en raison de sa couleur de cheveux – et de sa grande taille de grand con – en pleine conversation avec Eijirô que Denki interrompit sans aucune courtoisie, se plantant devant eux, sourcils froncés :
« On doit réviser. » annonça-t-il, sa patience aussi cramée que ses reins, ce qui souleva un sourcil dubitatif d’Eijirô :
« Toi ? Réviser ? »
« Le contrôle de Midnight. » précisa-t-il d’un ton pressant, regard fixé sur Hitoshi toujours aussi immobile à faire mine de ne pas comprendre. Ce salopard savait parfaitement ce qu’il faisait, avec son air pseudo-innocent et son putain de sourire de merde en train de dégouliner sur sa question conne :
« Ha ouais ? On révise maintenant ? »
Accompagné, bien évidemment, d’un frottement lent de ses mains sur son jean en toute discrétion, râpant la queue de Denki de plaisir et ce dernier inspira subitement, à deux doigts de perdre toute retenue.
« Oui, oui, on révise maintenant ! Viens par là ! »
Il attrapa le poignet d’Hitoshi d’un geste vif, l’entraînant à sa suite en ignorant royalement le « Ba ? » surpris d’Eijirô, devenu bien moins important que la perspective d’une session en tête-à-tête avec l’homme capable de le branler en cours – hey, la baise avant les amis, hein. Déso pas déso, Eij. Magnanime envers la patience décidément arrivée en bout de course de Denki, Hitoshi se laissa diriger bien volontiers, et comble de la délicatesse, il attendit même qu’ils soient hors d’oreille de leurs petits camarades pour savourer sa revanche :
« Tu trouves toujours que je suis trop calme, trésor ? »
Le surnom frôlant l’humiliation, vu le contexte, passa si loin au-dessus de la tête de Denki que ça aurait pu être un nuage à ce stade. Il grommela dans sa barbe, sans ralentir une seconde l’allure dans l’escalier, jusqu’à atteindre la porte arrière du dortoir, ouverte d’un coup de pied :
« Je t’en foutrais, du calme ! Et c’est moi que tu disais « dégueulasse quand je m’y mets » ? Alors que tu me fais un truc pareil ?! »
« T’avais pas l’air contre, en cours... » murmura Hitoshi dans son dos, si amusé que son sourire s’entendait dans sa voix. Quelle saloperie sur patte.
« T’avais pas l’air contre, en cours ! » singea Denki, souriant malgré lui d’entendre son camarade éclater de rire face à son imitation pourrie. « J’ai pas dit que j’étais contre, juste qu’en termes de dégueulasserie, tu me concurrences parfaitement, espèce de sadique en puissance ! »
Déverrouillant sa porte avec la version expresse de son code, il tira Hitoshi dans sa chambre en claquant derrière lui, refermant manuellement pour plus de sûreté – il n’était pas certain de pouvoir activer correctement son sortilège de verrou vu l’état d’excitation dans lequel il était. D’ailleurs, il n’était pas certain de pouvoir faire grand-chose, à part ordonner au sourire horriblement satisfait de lui-même d’Hitoshi :
« Sur le lit ! »
« Sans même m’inviter à dîner d’abord ? »
« Et c’est le type qui m’a sucé en cours qui se permet une remarque ? » lui retourna Denki, enlevant ses chaussures sans se baisser, le sac déjà balancé sur sa chaise pour se jeter dans la foulée sur le lit, soupir d’aise inclus. Du coin de l’œil, il vit son camarade suivre son exemple avec un naturel confondant, ôtant chaussure, sac et veste en un tour de main avant de se planter à côté du lit, mains sur les hanches :
« Alors, tu proposes quoi ? »
« Tu me commences, je te finis ? » proposa Denki en sortant un de ses sourires les plus lumineux, emprunté à Midobro, celui-là. Spéciale édition charme pour Kacchan, mais qui manqua d’efficacité sur Hitoshi et son calme olympien.
« Rien que de la branlette mutuelle ? Ça manque de charme. »
« De toute façon, quoi qu’on fasse, on va se retrouver les mains dans le caleçon de l’autre à cause de ce sort ! » contra Denki, à qui Hitoshi concéda le point en s’agenouillant à côté de lui, froissant définitivement les draps :
« … C’est pas faux. »
Puis ce fameux sourire, bien trop étiré pour que ce qui suive ne soit pas une connerie :
« Et étonnamment bien réfléchi, pour quelqu'un de soi-disant trop excité pour être poli envers Kirishima. »
« C’est fini de se foutre de ma gueule, oui ? Je te rappelle que tu faisais pas franchement le malin, hier soir, après ma… Après mes essais. »
« Après quoi ? » s’amusa Hitoshi, lui pinçant les lèvres de dépit face à son insistance et il secoua la tête, peu désireux de partager son expérience ratée. « Parce qu’en vrai, tu m’as jamais dit pourquoi t’as passé une heure de ta vie avec tes mains dans mon caleçon ? »
S’il avait eu une journée plus facile, peut-être que Denki aurait réalisé que dire « non » à un mec capable de le sucer dans une salle de classe remplie d’élèves n’était pas l’idée du siècle, mais que l’univers lui pardonne, il avait le corps meurtri d’un trop-plein de plaisir frustrant au possible. Et il se laissa tomber dans la caresse de l’indigo subitement descendue le long de son érection, lente à se faire sauter une dent tant il aurait donné un bras pour qu’Hitoshi accélère. Ou ne s’arrête pas, comme à présent.
« Alors, après quoi ? » redemanda celui-ci, le poussant du genou pour souligner le marché implicite, insensible au grognement agacé de Denki et le platine capitula avec une touche de mauvaise foi :
« Rhô, ça va ! Après ma session de masturbation avortée par ce putain de sort, voila ! Tu peux te foutre de ma gueule, c’est bon. »
« Je me fous pas de ta gueule, je trouve juste ça attendrissant que tu aies autant essayé. »
« Pas tant que ça ! »
Sa protestation se heurta au sourire qu’Hitoshi dissimulait de son mieux, succès mitigé qui lui valu un regard noir de Denki jusqu’à ce qu’il se laisse tomber à plat dos à côté de lui, trop amusé pour lâcher prise :
« Tu oublies que c’est moi qui aie subi tes tentatives… »
Est-ce qu’il devait présenter ses excuses ? Pardon de t’avoir allumé en essayant de me branler moi ? Un gloussement faillit lui échapper à l’idée de sortir un truc pareil, avant que le souffle d’Hitoshi sur sa joue lui coupe le souffle, suspendu à la douceur avec laquelle ses lèvres effleuraient sa peau. Presque trop intime, en dépit des circonstances.
« Et heureusement que je suis là, du coup. » conclut son camarade, calant son front contre sa tempe alors que sa main recommençait à enserrer la queue du platine d’une décharge de plaisir.
Déjà laminé des heures précédentes, le corps de Denki effaça la moindre sensation en dehors des doigts d’Hitoshi qui commençaient à le branler en usant de cette même paresse enivrante. Le drap trop chaud, la température trop élevée, son putain de pantalon bien trop serré pour cette activité, tout disparu, englouti dans le plaisir des mouvements sur son érection, que le sourire d’Hitoshi soulignait d’un peu plus d’excitation. Un afflux d’excitation supplémentaire difficile à enquiller, piquant les reins de Denki d’un halètement. L’assurance tranquille avec laquelle Hitoshi déroulait très lentement ses allers-retours sur sa queue, enserrant son excitation dans une caresse appuyée, était faufilée par le désir fou furieux qui sourdait du violet. Trahi par l’infime crispation de ses doigts autour de Denki après un sourire de ce dernier et la légère brisure dans sa voix :
« Mains sur le matelas, trésor. Hors de question que t’actives ton sort alors que c’est à mon tour de m’amuser. »
C’était si évident, si perceptible qu’il prenait son pied rien qu’en sentant le plaisir de Denki contre lui, que ça en devenait presque obscène d’érotisme.
Sans que Denki réalise, son dos quitta le matelas lorsque son corps préféra tendre chaque muscle et nerfs en sa possession plutôt que d’endurer sans réagir l’implacable lame d’excitation en train de lui faucher sa raison, seconde par seconde. Après une journée pareil, il aurait dû tenir deux minutes avant de jouir, pas plus, ne serait-ce que pour soulager son esprit rendu cinglé par la tension permanente que ses reins exerçaient sur lui.
Mais la lenteur maîtrisée d’Hitoshi lui interdisait toute amorce d’orgasme. Le renfonçait encore et encore dans un océan de plaisir absurde d’intensité, où il perdait pied au fur et à mesure qu’il serrait les doigts sur le drap pour s’empêcher d'agripper les mains de son camarade dans une tentative désespérée de le faire bouger plus vite. Parce qu’il fallait l’admettre, à son grand dam, que c’était trop bon pour qu’il ose faire le moindre geste.
Hitoshi était un putain de génie, rien que ça, d’arriver à allier ainsi une pression fluctuante sur son érection, tout en remontant lentement ses pouces sur la courbe de sa queue, avant de le branler avec nonchalance, presque désabusé. Recommencer en changeant son rythme, son intensité, ne suivant aucun autre schéma que celui de la respiration accrochée de plaisir de Denki. En pleines possessions de ses moyens, il aurait peut-être tenté d’analyser, trouver une logique afin d’offrir à Hitoshi le son qui le ferait enfin accélérer, mais il n’arrivait presque plus à garder les mains sur le matelas, alors diriger son esprit sur autre chose que le plaisir, impossible.
La seule chose qui faisait concurrence à celui-ci, peut-être, c'étaient les infimes mouvements de hanche d’Hitoshi contre lui, involontaires et donc mortellement excitants. Il avait envie d’y glisser la main, de parcourir l’érection pressée contre sa peau du bout des doigts, lui rendre la monnaie de sa pièce et découvrir si les sons de respiration malmenée de son camarade pouvaient se transformer en vrai gémissement.
Un gémissement d’Hitoshi.
Le cœur dans la gorge, Denki se mordit la lèvre à la simple idée de ce concept, rattrapa in extremis son propre gémissement qui ne tenait pas réellement du gémissement, s’il en croyait la tension dans ses nerfs. Il n’allait pas se mettre à geindre, tout de même ?
Comme s’il l’avait entendu, Hitoshi s’amusa à augmenter à nouveau et légèrement, ô si légèrement, mais de manière trop appuyée pour passer inaperçue, la cadence de ses mouvements, labourant son corps d’un afflux de plaisir insensé. Mortifié, Denki s’entendit donc bel et bien geindre, un son indécent et pas discret pour trois sous, suivi du sourire satisfait d’Hitoshi contre ses mèches. Mais il ne pouvait pas faire autrement que laisser la luxure lui voler son souffle et sa voix, alors qu’elle avait déjà mordu chaque nerf de son corps d’un plaisir à deux battements de cœur de la souffrance. Il avait envie, non, il avait besoin, viscéralement, désespérément, qu’Hitoshi accélère encore ses mouvements, qu’un tout petit peu plus de friction ou de pression vienne briser le statuquo de plaisir dans lequel ses nerfs étaient en train de frire, consumés de l’intensité de désir qui ne faiblissait pas. Jamais.
« Hi-Hitoshi ? »
« Mmm ? »
Il perdit son intention de le supplier dans la fausse nonchalance de son camarade, sexy à en avoir le vertige, et Denki craqua sans réaliser ce qui lui échappait :
« Je peux t’embrasser ? »
« Oh… Je suis si bon que ça ? » s’amusa Hitoshi dans un timbre de voix qui tenait plus du grondement. Ce fils de chien agrémenta sa moquerie d’un aller-retour vicieux de pression sur son érection, épinglant chaque nerf de Denki d’un plaisir qui lui arracha cette fois un vrai gémissement. Sa réaction lui valut un rire moqueur, dénué de toute méchanceté, ainsi qu’un murmure dans le creux de sa nuque :
« Je prends ça pour un oui. »
Allez, ça y est, il en avait sa claque. Version deux points zéro, adieux la bienséance et la retenue !
Vif comme l’éclair, Denki roula sur lui-même, agrippa la nuque d’Hitoshi d’une main en lui immobilisant les poignets de l’autre et se précipita sur sa bouche sans patienter une seconde supplémentaire. Le goût discret de la clope zébra le baiser d’une étincelle d’interdit, durant la fraction de seconde où la surprise figea Hitoshi en une véritable statue avant qu’il ne réponde. Violemment.
À mille lieux de son caractère si réservé et observateur, l’indigo l’embrassa avec une passion insoupçonnée chez lui. La brutalité du baiser lui ouvrit la bouche pour protester, incapable de sortir le moindre son que déjà la langue d’Hitoshi se faufilait contre la sienne, s’appropriant son souffle sans tolérer la moindre résistance. Dans le même mouvement, ses mains attrapèrent Denki par les cuisses pour le faire définitivement basculer sur lui, plaquèrent son corps contre le sien au moment où il pinçait sa langue entre ses dents.
La décharge de douleur, aussi furtive fut-elle, enragea Denki. Complètement à l’instinct, il roula des hanches sur Hitoshi, ravi de le sentir appuyer le mouvement de ses mains et gémir en même temps que lui. Le son qui roula dans sa gorge était moins plaintif que son propre gémissement, plus avide, au diapason de l’intensité avec laquelle Hitoshi accompagna ses hanches en le faisant réitérer son geste. C’était bien moins habile que ses mains sur sa queue, évidemment, mais le frottement de son érection contre celle d’Hitoshi leur tira le même gémissement étranglé. Avec le même sous-ton impatient dans leurs voix. Hors de question de laisser cette putain de barrière de vêtements continuer d’exister entre eux, c’était insupportable, et Denki échappa de justesse à une morsure pour reprendre une inspiration :
« Attends, attends, vire tes fringues ! » supplia-t-il, au désespoir de voir Hitoshi l’ignorer royalement pour lui cracher dans la bouche, impatient :
« Seulement ton pantalon et boxer, grouille. »
Y’avait pas plus illogique, mais à ce stade d’excitation, où le désir lui brouillait presque la vue, Denki eut déjà toutes les peines du monde à déboutonner ceinture et pantalon pour les jarter de lui, alors la logique pouvait aller voir ailleurs s’il y était. Hitoshi se déshabilla de manière bien plus rapide que lui, mais à sa décharge, il n’avait qu’à soulever les hanches pour ôter le tout, alors que Denki devait garder l’équilibre sur le matelas. Charitable au possible, ou tout simplement bien trop impatient, Hitoshi l’aida à se débarrasser de son caleçon avec une force à deux doigts de déchirer le pauvre bout de tissus, ce que Denki aurait trouvé presque mérité. Et qu’Hitoshi jugea vraisemblablement comme raisonnable, à la hauteur de la force qu’il mit à le faire tomber à nouveau sur lui, étouffant un grognement soulagé dans leur baiser, exigeant immédiatement l’accès à sa bouche.
Oh, la chaleur de sa peau, le soulagement presque euphorique d’enfouir son corps contre le sien, tellement plus agréable que tout ce qui avait précédé et surtout, la sensation électrisante de son érection contre la sienne. Sans aucune barrière. Il aurait gémi pour moins que ça et sans gêne, Denki tenta un roulement de hanche dévastateur pour leurs souffles. Failli crever de sentir sa queue glisser contre celle d’Hitoshi, savoura la moindre réaction de ce dernier, la manière dont son propre corps semblait vibrer d’excitation à chaque infime mouvement de hanches, crochetant ses nerfs d’un plaisir fade d’intensité, mais ravageur d’excitation. Il gémit sur la langue d’Hitoshi, gémit encore sous la morsure qui lui laissa la lèvre inférieure endolorie, engourdie de l’absence de son amant quand celui-ci l’abandonna une seconde – une seconde de trop.
« Den’ ? »
« Quoi ? » grogna Denki, bien plus préoccupé par la nécessité de lécher la lèvre d’Hitoshi à la recherche d’un peu plus de son goût, de son souffle, de l’esquisse de gémissement capable de le rendre cinglé.
« Les bagues… » souffla Hitoshi contre lui, appuyant son propos en remontant ses mains le long du dos de Denki sous son t-shirt sacrément froissé, des mains chaudes, à la peau nue. Complètement nue.
Denki se redressa brusquement, récupérant ses mains de sous les mèches violettes, des mains sans bagues ni anneaux, rien que sa peau et le tatouage en forme de sigil de concentration qu’il s’était inoculé lui-même deux ans plus tôt. Il examina sa peau attentivement pour y trouver une quelconque trace du sort, sans rien voir d’autre que les innombrables minuscules cicatrices laissées par les années et sa maladresse naturelle.
« Oh… »
« On a dû… arriver au bout du sort, peut-être… » suggéra Hitoshi, analysant lui aussi ses mains sans pour autant les ôter de la peau de Denki, jouant avec sa taille distraitement sans réaliser les frissons qu’il y laissait à la suite de ses caresses. Il remarqua en revanche fort bien la moue du platine, que celui-ci espérait pourtant discrète :
« T’as l’air déçu ? »
« Je… J’aimais bien notre jeu. » avoua Denki, un peu de gêne aux joues, plus embarrassé encore de voir le sourire que lui lança son camarade.
« C’est flatteur. Mais… Ça veut dire qu’on peut faire bien mieux, maintenant. » s’amusa Hitoshi et avec délicatesse, il lui ôta son t-shirt en le laissant complètement ébouriffé par l’électricité statique.
« Mieux ? » releva Denki, prêt à souligner qu’il y avait difficilement mieux que ce qu’ils faisaient actuellement, avant de réaliser que cela n’avait désormais plus rien à voir avec le sort. Et même, que cela n’avait plus rien à voir avec le sort depuis un moment, très exactement depuis la seconde à laquelle il s’était jeté sur Hitoshi comme un affamé, délaissant l’adresse de ses mains pour le plaisir bien plus intense de ses lèvres sur les siennes.
« Mieux. »
À mille lieux des pérégrinations mentales de Denki, Hitoshi appuya son propos en lâchant sa taille d’une main, enserrant immédiatement son érection entre ses doigts, sans sort ni magie entre eux, rien que sa chaleur sur lui et Denki dû reconnaître que oui, c’était mieux. Pas nécessairement parce que la sensation changeait réellement, c’était la même agilité, la même manière d’appuyer un peu plus avec son pouce en remontant, ajout de sensation à deux doigts de le faire gémir. Mais sans la contrainte liée au malheureux sortilège, s’ajoutait au plaisir en train de lui remonter dans la gorge la certitude qu’Hitoshi le touchait de son plein gré. Le branlait par envie de lui, et ça, ça n’avait pas de prix.
« Bouge. »
« Pourquoi ? » bougonna-t-il, mortellement gêné de la manière dont le regard d’Hitoshi le déshabillait alors même qu’il ne portait plus grand-chose, gêne accrue encore par le sourire de son amant :
« Parce que la vue est putain d’agréable. »
L’indécence de la remarque se contrebalançait d’un peu de douceur, juste ce qu’il fallait pour que Denki se sente rougir. Trop embarrassé de reprendre son mouvement tant il se sentait observé, il remercia l’univers quand Hitoshi l’attrapa par la gorge pour l’attirer à lui, sans doute par pitié pour son embarras si prononcé. Ou peut-être pas, vu le plaisir dans sa voix quand il ronronna, contre sa peau :
« Et parce que ça m’excite, de voir l’état dans lequel je te mets. »
Seigneur, si c’était ça, le domaine dans lequel Hitoshi n’était pas calme, il ne pourrait jamais plus le regarder dans les yeux de sa vie.
Et en même temps, il allait devoir se faire un devoir de continuer de le regarder, parce qu’il était impensable qu’il vive une seconde de plus sans l’assurance qu’il pourrait ravoir ses mains sur lui dans un futur proche. Très proche, même.
Les reins incendiés par l’attitude éhontée de son amant, Denki bougea légèrement, agrémentant les caresses sur sa queue de l’intensité divine créée par son propre mouvement. La gêne passa par la fenêtre quand son corps réalisa, bien avant lui, qu’il ne pourrait obtenir pareil plaisir qu’en bougeant et il recommença sans réfléchir. S’enfonça encore et encore dans la main d’Hitoshi en ayant la sensation que son monde se carbonisait des soupirs de plaisir qu’il réussissait à entendre aux milieux ses propres gémissements et il faillit mourir quand Hitoshi le lâcha.
« Non, ne… »
« Attends, fais-moi confiance… »
Ah. Oh. La main d’Hitoshi enroulée autour de leurs deux érections, c’était effectivement divin. Rien que le contact était excitant, mais là, avec la pression de ses doigts pour compléter le plaisir de son érection contre la sienne, avec l’assurance qu’ils ne pourraient pas s’éloigner d’un millimètre… Son autre main cadenassée sur la nuque de Denki dans un geste presque désespéré de plaisir, Hitoshi ajouta à tout ce plaisir un roulement de hanche sublime. Assez pour érailler la voix de Denki d’un son qui frôlait le cri et de la nécessité vitale de recommencer.
Il était désordonné et presque frénétique, dans ses gestes ; Hitoshi se fit bien plus méthodique, avec une adresse qui frôlait l’art lorsqu’il imposa un rythme lent, un mouvement de houle éreintant de perfection. Il se paya même l’indécence absolue de synchroniser les mouvements de ses doigts contre leurs queues avec le mouvement de ses hanches, achevant de laminer Denki, la tension dans son corps se morcelant dans ce plaisir piqueté de douleur et d’impatience, proche de le faire jouir.
Il n’avait jamais songé aux inclinaisons sexuelles ou amoureuses de ses camarades jusqu’à présent, mais là, il était dans l’obligation morale de créer une nouvelle catégorie qu’il intitulerait sobrement « déité vivante du sexe » pour classer Hitoshi. Au moins.
« J’vais pas tenir ! »
« Moi non plus. »
« Mais… je t’ai quasi… pas touché... » protesta Denki comme il put, entre deux mouvements de reins à perdre le contrôle de son corps, tellement c’était électrisant.
« J’ai passé la journée à… à te toucher et à te voir réagir ! » glissa Hitoshi, remarquablement maître de lui-même, mais pas assez pour dissimuler le soupir de plaisir en plein milieu de sa phrase. Un son divin, de l’avis de Denki. « Alors, là, si tu crois que je vais tenir dix ans... en t’entendant gémir contre moi... »
Bien évidemment, l’aveu aussi cru et décomplexé d’un tel plaisir prit par procuration, putain de sexy, fit aussitôt gémir Denki dans l’air surchauffé entre leurs bouches liées. Ça, plus la perte de maîtrise de ses hanches, le spasme de plaisir d’Hitoshi qui rapprocha davantage encore leurs queues et la tension dans ses reins éclata enfin. Son orgasme lui griffa la gorge d’un râle très audible, vu leur position, ce dont il se ficha comme de l’an quarante. Trop occupé à encaisser le vertige de plaisir dont son corps l’étourdissait, incapable de s’empêcher de pourchasser la moindre miette de son orgasme au creux de la paume d’Hitoshi.
Presque effacé de plaisir et un fourmillement de fatigue dans le corps, il réalisa l’orgasme de son amant uniquement quand celui-ci lui mordit l’épaule pour étouffer son gémissement, un son si excitant qu’il se surprit à rattraper lui-même une énième plainte. Un peu pathétique et obsédé, comme réaction... Et dire qu’Hitoshi n’avait même pas besoin d’un putain de sort pour le mettre dans cet état-là ! Déité vivante du sexe, qu’on avait dit.
Par pur respect pour son camarade, Denki usa ses derniers neurones dans la coordination son déplacement latéral pour s’effondrer en toute sécurité à côté d’Hitoshi, sans l’écraser de son poids. Et tourna la tête pour détailler un peu mieux son air ébouriffé, incroyablement improbable et de fait, incroyablement sexy. À se damner, presque.
« Tu vois… Mieux. » taquina Hitoshi, avant de l’attirer à lui en voyant sa petite moue faussement agacée, ignorant complètement le bordel de sperme qu’il étala sur leurs peaux dans le mouvement. Et sur le lit, aussi.
« Te moque pas… C’était vraiment fun. »
« Le reste aussi, je te signale. Et puis, t’as toujours la recette de ton sort, non ? On pourra recommencer... » souffla Hitoshi dans ses mèches, adorable de douceur sur laquelle Denki frotta son nez, là où sa gorge se creusait un peu. Dans la précipitation, il n’avait même pas remarqué le grain de beauté au creux de son cou, ni le dessin fin de sa mâchoire et il regretta ne pas avoir déjà commencé à cartographier l’entièreté du corps chaud contre lui. La prochaine fois.
« T’as aimé à ce point ? »
« Pouvoir te torturer comme ça, en classe ? Grave. » avoua Hitoshi sans une once de gêne, faisant éclater de rire Denki face à son air un brin fier de lui, presque incongru pour le personnage.
« Ok, mais j’exige que ça soit aussi fun qu’aujourd’hui ! »
« Aussi fun ? T’as pas idée des choses que je vais te faire si tu réactives ce putain de sort. »
« Genre, tu referais ton truc avec la langue ? »
La fausse innocence de Denki menaça le faire pouffer, alors qu’il frottait négligemment son menton contre la mâchoire de son camarade, amusé malgré lui de voir la détente dans laquelle la partie de jambe en l’air avait plongé le si flegmatique Hitoshi. Celui-ci lui vola un baiser, prolongé de la pointe de la langue tant et si bien qu’il se déplaça pour l’embrasser plus à son aise, emprisonnant un Denki plus que ravi sous lui. La manière dont les mèches violettes tombaient, sur eux, peignait le monde d’une couleur tendre, parfaite pour rehausser la douceur dans la voix d’Hitoshi :
« Un peu, que je le referais. Ce serait bien le diable si j’ai pas ma langue en toi au bout de deux minutes. »
« Hitoshi ! »
« Oh, monsieur le pervers en puissance n’est pas capable d’enquiller ça ? Dommage pour toi. »
Denki adorait la manière dont il arrivait à l’embrasser de son sourire. La façon dont celui-ci se fondait dans le plaisir évident d’Hitoshi au creux de leurs baisers, trop appuyé, trop passionné, ravageant de perfection et il se demanda vaguement s’il ne devait pas en faire une condition sine qua none à l’avenir.
« Au fait... »
« Mmm ? »
« Tu t’en es bien sorti, tu sais ? »
« Ah ? »
« Le premier volontaire pour venir te chercher, parce que t’étais en retard, c’était Mineta. »
FIN
Notes:
Dites-moi que vous avez les refs des titres de chapitres, par pitié XD
fishstickzz on Chapter 2 Wed 02 Jul 2025 11:06PM UTC
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Baronne_Buhdussy on Chapter 2 Sat 05 Jul 2025 06:49PM UTC
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