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Disease

Summary:

Emma avait affronté mille dangers. Elle avait connu la peur, la vraie, avait supporté et défié toutes les ombres. Mais celle qui grandissait là, tout près de Regina, était la seule qu'elle n'osait pas regarder en face.

Chapter Text

Me voici (déjà) avec une autre fic. Pour être honnête, j'avais eu l'idée d'une autre encore, très très culottée mais j'ai du mal à avancer. Le cu ça va deux minutes mdr mais il faut une trame solide et honnêtement, celle-ci en a. De base, c'est une idée qui appartenait au Snamione, un ship sur lequel j'ai beaucoup écris déjà. Mais j'aime explorer des choses qui n'existent pas ailleurs, et je trouvais l'histoire plus adaptée au SwanQueen. Ne soyez pas rebuté par le fait que je l'ai catégorisé en "drame". Dans cette fic, vous pleurerez, vous aurez du mal, mais vous rirez aussi, et vous allez fangirl. Parce que j'adore fangirler mdr

Allez, sur ce, bonne lecture.


Chapitre 1.

Emma ne comprenait pas pourquoi Henry avait tant insisté pour qu'elle vienne le chercher chez Regina, d'autant plus à un horaire pareil.

Il était tôt (trop tôt), ce matin là lorsque Emma arriva jusqu'au manoir rue Mifflin. Le ciel était gris et l'air un peu lourd annonçait une pluie imminente.

Emma coupa le moteur de sa voiture, mais elle ne descendit pas tout de suite. A la place, elle sortit son téléphone de sa poche arrière pour relire le message de Henry.

« Tu peux venir au manoir demain matin ? Le plus tôt possible. J'ai besoin de te parler. Seul à seule. »

Il était près de deux heures du matin lorsqu'elle avait reçu ça. Emma soupira et regarda l'ombre du manoir se former. Cela faisait très longtemps qu'elle n'était pas venue jusqu'à cette maison… Il fallait dire que son départ pour aller ailleurs avec Hook avait en quelque sorte, jeté un froid. Elle ne venait désormais qu'aux grands événements. Sauf que ce message avait une drôle de consonance.

Pas de maman, ni de coeur, ou de smiley. C'était sec, direct, sans détour… Un peu comme s'il venait de Regina en personne. À cette pensée, la sauveuse frissonna.

Sans prendre le temps de s'y apesantir, Emma prit une profonde inspiration et sortit de sa sempiternelle coccinelle. Puis, elle monta les deux petites marches du perron et toqua trois fois.

La porte s'ouvrit alors presque aussitôt. S'y trouvait derrière un Henry étrangement stoïque, d'un calme olympien.

« Salut, lança Henry sans même vraiment la regarder.

_ Salut toi. Ça va ? »

Il haussa les épaules et s'effaça pour la laisser entrer. Le manoir sentait la cire, le bois, comme son habitude. Il régnait une atmosphère réconfortante.

« Ta mère est là ?

_ Ouais. Elle… elle se repose. Enfin, elle essaie. »

Henry évitait son regard. Il avait les mains dans les poches et le pied qui tapotait nerveusement le sol. Il la guida sans mot dire jusqu'au salon, mais ne s'installa pas. Les yeux d'Emma balayèrent la pièce. Quelque chose avait changé. Les rideaux étaient tirés, la pièce moins lumineuse. Il régnait une odeur étrange, pas désagréable, mais inhabituelle : un mélange de lavande, d'infusion de gingembre. Exit celle du cirage.

Un peu comme si l'entrée impeccable cherchait à faire office de façade. Mais ce serait vraiment idiot, n'est ce pas ?

« Tu veux quelque chose ? Un thé ? Un café ? demanda le garçon en interrompant le fil de ses pensées.

_ Henry, qu'est-ce qu'il se passe ? »

Le garçon fronça les sourcils, l'air tiraillé entre loyauté et épuisement. Il savait que c'était idiot de faire comme si tout allait bien maintenant qu'elle était là. Emma n'avait jamais aimé faire semblant. Alors il finit par soupirer, résigné.

« J'en peux plus, murmura-t-il. J'ai essayé de respecter son choix. J'ai tout gardé. Tout. Mais c'est trop lourd. Je savais pas à qui d'autre en parler. »

Emma s'approcha instinctivement de lui.

« Parler de quoi ? commença-t-elle à s'inquiéter. »

Et là, un bruit retentit à l'étage. Un fracas léger. Puis des pas précipités, et une porte qu'on claque. Emma échangea un regard avec Henry.

« C'est rien, dit-il, trop vite.

_ Henry, gronda Emma la mâchoire serrée. Tu as prévenu ta mère que je venais au moins ? »

Le garçon ouvrit la bouche, mais la voix au loin de Regina répondit à sa place.

« Henry ? Qu'est-ce que tu fabriques ? J'ai entendu… »

Lorsque la brune arriva jusqu'au seuil du salon, Emma se retourna et son coeur s'arrêta.

Regina venait d'apparaître, vêtue de cette élégante robe bleue nuit dans laquelle elle l'avait vu un nombre incalculable de fois. Il y avait de cela quelques mois à peine, elle lui allait parfaitement bien, ce qui n'était visiblement plus le cas. Ses jambes, autrefois si élancées, semblaient fines à l'excès. Son visage était blême, ses joues creusées. Et ses cheveux… attachés à la va-vite, ternes, sans volume.

Emma remarqua que la brune portait un gilet en plein mois de juillet et fronça d'autant plus les sourcils lorsque la reine referma les pans de son vêtement sur elle rapidement à sa vue, comme pour se cacher derrière.

« Henry, tu aurais pu me prévenir ! se précipita-t-elle pour gronder son fils. »

Henry ne répondit rien. En fait, il venait de ramener deux tasses de café, sans un mot.

« Emma, qu'est-ce que tu fais ici ? »

Regina tenta de se redresser, mais elle semblait un peu trop fatiguée pour garder la même aura qu'à l'accoutumé. Déstabilisée de la voir dans cet état, Emma mit un certain temps à redescendre. Elle se racla alors la gorge, mal à l'aise.

« Je… je suis désolée, je ne voulais pas déranger. Henry m'a appelé et… »

Un silence brutal. On aurait entendu une plume tomber.

Regina cligna des yeux, et Emma jura y voir passer… de la panique.

« Et ? demanda la brune, nerveuse.

_ Et il voulait qu'on parle. N'est-ce pas ? »

Henry sursauta et afficha un sourire de façade.

« Oh euh… ouais. »

Regina déglutit. Elle ramena les pans de son gilet plus encore et Emma fixa sa clavicule ressortant bien trop avant que la reine ne la recouvre.

Puis, elle vint s'installer face à elle en s'asseyant avec prudence. Bien trop de prudence.

Regina mit plusieurs secondes à prendre place tout en s'appuyant sur les accoudoirs, d'un geste qu'elle voulu naturel, sans qu'il ne le soit entièrement.

Emma la connaissait par coeur. Depuis toutes ces années.

Regina était une femme qui transpirait l'élégance, et la maîtrise. Mais pas à ce point.

Machinalement, Regina toucha son visage, comme si elle venait de se rappeler qu'elle n'était pas maquillée.

« Je… je ne suis pas vraiment présentable, ricana-t-elle nerveusement. »

Emma serra le poing discrètement. Mais elle lui lança un sourire se voulant poli.

« Tu as l'air… »

Emma prit une inspiration qu'elle bloqua dans sa poitrine.

Fatiguée ? Usée ? Maigre ? Elle ignorait quel adjectif lui accorder sans la braquer. Mais elle n'avait jamais vu la brune ainsi.

« Juste une mauvaise grippe, balaya-t-elle. »

Regina se saisit rapidement du mug face à elle pour boire une légère gorgée de sa boisson avant de grimacer. Henry, lui, grogna vers elle, mais toujours sans répondre quoique ce soit.

Enfin, Regina se leva pour traverser le salon comme si elle voulait que tout ait l'air normal.

« Je n'ai pas dormi ces derniers jours, mais ça va passer. Tu sais comme je suis, je continue à courir partout même quand j'ai quarante de fièvre.

_ Si tu veux que je prenne Henry…

_ Non, se précipita à répondre le garçon. »

Emma fronça les sourcils vers lui, perplexe.

« Henry, gronda Regina en lui tournant le dos.

_ Je me disais que tu pourrais justement nous aider.

_ Henry, tais-toi, s'emporta Regina. »

Sa voix claqua plus fort que prévu. Le silence lui revint aussitôt, encore plus lourd. Elle se tourna vers lui, les traits tirés par une colère qu'on devinait surtout mue par la peur.

Mais au lieu de reculer, Henry se leva lentement, laissant la tasse sur la table basse. Il ne la regardait même plus.

« Tu peux t'énerver, j'en ai rien à faire.
_ Tu ne comprends pas ce que tu fais.
_ Si, je comprends exactement. Et c'est bien pour ça que je l'ai fait venir. »

Regina pâlit. Une fraction de seconde à peine. Juste assez pour qu'Emma voie. Elle inspira, comme si elle voulait répondre… puis porta la main à sa bouche. D'un coup, son dos se courba et son regard se vida.

« Regina ? appela Emma en se redressant. »

La brune leva un doigt, tremblante.

« Excuse-moi, je… »

Elle vacilla, recula d'un pas, puis pivota précipitamment. Elle disparut dans le couloir, et la porte des toilettes se referma dans un claquement sec.

Quelques secondes plus tard, les échos de haut-le-cœur et d'étouffements brisèrent l'illusion. Cette fois, même le silence ne pouvait plus couvrir la vérité. Emma resta là, le souffle bloqué.

Henry passa lentement une main sur son visage.

« Je l'ai suppliée, murmura-t-il. De le dire à quelqu'un. À toi surtout. »

Il se tourna vers Emma, les yeux rouges mais secs.

« Mais elle ne voulait pas. Elle a dit que ce n'était « pas le moment ». Et voilà que même devant toi, elle se met à boire du café pour garder la face, j'en ai ras le bol ! »

Henry prit rageusement les deux seules tasses qu'il avait préparé initialement pour lui et sa mère biologique, dont une dans laquelle Regina avait porté ses lèvres et qui était à moitié pleine. En colère, le garçon partit dans la cuisine. Lorsqu'elle entendit son fils jeter en fracas la vaisselle dans l'évier, Emma se leva d'un bond.

« Henry ! Dis-moi ce… »

La blonde vit son fils sortir de la pièce et monter les escaliers d'un pas enragé.

« Débrouille-toi avec elle, moi j'en peux plus ! »

Emma sursauta lorsque la porte de la chambre de son fils claqua. Mais pire encore, ce fut celle des toilettes qui s'ouvrit quelques instants plus tard. Regina en sortit lentement, un mouchoir près de la bouche. Son teint était plus blafard encore.

Elle ne vit pas Emma au début.

Et quand elle la remarqua, elle tenta aussitôt de se redresser, de prendre contenance, de sauver la façade.

« Regina… murmura Emma. »

La brune ne répondit pas. Elle se retourna d'un coup pour se diriger de nouveau vers le lavabo derrière elle, titubante. Elle posa alors une main tremblante sur le marbre pour s'y appuyer tout en gardant la tête basse.

Sans réfléchir, Emma s'avança. Le dos de Regina tremblait.

« Attends… laisse-moi t'aider, murmura la sauveuse. »

Emma s'approcha et, d'un geste doux, écarta les mèches humides du visage de Regina, remontant délicatement ses cheveux pour les maintenir en arrière.

De nouveau, Regina ne put retenir les sursauts de son estomac, mais il n'en ressortait que de la bile et elle gémit soudain de douleur.

Puis, elle soupira et repassa ce mouchoir sur la commissure de ses lèvres, cette fois bel et bien agacée.

« Passe-moi… ce truc, là, commanda-t-elle. »

Emma se retourna et suivit du regard l'index de Regina pointant vers une boite de comprimés. Lorsque Regina s'en saisit, elle en fourra un d'un geste vif dans la bouche et prit une gorgée d'eau avant de soupirer.

« Maintenant, tu peux partir, soupira la brune.

_ Partir ? Si Henry m'a demandé de venir pour parler, alors on parlera. Et vu ton état, je suppose que ça a un rapport avec toi. »

Emma leva sa main pour la poser sur le bras de la brune, mais celle-ci réagit immédiatement en se dégageant d'elle, comme si sa proximité la brûlait. Elle se redressa lentement, fière malgré les tremblements. Elle ne la regardait même pas.

« Je vais bien, trancha la reine.

_ Regina… je voulais juste t'aider.

_ Je n'ai pas besoin d'aide. »

Emma soupira. Elle s'apprêtait presque à repartir, mais son regard s'attarda sur la main de la brune qui serrait le bord du lavabo un peu trop fort. Elle n'y comprenait rien. Mais elle savait, là, au fond d'elle, que Regina mentait. Mal. Et que ce n'était pas une grippe.

« Tu sais… la dernière fois que j'ai entendu quelqu'un dire ça, c'était moi. Et je mentais. »

Regina resta figée.

« Je sais que tu détestes ça, admit Emma. Qu'on te voie… affaiblie.
_ Je ne suis pas faible, répondit Regina presque instantanément.

_ Non, bien sûr que non, mais là, franchement, t'as pas l'air d'aller bien du tout. »

Emma s'approcha d'un pas encore. Cette fois, elle ne tenta pas de la toucher.

« Est-ce que tu veux que j'aille parler à Henry ?

_ Tu devrais partir Emma.

_ Pas avant que tu me dises ce qu'il se passe. »

Regina se redressa lentement, les yeux dans le vague. Mais elle parvint au bout de quelques secondes à fixer la blonde dans les yeux.

« Ce n'est pas ton problème.

_ Si. Si Henry me fait venir au manoir à sept heures du matin en plein été, en secret, pour que je voie à quel point tu vas mal… alors si, ça devient mon problème. »

Le silence frappa Emma de plein fouet. Dans les yeux de Regina, elle put soudain lire… une chose qui n'avait pas été là depuis longtemps.

La peur.

Mais très vite, cela lui fut balayé d'un revers de main, et avec une telle facilité.

« Je suppose qu'il est fatigué lui aussi. Mais tu n'as pas à t'occuper de moi. Tu as déjà fais bien trop de chemin pour venir ici, je le crains, pour rien… Ce n'est que de la fatigue accumulée.

_ Arrête. »

Regina dévia le regard. Elle ravala quelque chose. On ne savait pas quoi. Un cri ? Un sanglot ?

« Je n'ai pas envie d'en parler.

_ Mais tu vas le faire.

_ Je. N'ai. Pas. Envie, articula-t-elle. »

Sa voix se brisa légèrement sur le dernier mot, mais elle garda la tête haute. Emma, elle se retourna pour croiser les bras sur sa poitrine et s'adossa au mur près d'elle.

« T'es enceinte, c'est ça ? »

Regina se retourna alors lentement vers la sauveuse et cligna des yeux, comme si elle venait d'entendre la chose la plus insensée du monde. Puis, elle ricana doucement face à l'absurde de la situation.

« Enceinte ? répéta-t-elle. »

Elle laissa tomber la tête en arrière, l'écho de ce rire résonnant un peu trop fort dans le couloir.

« Non, Emma. Je ne suis pas enceinte. Pas de miracle en vue. Pas d'histoire de bébé.

_ T'exagère en parlant de miracle.

_ J'ai avalé une potion pour devenir stérile dès que ma mère m'a marié de force, bien sûr que ce serait un miracle. »

Emma ouvrit la bouche. Elle… l'ignorait. Elle était d'ailleurs surprise que Regina lui fasse une telle révélation, d'un air décontracté, presque entre le plat et le dessert.

« Je… je ne savais pas, souffla Emma, presque penaude.

_ Et pourquoi l'aurais-tu su ? répliqua Regina sèchement. On n'a jamais vraiment parlé de ce genre de choses, toi et moi, pourquoi le ferait-on maintenant ? »

Regina se retourna et vint s'asseoir dans le salon. Emma la suivit, suspicieuse.

« Ce n'est pas une information qu'on glisse dans un dîner de famille, si ? répliqua Regina en se redressant lentement.

_ Tu dis ça comme si c'était normal.

_ Ça l'était. À l'époque. Chez moi. »

Regina tira un peu sur son gilet, réajusta le col et reprit enfin son port de tête.

« Et je ne suis pas enceinte. Juste… vidée. Un virus qui traîne, sans doute. Rien de plus. »

Emma la fixa, dubitative.

« Tu veux me faire croire que c'est un rhume qui te fait perdre autant de poids ?

_ Je n'ai pas perdu tant de poids que ça, répliqua Regina aussitôt. »

Emma leva les sourcils, mais Regina fit mine de ne rien entendre.

« Je traverse une mauvaise passe. Voilà. C'est tout.

_ Tu me prends pour une idiote ?

_ Je te demande juste de me laisser gérer mes affaires. »

Sa voix s'était adoucie, mais son ton restait ferme. Elle reprenait le dessus, avec ce mélange de calme glacial et d'autorité qu'Emma connaissait par cœur.

« Et Henry ?

_ Il s'inquiète trop. Comme toi. »

Elle pivota légèrement, les bras croisés, le regard tourné vers la fenêtre fermée.

« C'est flatteur, mais inutile. »

Emma la regarda un instant en silence. Regina s'était recomposée, presque parfaitement. Mais ses mains, elles, trahissaient encore un léger tremblement. Et c'est ça qu'Emma vit. Ce tremblement. Ce minuscule détail qui prouvait que tout ce discours était en carton.

Regina ne répondit par rien d'autre de plus que des réponses évasives avant de poliment mettre la blonde dehors. Alors, Emma laissa tomber… pour le moment.

Chapter Text

Chapitre 2

Il n'était pas encore neuf heures quand Emma traversa les rues de la ville en trombe, la mâchoire serrée, les pensées embrouillées. Lorsqu'elle arriva jusqu'à la maison de ses parents, elle se recomposa, juste un peu.

Elle ne venait que très rarement ici depuis son départ de Storybrooke. Alors, elle hésita à frapper.

C'était bête, mais une partie d'elle culpabilisait. Elle avait toujours voulu connaître ses parents et voilà qu'elle avait décidé de s'en aller, un beau jour. Pour… de multiples raisons, qui lui appartenaient. Mais en faisant cela, elle s'était éloignée d'eux.

Heureusement, Regina avait réunifié tous les royaumes, mais ses visites se faisaient toujours trop rares.

Pourtant, instinctivement, la main de la sauveuse vint toquer à leur porte. Quelques secondes plus tard, Charming ouvrit, un torchon sur l'épaule.

« Emma ? »

Il y eut un battement de silence. Puis, un demi-sourire apparut sur le visage de David.

« Tu aurais pu nous prévenir ! Ta mère va être si contente de te voir ! »

Emma sourit pleinement à son père qui glissa son bras sur son épaule pour l'inviter à entrer. L'odeur du café chaud, du pain grillé et de la confiture flottait dans l'air.
La maison était calme, douce. L'opposé exact de ce qu'Emma ressentait en elle à cet instant précis.

« Snow est dans le jardin, elle revient dans une minute. Tu veux un café ? »

Emma ne put s'empêcher d'entendre encore les mots de son fils à propos du café que Regina ne supportait plus. C'était d'autant plus… étrange, qu'elle savait que Regina en avait toujours consommé.

« Ouais, je veux bien, finit-elle par répondre à son père après un bref silence. »

Elle s'installa dans la cuisine, observa les tasses, les gestes familiers de son père, l'usure légère du plan de travail. Tout semblait paisible ici. Elle en voulait presque à cet endroit d'être encore figé dans la normalité.

« Alors, dit David en posant la tasse devant elle, qu'est-ce qui t'amène ?

_ Rien, mentit-elle. Juste... une pause. J'avais besoin d'un peu de calme. »

Il la regarda, suspicieux. Mais il ne dit rien.

Snow entra à ce moment-là, essuyant ses mains sur un chiffon de jardinage.

« Emma ?
_ Salut, Maman. »

Snow se précipita dans les bras de sa fille et la serra fort contre elle.

« Tu n'avais même pas prévenu ! Je suis heureuse de te voir. On avait justement quelques muffins qui refroidissaient ! »

Emma sourit face à sa mère. Elle partit chercher les pâtisseries d'un air ravi et Emma prit une gorgée de sa boisson. Elle attendit que sa mère s'installe, calme, puis prit une inspiration.

« Vous avez eu des nouvelles de Regina, récemment ? demanda-t-elle d'un ton se voulant innocent. »

David leva les yeux vers elle. Snow, elle, ne répondit pas tout de suite.

« Regina ? Eh bien, pas vraiment… Enfin, on l'a croisée à la mairie, l'autre jour. Pourquoi ?

_ Comme ça. »

Elle prit une autre gorgée, l'air de rien. Mais son regard ne lâchait pas celui de sa mère.

« Je suis passée la voir tout à l'heure. Elle a l'air crevée, non ?

_ Elle a beaucoup de dossiers en ce moment, répondit Snow un peu trop vite. Elle porte tout sur ses épaules, tu la connais. Surtout depuis la réunification de tous les royaumes.

_ Ouais. Je la connais. »

Emma plissa les yeux vers ses parents. David fuyait son regard, Snow quant à elle, trifouillait le bord de sa tasse. Bref. Quelque chose continuait de clocher et cela commençait à doucement lui courir sur le haricot.

« Elle avait pas l'air… je sais pas. Elle allait pas bien. J'ai cru qu'elle était malade.

_ C'est sûrement un petit virus, ajouta David.

_ Mmh. »

Emma observa leurs visages, leurs mains, le ton de leurs voix. Et elle sentit ses propres poings se fermer.

« Je suis juste étonnée que personne ne lui propose un peu d'aide, souffla Emma.
_ Henry l'aide. Et puis, elle a toujours été un peu… intense, tu sais. Quand elle travaille trop, elle oublie de manger, de dormir, ce genre de choses.

_ Tu veux dire qu'elle se rend malade exprès ? »

Snow posa sa tasse un peu trop lentement et Emma le remarqua.

« Elle en fait beaucoup, c'est tout. C'est son caractère. Elle s'épuise. Et puis, Regina a toujours été comme ça. Réservée. Discrète. »

Elle évitait son regard.

« Discrète ? répéta Emma. C'est franchement pas le mot que j'emploierais pour la désigner. Et en plus, elle avait l'air vraiment mal, ce matin. »

Snow écarquilla légèrement les yeux.

« Elle a fait un malaise ? s'inquiéta-t-elle d'emblée

_ J'en sais rien. Elle dit que c'est la fatigue. Ou un rhume. Ou un virus. Je suppose que ça dépend de l'heure de la journée. J'ai même cru qu'elle était enceinte. »

David fronça les sourcils, mais resta silencieux.

Snow, elle, chercha quelque chose du regard. Un échappatoire. Elle se passa la main dans les cheveux.

« Enceinte ? répéta sa mère dans un rire un peu forcé. Oh, je ne pense pas… ça me paraît improbable.

_ J'ai dit ça comme ça, murmura Emma. »

Emma redressa légèrement la tête.

« Elle a perdu du poids, non ? insista Emma. Je veux dire, vraiment beaucoup. La dernière fois que je l'ai vu était au nouvel an et elle avait l'air bien mieux que ça. »

Snow la fixa enfin. Et dans ses yeux, un éclair de panique.

« Peut-être un peu… admit la princesse d'une voix tremblante. Elle dit que c'est le stress. Et Henry traverse une période difficile, ça joue sûrement aussi.

_ Elle vous en a parlé ? »

Snow remonta légèrement ses manches, visiblement mal à l'aise.

« On ne se voit pas si souvent… on n'a pas eu le temps d'en parler en détail.

_ Mmh. »

Emma plissa les yeux vers elle.

« Maman. Qu'est-ce que tu ne me dis pas ?

_ Rien ! répondit-elle, un peu sur la défensive. Elle a juste besoin de temps. Un peu de repos.

_ Maman ! »

Snow prit une inspiration. Elle sursauta au cri de sa fille, d'autant plus lorsqu'elle l'appelait de cette façon.

« Elle... elle ne voulait pas que tu saches. C'est tout. Elle pensait pouvoir gérer seule.

_ Gérer quoi ? »

Snow détourna les yeux. Encore.

« Ce n'est pas à moi de te le dire, Emma.

_ Mais tu sais.

_ Ce n'est pas à moi de te le dire, répéta-t-elle, plus bas. »

David soupira doucement. Mais il ne parla pas.

Emma, elle, resta figée.

« Vous m'avez déjà menti. Plus d'une fois. Mais là, je vous jure que si ça concerne Regina, et que vous me cachez un truc grave…

_ Emma, tu as choisi de partir, souffla Snow. Je suppose que Regina… enfin, elle ne veut pas t'embêter avec ses histoires, surtout maintenant que tu t'es éloignée de tout ça.

_ Alors c'est quoi ? Une punition ?

_ Bien sûr que non ma puce. Je comprends que tu sois en colère, mais…

_ Je ne suis pas en colère ! mentit-elle (mal).

_ Ce n'est pas aussi grave que tu l'imagines, dit-elle, presque sans voix. »

Cette fois, s'en était trop. Emma se leva lentement de sa chaise, tentant de cacher son agacement.

« Je vais y aller.

_ Tu veux pas rester un peu ? proposa David.

_ Une autre fois. »

Emma attrapa sa veste et se dirigea vers la porte. D'un geste, Snow et David se regardèrent, sans oser répondre quoique ce soit.

xXx

Quand Emma poussa la porte du Granny's, le tintement familier de la clochette au-dessus d'elle sonna trop joyeux pour son humeur.
Il était tôt encore, entre le café du matin et l'affluence du déjeuner. L'endroit était calme.

Elle repéra Henry au fond, déjà installé dans une banquette. Il pianotait sur son téléphone, les sourcils froncés. Un chocolat à moitié bu refroidissait devant lui.

« Hé, dit-elle en arrivant à sa hauteur. »

Il leva les yeux, surpris.

« T'es venue.

_ Tu m'as proposé une gaufre. J'ai rarement refusé une gaufre. »

Il esquissa un sourire. Emma s'assit en face de lui.

« Tu veux quelque chose ? Je peux demander à Ruby.

_ Je vais me débrouiller. »

Emma se mit alors à jauger discrètement les faits et gestes de son fils. Il avait grandi si vite. Trop vite. Henry Mills était un garçon qui avait vécu bien trop de choses pour ne pas devenir adulte rapidement. Cela faisait environ six mois qu'elle ne l'avait pas vu et pourtant, elle avait l'impression que son fils était différent. Plus alerte. Et plus indépendant, d'une certaine manière.

« Henry. C'était quoi ce message hier soir ? »

Emma vit son garçon soupirer. Il hésita, commençant à trifouiller ses doigts crispés autour de son mug, comme s'il avait envoyé cet appel impulsivement et qu'il regrettait.

Pour être tout à fait franc, il ne s'attendait pas à ce que Emma rebondisse et débarque aussi vite.

« Tu as l'air d'être épuisé, comme si tu portais un poids sur les épaules. Je le vois. Et t'es qu'un gosse, tu devrais pas avoir à porter quoique ce soit après tout ce par quoi on est passé.

_ Je ne suis pas un gosse.

_ Je sais. C'est bien pour ça que je te parle comme ça. »

Henry continuait d'hésiter, encore et encore. Ruby leur amena leur gaufre et il se saisit de sa fourchette, mais trifouilla son assiette plus qu'autre chose.

« Je sais pas maman, j'ai promis de respecter ce que ma mère voulait.

_ Ecoute, souffla-t-elle. Je ne te demande pas de rentrer dans les détails, juste de me dire si je dois m'inquiéter ou non. »

Henry inspira longuement.

« Tu ne fais déjà que de t'inquiéter, même si je ne dis rien. »

Elle ne répondit pas. Face à son regard de chien battu, Henry soupira de lassitude. La situation était pesante pour tout le monde, et particulièrement pour lui. C'était justement ce qui l'avait incité à faire appel à sa mère, même si une partie de lui le regrettait.

« Regina… Elle va pas bien, pas vrai ? murmura la blonde. »

Henry ferma les paupières. Puis, il finit par serrer son mug de nouveau.

« Non. Non, elle va pas bien, souffla-t-il. »

Lorsque Emma vit le regard de son fils s'embrumer, son coeur rata un battement.

« On a des jours avec et des jours sans. Plus de sans, en ce moment, renifla-t-il, la gorge serrée. »

Emma le fixa, sans l'interrompre.

« Des fois, elle est trop faible pour se lever, alors je l'aide.Y'a que moi tu sais, et puis, elle a rejeté tout le monde. Je me suis dis bêtement qu'avec toi… Je sais pas. »

La sauveuse baissa les yeux, un peu honteuse. Elle ignorait encore pourquoi exactement.

« Je l'ai surprise à pleurer dans la salle de bain la semaine dernière. Je crois savoir pourquoi, mais j'ai pas osé lui en parler. »

Henry marqua une pause, avant de laisser échapper un soupir.

« Elle s'est excusée. »

Emma cligna des yeux et Henry grimaça, comme si ces mots lui faisaient encore mal à entendre

« Elle s'est excusée d'avoir l'air faible devant moi. »

Emma resta figée. Elle aurait voulu poser mille questions. Elle n'en posa aucune.

« Je dors plus très bien, avoua-t-il. J'ai peur qu'un matin… tu vois. »

Il détourna le regard.

« Et j'ai plus personne à qui en parler. »

Emma posa une main sur la table, pas sur la sienne, mais proche. Mais Henry se recroquevilla sur lui-même et éloigna sa paume.

« Quand elle est trop faible pour faire quelque chose, je l'aide, mais je suis tout seul à le faire maman, je peux pas… Je peux pas être partout. C'est trop. »

Henry se frotta les yeux contre ses paumes, usé.

« Je suis désolé, je sais que t'es parti pour vivre ta vie et souffler.

_ Non, murmura Emma en fronçant les sourcils. »

La blonde se redressa et se mordit l'intérieur de la bouche.

« Je voulais en finir avec les histoires de malédictions, de magie, mais pas avec le reste, insista-t-elle.

_ M'man, pourquoi t'es partie ? sanglota enfin le garçon. »

Henry baissa la tête, mais il était trop tard lorsque Emma remarqua le flot de larmes couler le long de ses joues. Quand il la vit pourtant tendre légèrement sa main vers lui, le garçon se crispa. Il inspira fort, comme pour se retenir.

« Hey… murmura-t-elle.

_ Je suis désolé, continua-t-il, la gorge serrée.

_ Ne t'excuse pas, nia-t-elle.

_ Je me sens seul et… et j'ai peur, et je m'en veux, parce que je t'en veux de m'avoir laissé, de l'avoir laissé. Tu sais comment elle est ! Ma mère refuse l'aide de tout le monde sauf la mienne, mais elle se rend pas compte du poids que c'est. Avant, il y avait toi aussi, mais maintenant… »

Et Emma sentit un nœud se former dans sa gorge.

Ce n'était pas juste qu'il pleure. Ce n'était pas juste qu'il se sente abandonné.
Ce qui lui vrillait la poitrine, là, c'était de comprendre qu'il avait raison.

Bêtement, Emma avant songé que… que c'était mieux comme ça. Qu'ils seraient tous mieux sans elle, surtout Regina, que quelque chose en elle viendrait toujours la ternir, qu'elle était maudite et qu'elle entrainait trop la reine dans ses problèmes.

« Je croyais que... souffla Emma, que c'était plus simple comme ça. De partir. De mettre de la distance. »

Elle marqua une pause.

« J'ai eu tort. »

Emma s'abstint de dévoiler le reste. Ce qu'elle fuyait vraiment.
Elle ne dit pas que chaque regard de Regina la brûlait, que chaque contact trop long lui laissait la peau à vif, qu'elle en était arrivée à ne plus se supporter dans le même espace qu'elle.

Elle avait cru qu'en partant, ça passerait.

Elle avait cru qu'en l'éloignant, elle guérirait.

Mais elle n'avait rien guéri du tout.

« T'inquiète, finit-il par souffler en séchant ses larmes avec la serviette devant lui. Je suppose que ça devait arriver un jour ou l'autre. Faut dire que maman n'aide pas, elle est trop têtue.

_ Je vais la faire s'ouvrir, et après, elle n'aura pas le choix d'accepter la main que je lui tendrais. »

Emma paraissait fière et leva son menton d'un air satisfait, un léger sourire sur ses traits. A son tour, un rictus se forma sur le visage de son fils, mais ce dernier était dénué de toute joie. Il avait l'air si triste.

« 'Man, murmura-t-il. S'il te plait… Je sais pas comment tu vas réagir à… à ça. »

Elle fronça légèrement les sourcils, surprise.

« À quoi ? »

Henry ouvrit la bouche puis la referma.
Il dévia le regard vers la vitrine du Granny's, comme s'il espérait y trouver une échappatoire.

« Henry ? »

Il secoua doucement la tête.

« Rien. »

Puis il souffla, dans un murmure.

« Juste… promets-moi que tu vas rester. Quoi qu'il arrive. Fais le pour moi. C'est important. »

Emma sentit ses entrailles se tordre. Elle hocha la tête, lentement.

« Je te le promets Henry. »

xXx

Songeant que Henry avait sérieusement besoin d'une pause, Emma lui avait suggéré de passer la soirée chez un ami.

Autant dire qu'elle avait du le trainer presque de force, tant il avait peur de laisser Regina toute seule. Mais Emma lui avait assuré que plus vite il irait chez son meilleur ami, plus vite elle pourrait retourner au manoir.

Ce n'était que cette promesse qui l'avait poussé à s'accorder ce temps pourtant, visiblement nécessaire.

Emma poussa alors la porte du manoir pour la seconde fois de la journée, mais à une heure bien plus avancée. Le soleil commençait à peine à se coucher.

Elle avait tenté d'envoyer un sms à Regina pour la prévenir de la situation, mais ce dernier était resté sans réponse. Lorsqu'elle entra, elle vit son sac noir posé près de l'entrée. À côté, une veste. Et, pendu au-dessus, un foulard violet. Alors, Emma appela machinalement la reine, une fois encore, en vain.

Le silence dans la maison avait quelque chose d'épais, presque vivant.

Après avoir jeté un oeil au salon et à la cuisine vide, Emma monta les escaliers à pas feutrés, le cœur cognant fort. Elle n'aimait pas que Regina ne lui réponde pas.

Lorsqu'elle arriva jusqu'au seuil, elle remarqua une porte entrouverte.

Elle hésita. Elle n'avait encore jamais pénétré dans l'intimité de la brune de cette façon… Mais elle avait promis à Henry de rester.

Alors, elle avança et poussa lentement la porte.

Regina était allongée sur le lit.
Pas vraiment endormie, mais pas éveillée non plus. Un bras sur le ventre, l'autre tombé au bord du matelas. Ses cheveux n'étaient pas coiffés. Elle portait un chemisier trop large, un legging froissé et son gilet. Et elle avait l'air… vidée.

Emma resta là, un instant, figée.

Elle s'attendait à de la colère, à une pique, mais Regina ne dit rien.

Elle tourna tout juste la tête vers elle à son entrée, les yeux creusés.

« Emma ? articula-t-elle d'un ton fatigué.

_ Ouais, souffla la blonde. Désolée, je… Henry avait besoin de sortir un peu ce soir et je lui ai promis de rester. »

Regina soupira. Elle ne répondit rien et ferma plusieurs secondes les paupières.

« Je peux m'asseoir ? demanda Emma d'une voix éteinte. »

En d'autres circonstances, Regina aurait eu toutes les raisons d'envoyer la blonde sur les roses. Emma débarquait chez elle, après des mois d'absence, lui imposant sa présence. Et voilà que maintenant, elle s'invitait carrément dans sa chambre, et sur son lit.

Pourtant, à sa surprise, la brune hocha imperceptiblement la tête.

Emma s'assit alors au bord du matelas. Elle sentit une odeur acide. Un mélange de sueur et de plastique.

« Je suis rentrée y a une heure, murmura Regina. »

Sa voix était rauque, comme éteinte.

« Je n'ai pas eu le courage d'aller jusqu'à la salle de bain. »

Emma ne répondit pas.

Regina avait des cernes violets sous les yeux. Sa peau était plus pâle que d'habitude.
Ses lèvres fendillées.

« Tu veux que je t'apporte quelque chose ? De l'eau ? »

Regina secoua la tête.

« L'eau me donne la nausée. »

Emma fronça les sourcils. Elle était contrariée. Elle en avait même assez de ces ronds de jambes. Elle n'avait jamais vu la brune dans cet état, de toute sa vie et elle sentit qu'elle avait besoin d'explications, plus que jamais.

« Regina, tu devrais consulter. »

La brune se contenta de rire, d'un rire amer et sans joie. Elle se passa le plat de la main sur les yeux.

Elle trouvait la situation doucement ironique.

« Tu recommences, souffla Regina, à la limite de l'exaspération. Tu recommences à vouloir me sauver quand je ne t'ai rien demandé.

_ C'est plus fort que moi. Tu devrais le savoir.

_ Oui et bien c'est justement pour ça que je voulais te maintenir à l'écart de tout ce… ce bordel ! »

Cette fois, Emma serra la mâchoire, de plus en plus agacée.

« Alors c'est quoi, une intoxication alimentaire à rallonge ? Une potion qui a mal tourné ? Une grippe de Neverland, une plante, j'en sais rien ! Arrête de tourner autour du pot, c'est fatiguant, comment veut-tu que je t'aide si tu ne veux pas me dire ce qu'il t'arrive ?! Je veux dire… merde Regina, personne n'a voulu lâcher le morceau, pas même ma mère !

_ Je sais comme ce genre de sujet est trop délicat pour toi.

_ Arrête tes conneries, je suis pas en sucre.

_ Sur ça, tu l'es.

_ Merci de ta sollicitude, siffla Emma en croisant les bras devant elle avant de dévier son regard, particulièrement blessée par sa remarque. »

Regina soupira.

« Ecoute, je suis… très fatiguée, ce n'est pas le moment.

_ Ça fait combien de temps que c'est pas le moment au juste ?

_ Longtemps. J'ai même l'impression que ça fait une putain d'éternité. »

Emma souffla. Elle jeta un regard de nouveau timide vers Regina, vers ses joues émaciées, son poignet fin et son teint grisâtre. Emma avança doucement, mais Regina leva la main pour la tenir à distance, le regard soudain effrayé.

« Ne t'approche pas. Je… je sens mauvais, j'ai mal partout et j'ai l'impression d'être une foutue coquille vide. T'as pas besoin de voir ça. Personne n'en a besoin.

_ Alors ça tombe mal, j'ai promis à Henry de pas me barrer d'ici et de prendre le relais. Alors crois-moi que t'as pas le choix, du moins pour les… trois jours à venir, inventa Emma.

_ Trois jours ?!

_ Ouais. Henry était exténué, je lui ai proposé une pause. Et comme t'es têtue comme une mule, j'ai dis que je m'occuperais de tout. »

Emma se garda bien de balancer à la reine que Henry n'avait accepté qu'un soir de répit. Sans quoi, elle se laisserait mourir sur ce lit en attendant son retour. Elle ne la connaissait que trop pour ça.

Mais Regina prit une profonde inspiration et sembla réfléchir un instant.

« D'accord… Appelle Snow.

_ Quoi, t'es sérieuse là ?!

_ Je préférerais que ce soit elle.

_ Putain mais Regina merde ! »

Emma bondit du lit et se mit à tourner de long en large d'un pas rageur et d'un regard froid.

« Appeler ma mère pour s'occuper de toi, tu dois franchement être au fond du trou, explosa-t-elle. Enfin quoi, qu'est-ce qui peut être si grave que tu préfère te tourner vers elle plutôt que de me dire exactement ce que tu as pour que je puisse t'aider ?! Je dois faire quoi, aller chercher une… potion de vérité, ou je ne sais quoi, parce que si tu…

_ J'ai un cancer. »

Emma se stoppa soudain et se tourna d'un geste vers Regina. Elle crut avoir mal entendu. Pourtant, un silence, lourd et pesant s'installa soudain dans la pièce, uniquement interrompu par le tic tac de l'horloge dans l'entrée.

Emma ne bougea pas. Pas d'un millimètre.
Elle resta là, le regard braqué sur Regina, les bras le long du corps, figée comme une statue.

Le silence qui suivit n'avait rien de confortable. Il pesait.
Il étouffait.

« Tu… »

Emma se retourna et cligna alors des yeux vers sa salle de bain à moitié ouverte. Elle avait l'impression de… planer. Alors, elle se tourna de nouveau vers Regina, tout en s'accrochant à la petite commode à coté, comme si elle s'apprêtait à s'effondrer. Alors, elle fut prise d'un espèce de rire nerveux.

« Qu'est-ce que tu… racontes, tu ne peux pas avoir… »

Regina ne répondit rien. Elle resta étrangement silencieuse, se contentant de fixer Emma avant de baisser le regard.

« Tu es… enfin tu es…

_ Je suis quoi ? répéta soudain Regina, agacée

_ Tu es une sorcière, tu as vécu quoi ? Plus d'un siècle, si ce n'est plus, tu ne peux pas avoir de cancer, amena Emma en levant le menton.

_ Je suis une femme, j'ai un coeur, un foie, des poumons, je respire, je vis, comme tout le monde.

_ Ça n'a aucun sens. »

Soudain, Emma leva les mains devant elle. Mais ces dernières tremblaient tellement qu'elle détourna le regard.

« C'est idiot, il doit y avoir une erreur. Ouaip. Complètement idiot.

_ Emma, soupira-t-elle.

_ Tu ne peux pas avoir de cancer ! finit par exploser la sauveuse.

_ Tu vois ?! cria soudain Regina. C'est exactement pour ça que je refusais de te le dire ! »

Emma recula d'un pas, comme si Regina venait de la gifler.

« Je… Je t'emmerde, ok ?! cria-t-elle à son tour. »

Une main tremblante glissa contre sa nuque, comme si elle cherchait à se maintenir dans son propre corps.

« Non. Non, je… Je suis désolée, mais non. C'est pas… Tu peux pas avoir… »

Elle éclata d'un rire sec, nerveux, presque hystérique.

« C'est pas vrai. C'est pas possible. T'as… t'as survécu à des malédictions, à des monstres, à des portails interdimensionnels, à… à la solitude, à tout. Et là tu veux me faire croire que tu as… »

Regina baissa les yeux. Ce rire lui broyait les tripes.

« Ce n'est pas réservé qu'aux gens d'un certain monde, Emma.

_ Oh si ! Ça l'est, justement ! Tout le monde a un putain de cancer de nos jours ! Mais pas toi. Pas toi ! »

Elle recula d'un pas, puis d'un autre, jusqu'à heurter le mur derrière elle. Elle secouait la tête comme une gamine qu'on forcerait à avaler une vérité trop dure.

« T'as dû te tromper. Ou c'est un truc magique, un sortilège qui mime les symptômes, ou… ou alors t'as lu le mauvais rapport. T'as mal compris. »

Regina releva doucement la tête, le visage fermé, la voix calme.

« Quatre mois après mon couronnement, j'ai remarqué une masse près de ma… poitrine.

_ Non, continua de nier Emma en levant son index vers elle, refusant de la regarder en face.

_ J'ai laissé trainé en pensant que ce n'était rien, mais après, j'ai eu un rendez vous annuel avec Whale et il m'a fait faire des examens. »

Emma continua de secouer la tête, encore et encore.

« On a appris la nouvelle il y a six mois. J'ai du commencer avec la radiothérapie.

_ Arrête, gronda Emma en se passant deux mains sur le visage.

_ Sauf que la chimio a commencé il y a…

_ Putain Regina, une chimiothérapie ! »

Regina se tut soudain. Emma croisa les bras, tendit la main vers elle, la rabaissa aussitôt.

« Non. Je… Je sais pas. Mais c'est pas réel. C'est pas la réalité. »

Elle inspira, le souffle court.

« Tu peux pas mourir, ok ? Tu peux pas… pas faire ça. »

Regina ferma les yeux.

« Tu vois maintenant pourquoi je ne t'ai rien dit. »

Emma leva les mains, comme pour se protéger de ses mots.

« Ferme-la. Je veux pas… Je veux pas entendre ça. »

Mais Regina continua, implacable, les yeux brillants de colère contenue.

« Tu crois que j'ai envie de ça, moi ? Tu crois que j'ai envie que toi tu le saches ? De te voir me regarder de cette façon ?! finit-elle par s'emporter. »

D'un geste, Regina se leva. Mais elle le regretta rapidement.

La pièce se mit à tourner et elle vacilla sans le contrôler.

Alors, Emma fit immédiatement un pas vers elle, l'air paniqué.

« Regina ! »

La brune leva un bras, comme pour lui dire de ne pas approcher. Mais elle ne parvint pas à prononcer un seul mot. Son estomac se tordit soudain violemment et elle sanglota. Ses genoux cédèrent et elle haleta avec douleur. Elle se rattrapa au rebord du lit et se mit à gémir.

« Je, je vais… »

Emma se précipita alors sur elle, et sans réfléchir, tourna sa tête pour trouver une bassine cachée juste en dessous du lit. Elle la glissa sous elle et Regina vomit de nouveau en se tordant. Dans son dos, Emma sentit ses yeux brûler, mais elle tint ses cheveux et sa main posé au milieu de son dos l'apaisa, un peu. Lorsque Emma lâcha, elle vit avec horreur plusieurs mèches rester dans ses mains tremblantes. Au bout de quelques secondes, les crampes se calmèrent, mais Regina resta un peu dans la même position. Sa respiration était hachée et ses paupières closes.

« Je ne veux pas de ta pitié ! finit-elle par lâcher en repoussant la blonde sans même la regarder. »

Emma manqua presque de retomber sur les fesses, alors qu'elle s'était agenouillée pour l'aider. Ses poings se serrèrent, tout comme sa mâchoire, ce qui empêcha les larmes de couler sur ses joues.

« Ce n'est pas de la pitié ! cria-t-elle, ses mots claquant dans l'air comme un coup de fouet. »

Regina se figea, sans trouver la force de répliquer, même si elle pensait tout l'inverse.

« C'est pas de la pitié… répéta Emma d'une voix éteinte. »

Regina se tourna alors vers elle et la fixa, les lèvres entrouvertes. Emma ne pleurait pas. Pas vraiment. Mais ses yeux étaient rouges, et tout en elle semblait… brisé.

Regina déglutit avec peine, puis essuya sa bouche avec sa manche, agacée.

« Je ne voulais pas que tu me vois comme ça. »

Regina finit par pleurer pour de bon en secouant son bras. Elle était bien trop loin de la reine qu'elle avait toujours été, élégante, propre, digne en toute circonstance. Elle se sentait si… si misérable ! Alors, Emma s'approcha d'elle et sans lui laisser l'opportunité de continuer de répliquer, glissa une main sur sa taille pour l'inciter à se lever.

Regina la suivit dans son mouvement machinalement, en s'appuyant sur elle plus que de raison. De toute façon, ses jambes l'empêchaient d'en faire plus.

« Allez viens, lui murmura la blonde. »

Regina ne dit rien. Elle avait la gorge nouée, les yeux humides, et elle n'avait plus la force de se débattre.

Elles traversèrent lentement la chambre, en silence. Emma ouvrit la porte de la salle de bain d'un coup d'épaule, puis alluma la lumière. Elle guida Regina jusqu'à l'intérieur, sans la lâcher, sans prononcer un mot.

Lorsque la sauveuse ôta le bras de Regina de ses épaules pour ouvrir le robinet de la douche, Regina secoua la tête faiblement.

« Non. »

Mais Emma ne l'écouta pas. Elle régla l'eau sur une température agréable et se tourna de nouveau vers elle.

« Regina. »

Son prénom fut un souffle. Pas un ordre. Une supplique.

Et contre toute attente, elle fit un pas. Puis un autre. Emma aida à enlever son gilet, tâché et trempé de sueur. Elle le balança sans réfléchir par terre. Puis, elle déboutonna les premiers boutons de son chemisier avant de sentir Regina tressaillir. Elle était gelée. Alors, elle retira rapidement son vêtement, la laissant vêtue d'une simple brassière en coton et d'une culotte du même coloris. Quand les pans du tissu tombèrent, révélant la maigreur de ses côtes, l'ombre des pansements, la pâleur cadavérique de sa peau… Emma détourna les yeux malgré elle. Elle les referma. Fort. Puis les rouvrit, et reprit.

« Tu devrais aller t'asseoir. »

Regina hocha faiblement la tête.

Elle l'aida à entrer doucement dans la douche et soutint son poids lorsqu'elle s'écroula à même le sol.

Merde, tant pis. Elle serait trempée.

Sans réfléchir, Emma entra à son tour dans la douche tout habillée. Les mains de Regina tremblaient et elle venait de fourrer sa tête dans ses jambes qu'elle avait replié sur elle-même. Le regard d'Emma tomba sur son dos, d'où elle pouvait voir toute sa colonne vertébrale ressortir, ses côtes, chacune de ses vertèbres. Alors, elle s'écroula à son tour et posa sa joue dans son dos.

Les gouttes d'eau se mêlaient à ses larmes, indistinctes. Elle n'arrivait plus à respirer normalement. Sa gorge était nouée, sa poitrine comprimée.

« Ça va mieux ? finit-elle par lui demander en parvenant à maîtriser assez sa voix pour cacher sa tristesse. »

Regina secoua négativement la tête.

Non elle n'allait pas mieux… C'était même une… une véritable catastrophe. Elle resta recroquevillée contre elle-même, tandis que la chaleur de l'eau tentait vainement de la réchauffer. Mais il n'y avait rien à réchauffer, parce qu'elle n'avait plus que la peau sur les os. Emma, elle, ne bougeait plus. Sa joue collée contre sa peau mouillée, elle écoutait sa respiration, saccadée, douloureuse. Elle ne savait pas quoi faire d'autre que d'être là. Juste là. Elle avait froid, ses vêtements trempés lui collaient au corps, ses cheveux ruisselaient, mais elle s'en foutait.

Regina tourna un peu la tête, comme si elle sentait la position de la blonde contre elle.

« Emma, pars… Pars. »

Mais Emma répondit aussitôt, sans lever la tête.

« Tais-toi. »

Une réplique douce, presque tendre dans son impertinence.

Un silence.

Puis Regina eut un ricanement sec, minuscule. Un rire sans joie. En un hoquet étouffé, elle se mit à pleurer, pour de bon, cette fois.

Elle sanglotait contre ses genoux, comme une enfant. Emma, qui n'avait jamais vu ça, calma ses propres pleurs. Elle se redressa un peu, et passa une main dans ses cheveux sombres.

« Non. Non s'il te plait, ne les… ne les touche pas. »

Emma n'écouta pas, mais comprit lorsqu'une trop grosse masse de cheveux tombèrent un peu sur sa peau. Alors, elle n'insista pas.

« D'accord, murmura la sauveuse. Mais je reste. »

Regina ne répondit pas. Sans un mot, Emma se saisit du premier flacon qui tomba sous sa main pour laisser couler du gel douche dans sa paume. Elle passa lentement sa main le long du dos de la brune, puis de ses épaules, de ses bras. Elle semblait bien trop faible pour agir autrement qu'en se laissant faire comme une poupée de chiffon.

« Je suis fatiguée, murmura Regina, les paupières closes. »

Emma se pinça la bouche, puis hocha la tête. Alors, elle se pencha pour prendre le pommeau et rinça rapidement le dos de Regina qui tremblait. Enfin, elle coupa l'eau et la porta de nouveau en dehors de la cabine.

Par chance, une serviette était à sa portée et elle l'entoura.

« Pourquoi tu me l'as pas dit ? »

Regina se contenta de hausser les épaules négligemment. Elle se laissa porter jusqu'à la chambre et Emma la déposa sur le lit avant de rapidement débarrasser le bazar autour d'elle. Mais Regina s'en soucia à peine. Elle s'allongea sur le matelas, épuisée.

« Je ne voulais pas que tu me voies comme ça. Je voulais… te préserver. »

Regina se recroquevilla sous les draps en position foetale. Emma la regarda au loin, la bassine encore dans les mains. Enfin, elle la fit disparaître magiquement et soupira.

« Mais c'est moi qui devrais te soutenir. C'est ça qui est censé se passer pas vrai ? Quand on tient à quelqu'un ? »

Regina rouvrit les yeux, lentement. Ils étaient rouges. Vides. Elle semblait à la fois terrifiée et complètement brisée. Elle voulait rétorquer quelque chose, une remarque sèche, une pique pour se défendre… mais rien ne venait.

« Après tout, tu aurais fait pareil, pour moi, non ? insista Emma, le regard fixé dans le sien. »

Le silence, encore. Puis une lente inspiration.

« J'aurais détruit le monde entier pour toi. »

Emma sentit sa gorge se serrer. Mais Regina se tourna pour mieux s'allonger en lui faisant ainsi dos.

« Eteins la lumière en partant… s'il te plait. »

Chapter Text

Chapitre 3

Emma était assise sur le rebord de la fenêtre dans le salon bien sombre du manoir. Elle avait l'impression de planer dans un autre monde, d'être en plein cauchemar et qu'elle finirait par se réveiller d'un moment à l'autre.

Mais il n'en était rien.

Elle pourrait se pincer le bras encore et encore que le résultat serait toujours le même. Elle avait beau retourner la situation dans tous les sens possibles, Emma peinait encore à en saisir le sens. Cette histoire de… de cancer, cela lui paraissait hors norme.

Le simple mot évoquait trop de… de choses, des choses sombres.

Emma était arrivée dans la ville de Storybrooke presque quinze ans en arrière, mais cela aurait pu tout à fait se passer hier. Elle revoyait encore son fils, haut comme trois pommes, venir la chercher. Elle sentait encore le parfum de Regina, son regard furieux, leurs batailles, et toutes ces aventures incroyables. Elle avait vu et vécu des choses que la plupart des gens n'oseraient même pas imaginer, même dans leurs rêves les plus fous, à un tel point que tout cela était en quelque sorte, devenu sa norme.

En fait, à cet instant même, Emma se détestait. Elle se sentait idiote, et terriblement insouciante.

Toutes ces années, elle avait naïvement pensé que le danger était… la magie, les malédictions, les monstres, ogres et autres joyeusetés. Jamais elle n'avait prit le temps d'envisager que quelque chose d'aussi « bête » puisse arriver à quelqu'un ici et encore moins à elle.

Regina.

Cette femme forte, indépendante, qui avait tout surmonté, qui avait affronté les âges et fait face à des monstres bien plus grands. Dont elle-même.

Emma se secoua la tête en étouffant un sanglot. Elle sortit son téléphone qui vibra dans sa poche arrière, mais ne répondit pas au message de Killian qui venait de s'afficher. Elle n'avait pas la tête à ça.

Encore trop de questions se bousculaient dans sa tête, et elle était toute embrouillée, elle ne savait même pas par où commencer.

« Tu es encore là, souffla la voix lasse de Regina derrière elle. »

Emma sursauta et sécha rapidement ses joues en voyant la brune appuyée dans le chambranle de la porte. La faible lumière du couloir brillait derrière elle et mettait en exergue sa fine silhouette.

« Bien sûr, bafouilla Emma en se remettant correctement tout en détournant de nouveau le regard sur l'extérieur. Pour qui tu me prends ? »

Regina soupira en baissant la tête. Elle s'avança timidement dans le salon et prit place sur le sofa, le dos tendu et les mains crispées. Emma ne la remarqua qu'à peine. Elle était dans un état bien trop… pathétique pour se connecter à la réalité.

« J'aimerai que tu partes, annonça gravement Regina. »

Emma se retourna soudain vers elle, comme pour la fusiller du regard. Mais elle en fut rapidement incapable. Elle était plus… plus perdue encore face à l'aberration de ce que Regina était en train de lui demander de faire. Partir ?! Comment pouvait-elle lui demander de faire une chose pareille maintenant ?

« C'est trop… trop humiliant, finit par lâcher la reine en détournant le regard. »

Regina se protégea elle-même en s'entourant de ses propres bras.

« Humiliant ? répéta la blonde, hébétée. »

Emma se leva lentement du rebord de la fenêtre et s'approcha, bras ballants. La lumière de la lune filtrant à travers les vitres jouait sur son visage, accentuant ses traits tirés. Elle s'arrêta à une bonne distance du canapé, consciente que trop s'approcher pourrait tout faire exploser.

« Tu as un cancer Regina. Tu as vu l'état dans lequel tu es ? Tu ne peux pas rester seule, insista la sauveuse.

_ Henry s'occupe très bien de tout ça.

_ Il est à peine majeur Regina, et… tu es sa mère. »

La brune se leva d'un bond, comme si elle refusait d'en entendre plus, mais Emma ne la laissa pas se dérober.

« Tu n'as pas besoin de faire ça.

_ J'ai promis à Henry de…

_ Il n'a pas à décider pour toi. »

Emma commença à prendre une inspiration, car elle sentait une colère sourde monter en elle… Et ce n'était pas bon signe.

« Je comprends pas comment tu peux… rester comme ça ! »

Regina haussa à peine les sourcils.

« Tu continue de travailler j'en suis sure ! Et peu de gens doivent être au courant si même mes propres parents ont gardé ce secret. Bon sang, mais…

_ M'effondrer ne changera rien à la situation, trancha Regina. »

Emma fit quelques pas dans la pièce, comme une lionne en cage. Ses mains se levaient, se rabaissaient, cherchant quoi frapper, quoi casser.

« C'est un putain de cancer, Regina ! Tu te rends compte ? Tu vas… »

Elle s'interrompit, incapable de finir la phrase.

« Je compte suivre les traitements. Les résultats n'ont pas encore donné de chiffres définitifs. »

Regina parlait comme si elle faisait le compte-rendu d'un conseil municipal. Emma serra les poings.

« Tu l'as su quand ? demanda la blonde.

_ Le diagnostic officiel est tombé en janvier.

_ JANVIER ?! hurla Emma. Et t'as dit ça à PERSONNE ?!

_ Je l'ai dit à Henry qui n'a pas su tenir sa langue face à ta mère et ses questions, siffla-t-elle. Alors ils savent eux aussi, mais je leur ai fais promettre de garder le secret.

_ Et moi ?! »

Regina la regarda, impassible.

« Tu avais refait ta vie. »

Emma se figea. Elle ouvrit la bouche, mais aucun son n'en sortit. Elle avait l'impression de s'étrangler dans son propre air.

« Quel type de cancer ? lâcha-t-elle enfin, d'une voix plus sourde, plus dure.

_ Cancer du sein. Stade trois. La tumeur est localisée mais assez agressive. Ils ont tenté une radiothérapie, mais ça n'a pas marché. Maintenant, je suis sous chimio. »

Elle énonçait cela sans trembler, comme si elle parlait du traitement d'un dossier fiscal.

« Et maintenant ?

« Une opération est envisagée si le protocole fonctionne. Sinon, on avisera. »

Emma passa une main dans ses cheveux, les doigts tremblants.

« Tu dis ça comme si… comme si tu parlais d'un putain de rendez-vous au pressing ! »

Regina resta silencieuse, stoïque et si froide que cela glaça le sang d'Emma.

« Et ça veut dire quoi au juste, on avisera ? bafouilla-t-elle en croisant les bras devant elle.

_ Je ne sais pas. Des anti douleurs je suppose. »

Emma inspira profondément, les bras croisés, les ongles enfoncés dans sa peau. Elle voulait hurler. Briser quelque chose. Briser quelqu'un. Mais tout ce qu'elle avait devant elle, c'était Regina calme, fatiguée, et pourtant toujours aussi droite et silencieuse.

« Et tu crois que maintenant, je vais me casser d'ici la bouche en coeur ?

_ Je ne te demande rien.

_ Mais justement ! rugit Emma. Tu demandes jamais rien, t'as toujours fait ça ! Tu préfères crever plutôt que d'avoir une main tendue vers toi ! »

Regina tourna lentement la tête vers elle, le regard froid.

« Parce que les mains tendues finissent toujours par se retirer. »

Emma ouvrit la bouche, suffoqua, et la referma. C'était… injuste. Mais Regina ne cherchait pas la justice.

Elle resta un moment silencieuse, à la fixer avant de se lever de nouveau.

« J'en ai rien à foutre, je reste, balança-t-elle.

_ Et pour quoi faire ? cracha Regina. Me doucher ? Me ramasser comme une loque ? Laver mon vomi et me cuisiner des trucs qui finiront au fin fond d'une poubelle ? »

Emma secoua la tête, incrédule.

« Retourne auprès de ton mari Emma, ce n'est pas une solution de t'entrainer une énième fois dans mes problèmes.

_ Regina. On ne parle pas de simples « problèmes » comme tu dis. »

Le silence s'installa de nouveau dans le salon. Mais cette fois, il n'avait plus rien d'hostile. Il n'était pas confortable non plus.

Regina, elle, gardait le regard droit devant elle. Fixe. Comme si elle cherchait à maintenir son esprit au-dessus de tout ça. Au-dessus de son corps douloureux. Au-dessus de sa peur. De sa honte. De cette humiliation qu'elle ressentait à être faible devant… Emma.

Emma… La seule personne qu'elle avait voulu épargner.

C'est bête, mais elle était la première personne à qui elle avait pensé lorsque Whale lui avait donné le diagnostic. Pas elle, pas Henry, pas Snow. Juste elle. Parce que Emma était tellement angoissée par la mort qu'elle avait préféré s'enterrer la tête dans le sable plutôt que d'envisager de lui dire, d'une façon ou d'une autre. Et puis… elle n'avait pas envie qu'Emma mette de nouveau sa vie de côté pour elle. Hors de question.

Elle était partie. C'était bien pour une raison, non ?

Parfois, lorsque Regina y pensait, elle se sentait encore amère.

« Et ta magie ? demanda soudain Emma. Elle fonctionne encore ? »

Regina se mordit l'intérieur de la bouche. Elle prit une profonde inspiration et ferma les paupières.

« Non. »

Sa réponse sonna plus encore comme un couperet.

« La chimiothérapie est un traitement qui tue tout, sans distinction.

_ Tu veux dire que ça la drainerait aussi ?

_ Je l'ignore. Mais mes pouvoirs sont liés à mes émotions, à mon corps et si je suis épuisée, il est logique que je ne puisse plus les utiliser.

_ Dans ce cas, qui s'occupe de ta maison ? De ton linge, des repas, de, de… j'en sais rien moi, de tout !

_ Moi et Henry. »

Autant dire, Henry tout court.

« Vois la vérité en face Emma, finit par souffler Regina en se levant pour mettre de la distance entre elles. C'est… Je ne sais pas, le karma ou quelque chose comme ça, bafouilla-t-elle. J'ai ôté la vie à beaucoup de gens en plongeant ma main dans leur poitrine et j'en ressors avec un cancer du sein. Si tu veux mon avis, l'univers s'est chargé de me faire passer un sacré message. »

Emma écarquilla les yeux.

Elle allait répondre, dire que c'était absurde, que l'univers n'avait rien à foutre de ce genre de logique poétique tordue, mais aucun son ne sortit. Puis Regina parla, d'une voix étonnamment calme.

« Je sais que tu m'en veux. »

Emma ne répondit pas.

« Mais tu n'as pas le droit de revenir maintenant et d'agir comme si tu pouvais réparer les choses en trois jours. Et je vois dans ton regard qu'une partie de toi meure d'envie de fuir. Alors fais le. »

Emma la fusilla du regard, mais ne nia pas. Pas cette fois. Parce qu'au fond, c'était vrai.

Elle avait envie de fuir.
De courir.
De s'effondrer dans une forêt au bord du monde et de hurler.

Mais elle ne partirait pas.

« Ça me fait peur, OK ? Voilà. T'as gagné. T'es contente ? Je suis une débile absolue qui vivait dans l'insouciance la plus totale et je croyais naïvement que tu étais immortelle. Alors ouais, être confrontée à la réalité des choses, c'est pas le truc le plus plaisant de l'univers mais il est hors de questions que je me défile. »

Elle marqua une pause. Son souffle était court, son regard brillant.

« Tu m'as toujours foutu les jetons, Regina. Pas parce que t'étais méchante. Mais parce que t'étais plus forte que moi. Et là, je te vois t'effondrer. Et je… »

Elle ne termina pas sa phrase.

Parce que Regina détourna le regard. Un silence pesant s'installa de nouveau, mais Emma refusait toujours aussi obstinément la situation.

D'accord. Regina avait un cancer.

L'information avait fini par rentrer.

Mais son fils l'avait appelé exprès pour qu'elle le voit de ses propres yeux et désormais, elle percevait des petits détails. La poussière sur la cheminée. Un bol avec un fond de café sec sur la console. Et la vaisselle qui trainait.

« On va faire un deal. »

Regina cligna des yeux, surprise par la formulation.

« Un quoi ?

_ Un plan. Un truc basique. Organisé. C'est ce que tu aimes, non ? »

Regina haussa un sourcil, l'air méfiant. Emma continua, s'approchant de la table basse, puis se mettant à genoux comme si elle allait poser des cartes sur un plateau invisible.

« Tu fais la liste de tout ce que tu ne peux pas faire seule : courses, repas, lessive, papiers, rendez-vous, respirer… j'en sais rien. »

Elle planta son regard dans le sien. Il n'y avait rien d'héroïque dans ses yeux. Juste de l'entêtement. Une sorte de rage froide et fébrile qui la maintenait debout.

Regina la fixa longuement. Puis secoua légèrement la tête, dubitative.

« Et tu comptes faire ça pendant combien de temps ?

_ Jusqu'à ce que tu puisses le faire seule.

_ Et Hook ?

_ Nous sommes… en désaccord. Mais ce n'est pas le sujet. »

En désaccord, le mot était faible, songea Emma en se remémorant la dispute mémorable qu'ils avaient eu avant qu'elle ne s'en aille.

Le pirate lui avait demandé de couper les ponts avec Regina et cette demande lui avait en quelque sorte… fait péter les plombs.

Mais Emma vit le tiraillement dans le regard de Regina. Bien évidement, elle ne pouvait pas gérer tout toute seule et elle avait besoin de soutien, quoiqu'elle en disait. Mais accepter ça…

Sans réfléchir, Emma avança sa main et plongea ses yeux verts dans les siens.

« Regina… »

La brune déglutit difficilement.

« Accepte juste ça… s'il te plait. »

Regina hésita encore. Alors, Emma se mordit l'intérieur de la bouche, le coeur battant.

« Si tu ne le fais pas pour toi, ni pour moi… Fais le pour Henry.

_ Pour Henry ? murmura-t-elle.

_ Laisse le profiter des meilleurs instants avec toi sans avoir les mauvais. Il mérite d'avoir sa mère et que vous riez ensemble plutôt que de pleurer et qu'il s'écroule de fatigue après s'être occupé d'une maison entière tout seul. »

Emma avait raison, et c'était tout ce que Regina détestait.

« Et j'ai des pouvoirs je te le rappelle. Je peux être d'une efficacité à toute épreuve.

_ Comme brûler des toasts ?

_ Super, Henry tiens vraiment tout de ma mère en ce qui concerne le fait de garder un secret à ce que je vois. »

Regina sourit un peu et c'était la première expression de joie que Emma voyait depuis son retour. Alors, elle sourit elle aussi et osa vraiment prendre la main de Regina dans la sienne.

Regina serra un peu plus fort la main d'Emma, presque sans s'en rendre compte.

« D'accord, souffla-t-elle finalement. »

Le coeur de la sauveuse se mit à battre bien plus fort et elle manqua de bondir de joie.

« Mais pas de discours de sauveuse, pas de mièvrerie, pas de larmes, pas de… »

Emma leva les yeux au ciel.

Et voilà qu'elle retrouvait la Regina originelle. Elle ne savait pas encore si c'était une bonne ou une mauvaise nouvelle.

xXx

Une lumière chaude filtrait à travers les rideaux peu occultants du salon. Lorsque Emma cligna un peu des yeux, elle mit quelques secondes à se remettre les idées en place. Elle réalisait qu'elle était toujours chez Regina, et constatait, malheureusement, que les révélations d'hier soir ne provenaient pas de son imagination.

Elle soupira alors, de dépit comme de douleur en se massant les lombaires. Lorsque Emma se redressa, elle grogna de mécontentement. Le canapé n'était pas l'endroit idéal pour dormir et encore moins pour y passer une nuit aussi complète qu'agitée.

Lorsque les pieds nus d'Emma se posèrent sur le parquet froid du manoir, elle pressa son visage dans ses mains, puis finit par se lever. Elle ignorait quelle heure il était, mais il y avait fort à parier qu'il était encore très tôt.

Rien ne bougeait dans la maison, il y régnait un calme presque… paisible, dirait-elle même. L'air s'engouffrant dans l'entrée par laquelle Emma passa était encore frais malgré la saison. Le parquet grinça, et Emma arriva jusqu'à la cuisine, mais s'immobilisa. Elle attendit quelques secondes. Puis, elle poussa la porte battante.

Regina était là.

Elle était assise près du comptoir, enfermée dans un peignoir de soie noir. Ses mains entouraient une tasse fumante d'infusion, ce mélange de gingembre et de citron qui avait frappé Emma lorsqu'elle était arrivée au manoir à la demande de son fils.

La blonde prit alors une profonde inspiration et s'avança dans la pièce en accordant à la brune, un sourire gêné.

Elles se retrouvaient à partager une sorte de scène domestique qui sonnait encore assez étrangement pour l'une comme pour l'autre. Mais Emma songea qu'il faudrait s'y habituer, de toute façon.

Alors, elle désigna la cafetière d'un geste de la tête et regarda la reine.

« Je peux ? »

Regina hocha la tête.

En silence, Emma se servit une tasse, puis s'installa en face d'elle.

Elles ne dirent rien durant un petit moment. Seule l'odeur du café planait dans l'air, et aidait Emma à se réchauffer les mains. Puis, elle cligna des yeux vers Regina.

« L'odeur ne t'incommode pas ?

_ J'ai une séance tous les vingts jours. Seule la première semaine est assez épuisante. Peu à peu, ça passe, jusqu'à la prochaine, soupira-t-elle.

_ Oh… je vois. »

Pour être tout à fait honnête, Emma n'y connaissait strictement rien. Mais elle avait bon espoir, et quelques idées en tête pour apaiser Regina.

« Est-ce que des potions pourraient t'aider ?

_ Je ne crois pas. Et dans tous les cas je n'ai pas voulu prendre le risque d'en consommer pour quoique ce soit. Cela pourrait interférer avec le traitement.

_ Pas même un petit sort ?

_ Je n'arrive plus à utiliser mes pouvoirs convenablement.

_ Je parle de Zelena. Elle pourrait t'aider, non ?

_ Zelena ne sait rien. »

Emma arrondit le regard vers Regina, abasourdie.

« Regina… commença-t-elle.

_ Je sais, je sais, l'interrompit la brune en se levant. Mais elle a sa petite fille et… et elle va se contenter de débiter des sortes de vannes douteuses pour détendre l'atmosphère, ce qui me mettra particulièrement mal à l'aise. »

Emma soupira en plongeant son nez dans son café. Dans le fond, elle notait mentalement tout ce qu'elle allait devoir faire. Il ne s'agissait pas seulement de s'occuper de simples tâches ménagères.

Regina avait besoin d'un soutien moral. D'accepter les choses… Ce qui ne serait guère aisé.

Lentement, Emma posa sa tasse en une inspiration.

« Dis-moi ce qu'il faut faire. »

Regina releva les yeux vers elle avec lenteur.

« Aujourd'hui, je dois me rendre à l'hôpital pour un bilan sanguin.

_ Je t'accompagne, se redressa rapidement Emma.

_ Ce n'est pas nécessaire tu sais, je…

_ Henry a des cours et je suis sure que depuis tout ce temps, tu te rends à tous tes rendez-vous médicaux toute seule, je me trompe ? »

Regina se mordit l'intérieur de la bouche. Puis, elle se résigna.

« C'est possible.

_ A quelle heure le rendez-vous ?

_ Quinze heures, mais on est mardi et j'ai une tonne de paperasse qui m'attend à la mairie, lâcha la brune en jetant un regard sur sa montre.

_ Tu continue vraiment de travailler ? Tu aurais pu prendre une assistance, grogna Emma.

_ Les royaumes réunifiés ne vont pas se diriger tout seuls. »

Regina se redressa et finit sa tasse d'une traite avant de se diriger vers l'escalier. Puis, elle se stoppa en plein chemin. Alors qu'elle avait déjà presque passé le pas de la porte, elle se retourna vers la sauveuse.

« Il y a du linge dans la machine, si tu veux vraiment t'occuper de quelque chose. »

Emma hocha la tête, sans un mot. Elle laissa toutefois échapper un léger sourire une fois la brune éclipsée.

Regina venait de lui confier une tâche à faire…

xXx

Emma n'était jamais entré dans cette partie de l'hôpital. Jusqu'à aujourd'hui, elle n'avait vu que les urgences et cette salle où David était resté dans le coma.

En vérité, la clinique était bien plus grande que cela. Et elle fut même surprise de lire le terme « oncologie » en suivant Regina dans les dédales des couloirs qui ressemblaient franchement à un véritable labyrinthe.

Mais dès qu'elle franchit la porte du service, le nez de la sauveuse se plissa. Ici, l'odeur aseptisée était bien plus forte que dans tout le reste de l'hôpital.

Emma suivit de près les pas de Regina, même si elle n'était pas tout à fait sure d'avoir le droit d'être là. Elle avait toutefois insisté pour la conduire en voiture, ce contre quoi Regina avait bien sûr vivement protesté. Après avoir lutté contre quelques minutes, elle avait fini par céder. Et Emma l'avait attendu pendant qu'elle s'était accordé quelques minutes afin d'ajouter une touche de maquillage à son teint, juste histoire d'avoir l'air… normale.

Devant la porte du box 3B, Regina s'arrêta enfin. Elle inspira, puis entra d'un pas décidé. Et la voix enjouée d'une infirmière l'accueillit avec le sourire.

« Bonjour Mme Mills. Comme toujours, à l'heure.

_ Toujours, Miss Charles, répondit Regina avec un petit rictus. »

L'infirmière tourna la tête vers Emma et la détailla rapidement. Emma en fit de même. Elle avait l'air jeune, 20 ans tout au plus, mais semblait tout à fait sympathique. Alors, la blonde lui accorda un rictus poli.

« Vous êtes accompagnée cette fois, constata-t-elle avec un sourire plus large encore. »

Regina ne répondit pas, mais Emma hocha la tête. Le regard de l'infirmière s'adoucît. Elle semblait heureuse que sa patiente ne soit pas seule.

Elle invita la brune à s'asseoir. Mais, alors que Emma s'attendait à ce que Regina remonte sa manche, elle déboutonna son chemisier à la place et Emma pencha la tête en voyant un petit cathéter dépasser de sa clavicule, recouvert d'un pansement transparent. La brune détourna toutefois le regard dès que l'infirmière commença à stériliser son matériel.

« Qu'est-ce que c'est ? »

Regina fronça les sourcils vers Emma, mais l'infirmière elle, continua de sortir son aiguille d'un air concentré.

« C'est une chambre implantable, répondit la jeune femme d'un ton professoral. Un cathéter est relié à la veine jugulaire de Mme Mills, ce qui nous permet d'injecter ou prélever directement sans chercher systématiquement une veine. »

L'infirmière piqua alors Regina sans aucune difficulté après un petit clic enclenché par l'aiguille dans l'appareil. Lorsqu'elle se retourna, Emma fixait l'appareil d'un air concentré, les bras croisés sur sa poitrine.

« Les produits de chimiothérapie sont très agressifs. Les injections répétés abimeraient trop le système veineux périphérique. C'est très pratique. »

Emma hocha la tête, mais Regina soupira d'un air dépité. L'infirmière le remarqua et sourit un peu.

« Si vous avez d'autres questions, je crois que vous feriez mieux de les poser directement à la concernée.

_ Maggie… souffla Regina d'un ton un peu dissuasif.

_ Hé, vous avez déjà franchi le pas d'arrêter de venir seule, c'est déjà une excellente chose. Vous viendrez à la prochaine chimio, mademoiselle… ?

_ Swan, répondit Emma d'un ton ravi. Oui, je viendrais. »

Regina secoua la tête de dépit, incapable pourtant de contester.

« Vendredi, à quinze heure.

_ Vendredi ? répéta Regina plus vivement. Mais ça ne devait pas être avant la semaine prochaine !

_ Entre les jours fériés, nous avons eu quelques soucis de personnel… Je suis désolée. »

Regina soupira de lassitude.

Elle déglutit, les yeux brillants que seule Emma remarqua, tout comme son poing serré et son souffle court.

Quelques tubes plus tard, tout était terminé et l'infirmière rangea tranquillement son matériel.

De retour dans le couloir, en silence, Regina marcha droit vers la sortie.

Ce n'est qu'au moment où elles franchirent les portes coulissantes de sortie qu'Emma finit par parler.

« Tu veux qu'on s'arrête pour un café ? »

Regina s'arrêta, puis se retourna doucement.

« J'ai encore beaucoup de…

_ Si ta chimio est avancée à vendredi, il ne te reste plus beaucoup de jours pour te goinfrer de burgers et de milkshake. »

Le coin des lèvres de Regina se releva à peine. Alors, elle hocha la tête.

xXx

Emma posa le plateau sur la table comme on pose un véritable butin.

Y étaient posés deux cafés allongés, un chocolat chaud, un muffin, une barquette de frites, un cookie gros comme sa main et une énorme coupe de glace.

Regina haussa un sourcil, les bras croisés, adossée contre la banquette.

« Tu as invité quelqu'un d'autre ou tu comptes me faire avaler ça de force ? »

Emma s'assit en face d'elle, avec un air terriblement innocent sur le visage.

« Je prévois. T'as encore trois jours de répit, alors j'optimise. »

Regina leva les yeux au ciel. Néanmoins, sa main se glissa sur une frite qu'elle attrapa avant de laisser échapper un soupir résigné.

« Tu ne me feras pas grossir par culpabilité, balança Regina en la fusillant du regard.

_ C'est pas de la culpabilité c'est de la stratégie, rectifia Emma. »

Regina mordit dans une frite, puis deux. Emma la regarda faire, le menton dans la main, silencieuse.

« J'ai une méthode d'enfer pour ça, balança Emma en désignant les trois boules de glace en train de fondre. »

Emma prit en main le cookie et en coupa un morceau pour s'en servir de cuillère comestible avant de gober le tout. Regina rit un peu avant de secouer la tête.

« Je vais déjà avoir assez de mal à tout terminer. »

Mais elle suivit tout de même son mouvement et Emma se retint de sourire trop fort. Henry entra dans le Granny's et se fixa soudain à l'entrée en voyant sa mère manger. C'est bête… mais cela faisait longtemps qu'il ne l'avait pas vu faire cette chose pourtant si simple.

« Henry ! s'exclama la brune en se cachant la bouche avec sa main. »

Lorsque Regina le vit sourire en s'installant à côté d'elle, elle réalisa que cela faisait longtemps qu'elle ne l'avait pas vu faire ça. Et ce rictus fit battre un peu plus son coeur.

« Wow, je rêve ou tu te goinfre du sucre que tu m'as toujours défendu de m'enfiler ? balança le garçon.

_ Ta mère a une excuse, pas toi, balança Emma en le pointant avec une frite. Si j'avais pu, j'aurais commandé une fondue savoyarde, mais on est en plein mois de juillet. Et Granny m'aurait tué.

_ Je suis même certaine que tu te serais empressée de le faire, confirma Regina. Et j'ai fort à parier que Ruby risque d'arriver avec une assiette de gaufres haute comme le mont Everest d'ici cinq minutes. »

Henry rit doucement. Il ne savait pas ce qui l'apaisait le plus : voir ses mères de nouveau ensemble, ou les entendre plaisanter à voix basse sans qu'aucune tension ne menace d'éclater.

« Ça fait du bien de te voir comme ça, finit-il par lâcher au bout de quelques secondes. »

Regina baissa les yeux, d'un air gêné.

« Ça ne durera peut-être pas, j'appréhende déjà le week end à venir… »

Soudain, Ruby arriva en soupirant de fatigue, interrompant la réflexion de Regina. Lorsqu'elle déposa une assiette pleine de pancakes, Regina et Henry levèrent leurs sourcils vers la blonde.

« Quoi ? »

Regina rit de nouveau en secouant la tête. Emma cacha son sourire à elle aussi et cligna des yeux vers la main de son fils qui vint se servir.

« Au fait, Henry, tu vais toujours prévu de rester chez ton ami jusque lundi, n'est-ce pas ?

_ Lundi ?! Mais enfin, je… »

Lorsque le garçon vit le regard insistant de la blonde, il se raidit.

« Oh… Ouais, dit-il avec un petit sourire nerveux. Lundi, nickel. »

Regina continua de manger, sans réaliser le mensonge éhonté qu'était en train de partager son fils avec sa mère.

« Et concernant Hook, il n'est pas venu avec toi ? Je suis passé chez grand mère tout à l'heure et je ne l'ai pas vu. »

Sa question était innocente et pourtant, Emma se crispa d'un geste. Elle mit un tout petit peu de temps à répondre, assez pour que Regina se tourne vers elle en levant un sourcil.

« Non, je suis venue seule, finit-elle par répondre, mal à l'aise. Killian a prit le Jolly Rogers. Il avait besoin d'air. Et moi aussi. »

Regina ne répond rien mais fixe sa tasse. Un espèce de silence pesant s'installa à table. Mais Henry se mit à dévorer des pancakes en commençant à raconter des tas de potins sur son groupe d'amis, ce qui permit de détendre un peu l'atmosphère.

Il parla presque non stop pendant près d'une demi heure, comme s'il n'avait attendu que ça. Ce qui était sans doute le cas, dans le fond. Lorsqu'il n'éclipsa après avoir jeté un oeil sur son téléphone, Henry déposa un baiser sur la joue de Regina tout en jetant un regard vers sa mère, comme pour lui adresser un « merci » silencieux.

Quand elles se retrouvèrent de nouveau toutes les deux, Regina resta silencieuse, le regard planté sur la barquette de frites froides à moitié entamé.

« Emma, soupira-t-elle enfin. Tu as prévenu ton mari de la situation ? »

Le terme « mari » écorcha la bouche de la brune, mais elle tenta de faire face en levant le menton.

« Bien sûr que non, ça ne le regarde pas !

_ Je ne suis pas sure qu'il soit tout à fait ravi que tu passe un temps indéfini ici.

_ Ça c'est sur, soupira Emma. »

Regina fronça les sourcils vers la sauveuse, et cette dernière comprit alors qu'elle n'allait pas pouvoir s'en sortir en évitant la conversation éternellement. Emma laissa alors tomber sa frite dans la corbeille et glissa dans son siège.

« C'est compliqué. »

Regina hocha lentement la tête, sans rien dire. Elle fixait la tasse entre ses mains.

Emma soupira.

« C'est pas ta faute, Regina.

_ Tu vas me faire croire que ton arrivée ici et la tension entre toi et Hook ne sont pas liées ? souleva Regina en levant un sourcil.

_ Non, mais… c'est sa faute, rectifia Emma. Il a mal réagi que je laisse tout tomber pour venir, sous prétexte que j'ai voulu… m'éloigner de Storybrooke. Je crois qu'on s'est pas compris sur mes intentions quand j'ai pris cette décision.

_ Et quelles étaient tes intentions ? »

Emma ouvrit la bouche, puis la referma, à la fois surprise que Regina soit si directe, comme par le contenu de la question… Ainsi que tout ce que cela impliquait.

« Je suis partie parce que je ne savais plus où j'en étais. Et puis, c'était… plus simple.

_ Et ça l'est toujours ? »

Emma inspira profondément et ferma les paupières un court instant.

« Non. »

Emma se redressa un peu sur sa banquette, un poil mal à l'aise. Mais elles n'en avaient jamais parlé, jamais « vraiment ».

« Je croyais que si je me rangeais, si je… faisais ce qu'on attendait de moi, ça irait.

_ Tu pense qu'on attendait que tu partes, grimaça la brune.

_ Non, mais… tu sais, Regina, je me suis mariée, j'ai été en enfers, on a vécu beaucoup de trucs pas cool et pourtant… »

Emma déglutit difficilement, comme si ses mots lui étaient arrachés de la bouche, mais elle tenait à aller au bout.

« Pourtant quand tout s'est arrêté, je me suis sentie vide, finit-elle par avouer. »

Regina continuait de fixer Emma, pour lui laisser juste l'espace nécessaire afin de se confier.

« Regina, ce vide, il m'a fait peur, avança la blonde. J'ai compris que si je restais, j'allais continuer à vous entrainer dans mes problèmes et…

_ Qu'est-ce que tu racontes ? souffla Regina en clignant des yeux.

_ Quand je suis arrivée à Storybrooke, j'ai tout bousculé. J'ai peut-être brisé la malédiction, mais à quel prix ? murmura-t-elle. Combien de gens sont morts à cause de moi ? A cause de mon rôle de sauveuse ? Tout allait mieux avant que…

_ Nous vivions tous dans une boucle sans fin, une parenthèse dans laquelle plus personne n'avait de souvenirs ni sa place, rectifia Regina. Tu trouvais ça mieux ?

_ Au moins, Robin n'était pas mort. Graham non plus. Tu n'étais pas… tu étais moins seule.

_ Tu as donc résolu mon problème de solitude en t'en allant, siffla Regina, sans se rendre compte elle-même qu'elle commençait à être cynique. »

Emma ouvrit la bouche de nouveau, incapable de répondre.

« Je crois que je préférais encore les monstres. Voir même carrément le cancer.

_ Tu ne devrais pas dire ça.

_ Ah oui, et pourquoi ? commença à s'irriter Regina. Tu sais ce que ça m'a fait quand tu es partie ? Non bien sûr. J'ai du passer tous les jours devant le commissariat, devant ta poubelle jaune, et la fichue veste que tu n'as même pas pris la peine de prendre avant de te sauver.

_ Ça peut pas être pire qu'une chimio, se braqua Emma.

_ Si, ça l'était. »

Regina se leva et s'en alla. Emma devina au son de la clochette sous la porte qui s'était ouverte brutalement que la reine avait quitté les lieux en colère.

Chapter Text

Chapitre 4

Emma venait de se garer juste en face de la maison occupée par le meilleur ami de Henry. Son fils l'attendait sur le trottoir, adossé à un mur en train de jouer sur son portable. Ou d'envoyer un texto, elle ne savait pas trop.

Emma avait fait un sac à la va vite avec quelques affaires qui reposait sur le siège passager.

Lorsque la coccinelle s'arrêta à son niveau, Henry leva la tête. Emma sortit de son véhicule et lui tendit son sac avec un sourire quelque peu crispé.

« Merci. Mais la prochaine fois, préviens moi, balança-t-il en levant les yeux au ciel.

_ Ouais j'ai… un peu improvisé pour convaincre ta mère de ne pas me virer à grands coups de pied aux fesses. »

Henry ricana un peu. Emma elle, se gratta l'arrière du crâne, mais ne décampa pas comme il s'y attendait. En fait, elle naviguait d'un pied à l'autre, comme si… elle crevait d'envie de lui dire quelque chose sans oser franchir le pas.

« Maman, qu'est-ce qui a ? soupira-t-il.

_ Rien enfin ! Je… »

Emma soupira enfin en levant la tête avant de croiser les bras sur sa poitrine, et son fils plissa les yeux vers elle, suspicieux.

« Henry… Est-ce que je peux te poser une question ? »

Le jeune homme rangea son téléphone, intrigué par le ton de sa mère. Il haussa les épaules.

« Ouais. »

Emma hésita. C'était idiot, presque déplacé, mais elle avait besoin de savoir.

« Tu sais après, enfin, se racla-t-elle la gorge, après que je sois partie.

_ Oui ?

_ Comment elle allait ? Regina, finit par lâcher Emma. »

Henry fronça légèrement les sourcils.

« Tu veux dire, avant qu'on découvre qu'elle était malade ? »

La blonde hocha vivement la tête, le coeur battant. Son fils soupira alors et se mit à hausser les épaules avant de river son regard sur le sol.

« Elle se levait, elle bossait, elle cuisinait. Elle s'occupait de tout, comme d'habitude. »

Emma acquiesça, un poil soulagé.

« Mais… »

La sauveuse leva soudain le regard vers son fils qui trifouillait un caillou avec sa chaussure, les joues un peu rouges.

« Elle sortait moins. Elle restait tard à la mairie, elle rentrait et… parfois, je la surprenais dans le salon, assise, juste… à fixer le vide. Pour ce que ça vaut. »

Emma resta silencieuse. Elle déglutit difficilement, tout en continuant à soutenir le regard de son fils le menton haut, comme s'il lui racontait la météo. Mais lui, ne réalisait pas son trouble, ni la portée de ce qu'il lui confessait.

« Et puis elle a commencé à avoir mal. Elle était toujours en train de se réajuster, se redresser en grimaçant. Elle dormait aussi d'avantage, mais elle restait sans arrêt fatiguée. Je lui disais que c'était pas normal. »

Un silence s'installa avant que Henry n'expire son air, dépité.

« Tu sais, elle a mis des semaines avant d'accepter de faire les examens. Et quand le diagnostic est tombé… j'ai eu l'impression qu'elle était presque soulagée. »

Emma se redressa, stupéfaite.

« Soulagée ? »

Henry acquiesça.

« Je crois qu'elle se disait que maintenant, elle avait une bonne raison d'aller mal. Une raison visible. Un truc qu'elle n'avait plus à cacher. »

Emma sentit les larmes lui monter aux yeux.

« Et toi ? Tu as fait comment, tout ce temps ? »

Henry la regarda avec douceur, mais sans complaisance.

« Je me suis débrouillé. Je t'avoue, j'espérais qu'un jour, tu reviennes. Je savais que malgré tout… elle tiendrait bon. Mais… C'était dur, et quand je lui glissais d'en parler à quelqu'un, toi surtout, elle refusait toujours obstinément sous prétexte de ne pas vouloir te déranger. Elle voulait tout gérer, mais elle a pas pu. J'ai pris le relais, mais je me suis laissé débordé, souvent. »

Henry glissa un sourire vers sa mère se voulant réconfortant, mais à la place, ce fut Emma qui passa sa main dans ses cheveux. Alors, elle le laissa repartir en le remerciant puis retourna dans sa voiture.

Avant de démarrer, elle serra le volant entre ses jointures et sentit ses larmes bruler sa rétine. Mais elle fit bonne figure pour son fils et les ravala en lui accordant un rictus avant de repartir.

xXx

Emma n'était pas rentrée au manoir, pas tout de suite.

Elle s'était rendue au port, malgré l'heure tardive. Sa tête était posée sur le rebord du banc qui faisait face aux bateaux amarrés.

Elle fixa les remous de la mer secouer lentement les coques, et les clochettes de quelques bateaux retentirent à ses oreilles.

L'odeur de l'iode lui permettait d'oublier. Du moins, partiellement.

Mais au bout de quelques minutes à peine, les mots de Henry lui revinrent soudain en mémoire et cette fois, Emma ne put trouver la force d'étouffer le sanglot qui lui étrangla la gorge.

Elle laissa alors le chagrin la submerger et des larmes dévalèrent ses joues sans discontinuer. Elle avait l'impression de n'avoir jamais pleurer de cette façon, ou peut-être quelques fois, il y a longtemps, quand elle n'était qu'une enfant.

C'est bête, mais elle aurait presque pu se recroqueviller, là, sur ce banc, avec son vieux doudou dans les bras. Emma Swan n'était pourtant guère une femme sensible. Mais ce soir, elle avait l'impression de ne plus rien retenir.

Elle pleura pour Henry, pour Hook, pour toutes ces décisions prises à moitié, ces départs, elle pleura même pour elle-même. Mais surtout, elle pleura pour Regina.

Et là, les sanglots redoublèrent.

Elle se revit partir, se remémorant le regard de la reine, la façon dont elle n'avait rien dit, rien retenu, comme si elle s'y attendait déjà. Et maintenant, elle apprenait qu'elle avait préféré le cancer à son absence.

Emma sentait son coeur se serrer, et une petite voix s'insinua en elle.

Elle l'avait laissé tomber.

Le vent du port souleva doucement ses cheveux, comme pour la consoler. Mais il n'y avait pas de réconfort possible. Une douleur ancienne, étouffée depuis trop longtemps, jaillit comme un cri silencieux.

« Emma ? »

Emma se redressa à peine, passa un revers de manche sur ses joues mouillées, mais elle n'avait plus l'énergie de faire semblant. Face à ce spectacle, Snow s'approcha vite, puis s'accroupit face à sa fille. Elle la regarda en silence, puis finit par sortir un bout de tissu pour sécher ses larmes comme le ferait une mère avec sa petite. C'était étrangement, peut-être l'interaction la plus douce qu'elle avait pu avoir avec elle, la plus authentique mais aussi la plus douloureuse.

« Ça va ? »

Emma ne dit rien et son silence suffit à constituer une réponse.

« Je suis désolée, murmura Snow. Je ne voulais pas… te surprendre comme ça. »

Enfin, Emma éclata, la voix cassée.

« T'as pas à t'excuser. C'est moi. C'est moi qui ai… j'ai tellement merdé.

_ Qu'est-ce que tu raconte ? murmura Snow d'une voix douce en passant un mouchoir sur ses joues. »

Emma accepta le mouchoir en tissu blanc de sa mère déjà mouillé de ses larmes. Elle renifla, puis essuya son nez.

Snow vint finalement s'asseoir à côté d'elle, puis prit sa main fermement dans la sienne.

« J'aurais jamais du partir, finit-elle par laisser échapper en secouant la tête.

_ Emma… soupira sa mère.

_ J'aurais du être là, continua Emma, la gorge nouée. J'ai… j'ai abandonné Regina.

_ Hé, souffla Mary Margareth en passant son bras autour de ses épaules. Tu ne pouvais pas savoir. »

Mais Emma continua de secouer la tête, encore et encore.

Si, elle aurait du savoir, elle aurait du le sentir. Depuis leur première rencontre, Emma avait toujours pressenti tout ce qui concernait Regina, sa tristesse, ses angoisses, ses peurs et colères. Mais là, rien. Et elle s'en voulait plus encore.

C'était bête, mais elle aurait préféré se lever un beau jour et que le ciel lui tombe sur la tête, telle une révélation divine qui lui aurai glissé « Regina va mal ». Mais rien de tel n'était arrivé.

Elle avait juste… débarqué au manoir sur demande d'Henry et s'était retrouvée bêtement devant le fait accompli.

« Elle allait mal et j'ai rien vu, continua Emma en se pressant le visage dans les mains.

_ Tu sais… Regina, elle…

_ Mais elle aurait pu me le dire ! couina Emma en la coupant dans son élan. Me supplier, m'engueuler, m'en vouloir, j'en sais rien ! »

Emma serra les poings, le dos tendu. Ses yeux étaient rougis par la colère, mais aussi par une grande part de détresse.

« A la place, elle a… encaissé. »

Snow ne répondit pas tout de suite. Elle savait que rien de ce qu'elle pourrait dire n'apaiserait quoique ce soit. Elle se contenta juste de poser sa main sur le bras de sa fille.

« Ce n'était pas contre toi, souffla-t-elle. Je ne l'ai su que par pur… accident, Regina ne m'a rien dit d'elle-même.

_ Peut-être qu'elle pensait que je n'étais pas assez importante pour être prévenue, lâcha Emma en fixant son regard dans le vide.

_ Ne dit pas de bêtises, nia Snow. Tu sais comment elle est, elle a l'habitude de se débrouiller toute seule. Et puis… elle voulait te protéger.

_ C'est ce qu'elle t'a dit ? »

Snow soupira puis, riva son regard à son tour sur l'horizon. Elle ne devrait pas parler de tout ça à sa fille, c'était le jardin secret de Regina. Mais la situation était plutôt critique.

« Elle m'a posé des questions.

_ Quels genre de questions ? s'inquiéta Emma.

_ C'est pas important…

_ Maman, insista sa fille. »

De nouveau, la brune ferma les paupières, et laissa un léger silence s'installer avant d'expirer, lasse.

« Elle m'a demandé si tu me manquais, si… si parfois, je ne croyais pas entendre ta voiture dans l'allée, ce genre de choses… murmura-t-elle en regardant ses pieds.

_ Oh. Elle… ne m'en a jamais parlé.

_ Parce qu'elle savait que tu étais parti pour de bonnes raisons. Elle ne voulait pas te retenir. La semaine dernière à peine, elle m'a dit que si elle t'aimait vraiment elle devait savoir te laisser t'éloigner. »

Emma tourna la tête lentement vers sa mère, figée. Alors, Snow releva rapidement la tête, un poil effrayée. Elle en avait trop dit.

« Quoi ?!

_ Je ne suis pas sure que c'étaient… ses termes exacts, peut-être que c'était une manière de parler, tenta-t-elle de rattraper maladroitement. »

Mais Emma n'y croyait qu'à moitié.

« Vous êtes tellement têtues toutes les deux, grogna Snow, fatiguée de retourner la situation dans tous les sens. C'est idiot, vous tenez l'une à l'autre tellement fort et vous passez votre temps à tout faire pour ne pas le montrer. »

Emma déglutit, sans qu'aucun mot ne sorte. A la place, elle se mit à rougir énormément en détournant les yeux. Puis, la réalité la frappa de nouveau.

Regina avait un foutu cancer, à un stade plutôt avancé. Et sa mère avait raison, aussi douloureux soit-il de le penser. Alors, elle claqua ses mains sur ses cuisses et bondit de sa place.

« Tu as raison. »

Snow fronça les sourcils vers sa fille.

« Cette situation est absurde, acquiesça Emma. »

xXx

Regina, en robe de chambre, se tenait debout près du spatio avec une tasse entre les mains. Elle n'avait pas passé une excellente nuit.

D'une part, parce que sa chimio était cet après midi. Et d'une autre, parce que cette conversation avec Emma n'arrêtait pas de tourner dans sa tête.

Elle s'en voulait. Jamais elle n'aurait du lui tomber dessus de cette façon… Et Regina refusait de laisser parler sa rancoeur. Bien sûr, le départ d'Emma avait été très douloureux. Et elle avait tenté au maximum de le cacher, même à elle-même. Mais ça avait été si douloureux que quelques soirs, elle était restée allongée là, les yeux grands ouverts, à guetter le bruit habituel du vieux moteur de sa coccinelle.

Machinalement, Regina tourna sa tête vers la fenêtre opposée donnant sur sa cour, là où, derrière un buisson se profilait la couleur jaune de ce tacot de malheur.

Emma avait du rentrer bien tard cette nuit là, elle ne l'avait même pas entendu.

Alors, quand Regina perçu des pas entrer dans le petit salon, elle se retourna à peine.

« Qu'est-ce que tu veux ? marmonna Regina. Parce que si c'est pour savoir à quelle heure est ma prochaine séance de chimio, je ne sais pas si… »

Regina se retourna, prête à finir sa phrase de ce ton glacial qu'elle avait prit l'habitude d'adopter. Mais elle n'en eut pas le temps.

En un choc, presque brutal, Emma fondit sur elle et l'enlaça avec force. Ses bras venaient de se croiser derrière son dos, et sa chevelure blonde vint s'enfouir dans sa clavicule. Regina eut un léger mouvement de recul, réflexe de quelqu'un qui ne reçoit jamais ce genre d'étreinte. Mais Emma ne lâcha pas.

Alors, la reine resta droite, les bras figés le long du corps, comme… sidérée.

« Euh… Emma ? »

La sauveuse ne répondit pas. Elle la serrait désormais comme si sa vie en dépendait, comme si Regina était devenue une sorte de bouée au milieu de l'océan. Cette dernière fronça alors les sourcils en sentant son souffle trembler contre sa peau.

Elle ignorait ce qui lui prenait. Mais pour faire une chose pareille…

Regina savait qu'Emma était une femme très loin d'être tactile. Avec Henry, parfois encore maintenant, elle était si… si réservée.

Sa tasse glissa presque de ses mains. Alors, elle finit par la poser à l'aveugle sur la commode. Puis, lentement, comme si elle se donnait la permission, Regina referma ses bras autour du corps d'Emma. D'abord une main sur son dos. Puis l'autre. Puis un vrai geste.

A son tour, elle se laissa aller et Emma sentit son coeur se détendre peu à peu dans sa prise. La sauveuse laissa échapper une expiration soulagée avant de remplir ses poumons du parfum de la brune, juste là, au creux de son cou.

« Tu es sure que ça va ? lui murmura Regina au creux de l'oreille, d'une voix presque inaudible. »

Emma ferma alors les paupières et secoua négativement la tête. Alors, contre toute attente, Regina finit par serrer ses bras autour d'elle à son tour, jusqu'à ce qu'elles manquent presque d'air toutes les deux.

« Je suis là. »

Emma serra les poings. Quelque part, Regina venait de dire tout ce qu'elle avait besoin d'entendre, en si peu de mots.

« Je suis désolée, marmonna la sauveuse dans son cou. J'aurais du être là plus tôt. »

Puis, elle se redressa, lentement. Ne parvenant à quitter son étreinte, le visage d'Emma se retrouva à quelques centimètres à peine de la reine. Elles se fixèrent étrangement, avec une sorte d'intensité indescriptible dans le regard. Machinalement, Regina baissa les yeux sur la bouche d'Emma et cette dernière en fit de même.

La main de la mairesse glissa contre la nuque d'Emma, en la faisant frissonner au passage. Sa peau était tiède, son souffle chaud et ses cheveux sentaient le shampoing à la pêche… Regina sentit son coeur battre un peu plus fort lorsqu'elle remarqua façon dont Emma se raccrochait à elle, comme si elle était une sorte de… chose fragile et précieuse qui ne pouvait pas tomber.

« Tu n'as pas à t'excuser, murmura finalement Regina, presque malgré elle. »

Emma serra un peu les doigts sur la taille de la brune, puis déglutit difficilement.

« Je… je ne savais pas comment faire. »

Regina inclina légèrement la tête, une ride plissant son front. Mais elle ne répondit pas. Son regard dévia vers les bras de la femme toujours autour d'elle, vers cette proximité nouvelle, déroutante à laquelle elle ne pouvait se résoudre à se détacher.

« Je comprends. »

Emma passa instinctivement sa langue sur sa lèvre et Regina sentit son coeur manquer un battement. Par la force des choses, ses bras s'étaient pressés autour de son cou. Elle les glissa alors, comme pour quitter son étreinte. Mais à la place, ses mains se posèrent là, tout près de sa mâchoire. Le souffle d'Emma se coupa un bref instant. C'était comme si… comme si…

Puis la porte s'ouvrit, si brutalement qu'elles sursautèrent d'un même homme.

« Maman t'aurais pas vu mon… »

Henry s'arrêta net, figé dans l'encadrement. Son regard sauta de Regina à Emma, puis de leurs bras à leurs visages. Et il resta là. Les yeux écarquillés.

Emma se recula d'un coup et Regina tenta de se recomposer, les joues en feu.

« Wow. Euh. Pardon. »

Emma se passa une main nerveuse dans les cheveux.

« Qu'est-ce que tu fous là ?! lança-t-elle, plus fort qu'elle ne l'aurait voulu. T'étais pas censé être chez ton pote jusqu'à lundi ?! »

Henry s'était figé sur le seuil, les yeux grands ouverts.

« Euh… si. Enfin… j'ai oublié un truc. »

Il regarda tour à tour Emma et Regina, les sourcils froncés.

« Vous… vous faisiez quoi, là ?

_ Rien ! répondit la blonde sur la défensive et un peu trop sèchement. »

Regina baissa les yeux en se raclant la gorge et Henry haussa un sourcil.

« Ok. »

Il attrapa ce qu'il était venu chercher sur la commode, puis battit en retraite, lançant un regard un peu trop long à sa mère biologique.

« Je repasserai plus tard. »

Henry parti, Regina se tourna enfin vers Emma en prenant une profonde inspiration. Elles restèrent un court instant ainsi, dans un espèce de silence gênant.

« Je voulais te dire…

_ Oui ? »

Soudain, se fut comme si la tension entre elles était revenu de plus belle. Alors Emma comprit pourquoi elles n'avaient jamais eu de gestes de cette portée. C'était comme si… cela déclenchait quelque chose. Elle se souvenait vaguement de ce sentiment lorsque sa main s'était machinalement posée sur son bras lorsque Regina était parvenu à faire fonctionner le chapeau de Jefferson.

« Ma chimio est avancée à 14 heures. »

Oh.

Emma prit une inspiration, puis lui accorda un sourire crispé.

« D'accord. »

Regina lui rendit avec un peu plus de douceur.

xXx

Emma n'aimait définitivement pas cet endroit.

L'hôpital n'était agréable pour personne, mais alors ce service, c'était vraiment l'enfer. Cette salle, impersonnelle, sentait toujours autant la javel et Emma songea qu'ils auraient au moins pu mettre une petite musique d'ambiance, histoire de ne pas se croire au crématorium.

Emma regarda l'infirmière déplacer le bord du chemisier de Regina sur le coté afin d'accéder à sa chambre implantable. La poche de chimio était sur une potence. D'un blanc laiteux, elle peinait à imaginer que cette chose était un véritable poison sur patte.

« Et voilà, souffla l'infirmière en réglant le débit. »

Regina grimaça.

Elle détestait cette sensation… Ce gout métallique dans la bouche aurait presque pu lui donner la nausée.

« A tout à l'heure. »

Emma leva les sourcils et suivit du regard l'infirmière quand elle partit de la pièce. Puis elle se tourna vers Regina qui s'accouda au bord du fauteuil incliné d'un air boudeur.

« Quoi c'est tout ? Ça valait bien la peine d'en faire tout un foin. »

Regina pouffa de rire sans même pouvoir le réprimer. Elle ne s'attendait pas à une remarque pareille. Emma se détendit un peu et machinalement, s'empara des brochures à sa portée.

« Vois le bon côté des choses, lâcha la blonde en parcourant les lignes sur les brochures. Au moins tu n'as pas, euh… »

Emma retourna le papier et plissa les yeux.

« Le diabète. C'est écrit là que tu peux te faire amputer des orteils, non mais t'imagine ?

_ Emma ?

_ Oui ?

_ Arrête, tu me fatigues. »

Emma releva la tête, surprise, mais elle aperçut enfin un petit sourire aux coins des lèvres de Regina. Alors, la blonde reposa les papiers derrière elle, puis se mit à tapoter ses genoux en silence.

« Y'en a pour combien de temps ?

_ Trois heures.

_ Trois heures ?! »

La sauveuse soupira. Puis, elle se leva en un geste et Regina crut un instant qu'elle perdait patience et la laisse là pour venir la récupérer après. Elle aurait compris… tout en étant extrêmement déçue.

« Tu veux un truc à boire ? »

Regina haussa un sourcil, perplexe.

« On est à l'hôpital.

_ Oh ça va, je te parlais pas d'une Margarita, juste d'un coca au distributeur. En plus, si tu vomis, j'ai prévu un t-shirt moche. »

Un éclat de rire bref échappa à Regina. Elle jeta un oeil au t-shirt tout bonnement affreux que portait en effet la sauveuse, parée d'un logo de Queen à moitié effacé.

« Je ne ressens les symptômes que le lendemain généralement.

_ Super ! »

Emma s'éclipsa et Regina finit par reposer sa tête sur le fauteuil en soupirant. Lorsqu'elle revint à peine dix minutes plus tard, la blonde tenait entre ses mains deux soda, un paquet de M&m's entre ses dents et des bonbons dans les bras.

« Emma, soupira Regina.

_ Quoi ? marmonna la sauveuse en balançant tout son package sur la petite table.

_ On n'est pas au cinéma je te signale !
_ Et pourquoi pas, hein ? Le Dr House lui, il bouffe des sandwich dans des chambres de patients dans le coma, pourquoi j'aurais pas le droit de faire pareil ? »

Regina leva les yeux au ciel et Emma ouvrit le paquet de bonbons chocolatées en s'affalant dans son siège.

« Tu sais qu'on m'a déjà dit que j'avais une ressemblance troublante avec le Docteur Cameron ? balança-t-elle en fourrant une friandise dans sa bouche.

_ En tout cas, tu n'as clairement pas les mêmes manières. »

Emma sursauta et se tourna vers Regina. Puis, elle plissa les yeux et lui tira la langue, mais celle-ci était encore colorée d'un mélange de bleu et de chocolat alors Regina ne put s'empêcher de pouffer de nouveau. La conversation glissa sur les dernières séries qu'elles n'avaient pas vues, les livres abandonnés à la troisième page, les recettes ratées et leurs rêves les plus bizarres.

Regina finit par retirer ses chaussures et plier les jambes sur le fauteuil. Emma imita son relâchement, s'étalant sur sa chaise en arrière. Elle songea qu'elles n'avaient encore jamais discuté ainsi. Et c'était si fluide, si naturel que s'en était troublant. Regina avait fini par poser la tête contre le dossier, les traits légèrement plus détendus.

« Cette brochure sur le diabète m'a donné faim. »

Regina pouffa un peu, sans le montrer tout à fait. Alors, Emma s'allongea un peu plus dans son siège et laissa son regard se perdre dans le vide.

» Tu sais qu'un jour, j'ai volé des tas de toasteurs ?

_ Des toasteurs ? reprit Regina, un peu ahurie. »

Regina leva les yeux au ciel, tentant de cacher son amusement, chose qu'elle fit avec plus ou moins de succès. Emma s'avança dans son siège, comme dans l'idée de se confier et elle se mit à parler tout bas.

« Je les vendais dans ma voiture, mais j'arrivais à peine à conduire tellement y'en avait.

_ Ton ingéniosité ne cessera jamais de me surprendre, lâcha la brune, placide.

_ J'étais persuadée d'être une genre de business woman, continua Emma, imperturbable. Et figure toi que j'étais très organisée. Je tenais un carnet. Un dauphin moche était dessiné dessus, en plein vol devant un coucher de soleil rose. »

Regina se mit à imaginer la scène dans sa tête et retint de plus en plus fort un rictus amusé.

« En fait, je me souviens surtout de ce type qui en avait profité pour me piquer mon porte feuille. Et… ma pizza, grogna Emma dans le vide. »

Emma hocha la tête d'un air très sérieux qui fit cette fois, rire Regina à gorge déployée.

« Ne te moque pas !

_ Non, c'est juste que la part de pizza semble plus grave pour toi que tout le reste.

_ Ça c'est évident. En plus, c'était une quatre fromages, supplément pepperoni. Mais forcément, ça ne te parle pas, tu préfère le sucre.

_ Je n'aime pas le sucre, se défendit Regina en marmonnant dans sa barbe.

_ Je t'ai pourtant ramené ton dessert préféré. Je l'ai laissé dans le frigo, au manoir, lâcha Emma en haussant les épaules avant de sortir son téléphone pour engager sa partie hebdomadaire de Angry Birds. »

Regina se redressa sur son siège, les sourcils levés.

« Il y a déjà du tiramisu au frigo.

_ Pas celui qui est planqué derrière les yaourts. Du vrai tiramisu, celui de Granny.

_ Il n'y en avais plus ce matin, ni hier d'ailleurs.

_ Oh si, il y en avait, lâcha Emma en plissant les yeux sur son écran de téléphone. Un seul, caché dans l'arrière cuisine du resto. »

Regina ouvrit soudain grand les yeux.

« Tu as volé le tiramisu de Granny ?!

_ C'est une longue histoire, balança Emma en reposant son téléphone. Qui implique Ruby, un pot de miel de la Forêt Enchantée, et beaucoup, beaucoup de persuasion. »

Regina la regarda, bouche bée.

« Tu veux jouer ? demanda Emma en plaquant carrément son écran sous le nez de la reine. »

Regina prit une inspiration, puis prit son téléphone d'un soupir agacé avant de le regarder. Emma lui expliqua les règles en une minute à peine. Elles se retrouvèrent ainsi à élaborer des tas de stratégies tordues pour venir à bout des monstres verts.

xXx

Regina était assise sur le tabouret de sa salle de bain. Elle soupira en fixant sa brosse à cheveux. Elle en perdait tellement. Bien sur, elle l'avait remarqué et ce, dès la première séance de chimiothérapie. Ça avait commencé par son oreiller, puis elle en avait ramassé de plus en plus, éparpillé dans la douche, sur son lit, ainsi que dans toutes les pièces de la maison.

Regina passa sa main dans ses cheveux et en ôta une énorme touffe qu'elle fit glisser entre ses doigts. Elle resta pourtant figée devant sa quantité et sentit une bouche lui étreindre la gorge.

« Hé Regina, tu… »

Emma venait de débouler comme un véritable boulet de canon dans sa chambre, débarquant dans la salle de bain sans attendre d'y être invitée. C'était devenu comme ça, et avec une telle facilité. Il ne lui avait fallu que deux semaines pour s'imposer.

Auparavant, Emma aurait à peine osé poser un seul pas dans ce manoir. Et voilà que maintenant…

« Hey, tout va bien ? »

Regina tourna lentement son visage vers celui d'Emma. Puis, elle le baissa, le regard rivé sur le sol, pétrie de honte.

« Je vais bien, finit-elle par affirmer en un sourire crispé. Je vais juste… rester un peu tranquille ce matin. »

Emma se pinça la bouche. Mais, au lieu de partir, elle s'avança dans la pièce et prit la brosse à cheveux que Regina tenait encore dans sa main. Elle la fixa quelques secondes, puis la posa sur le bord du lavabo avant de soupirer et de se planter face à la reine.

« Je suis désolée, souffla Regina, mal à l'aise. C'est… un véritable enfer, je sème des cheveux derrière moi comme un foutu labrador en pleine mue. »

Emma ne répondit pas. Elle baissa la tête, puis vit Regina s'avancer vers elle. Cette dernière tira le tiroir du meuble sous l'évier et en sortit un ciseau qu'elle finit par tendre à la sauveuse. Emma ouvrit alors la bouche, un peu coite et perturbée.

« Tu… tu es sure ? bafouilla-t-elle.

_ Fais le avant que je change d'avis, grogna Regina. »

Emma resta un petit moment debout face à elle, trifouillant les ciseaux entre ses mains.

« Tu sais, il existe des tas d'alternatives… J'ai vu que tu avais une collections de foulards dont le cout total doit dépasser franchement la somme de mon dernier appart. »

Regina rit un peu vers elle.

« Je peux aussi invoquer quelque chose, utiliser ma magie, suggéra Emma.

_ Et finir avec des cheveux roses ? Hors de question.

_Oh ça va, je suis pas si horrible, lâcha la sauveuse en levant les yeux au ciel. »

Emma s'avança vers Regina qui lui tourna le dos en un soupir. Elle fixa alors son dos, et ses cheveux bruns, le coeur serré.

« Bon, lâcha-t-elle en une expiration tremblante. Par contre, avant, je dois faire un truc. »

Regina leva un sourcil en se tournant un peu.

« Et quoi ? Mettre un tablier ou… »

Regina arrondit le regard d'effroi lorsque Emma retourna les ciseaux contre elle et coupa une grosse partie de ses cheveux pour se faire un carré extrêmement court, juste sous les oreilles.

« Oh mon Dieu mais qu'est-ce que tu fais ?! »

Regina venait de se lever d'un bond et il ne lui fallut que d'un pas pour arriver à la hauteur de la sauveuse. Elle manqua presque de pleurer en voyant ses beaux et longs cheveux blonds tomber dans l'évier. Emma continua, imperturbable, à couper encore et encore.

« En fait, tu vas rire, mais… commença Emma d'un ton léger.

_ Je ne ris pas du tout Emma !

_ La dernière fois, j'ai pensé à ce moment qui finirait fatalement par arriver et j'ai trouvé une coiffeuse.

_ Alors tu t'es dis que c'était une bonne idée de t'essayer à une nouvelle coupe révolutionnaire ? siffla Regina.

_ Pas vraiment, lui glissa la sauveuse. »

Emma tira un autre tiroir, un peu plus bas et en sortit un sac plastique fermé d'où elle fourra ses longs cheveux. Et Dieu qu'il y en avait beaucoup.

« Tu vas devenir blonde, lui balança Emma en gloussant comme une gamine.

_ Quoi ? »

Emma ferma le sachet, puis se tourna enfin vers la reine avec un sourire heureux, mais des yeux brillants.

« Tu pourras toujours les teindre. Mais j'ai trouvé quelqu'un dans Storybrooke qui conçoit des perruques incroyables. Et avec ma longueur, rien ne changera sur toi. On n'y verra que du feu. »

Regina ouvrit la bouche, puis la referma. Elle baissa les yeux vers ce que Emma tenait dans ses mains, complètement soufflée.

« C'était le seul truc dont elle avait besoin pour faire quelque chose de correct…. Tu m'en veux pas j'espère ? »

Emma venait à peine de souffler sa dernière question, le regard brillant. Regina cligna des yeux, encore un peu ahurie. Elle ne savait même pas comment réagir.

« Combien… commença Regina avant de se racler la gorge. Combien de temps tu as mis pour atteindre cette longueur ? »

Emma plissa les yeux, puis prit une inspiration avant de s'appuyer contre le mur.

« La dernière fois que j'ai eu cette coupe, je crois que j'étais en formation, à Boston. Henry devait avoir quoi… trois ans, si mes calculs sont bons.

_ Tu as mis sept ans à retrouver cette longueur ?!

_ A peu de choses près, oui, acquiesça-t-elle. »

Regina voulait la serrer contre elle, là, tout de suite. Elle crevait d'envie de la remercier, voir carrément de s'effondrer dans ses bras sans dignité, sans armure, sans sarcasme.

Mais elle ne bougea pas.

Elle n'en avait pas la force. Et puis… Elle n'était pas comme ça. Regina avait toujours eu du mal à montrer son affection ou sa gratitude, hormis avec son fils.

Ses doigts tremblaient légèrement autour de la manche de son peignoir, alors elle les dissimula dans les plis du tissu. Puis, elle baissa à nouveau les yeux sur le sachet que tenait Emma.

« Tu es folle, murmura-t-elle, presque inaudible. »

Emma esquissa un sourire, pas très sûr.

« Ouais. Je sais. Mais j'ai de beaux cheveux, non ? Ce serait dommage qu'ils servent à rien. »

Emma pencha la tête, attendrie face à la reine. Elle voyait ses hésitations, son regard et laissa échapper un léger sourire.

« On a qu'à dire que tu me dois un bonnet, ok ? demanda-t-elle d'une petite voix pleine de douceur. »

Regina hocha distraitement la tête. Emma laissa échapper un soupir face à son regard fuyant, sa posture tendue et tout ce que son corps montrait.

Elle n'était pas dupe.

Regina était extrêmement touchée par son geste. Ses yeux brillants la trahissaient. Et Emma ne pouvait que trop comprendre son hésitation pour être passe par là elle-même, ce ne sont que les mots de sa mère qui lui ont fait réalisé que cette retenue était un véritable fardeau dont elle devait se défaire.

Elle avait envie, elle aussi, de lui laisser l'espace nécessaire pour faire un pas, mais elle savait également que Regina ne le ferait jamais sans aide.

« Hé, chuchota Emma en avançant d'un petit pas. »

Elle leva sa main, puis finit par presser celle de la reine dans la sienne, et celle-ci réalisa enfin sa proximité en levant son visage.

« Regina, je sais pas à quel stade de la maladie tu es, je… je n'ai pas ton dossier médical sous le coude tu vois… Mais bêtement, avant tout ça, je croyais que ça irait. Que toi, t'irais. Que moi, j'avais plus ma place ici. Et puis… Bref, lâcha-t-elle en secouant la tête. »

Regina resta silencieuse. Alors, Emma prit une inspiration et continua.

« C'est bête, mais avant que tu me balance cette bombe, je croyais vraiment que tu étais immortelle. »

Cette fois, Regina pouffa malgré elle.

« Ne ris pas… Tu as vécu énormément d'épreuves, t'es limite une légende.

_ Arrête, marmonna la brune en croisant ses bras sur sa poitrine.

_ Je veux dire par là que quand tu m'as dis que tu avais ce fichu cancer, j'ai fini par comprendre, difficilement que j'en avais marre de cette retenue idiote entre nous. Et que j'aurais pu me réveiller un beau matin remplie de regrets…

_ Quels genre de regrets ? murmura Regina avec timidité. »

Leurs regards se portèrent sur les lèvres l'une de l'autre. C'était devenu presque un automatisme, depuis quelques temps.

« Je tiens à toi, souffla Emma. Je tiens vraiment beaucoup à toi. »

La respiration de Regina se fit tremblante. Son coeur manqua un battement et elle se trouva incapable de sortir un seul mot. Emma lui serra doucement les doigts et la reine déglutit. Elle savait qu'Emma réagirait à l'annonce. Mais elle s'était attendue à la fuite. Pas à ça.

Elle s'était habituée à la solitude. L'idée qu'Emma soit là, vraiment là, rendait l'envie de se laisser aller presque douloureuse.

« Moi aussi je tiens beaucoup à toi Emma, finit-elle par murmurer. »

Un silence s'installa entre elles.

« C'est vrai ? demanda doucement la blonde. »

Regina hocha la tête.

« Oui. »

Elle lui adressa un sourire discret, presque timide. Emma, elle, souriait plus franchement. Il y avait quelque chose de nouveau dans ses traits. Une forme de soulagement.

C'était un pas, bien plus grand que tout ce qu'elles avaient pu se dire jusqu'à présent. Alors, sans réfléchir, Emma attira Regina contre elle et la serra fort, vraiment fort.

« Je veux pas que tu meures Regina, lâcha Emma, la gorge nouée.

_ Je ne vais pas mourir, ne dit pas de bêtises, répondit la brune avec un rire tremblant, les yeux brillants eux aussi. »

Regina se détacha, juste un peu, et posa sa main sur la joue d'Emma. Sa main glissa jusqu'à la joue d'Emma. Elle sentit une larme et l'effaça doucement du pouce, d'un geste si tendre. En vérité, Regina la trouvait juste… adorable.

« Je teindrais tes cheveux quand même, finit-elle par lâcher en fronçant les sourcils d'un air faussement sérieux. »

Cette fois, le rire d'Emma fut un peu plus franc, même si il était encore teinté d'émotion. Elle ramena rapidement le visage de la brune contre le sien et posa ses lèvres contre sa joue avant de rapidement se détacher.

« Bon, où sont ces ciseaux de malheur ? demanda-t-elle en se passant le plat de la main sous les yeux. »

Chapter Text

Désolée j'avais complétement oublié de donner le contexte car on me la demandé : donc dans cette fic, Emma est mariée à Hook bien entendu. Ils ont changé de monde. Mais ils n'ont pas eu d'enfants. Hope est donc inexistante.


Chapitre 5.

Lorsque Henry était rentré au manoir plusieurs jours plus tard, il avait cligné des yeux face à Emma en voyant sa nouvelle coupe de cheveux. Puis, il passa près de la cuisine et aperçu sa mère avec un foulard en soie autour de la tête, penchée sur un tas de dossiers d'un air concentré.

Son coeur se serra. C'était soudain comme si… comme si ça devenait plus concret.

« Hé gamin, t'as une liste de trucs que tu veux ? »

Henry se tourna alors vers Emma qui venait de le dépasser. Imperturbable, la blonde se posta sur le comptoir, juste en face de Regina, un stylo dans la main, un calepin dans l'autre.

« Quoi ? bafouilla-t-il.

_ Les courses, appuya-t-elle. Quelle question. »

Henry ouvrit, puis ferma la bouche bêtement. Il trouvait cette scène un poil surréaliste, peut-être parce qu'elle transpirait d'une sorte d'intimité familiale qu'elles n'avaient jamais vraiment eu.

Regina ferma son dossier face à elle et se pencha vers Emma, l'air intéressé. Mais celle-ci reprit son papier juste à temps pour que la reine ne le lise pas, non sans lui lancer un regard dissuasif.

« Qu'est-ce que tu fabrique 'man ? marmonna finalement Henry en se dirigeant vers la cafetière.

_ Rien, se précipita à répondre Emma. Je veux juste pas que ta mère lise mes prévisions de repas et se mette à râler.

_ Je ne vais pas râler, répondit Regina en levant les yeux au ciel.

_ Ouais c'est ça. »

Henry pouffa bêtement en sortant un mug du placard juste au dessus de sa tête.

« Bon t'as besoin de rien alors ?

_ Juste du lait.

_ Ok, super. »

Emma se leva de son petit tabouret en un léger sursaut presque heureux. Elle fourra ensuite le papier dans la poche arrière de son jean avant de contourner le ilot central de la cuisine.

« A tout à l'heure, lâcha naturellement Emma à Regina. »

Emma se pencha vers la brune dans l'idée de glisser un baiser rapide sur sa pommette. Sa main se posa naturellement sur sa joue, mais Regina se tourna au même instant vers elle et elle sentit les lèvres de la sauveuse se poser prés de la commissure de sa bouche par inadvertance. Toutes deux surprises, Regina cligna rapidement des yeux. Emma elle, se détacha rapidement, le rouge aux joues.

Henry, qui s'était tourné au même instant vers elle, sentit son regard s'arrondir d'effroi.

« Euh, lâcha Emma en se raclant la gorge. Je… te rejoins à la mairie après.

_ D'acc-d'accord, bafouilla Regina en retournant sur son dossier afin de faire mine qu'il ne s'était rien passée. »

Une nouvelle fois, Emma déglutit et s'agita de nervosité avant de sortir du manoir, les yeux plantés sur le sol.

Henry lui, la regarda sortir, les yeux plissés.

xXx

« Tant pis pour le cours du matin, songea Henry en arrivant à vélo sur le petit parking de la supérette, tout près du manoir. »

Le garçon roula jusqu'à un poteau, et y accrocha rapidement son vélo.

Emma sortait à peine du magasin, les bras chargés de sacs en papier pleins de victuailles plus ou moins utiles. Principalement des trucs qu'elle avait acheté juste pour que Regina mange un peu.

Elle ne vit Henry que lorsqu'il vint s'appuyer contre sa coccinelle dont elle venait d'ouvrir difficilement le coffre.

« Henry ! s'exclama Emma en laissant tomber un sac par inadvertance. Tu m'as fais peur. Je pensais que t'étais parti à l'école. »

Le garçon ne répondit pas tout de suite. Il se contenta de croiser les bras devant sa poitrine et de la fixer. Emma, elle, ramassa les boites de conserve tombés par terre, puis remplit son coffre en fronçant les sourcils face à son mutisme.

« Quoi ? finit-elle par demander en s'arrêtant.

_ C'était quoi tout à l'heure ? demanda-t-il, la voix plus grave qu'à l'accoutumée. »

Emma le fixa, confuse.

« Tout à l'heure ? »

Henry inspira, puis se mordit un peu la langue avant de serrer ses doigts entre eux.

« Qu'est-ce que tu fabrique avec ma mère ? siffla-t-il. »

Emma leva un sourcil.

« Henry…

_ Pourquoi tu fais ça ? la coupa-t-il, un peu sèchement. »

Emma s'interrompit, surprise avant de soupirer.

« Faire quoi ? le questionna-t-elle, un brin agacée elle aussi. L'aider ?

_ Jouer à la famille. »

Emma sentit soudain sa poitrine se serrer. Elle plissa les yeux, blessée.

« Je ne joue à rien du tout, répondit-elle sur le même ton en continuant de ranger les sacs avec un peu plus de vivacité.

_ Tu l'as embrassé !

_ Ne dit pas de bêtises, lâcha la blonde en roulant les yeux. C'était un accident, rien de plus. »

Emma claqua son coffre, puis se tourna complètement vers son fils. Mais celui-ci ne décolérait pas.

« A d'autres, balança-t-il. Tu crois que c'est malin ce que tu fais ?

_ Hé, c'est toi qui m'as demandé de venir je te signale.

_ Et j'en étais très satisfait, surtout quand je l'ai vu reprendre vie comme ça. Mais je t'ai demandé justement de venir pour que tu me file un coup de mains, pas pour… »

Henry agita ses mains, le visage tendu.

« Tu sais pas ce que c'est, toi, de la voir comme je l'ai vu. Elle encaissera pas un truc de plus.

_ Qu'est-ce que tu racontes ? murmura Emma, perdue. »

Henry inspira plus fort, comme pour se donner du courage. Puis, il ferma les paupières afin de rassembler ses idées.

« Tu veux un conseil ? Si tu dois repartir, fais-le vite, trancha-t-il. »

Emma ouvrit la bouche, le souffle coupé.

« Henry…

_ Je suis sérieux, gronda-t-il. Tu sais tout ce qu'elle a perdu. Y'a eu Robin, et d'autres encore avant. Elle n'en supportera pas d'avantage. Et si tu fais tout ça juste parce qu'elle est… malade, si t'es là par pitié ou pour te donner bonne conscience… »

Emma sentit la colère bouillonner en elle. Son estomac se contracta et son poing se serra sans qu'elle ne s'en rende vraiment compte.

« Si c'est pour disparaître quand tout deviendra trop compliqué…

_ Ah parce que c'est déjà pas compliqué là peut-être ? siffla Emma.

_ Nan ça l'est pas, répondit Henry d'un ton plus cassant encore. C'est facile pour toi, tu débarque maintenant, après le diagnostic, après la première chimio, après les pleurs et l'angoisse.

_ Oh Henry, répondit Emma en plissant les yeux de rage. C'est bien trop facile de dire ça quand on n'est pas…

_ Quand on n'est pas quoi ? l'interrompit-il. Quand on n'est pas adulte ? Quand on n'est pas là ? Mais c'est toi qui t'es barré de nos vies je te rappelle ! »

Emma recula d'un léger pas, comme si elle venait de se prendre un coup.

« Franchement, je te connais assez pour savoir que t'as peur. T'as toujours eu peur, alors pourquoi ce serait différent cette fois ? Aie au moins la décence de pas la faire espérer pour rien ! »

Emma empoigna ses clés restées dans sa poche, puis avança vers son fils qui la dépassait désormais d'une tête.

« Ecoute moi bien Henry, accusa-t-elle d'un index dressé vers lui. Tu m'as demandé de…

_ De m'aider, ouais. T'es venu pour me soutenir et pour être tenue au courant, t'es là pour aider, pas pour tout compliquer ! »

Emma ne répondit par rien d'autre qu'un regard glacial, que Henry affronta sans sourciller.

« Si tu l'abandonnes encore une fois de plus, commença-t-il d'une voix rugissante. Tu ne feras pas juste du mal à ma mère. Tu m'en feras à moi aussi, et je te jure que je te le pardonnerais pas. »

Cette fois, la sauveuse se figea.

« T'as pas le droit de me dire ça. »

Henry soutint son regard, sans ciller.

« Si, dit-il en levant le menton. Parce que c'est moi qui resterais quand tu seras reparti. »

Emma laissa échapper une expiration choquée.

« Et j'ai pas envie de la ramasser à la petite cuillère une fois que tu te seras défilé quand tu penseras que tout est résolu, continua-t-il, imperturbable. Alors je te préviens, laisse la tranquille et évite de la détruire une nouvelle fois avec tes… insécurités à la con ! »

Henry tourna les talons sans laisser le temps à Emma de répondre. Elle le regarda s'éloigner sans un mot de plus. Emma le suivit des yeux, la gorge nouée et les nerfs à vif.

Comment… comment pouvait-il…

Emma prit une inspiration, puis serra la mâchoire en détournant le regard de la ruelle derrière laquelle son fils venait de disparaître à vélo.

Elle baissa les yeux vers le dernier cabas en papier à ses pieds. Elle ouvrit sa portière, puis saisit brutalement le sac dans sa main avant de littéralement le jeter sur le siège passager.

Quand elle s'installa derrière le volant et claqua la portière, un silence étouffant tomba dans l'habitacle.

D'un geste rageur, Emma frappa le volant, une fois, deux fois, puis trois, jusqu'à sentir des larmes brouiller sa vue.

Elle aurait voulu hurler.

xXx

Emma tournait en rond comme un lion en cage devant le bureau de Regina. Elle l'entendait griffonner et marmonner dans sa barbe depuis la porte fermée.

Le discours d'Henry l'avait bien plus bouleversé que ce qu'elle voulait bien admettre.

Et elle se posait des questions.

Et si Regina guérissait ? Après tout, c'était envisageable, non ? Elle n'avait pas reçu le diagnostic d'une maladie incurable. Qu'arriverait-il alors ? Repartirait-elle ? Il le faudrait bien… Et alors… Alors Regina serait bouleversée de nouveau, sans jamais vouloir l'admettre. Et Hook ? Ils avaient eu une vive dispute avant qu'elle ne parte, il avait été si furieux qu'elle se précipite au chevet de Regina en un claquement de doigts sans lui demander son avis. Peut-être avait-il cru laisser tout ça derrière eux en quittant Storybrooke. Elle ne pouvait pas lui en vouloir. Comme Henry le lui avait douloureusement rappelé, c'était son choix à elle de s'en aller.

Ou plutôt, de prendre ses jambes à son cou.

« Je t'entends grincer des dents depuis l'autre bout du couloir, gronda soudain Regina. »

La porte de son bureau venait de s'ouvrir plutôt brutalement, et derrière se tenait la reine, l'air d'un ours mal léché.

Emma sursauta, puis tenta de se recomposer, sans grand succès. Regina soupira avant de retourner vers son bureau, laissant la porte grande ouverte. Alors, timidement, la sauveuse entra et referma derrière elle.

Elle vint s'asseoir sur un des sièges en face du bureau, les mains crispées sur ses genoux.

« Ça va ? finit par demander Regina en redressant le visage face à son attitude. Tu as l'air bizarre.

_ Moi ? Bizarre ? »

Regina leva un sourcil face au ton un poil suraiguë qui trahissait la nervosité d'Emma. Alors, cette dernière soupira, puis s'enfonça dans son dossier en croisant les bras sur sa poitrine.

« C'est Henry. »

Regina posa son stylo. Mais Emma elle, préféra fixer le mur à sa droite pour éviter son regard.

« Enfin… pas seulement Henry, mais…

_ Emma, soupira la brune avec une patience un peu lasse.

_ Il a dit que je devrais arrêter de me comporter comme je le fais avec toi parce que je finirais par m'enfuir quand tout ira mieux. »

Elle venait de lâcher ça, comme si elle retenait ses mots dans sa bouche depuis trop longtemps. Regina ouvrit la bouche, puis la referma.

« Il n'a pas tout à fait tord, soupesa-t-elle.

_ Super. Génial. Vous êtes donc d'accord tous les deux. »

Emma se sentit terriblement vexée. Leurs regards se croisèrent, et Regina baissa un peu le sien, l'espace d'une seconde, comme si elle regrettait d'avoir été si franche.

Elle se redressa, cherchant à reprendre contenance.

« Si tu es venue me dire que tu comptes partir, fais-le. Je préférerais savoir maintenant.

_ Quoi ?! Non !

_ Tu as déjà fais beaucoup, et cela fait presque trois semaines que tu…

_ Regina, tais-toi nom d'un chien, je ne partirais pas ! »

Emma avait presque crié. Regina se tut, figée de surprise par son ton.

La blonde reprit alors un peu son souffle, puis ferma les yeux un instant. Le silence qui s'ensuivit leur parut interminable.

« Excuse-moi, souffla-t-elle. »

La reine ne répondit pas tout de suite. Elle la fixait, avec cette manière qu'elle avait de sonder les autres jusqu'à l'os. Emma s'était toujours senti intimité par ce regard. Comme si elle était soudain toute nue face à elle.

« Je voulais juste… être honnête, dit Emma. »

La brune plissa un peu les yeux, comme si elle cherchait à comprendre. Alors, Emma se leva, puis se mit à faire les cents pas.

« Je voulais arrêter de prétendre que tout ça me rend indifférente, tu comprends ?

_ Tout ça… quoi ? »

Emma s'immobilisa, et prit une longue inspiration.

« Toi. »

Regina leva les sourcils. Enfin, Emma s'approcha de son bureau, un peu plus sure d'elle.

« Ta maladie, et moi qui… »

Sa gorge se serra d'un coup, l'empêchant d'aller plus loin. Touchée, Regina soupira. Elle se leva lentement, et contourna le bureau. Elle s'arrêta tout juste face à Emma, encore incapable de la toucher, mais elle croisa les bras et la dévisagea, préoccupée.

« Emma… souffla-t-elle. Je n'ai pas besoin qu'on… dramatise davantage.

_ Ce n'est pas de la pitié, répondit-elle, d'une petite voix.

_ Je sais. »

Regina esquissa un mince rictus réconfortant. Mais il ne parvint pas à apaiser la douleur dans la poitrine de la jeune femme. Alors que Regina s'apprêtait à s'éloigner, Emma, prise d'un élan, lui attrapa le poignet. Regina se figea, les yeux agrandis, mais à sa grande surprise, ne se dégagea pas pour autant.

« Et je ne fais pas ça parce que tu es malade. »

Regina déglutit, trop surprise pour masquer ses émotions. Elle resta immobile, se contentant de la regarder.

« Regina, j'ai toujours voulu… me rapprocher de toi sans vraiment trouver le courage de le faire. Alors ouais, quand j'ai réalisé que je pouvais te perdre, je me suis dis… »

Emma laissa échapper un soupir, puis ferma les paupières.

« Peu importe ce que je me suis dis.

_ Emma…

_ J'en ai marre de jouer à ce petit jeu, pas toi ? »

Regina cligna un peu des paupières. Elle ignorait si elle était prête à se dévoiler de cette façon. Accepter Emma ici tous les jours, la laisser la voir ainsi, c'était déjà tellement.

Jusqu'à maintenant, elle avait été persuadé qu'elle finirait par passer au dessus de tout ça. Mais… et si ce n'était pas le cas ? Et si, demain, les médecins lui annonçaient que les chimio n'avaient servi à rien ?

« Si, finit-elle par souffler malgré elle. »

Sans attendre, Emma lui prit la main et la serra, d'un geste si fort que Regina fut contrainte de faire un pas de plus.

« Regina, je t'aime. »

La reine cligna des yeux plusieurs fois vers Emma. Elle devait rêver, forcément.

« Qu-quoi ? balbutia-t-elle en un rire nerveux.

_ Je le dis jamais assez aux gens. Je ne le dis pas à ma mère, ni à mon fils, ni… mais je t'aime. Je t'aime vraiment. »

Regina manqua d'air, l'espace d'un instant.

Peut-être que c'était des mots qu'Emma ne disait jamais oui, mais Regina au même titre, ne les avait que rarement reçu.

Elle ne savait pas comment réagir, elle n'en avait pas l'habitude. Machinalement, ses yeux se baissèrent sur leurs mains jointes. Emma sentit son coeur battre à s'en rompre la poitrine et la panique s'insinua dans ses veines. Peut-être avait-elle était trop loin.

« Euh, pardon. »

Regina releva les yeux, insondable.

Le silence pesait encore si lourd qu'Emma crut qu'il allait la broyer vivante.

« Tu n'es pas obligé de répondre, se précipita-t-elle à rajouter, la voix tremblante. »

Et voilà qu'elle s'enfonçait. Merveilleux.

De nouveau, la reine leva un sourcil ce qui fit déglutir Emma. Alors, elle lâcha sa main maladroitement.

« Je ne voulais pas dire ça pour te… compliquer la vie. »

Emma attendit une seconde et si elle l'avait fait une seconde de plus, elle jurait qu'elle aurait été capable de balancer une autre bêtise.

« Tu pense que tu me complique la vie ? demanda Regina en un souffle. »

Le coeur d'Emma battit un peu plus fort.

« Non… Enfin, ouais. Je sais pas. »

Lorsque la blonde baissa les yeux, le coeur de Regina se serra. Et elle n'osa s'attarder sur la pensée qu'elle la trouvait adorable.

« Je suis contente que Henry t'ai demandé de venir, murmura la brune. »

D'un geste soudain, Emma releva la tête, l'air ahuri.

« Ça m'a soulagé, osa-t-elle enfin avouer. Je vais mieux depuis, moralement. Et physiquement.

_ Vraiment ? »

Regina hocha la tête en un sourire qui fut cette fois, communicatif.

« Quant à ce que tu as dis tout à l'heure… »

Emma retint son souffle.

« Eh bien… c'est… lâcha Regina en cherchant plus ou moins ses mots.

_ Ouais, je sais, répondit Emma, gênée en se massant l'arrière de la nuque. »

De nouveau, un silence passa.

« J'ai jamais été douée pour ce genre de trucs. »

Regina ne put s'empêcher de pouffer de rire, mais Emma sourit malgré elle.

« Tu compte recommencer ?

_ J'en sais rien moi, pourquoi ?

_ Pour que tu me prévienne avant. »

Emma laissa échapper un petit rire.

« D'accord. La prochaine fois, je t'enverrai un SMS de mise en garde.

_ Merci. C'est… apprécié. »

xXx

Emma attendait devant le porche de la maison de ses parents, tapotant son téléphone dans ses mains en tournant en rond.

Le message qu'elle avait reçu une heure plus tôt était toujours affiché dans ses notifications.

« Killian est ici. Il te cherche. Préviens-moi si tu veux que je lui parle à ta place. »

Elle n'avait pas la force de le voir, pas maintenant.

Depuis cette terrible annonce concernant Regina, Emma avait l'impression d'avoir mis cette vie entre parenthèse. Et à sa grande surprise, elle n'avait pas franchement envie d'y retourner.

Killian ne lui manquait pas. C'était comme si elle l'avait viré de son coeur en un geste pour se consacrer pleinement à Regina. C'était injuste, oui, peut-être. Mais elle n'avait ni la force physique, ni mentale pour l'affronter.

Néanmoins, elle était venue jusqu'ici pour le faire quand même, car elle n'avait aucune envie d'accueillir le pirate au manoir et d'emmerder Regina avec ses problèmes de couple.

Emma inspira une grande bouffée d'air frais, puis toqua enfin à la porte.

Lorsque Snow lui ouvrit, cette dernière lui offrit un rictus gêné, puis se recula pour la laisser entrer. Rapidement, Emma vit son mari assis sur le bord du canapé du salon, les coudes appuyés sur ses genoux. Il se leva alors d'un bond à son arrivée.

« Oh euh… salut

_ Salut, répondit Emma. »

La jeune femme ne comprit pas tout de suite sa surprise, jusqu'à réaliser qu'elle avait coupé ses cheveux. Elle les trifouilla alors nerveusement.

Un silence s'en suivit, si pénible que Snow s'éclipsa rapidement de la pièce sous l'excuse bidon de lancer une machine.

« T'as changé de coupe.

_ Ouais.

_ Ça te va… bien. »

Il n'en pensait pas un mot, mais Emma se mordit les lèvres pour se retenir de donner une réponse un peu trop acide.

« Merci, balança-t-elle sans grandes convictions.

_ Tu aurais quand même pu prévenir. »

De nouveau, cette tension dans l'air le rendit presque irrespirable.

« Mais tu… m'en veux encore, je suppose, marmonna-t-il. »

Emma plissa les yeux vers le pirate.

Lui en vouloir était peu dire. Il était tout bonnement pété les plombs à son départ.

« Ecoute…commença-t-il.

_ Je sais pas si je veux en entendre plus, évita-t-elle.

_ Comprends moi merde ! Regina fait partie de ta vie depuis le début Emma, je croyais que tu voulais passer à autre chose !

_ C'est Henry qui a eu besoin de moi, tu crois vraiment que j'aurais ignoré l'appel à l'aide de mon fils ? Je l'ai déjà abandonné une première fois, il est hors de questions que je recommence.

_ Et qu'est-ce qu'il voulait ? demanda Killian en croisant les bras sur sa poitrine. »

Emma évita d'emblée son regard. Elle aussi, se mit dans une posture défensive et se mordit l'intérieur de la bouche.

« Rien.

_ Rien ? répéta-t-il d'un ton légèrement amer. »

Emma haussa les épaules, incapable de le regarder.

« Juste… il avait besoin de moi, c'est tout. »

Il était hors de questions de tout lui dire, à propos du cancer de Regina et de tout le reste.

« Et moi ? soupira-t-il. »

Emma sentit sa poitrine se serrer. La situation la mettait en colère, même s'il n'y pouvait rien. Elle ne pouvait s'empêcher de le voir là, face à elle, en pleine capacité de ses moyens, avec une santé de fer et aucun problème hormis l'absence de sa femme dont les raisons ne le regardaient pas. Elle voyait sa question, innocente, comme une intrusion.

« Tu vas rentrer ? finit-il par demander après un soupir las.

_ Non, pas ce soir.

_ Et demain ? »

Emma haussa les épaules.

« J'en sais rien. »

Si, elle le savait. Le cancer de Regina ne se résorberait pas en 24 heures. Et de toute façon, elle ne la laisserait pas seule. Plus maintenant.

Emma hésita un instant à en parler à son mari, mais au vu de sa tête, elle préféra s'abstenir.

Le pirate laissa échapper un rire bref et sans joie.

« Très bien, répondit-il la voix tremblante. Je ne vais pas te forcer de toute façon. »

Il avait l'air très déçu, mais elle ne pouvait pas lui en vouloir. Tout comme elle ne pouvait pas lutter contre son besoin irrépressible de vérifier l'heure sur sa montre. La maladie de Regina avait comme, déclenché quelque chose en elle.

« Moi, je resterais ici.

_ Quoi ? »

Une panique soudaine coula le long de l'échine d'Emma. Elle ne voulait pas qu'il voit Regina, qu'il comprenne ce qu'il se passe.

« J'ai ramené le Jolly Rogers, je vais donc rester pour attendre que tu sois prête à rentrer. »

Emma cligna plusieurs fois des yeux. Elle avait le sentiment qu'elle devait trouver une issue, et vite.

« C'est pas la peine tu sais.

_ Qu'est-ce que ça signifie ? demanda-t-il en fronçant les sourcils.

_ Je veux dire… je ne sais pas combien de temps ça va prendre, Killian. Je ne peux pas te dire un jour, ou deux, ou une semaine. »

Hook hocha la tête, sans comprendre pour autant. Tout ce qu'il ressentait, c'était que sa femme cherchait à le chasser. Ce qui l'encouragea plus encore à creuser.

« Et si je reste, ça changerait quoi ?

_ Ça mettrait une pression inutile. »

Emma évita son regard, jouant nerveusement avec la manche de son pull. Mais plus les minutes passaient, plus la situation le plongeait dans une sorte de rage indescriptible.

« Une pression. »

Emma hocha la tête. Hook, lui, se passa lentement une main sur la bouche, puis laissa retomber son bras contre son flanc.

« Tu réalises ce que tu es en train de dire ?

_ Killian, ce n'est pas contre toi.

_ Donc je suis quoi ? De trop ? Un poids ? continua-t-il.

_ Ce n'est pas ce que j'ai dis.

_ C'est exactement ce que tu as dis. »

L'homme serra le poing et Snow choisit cet instant précis pour entrer dans la pièce. Elle s'arrêta à mi chemin, avec un plateau dans les mains comprenant une grande théière pleine, ainsi qu'un jeu de tasses et un bocal de sucres en morceaux.

« Hum, je peux… je peux repasser plus tard. »

Le couple se tourna vers elle d'un bloc. Et Snow se ratatina plus encore sur sa petite personne.

« Je… croyais que vous aviez fini, balbutia-t-elle.

_ On a fini, répondit le pirate d'un regard noir.

_ Killian…

_ Non ? »

Emma se pinça la bouche, puis recula d'un pas.

« Si… si, on a fini, approuva-t-elle à demi mot. »

Killian laissa échapper un soupir désabusé, puis s'excusa brièvement auprès de Snow avant de s'en aller. Jusqu'à son départ, Emma se frottait mécaniquement le bras.

Lorsque la porte d'entrée claqua derrière le pirate, Snow se tourna vers sa fille, l'air interrogateur.

« Tu ne lui as pas dis ?

_ Non, souffla la blonde.

_ Mais… pourquoi ? »

Emma leva lentement sa tête vers elle, oubliant enfin sa gêne passagère.

« Tu me pose sérieusement cette question ? souffla-t-elle. »

Snow fronça les sourcils, posant le plateau sur la table basse sans faire de bruit.

« Je… je pensais qu'il avait le droit de savoir.

_ Et ensuite ? Tu voulais qu'il fasse quoi, exactement ? Qu'il débarque au manoir pour lui présenter ses condoléances ? »

Son ton était bien plus sec et acerbe que ce qu'elle aurait voulu. Mais elle ne pouvait s'en empêcher.

Killian n'avait aucun droit sur Regina, aucun. Emma tenait à tout prix à garder ce huit-clos, parce que c'était ce que Regina voulait. Elle n'avait pas besoin de sa pitié.

« J'ai pas envie qu'il sache, c'est tout. »

Snow soupira, puis posa ses mains à plat sur le tablier qu'elle avait noué sur sa taille.

« Qu'est-ce que tu vas faire ?

_ Je vais rentrer au manoir, acquiesça Emma.

_ Ce soir ?

_ Oui. »

Snow la fixa un moment, visiblement partagée entre l'inquiétude et une résignation qu'elle n'osait pas avouer.

« Si tu changes d'avis… si tu veux rester ici…

_ Je ne veux pas. »

Elle n'avait même pas réfléchi avant de répondre. C'était sorti d'un bloc.

Snow se pinça les lèvres, puis baissa les yeux.

« D'accord. »

Le silence retomba, plus gênant encore que celui de tout à l'heure.

Emma inspira profondément, attrapa la poignée de la porte et la poussa, sans se retourner.

« Emma… murmura Snow, une dernière fois.

_ Bonne nuit maman, la coupa-t-elle, la voix rauque. »

Et elle sortit.

Chapter Text

Chapitre 6.


Quand Emma poussa la porte du manoir, elle le fit en retenant un grognement de mécontentement dans sa gorge. Elle balança son sac sur la table en verre de l'entrée sans aucun ménagement.

Il était presque minuit lorsque Emma regarda rapidement sa montre. Sauf qu'elle remarqua bien vite la lumière qui filtrait depuis le bout de l'entrée, juste vers le fond de la cuisine.

Alors, la blonde fronça les sourcils. Elle espérait que Regina ne sois pas en train de faire une sorte d'insomnie.

« Regina ? appela-t-elle doucement. »

Son absence de réponse fit monter son angoisse d'un cran et un frisson glacé lui parcourut l'échine. Emma jeta un dernier coup d'oeil rapide au portemanteau d'où la veste noire de la brune était accrochée. Alors, elle avança dans le couloir, le coeur battant.

« Hé Regina, c'est moi. »

Emma parvint jusqu'à la cuisine, mais se figea dans l'entrée.

Regina s'était assise à même le sol, recroquevillée contre elle-même. Son visage était si pâle et sa respiration courte. Elle ne portait qu'un pyjama, si léger et pourtant, ses cheveux collaient à son front par la sueur.

Les yeux d'Emma s'arrondirent d'effroi avant qu'elle ne se précipite pour s'agenouiller face à elle.

« Regina, hey ! Ça va ? »

Les paupières de la brune papillonnèrent soudain vers elle, comme si elle remarquait enfin sa présence. Sans réfléchir, Emma posa sa main sur son front puis sa joue.

Elle était brûlante.

« Tu as de la fièvre, dit-elle gravement. »

Emma prit en coupe le visage de Regina. La reine ne parvint pas à se recomposer. En fait, elle commença à pleurer doucement, sans réussir à le cacher plus longtemps. Elle avait voulu se débrouiller seule ce soir, ne pas faire appel ni à Henry, ni à Emma. Mais elle s'était sentit soudain mal… Et…

Emma attrapa un torchon propre tout près du plan de travail. Elle se leva et l'humidifia avant de le passer lentement sur son visage.

« T'es dingue, pourquoi tu m'as pas appelée ? demanda la sauveuse avec douceur.

_ Tu étais… occupée et…

_ Tu es tombée ? Tu n'as rien ? s'inquiéta Emma en l'inspectant sous toutes les coutures.

_ J'ai voulu me lever oui, mais…

_ Depuis combien de temps t'es là ? continua la blonde sans tenir compte des maigres protestations de la reine.

_ Je ne sais pas. »

Emma passa sa main autour de sa taille, cherchant à l'attraper, mais Regina gémit de douleur.

« Tu crois que tu peux t'appuyer sur moi ? »

Soudain, les yeux de Regina se plongèrent dans ceux d'Emma et elle ouvrit bêtement la bouche, sans qu'aucun son n'en sorte. Emma, elle, sentit le regard de Regina accrocher le sien, comme si sa question résonnait plus loin qu'elle ne l'avait prévu. Mais ce devait être la fièvre. Un silence s'installa entre elle, où Emma craint presque que Regina entende son coeur battre tant il raisonnait dans ses propres oreilles.

« Oui… oui je peux. »

La blonde déglutit, puis se secoua la tête. Regina se racla nerveusement la gorge, puis inspira. Lorsque Emma la souleva, elle sentit ses jambes trembler et elle eut si peu de force pour se porter que Emma le fit presque entièrement à sa place.

« On va sur le canapé. »

Regina se laissa guider sans protester. Quand elles arrivèrent au salon au prix de nombreux efforts, Emma l'installa pourtant sur le sofa avec une douceur inégalée malgré son dos en compote.

Puis, la blonde se tourna rapidement sur elle-même et choppa une bouteille d'eau dont elle versa le contenu dans un verre à proximité, les mains si tremblantes qu'elle manqua d'en renverser la moitié sur le tapis.

« Tiens, bois. »

Regina la remercia du bout des lèvres. Elle n'osa témoigner de son soulagement qu'Emma soit arrivée à cet instant précis.

Elle n'avait pu se résoudre à lui dire qu'elle était restée au moins deux heures, assise à même le carrelage, à chercher un semblant de fraicheur quelque part sans parvenir à se relever toute seule.

Elle avait le dos et les jambes ankylosées.

« Je vais t'aider à monter, viens, souffla Emma.

_ Non, protesta Regina d'une petite voix, presque plaintive. »

Emma leva les sourcils de surprise. Alors, Regina se racla la gorge, et réussi à poser son verre, non sans difficulté tant ses mains tremblaient.

« Je… je ne veux pas… je ne peux pas me relever, rectifia-t-elle. Pas tout de suite. »

Emma réfléchit un instant, les lèvres pincées. Puis, elle soupira, résignée.

« D'accord. Alors, on va rester ici. »

Emma se leva puis, mit quelques coussins ça et là avant d'activer un système à l'arrière pour allonger un peu plus le dossier du long canapé. Ce n'était pas un clic clac, elles n'auraient donc pas le confort d'un lit, mais c'était mieux que rien.

« On ? Comment ça, on ? demanda Regina en la regardant faire sans trouver la force de l'en empêcher.

_ Je vais rester avec toi, balança Emma en haussant les épaules. »

Regina ouvrit la bouche, puis regarda la sauveuse s'asseoir sur le petit fauteuil juste à côté. Elle se débarrassa de ses bottes.

« Emma, ce n'est pas nécessaire, souffla-t-elle.

_ Si, ça l'est.

_ Je vais bien, insista Regina sur un ton néanmoins, loin d'être convainquant.

_ Hé, je t'ai retrouvé sur le sol de ta cuisine, tu es bouillante de fièvre alors que tu as le système immunitaire en vrac. »

Emma se leva d'un bond et se débarrassa de son jean d'un geste sec. Elle avait chaud, elle était épuisée, et n'avait aucune patience pour les protestations de Regina.

« Je peux prendre le fauteuil, balança-t-elle enfin en posant ses mains autour de ses hanches. »

Regina ouvrit la bouche, puis papillonna du regard avant de le détourner.

« C'est… c'est idiot, bafouilla-t-elle.

_ Ouais, je suis une idiote, têtue, envahissante et pénible. Bla bla. »

Emma ne la laissa pas répondre. Regina, recroquevillée désormais sur le côté, n'eut pas non plus la force de la retirer lorsque Emma se glissa derrière elle. Son corps se colla contre le sien, par la force des choses, même si elle prenait toutes les précautions du monde pour ne pas l'écraser.

« Si tu veux que je te laisse un peu plus d'espace, dis-le. Et si tu entends boum, ce serait probablement moi qui me sera retrouvée par terre. »

Regina ne put s'empêcher de pouffer un peu.

Elles restèrent un moment sans rien dire. La respiration de Regina était encore un peu saccadée. Celle d'Emma se calait presque instinctivement sur la sienne.

Puis, Regina se retourna comme elle le put.

« Tu vas te faire mal au cou comme ça, murmura-t-elle. »

Emma laissa échapper un petit rire fatigué. Puis, elle ferma les paupières. Son bras était posé derrière sa propre tête dans une positon très inconfortable.

« J'essaie de ne pas t'écraser. »

Regina se mordit l'intérieur de la bouche. Puis, elle ferma les paupières et prit une inspiration.

« C'est bon, souffla-t-elle vers elle. Tu peux venir plus près.

_ Tu es sure ? »

Regina se retourna suffisamment pour lui adresser un léger rictus encourageant, et gêné à la fois. Elle hocha lentement la tête. Timidement, Emma s'approcha alors d'elle et sa poitrine effleura le dos de Regina. Son bras se glissa naturellement autour d'elle et sa main vint pendre mollement près de son ventre.

Regina ferma les yeux et se sentit déjà partir, tant elle était épuisée. Et pourtant, sereine à la fois, malgré la fièvre.

Elle sentit l'autre main d'Emma chercher son visage, juste pour contrôler sa température sûrement. Regina se laissa faire, et ne protesta pas, y compris lorsque les doigts d'Emma dégagèrent les quelques mèches de cheveux collées contre son front.

« Emma, murmura Regina d'une voix fatiguée.

_ Oui ? souffla la blonde d'un air concerné.

_ Tu ne vas pas repartir, hein ? »

Le coeur d'Emma fit un bond minuscule. C'était idiot. Regina avait déjà les paupières fermées. Sans doute ne se rendait-elle même pas compte de ce qu'elle disait. Pourtant, Emma se permit de lui caresser la joue en l'effleurant de ses doigts.

« Non, je ne repartirais pas, murmura la sauveuse. »

xXx

Dans son sommeil, Emma avait anticipé les mouvements de la brune. Plus tard, dans un demi-tour maladroit, elle se retrouva face à elle, leur souffle mêlé. Emma l'avait rattrapé juste à temps et elles s'étaient bêtement retrouvé dans les bras l'une de l'autre.

Emma s'était définitivement endormie avec des inspirations chargées du parfum de la brune et celle-ci, le nez fourré dans son cou, parvint à calmer ses cauchemars habituels en calant sa respiration sur la sienne.

Néanmoins, les rideaux non tirés avaient laissé filtré la lumière de trop bon matin à travers la pièce et Emma grogna en serrant la brune contre elle lorsqu'elle sentit le sommeil lui échapper.

Regina quant à elle, en fit de même, tiraillée par une terrible migraine.

« Je t'emmène au lit, marmonna Emma, encore ensommeillée. »

Regina se contenta de hocher la tête, les paupières refusant de s'ouvrir. Elle sentit le bras d'Emma prendre le sien pour le mettre autour de ses épaules. Elle tenta d'aider la sauveuse en se portant elle-même comme elle le put.

A l'aveugle, elle laissa Emma la guider, marche après marche, jusqu'à retrouver l'obscurité et l'odeur habituelle de ses draps.

Emma l'allongea alors sur son matelas et son oreiller, remontant une couverture légère sur elle. Regina n'avait même pas eu la force d'ouvrir les yeux tout ce temps.

« Reste, souffla-t-elle. »

Emma, qui s'apprêtait à partir, se retourna vers elle et resta plantée là, surprise. Regina lutta pour entrouvrir les paupières, juste un peu.

« Reste, répéta-t-elle d'une voix faible. »

A tâtons, Regina chercha la main d'Emma. Celle-ci la regarda faire quelques secondes, hébétée. Puis, elle secoua la tête, incrédule lorsque Regina parvint à atteindre ses doigts.

« D'accord, répondit-elle sans même s'en rendre compte. »

La reine, sans doute déjà partie dans les bras de Morphée, réalisa à peine que son matelas venait de s'affaisser derrière elle. Puis, un bras se retrouva de nouveau autour de sa taille et elle soupira d'aise. Elle ne se souvenait plus de la dernière fois où quelqu'un était resté ainsi, sans qu'elle n'ait à supplier ou à s'excuser. Alors elle sourit faiblement dans le vide avant de sentir le sommeil la rattraper.

Elle ne se réveilla que bien plus tard ce matin-là. D'abord, elle prit conscience de cette chaleur dans son dos. Puis, cette pression, douce sur sa tempe.

Regina mit du temps à émerger. Tout était encore très flou.

Il y avait sa chambre, ses rideaux tirés qui laissaient échapper faiblement les rayons du soleil qui égaillait cette nouvelle journée d'été, et ce silence paisible dans le manoir. Un silence uniquement entrecoupé par la respiration derrière elle qui lui chatouillait légèrement le cou.

Et il y avait cette main, ces doigts qui caressaient son visage en un va et viens, effleurant sa tempe, dessinant les contours de son visage et replaçant les quelques mèches de ses cheveux.

Regina parvint à ouvrir lentement les yeux. Elle avait la gorge sèche, et la tête lourde. Elle se souvenait de ce malaise la veille, et sa fièvre…

Elle se sentait mieux. Ce ne devait pas être grand chose, un léger virus passager tout au plus. Mais son coeur, lui, battait un peu plus fort.

Elle savait que Emma avait sans doute deviner qu'elle s'était réveillée. Alors elle ne dit rien. Elle attendit, juste un peu… histoire de voir si elle continuerait.

Mais Emma n'en fit rien. Elle se dégagea.

Regina réfléchit un instant, puis finit par se retourner entièrement vers Emma et fut surprise de se trouver en face d'elle, si proche. Emma partagea le même sentiment. Regina le sentit, à son souffle coupé et sa façon de la regarder avec ces yeux ronds.

« Désolée, je… je croyais que tu dormais je voulais m'assurer que tu respirais toujours et… et je… »

Emma ne parvint pas à terminer, elle n'avait pas vraiment d'excuse à formuler. Son regard se perdit sur la bouche de Regina qui s'entrouvrit légèrement, la respiration lourde.

« Tu veux que je parte ? demanda finalement Emma en un chuchotement à peine audible. »

La question resta suspendue. Jusqu'à ce que Regina, sans un mot, ne secoue la tête imperceptiblement. La main d'Emma trembla lorsqu'elle se pressa sur la joue de la brune et celle ci se tourna légèrement dans sa paume. Son pouce traça une ligne sur sa pommette et Emma sentit une chaleur bizarre s'étendre dans son abdomen.

« Ça va mieux ? souffla la sauveuse. »

Regina se contenta de hocher la tête cette fois. Elle lui accorda un maigre, très maigre rictus réconfortant. Puis, après quelques secondes d'hésitation, leva la main pour la poser sur celle d'Emma qui était encore contre sa joue.

Leurs doigts s'enlacèrent sans qu'elles ne s'en rendent vraiment compte.

Emma entrouvrit la bouche, prête à dire quelque chose… Mais elle refusait de briser ce moment.

« Merci…, dit Regina d'une voix très basse en fermant les paupières. »

Emma passa sa langue sur ses lèvres. Elle refusait de retirer sa main d'elle. Ses doigts glissèrent ainsi lentement jusqu'à sa mâchoire. Elle avait le sentiment que la situation était en train de lentement dégénérer.

Elles, dans ce lit, en train de se toucher. C'était un cocktail trop détonant. Pire encore, un frisson parcourut les bras de Regina dont le souffle se bloqua un instant dans sa gorge.

Emma elle, inspira longuement, essayant de calmer le rythme de son coeur, et sa poitrine qui montait et descendait avec plus d'ampleur que nécessaire.

« Tu pourras toujours compter sur moi. »

Les paupières de Regina s'ouvrirent pour qu'elle puisse plonger enfin ses pupilles dans celles de la blonde. Elles étaient dilatées, par l'obscurité, comme par l'intensité du moment.

« Tu devrais dormir, finit par conseiller Emma. »

Enfin, sa main se retira avec une douceur insoupçonnée. Mais Regina la retint, juste à temps, à une seconde à peine.

« Je… »

Les mots de Regina restèrent bloqués dans sa gorge. Elle ne pouvait s'empêcher de repenser au moment où Emma lui avait avoué qu'elle l'aimait. Elle aurait aimé le lui dire, elle aussi. Car c'était le cas. Elle tenait énormément à elle. Mais ces mots là, elle ne les avait que trop rarement dévoilé, et ils avaient toujours eu des conséquences funestes.

Emma la regarda sans rien rajouter, comme si elle entendait ce que Regina ne disait pas. Elle se contenta alors d'approcher son visage pour lui donner un baiser plein de tendresse sur sa joue. Les paupières de la brune se fermèrent à ce geste. Elle resta immobile, sa peau encore tiède à l'endroit exact où les lèvres d'Emma s'étaient posées.

« Tu veux que je t'aide à te lever ? Prendre un peu d'eau ? Des médocs ? »

Regina resta un moment silencieuse. D'ordinaire, elle aurait refusé par fierté. Elle l'aurait remerciée sèchement, ou aurait nié tout besoin.

Mais ce matin-là, elle était trop lasse pour mentir. Et surtout… elle n'avait pas envie qu'Emma parte.

Alors, elle hocha la tête, très légèrement.

« Oui… S'il te plait. »

A peine la blonde se redressa-t-elle lentement qu'elle sentit le vide qu'elle venait de laisser à ses côtés.

« Je reviens tout de suite.

_ Emma, l'interpella-t-elle. »

La blonde se tourna vers elle, en penchant la tête.

« Comment… Avec Hook comment ça s'est passé hier soir ? »

Emma prit une inspiration, puis lui accorda un sourire crispé.

« On n'est pas sur la même longueur d'onde.

_ Tu lui as parlé de ce qu'il se passait ?

_ Non. Non, hors de question, nia Emma en secouant la tête.

_ Emma… commença Regina d'un ton las.

_ Il n'a pas à savoir. Personne ne saura, répondit Emma. »

La blonde vint de nouveau s'asseoir tout près de Regina et lui accorda un sourire se voulant réconfortant.

« Tu vas guérir, alors à quoi bon créer un drame inutile ? lui dit-elle en pressant sa main dans la sienne.

_ J'en sais rien Emma, soupira Regina en retombant sur le dos.

_ Moi je le sais, Je t'aime et j'ai un coeur magique. Franchement, t'as de la chance de m'avoir, tu sais ? »

Regina ne put retenir un léger rire amusé. Et Emma lui sourit en levant le menton fièrement.

« Oh oui, j'en suis persuadée, finit par lâcher la brune. »

La sauveuse continua de lui sourire avant de se lever. Regina ferma un instant les yeux à son départ. Elle aurait pu s'endormir là. Mais la fraîcheur de la pièce sans Emma lui semblait presque désagréable.

« Si Henry apprend que je t'ai câliné toute la nuit comme si t'étais mon doudou, il va me tuer. »

Regina sursauta à l'arrivée d'Emma qu'elle n'avait pas entendu revenir. Elle fixa la petite bouteille d'eau tendue ainsi que les seuls médicaments dont elle avait besoin.

« Sans parler de ton mari, répondit la reine.

_ Alors ce sera notre petit secret, finit par répondre Emma en souriant. »

Regina goba le comprimé contre son mal de tête ainsi que celui contre les nausées. Puis, elle soupira et finit par poser sa tête sur le bras d'Emma.

« D'accord, souffla-t-elle. Notre petite secret.

_ Notre petit secret, répéta Emma en posant sa joue sur le haut de sa tête. »

xXx

Emma trifouillait sa salade avec la conviction d'un enfant puni. Face à elle, Snow débitait des phrases sur l'éducation positive, les travaux du potager, et, apparemment un nouveau type de farine de pois chiches qu'elle comptait tester.

Emma, elle, comptait chaque minute qui la séparait de son retour au manoir.

Discrètement, elle sortit son portable pour regarder l'heure. Puis, son doigt ripa sur son application de messages et elle hésita un court instant. Son regard dévia face à elle et à cette… ignoble tarte aux fruits sur le comptoir.

« Dis-moi que tu n'as pas mangé les restes de tiramisu, envoya-t-elle à Regina. »

La réponse arriva presque aussitôt, à sa surprise.

« Je suis malade, pas cruelle. »

Emma ne put s'empêcher de pouffer un peu. Elle se recala contre le dossier de sa chaise.

« Je demandais juste parce que ma mère a fait une tarte.

_ Dieu du ciel. »

Cette fois, Emma rit un peu plus franchement sans remarquer le regard en biais que lui accorda David.

« Tu rentre quand ? reçut-elle. »

Emma leva un sourcil. Cet échange transpirait d'une familiarité peu commune. Mais elle se sentait tout à fait capable de s'y habituer. Discrètement, Emma jeta un regard vers sa mère, concentrée sur la présentation de son dessert.

« Dès que je peux m'enfuir. Tu veux que je ramène un truc ?

_ Il y a un reste de mozarella qui traine dans le frigo.

_ Je piquerais des tomates au passage.

_ Merci. »

Emma se mordit la lèvre, puis soupira en tapotant nerveusement son téléphone.

« Qu'est-ce que tu fais ? lui envoya-t-elle. »

Emma prit une inspiration, et manqua de ranger son téléphone avant que celui ci ne vibre de nouveau.

« Je suis en nuisette et je viens d'étendre le linge. »

Emma ouvrit la bouche, à un tel point qu'une mouche aurait pu y rentrer et s'y installer tranquillement. Snow leva les yeux vers elle, intriguée.

« Qu'est-ce qui a ? demanda la princesse. »

Soudain, Emma sursauta, si fort que son téléphone manqua de tomber par terre et elle jongla quelques secondes pour ne pas le faire exploser.

« Rien, rien, bafouilla Emma en fourrant son portable dans sa poche. »

Snow plissa les yeux, suspicieuse, puis continua de parler inlassablement de ses histoires de potager et d'une invasion présumée de cochenilles. Emma ignorait à quoi ressemblaient des cochenilles. Sa tête ne faisait qu'imaginer Regina, affublée d'une nuisette en soie rouge extrêmement courte, en train d'accrocher des tas de culottes en dentelle dans son jardin en levant les bras pour atteindre la corde à linge. Autant dire qu'elle n'écoutait pas un traître mot de ce que lui racontait sa mère.

« Emma, tu es sure que ça va ?

_ Oh, sursauta la blonde. Euh… Ouais. Je… je reviens. »

Emma s'éclipsa lentement de la table, puis fit un petit pas d'accélération avant d'arriver aux WC. Elle s'appuya contre la porte quand elle la ferma, les paupières closes avant de vite sortir son téléphone de sa poche.

« Emma ? avait envoyé la brune il y a sept minutes.

_ Ouais pardon, c'est la tarte. »

Regina, encore au manoir, ricana en s'appuyant contre le chambranle de sa porte de chambre.

« Je vais me coucher, ne fait pas de bruit.

_ Quoi, déjà ?

_ J'ai un rendez-vous à la mairie très tôt demain matin.

_ Oh. D'accord. »

Regina sourit tendrement vers son téléphone. Elle hésita un instant en se mordant la lèvre, puis fixa le mur avant de regarder de nouveau l'écran dans ses mains.

Emma, elle, fixa l'application de message quelque instant. Elle s'apprêta à souhaiter une bonne nuit à Regina, mais sa réponse la figea.

« Je dors du côté gauche du lit. J'ai branché ton chargeur à droite. »

Le coeur d'Emma manqua un battement. Elle resta coite durant quelques secondes, et Regina sentit le stress lui nouer la gorge. Elle s'apprêta à s'excuser, mais Emma répondit tout juste avant qu'elle ne le fasse.

« J'arrive. »

Chapter Text

Chapitre 7.


Regina n'avait jamais été aussi heureuse de se rendre à sa séance de chimiothérapie. Elle était assise à son fauteuil habituel, et répondait patiemment aux nombreuses questions que l'infirmière posait en prenant des notes.

« Et le sommeil ? demanda-t-elle.

_ J'ai très bien dormi la nuit dernière, affirma Regina.

_ Ouaip, reprit Emma. Pas un ronflement. Ça change de la fièvre.

_ La… la fièvre ?

_ C'était peu de choses, ça ne date que de deux jours à peine, balaya la brune.

_ Oh… Vous auriez du me le dire plus tôt…

_ Pourquoi ? s'inquiéta soudain Emma en s'avançant sur son siège.

_ Eh bien, c'est juste qu'on ne va pas pouvoir maintenir la chimio aujourd'hui, répondit timidement l'infirmière.

_ Quoi ?! s'offusqua Regina.

_ C'est trop risqué. Je vous propose de faire une prise de sang pour surveiller vos leucocytes et de repousser cette séance à dans deux semaines.

_ Deux semaines ?! »

Regina était… en colère.

Elle avait tout préparé. Mentalement. Physiquement. Et puis Emma était là. C'était presque devenu une routine, une bulle. Quelque chose de supportable. Et voilà qu'on lui retirait ça.

« Vous plaisantez, j'espère, lança-t-elle d'une voix sèche, en retirant lentement le brassard de tension. »

L'infirmière secoua doucement la tête.

« Désolée. Mais après une fièvre, même légère, on préfère éviter les risques d'infection. On pourra reprogrammer dès que vos résultats seront bons. »

L'infirmière s'éclipsa et Emma se tourna vers la reine qui commençait déjà à rassembler bruyamment ses affaires.

« Hé, c'est juste temporaire, lui souffla Emma en posant sa main sur la sienne. »

Regina soupira, puis tourna son visage vers la sauveuse.

« Vois le bon côté des choses. J'avais trouvé toute une collection de cercueils absolument immondes à te montrer pendant toute ta séance de chimio. Tu as réchappé à ça.

_ Je te demande pardon ?

_ Des cercueils. Attend je te montre. »

Regina ouvrit la bouche, puis suivit du regard le téléphone d'Emma qui afficha un cercueil ignoble en forme de poisson.

« Qu'est ce que c'est que ce truc ?

_ Je sais pas, j'ai trouvé une société qui vend ça. Avec des bougies en coquillage offerte.

_ Tu es malade ?!

_ T'inquiète, y'en a aussi sur le thème de Shrek et Barbie. Avec les fleurs !

_ Oh bah s'il y a les fleurs alors on doit sauter sur l'occasion, ironisa Regina. J'espère que le briquet est aussi inclus en cas d'incinération.

_ Ça me semble évident. »

Regina leva les yeux au ciel.

« J'avais annulé tous mes rendez vous aujourd'hui, grogna Régina en finissant de rassembler ses affaires, fermant le zip de son sac.

_ Tous tes rendez vous ? se redressa Emma.

_ Oui ! Quelle perte de temps. »

Mais le sourire espiègle d'Emma la fit plisser le regard.

« Quoi ? finit-elle par lui demander.

_ On pourrait en profiter.

_ Comment ça ?

_ Eh bien Henry est à l'école, tout le monde dans cette ville travaille et il n'est que 11h30.

_ Rectification : tu pourrais justement saisir l'occasion pour aller voir ton mari.

_ Pourquoi faire ? Ecoute… »

Regina leva un sourcil et Emma s'avança dans son siège.

« On rentre, on s'enferme à double tour, et on se fait une après midi détente avec un bain chaud, une pizza et Dr House ! »

Regina fixa Emma d'un air impassible.

« Tu as un réel problème avec cette série télévisée depuis que j'ai eu le malheur de t'emmener ici.

_ Et toi, t'es une rabat joie. »

Regina pouffa un peu. Puis, elle prit une inspiration.

« D'accord.

_ D'accord ? répéta Emma, un poil excitée.

_ Mais pas de Dr House. »

xXx

Emma faisait lentement couler l'eau dans la baignoire, naviguant son regard sur les produits de soins tout autour dont elle lisait la composition pour passer le temps.

Elle ouvrit un des flacons en verre et y passa son nez avant d'acquiescer.

Les sels de bain sentaient les fruits rouges.

Elle en versa alors une poignée et observa des tourbillons de paillettes se former dans la baignoire.

« Emma ! »

Regina venait de gronder son prénom en entrant dans la salle de bain sans s'annoncer.

Elle avait l'air en rogne.

Mais en réalité, ce n'est pas tout à fait ce qui interpella la blonde, qui se retrouva bêtement la bouche ouverte.

Regina s'était plantée face à elle, parée d'un peignoir sombre extrêmement court, à peine nouée sous lequel sa poitrine se devinait.

Ses longues jambes élancées, et ce vêtement qui tombaient à peine sous la forme de ses fesses rendirent Emma complètement muette.

Regina, inconsciente de son trouble, porta ses mains sur ses hanches d'un air autoritaire.

« Tu as vu tout ce que tu as commandé ? Trois pizzas, quatre pots de glace, une portion de frites et deux bouteilles de soda ! »

La bouche d'Emma s'ouvrit et se ferma comme celle d'un poisson.

« Je t'ai fais coulé un bain, finit-elle par balancer devant le regard insistant de Regina qui ne se rendait définitivement pas compte de son accoutrement.

_ Oh. »

Elle se sentait bête, maintenant.

Regina fit un pas et jeta un regard vers la baignoire avant de se mordiller l'intérieur de la bouche.

« Merci, fit-elle, un peu plus douce, comme prise de court. »

La façon dont la brune venait de croiser ses bras dans son dos fit ressortir les courbes de son corps. A cette pensée, Emma bondit sur ses pieds. Son genou heurta le rebord de la baignoire, la faisant tomber par terre en une complainte douloureuse. Regina se précipita, les mains sur elle en un éclair.

« Emma ! »

La blonde prit place sur le rebord de nouveau, en se frottant le coude, puis le genou. Regina s'agenouilla immédiatement à son niveau. Le bain était si chaud qu'une vapeur se formait dans la pièce et se déposait sur sa peau devenue moite. Elle paniqua, et toucha son front et ses bras.

« Ca va ?

_ Ouais… ricana nerveusement Emma.

_ Tu es fatiguée, tu ferais mieux de te reposer…

_ Non, non ça ira, souffla-t-elle.

_ Emma, insista la brune.

_ C'est moi qui prends soin de toi, pas l'inverse.

_ Ne dis pas de bêtises, murmura-t-elle.

_ C'est pas des bêtises, grogna Emma en se redressant. »

Regina la regarder masser sa peau avec un mélange de contrariété et d'inquiétude. Elle prit une inspiration, puis se releva à son tour.

« Tu devrais rester là. »

Lentement, Emma leva le visage et fixa la brune, incrédule.

« Quoi ?

_ Je suis sérieuse. Si tu pars et que tu te cogne dans un autre coin du manoir, c'est moi qui vais m'inquiéter. Et je n'ai pas la tête à ça. D'ailleurs, je me sens fatiguée, alors je préférais que tu restes, ajouta la brune.

_ D'acc… d'accord, balbutia Emma pendant que ses paupières papillonnaient de surprise. »

Regina se retourna et attrapa une serviette propre pour la poser non loin. Elle desserra la ceinture de son peignoir, mais ne le retira pas encore. Et Emma détourna le visage juste à temps, les joues rouges.

« T'as vraiment toujours eu une façon très bizarre de demander de la compagnie. »

Emma entendit Regina rire un peu. Elle se leva et ne se résout à se retourner que lorsqu'elle entendit le léger clapotis de l'eau. La brune était désormais immergée, la mousse et la vapeur recouvraient presque tout, mais ce qu'elle voyait suffisait à lui donner des idées qu'elle n'avait aucune intention d'avoir. Enfin… Théoriquement.

Regina finit par soupirer de lassitude en tournant son visage vers elle alors qu'elle la voyait plantée là, presque vacillante.

« Je vais m'asseoir là. Mais… juste un moment, ok ?

_ Bien sûr, répondit Regina d'une voix un peu plus basse. »

Emma soupira tout en s'exécutant, mais préféra toutefois s'asseoir à même le sol, histoire de ne pas avoir une vue trop.… plongeante. Son visage se retrouva alors à la même hauteur que celle de la reine. Elle avait fini par croiser les bras sur sa poitrine, cherchant à reprendre contenance. Chaque bruit de l'eau lui paraissait exagérément intime. Elle n'osait plus bouger. Pas même respirer trop fort.

« Tu veux… parler de quelque chose ? demanda Regina d'un ton se voulant décontracté en passant sa main sur la mousse en surface.

_ Parler ?

_ Oui. Après tout, tu avais l'air douée, tout à l'heure, pour faire la lecture des ingrédients sur les flacons. »

Emma pouffa et finit par soupirer en prenant de nouveau un gel douche pour lire la notice. Regina s'approcha d'elle d'un air espiègle en faisant légèrement soulever l'eau autour d'elle.

« Ça dit qu'on doit s'en servir pour se laver, lui glissa-t-elle en un murmure.

_ Et rincer le tout de préférence, ajouta Emma. »

Regina rit de nouveau avec douceur et Emma réalisa que son visage n'était qu'à quelques centimètres du sien. La brune posa son menton sur le rebord de la baignoire.

« Je suis contente de ne pas avoir eu ma chimio aujourd'hui, chuchota Regina.

_ Moi aussi, répondit Emma sur le même ton en prenant sa main trempée dans la sienne. »

Regina lui sourit en posant sa joue sur son bras plié sur la baignoire.

Emma sentit son coeur rater un battement. Alors, elle se leva un peu précipitamment.

« Je, je vais te laisser prendre ton bain et… »

Regina se redressa un peu, comme pour la retenir. Dans son geste, elle glissa et Emma arrondit le regard.

« Wow, Regina ! »

La blonde chercha à la retenir par les bras, mais Regina l'entraina malgré elle. Emma tenta de résister mais ses pieds glissèrent sur le sol mouillé et elle bascula entièrement en avant.

Un grand splash résonna alors dans la pièce.

L'eau gicla hors de la baignoire dans un chaos de mousse et de paillettes roses. Emma, tout habillée, se retrouva à moitié assise sur Regina, trempée de la tête aux pieds, la respiration coupée. Elle se redressa soudain en une aspiration choquée, le visage dégoulinant. Les deux femmes haletaient, figées, les yeux agrandis par la surprise.

« Oh. Bor-del, articula Emma en s'essuyant les yeux des restants de mousse. »

Regina ouvrit la bouche et la referma.

Puis elle éclata de rire. Un rire court, nerveux, mais terriblement contagieux.

Emma, les cheveux dégoulinants, les cuisses immergées dans l'eau chaude, fronça les sourcils.

« Tu trouve ça drôle ? »

Regina secoua la tête en riant encore, puis laissa retomber sa tête contre le bord de la baignoire. Alors, sans réfléchir, Emma lui balança une énorme vague d'eau à la figure et Regina s'arrêta instantanément en laissant échapper un cri choqué.

Son mascara venait de couler le long de ses joues et Emma ne put s'empêcher d'éclater de rire à son tour.

« Emma !

_ Tu verrais ta tête ! »

Regina se redressa alors et lui tira le bras pour l'enfoncer plus encore dans l'eau, sans tenir compte de sa nudité ni de tout le reste. Le débardeur et le jean de la blonde collaient à sa peau et elle ne faisait que glisser sur l'email. Emma coula à moitié contre elle, son genou heurtant la paroi, ses doigts cherchant appui sans succès. Chaque mouvement les rapprochait un peu plus.

Enfin, Emma finit par se redresser difficilement en se mettant au dessus d'elle. Essoufflée, elle plaqua ses cheveux en arrière. Les bras de Regina s'étaient machinalement refermés autour de son cou dans sa tentative de la retenir. Emma sentit son cœur cogner dans ses tempes. Elle était littéralement sur elle. Le corps nu de Regina, plaqué… sous elle.

« Désolée, souffla la blonde. »

Regina cligna des yeux, ses cils encore trempés. Son regard glissa lentement vers les lèvres d'Emma.

« Tu vas attraper froid, souffla-t-elle. »

Sa main venait de se poser sur son visage, et son pouce effleurait sa bouche. Le regard de la reine navigua sur son visage, examinant ses traits comme elle ne l'avait jamais fais jusqu'à maintenant.

« Les pizzas vont refroidir. C'est pire. »

Regina rit de nouveau, son regard perdu dans le sien. Ces derniers temps, elle ne pensait plus vraiment au cancer, plus à sa maladie ni à tous ces inconvénients. Et elle se sentait bien malgré la fatigue et le reste. Elle ne s'était même jamais senti aussi bien depuis de nombreuses années.

« Je… articula-t-elle.

_ Tu ? »

Regina ouvrit la bouche, puis la ferma. Puis, elle lui offrit un faible rictus.

« Merci. »

Emma laissa échapper une expiration lourde avant de la fixer, puis de lui sourire tendrement.

« C'est pas ce que tu allais dire.

_ Si, mentit-elle. »

Emma laissa échapper quelques secondes de silence. Puis, elle soupira et chercha à s'éloigner. Mais Regina se redressa sur les coudes à la place, comme pour l'en empêcher.

« Je t'aime. »

Elle venait de dire ces petits mots à une vitesse presque surréaliste. Emma resta figée une demi seconde avant de se pencher pour lui donner un baiser sur la joue. Un geste un peu plus long qu'habituel qui fit fermer les yeux à la brune.

« Moi aussi, entendit-elle près de son oreille. »

xXx

Regina avait les deux mains posées autour de son mug de thé fumant. Son regard était rivé sur le journal ouvert en deux, pile sur le ilot de la cuisine.

Henry quant à lui, mangeait toujours cet énième bol de céréales qu'il ingurgitait comme chaque matin depuis ses six ans.

Lorsque Emma débarqua, ce fut à une vitesse ahurissante. Regina leva à peine les yeux, le sourcil levé.

« Désolée, je suis à la bourre, je dois… aller chercher des affaires, et après aller au bureau du shérif. Ton rendez-vous est à quelle heure ?

_ Emma, tu n'es pas obligée de…

_ Ton rendez-vous, insista la sauveuse. »

Regina soupira, sans se rendre compte que Henry les observait au dessus de son smartphone qu'il faisait mine de parcourir.

« 10h40, finit par lâcher la brune.

_ Ça va le faire, ça va le faire, répéta Emma, comme pour se convaincre. Je te rejoins là bas. »

Emma glissa son bras au dessus de l'épaule de la brune pour fourrer une tartine de pain dans sa bouche.

« A tout à l'heure. Je t'aime, balança-t-elle sans réfléchir.

_ Oui oui, moi aussi, répondit Regina négligemment, le regard fixé sur un article de son journal. »

Emma pencha sa tête pour embrasser Regina qui elle, tendit inconsciemment sa joue, le regard ne se détachant pas de sa lecture.

Henry les observa, la cuillère à mi chemin vers sa bouche ouverte. Quelques céréales retombèrent en un plop dans son lait qui fit quelques taches sur le marbre. Lorsque sa cuillère tomba définitivement dans son bol, Regina sursauta et fut surprise de tomber sur son visage complètement ahuri.

« Henry, ça va ? s'inquiéta-t-elle.

_ Vous… Vous, vous, commença-t-il à bégayer.

_ Nous quoi ? demanda Regina avec douceur en penchant la tête. »

Henry cligna des yeux, comme s'il venait d'assister à un épisode entier d'une série qu'il avait manqué.

« Vous venez sérieusement de vous dire je t'aime au petit-déj comme si c'était… comme si c'était normal ? »

Emma réapparut dans l'encadrement de la porte, une chaussure à moitié au pied.

« Bah… c'est normal. »

Regina arqua un sourcil, feignant l'indifférence.

« C'est une formule de politesse. Comme "passe une bonne journée". »

Henry ouvrit la bouche, visiblement en train d'essayer d'assimiler cette réalité alternative.

« Donc… vous cohabitez, vous vous embrassez, vous vous dites je t'aime… mais c'est genre, amical ? »

Emma hésita une seconde.

« Ouais ! finit-elle par répondre avec un grand sourire en hochant la tête, ravie »

Puis, elle retourna dans l'entrée pour enfiler sa deuxième chaussure. Henry ouvrit la bouche, prêt à répliquer mais entendit sa mère depuis l'autre bout du couloir.

« Et n'en fait pas tout un plat ! hurla-t-elle en fourrant ses clés dans sa poche. »

De nouveau, Henry s'apprêta à répondre, mais la porte d'entrée claqua et il ne put que grogner. Regina, elle, l'observa du coin de l'oeil, un poil préoccupée.

xXx

Regina tournait en rond comme un lion en cage devant l'entrée de l'hôpital. Lorsque Emma arriva comme un boulet de canon à sa hauteur, elle la fusilla du regard.

« Bon sang, mais qu'est-ce que tu…

_ Désolée, articula-t-elle difficilement, à bout de souffle. »

Emma s'appuya sur ses genoux pour reprendre une respiration normale. Elle avait courut, littéralement, depuis l'autre bout du parking.

C'est qu'elle avait du aller sur le Jolly Rogers pour récupérer quelques affaires, et bien évidemment, Killian lui avait prit la tête. A base de leçon de morale sur le mariage, et d'un interrogatoire pénible pour savoir s'il lui manquait ou non.

Emma avait du l'éviter comme la peste, sans grand succès. Elle trouvait ses inquiétudes si… si dérisoires, comparées à la situation que vivait Regina. Elle avait le sentiment qu'il se plaignait sur son pauvre sort alors que… alors que Regina elle, restait si droite et fière malgré le contexte absolument catastrophique qui se profilait.

Cela avait le don de l'irriter particulièrement.

Autant dire qu'elle avait eu tout juste le temps de fourrer ses affaires dans son coffre, en les poussant jusqu'à ce qu'elle puisse le fermer. Et qu'elle avait raté son rendez-vous au bureau du shérif.

« J'aurais pu y aller seule, souffla Regina.

_ Hors de questions. »

Regina prit une inspiration, puis entama la marche.

Cette fois, elle ne l'amena pas vers la chambre habituelle utilisée pour la chimio.

Un collègue du Dr Whale, un vieux médecin aux cheveux grisonnants, les attendaient dans son bureau. Ici, l'odeur qui planait ressemblait plutôt à celle du café froid et du désinfectant, moins fort que dans le service d'oncologie. Le docteur Morel feuilletait le dossier devant lui. Il fronça légèrement les sourcils, fit glisser ses lunettes plus haut sur son nez, puis releva les yeux à leur arrivée.

En silence, Regina prit place face à lui après une excuse prononcée à demi mot sur leur retard. Emma elle, en fit de même.

« Madame Mills, la salua-t-elle. »

Regina lui offrit un sourire crispé. Elle n'aimait pas ces moments. Elle avait l'impression de passer un examen scolaire. Le médecin prit de nouveau son dossier dans ses mains et prit une inspiration.

« Bon. Vos analyses sont plutôt bonnes, dit-il enfin. Les marqueurs tumoraux ont baissé, c'est très encourageant. »

Le coeur d'Emma battait la chamade. Elle semblait pendue aux lèvres du docteur. Un léger sourire se dessina sur son visage. La tumeur avait régressé… La chimio fonctionnait.

« Il reste deux séances à programmer. Si tout se passe bien, elles concluront la phase de chimiothérapie.

_ Bien, se contenta d'acquiescer Regina. »

Emma sentit l'espoir revenir en elle. Le médecin soupira à peine avant de poursuivre.

« Ensuite, reprit-il, il faudra discuter de l'étape suivante. En l'occurrence… une intervention chirurgicale. »

Il marqua une pause. Regina leva lentement le menton.

« Quel genre d'intervention ? demanda-t-elle d'une voix mesurée.

_ Une mastectomie, répondit le médecin. Partielle ou totale. Nous prendrons une décision selon l'imagerie post-chimio, mais...

_ Non, le coupa Regina. »

Emma la regarda. Le médecin aussi.

« Madame Mills, je comprends que ce soit brutal, mais…

_ J'ai dit non. »

Sa voix était mesurée, calme et tranchante à la fois. Le silence s'imposa dans la pièce. Emma cligna plusieurs fois des paupières vers elle, complètement coite.

« Regina, murmura-t-elle.

_ Je comprends votre réaction, madame Mills. C'est une annonce difficile. Mais ce n'est pas une option secondaire. C'est même une étape cruciale dans votre protocole.

_ Vous venez de dire que les marqueurs ont baissé, répliqua Regina, la voix parfaitement calme.

_ Les marqueurs baissent, oui. Mais ce n'est pas suffisant. Il reste un foyer et le cancer est agressif. Une récidive est possible sans intervention complète. Si on attend, on court le risque que la maladie reparte. Et si elle revient, ce sera plus difficile. Vous le savez, non ? »

Regina détourna les yeux. Elle serrait son sac si fort que ses jointures blanchissaient.

« Il ne s'agit pas d'un simple choix de confort. Il s'agit de… de votre vie, souffla le docteur d'un ton insistant.

_ Regina, reprit Emma, un peu plus ferme. »

Regina continua de secouer la tête, n'osant regarder la sauveuse en face. Emma quant à elle avait l'impression de vivre une espèce de vie parallèle. Elle ne pouvait pas faire ça. Pas maintenant !

« Ecoutez, prononça la brune d'une voix posée, bien que ses mains serrées trahissaient des émotions contradictoires. Je vous remercie pour votre franchise, docteur. Mais je ne souhaite pas subir cette opération. Si vous avez besoin de rallonger les séances de chimiothérapie, d'en rajouter, allez-y.

_ Ce n'est pas une décision qu'on prend à la légère, vous savez…

_ Justement, répondit Regina en le regardant droit dans les yeux. Et je ne la prends pas à la légère. J'ai pesé les risques. J'ai lu. J'ai compris. Mais c'est non. »

Emma se leva brusquement. Elle ne pouvait en entendre plus.

Et elle ne s'attendait pas à ce que Regina dise ça !

« Tu plaisantes ? Tu fais la fière là, mais c'est de ta vie qu'on parle ! cria-t-elle. »

Regina se tendit à peine. Le médecin recula d'un souffle sur son fauteuil.

« Tu vas refuser pour quoi ? Un décolleté ? explosa-t-elle.

_ Emma, ce n'est pas…

_ Non ! Tu choisis de ne pas te battre jusqu'au bout ! Bordel mais qu'est-ce que tu fabrique ?! »

Lentement, la reine tourna son visage vers la sauveuse. Et fut quelque peu surprise de voir les émotions qui s'imprimaient sur ses traits.

Elle s'attendait à ce qu'elle soit en colère, qu'elle soit révoltée. Mais Emma avait juste l'air… terrorisée.

« Ce que je fais de mon corps me regarde, marmonna-t-elle.

_ J'en reviens pas. T'es vraiment qu'une… qu'une égoïste ! »

Le mot claqua dans la pièce.

Regina resta figée. Le médecin ne disait plus rien.

« Je t'attends dans la voiture, balança-t-elle en levant ses mains devant elle. »

Emma partit en trombe du bureau, et Regina sursauta lorsque la porte claqua derrière elle. Le silence retomba.

Le médecin, lui, referma lentement le dossier.

« Vous avez le droit de refuser, dit-il simplement. Mais je vous demande de reconsidérer. Et de revenir me voir dans quelques jours. »

Regina se contenta de hocher la tête, encore hagarde.

« Je ne vous ai jamais posé la question mais… hésita-t-il.

_ Oui ?

_ Nous avons une psychoclinicienne qui intervient dans l'hôpital. »

Regina se contenta de le fixer, la bouche fermée.

« Elle est là tous les mardi, et le jeudi matin.

_ Ça ira, souffla Regina en un rire nerveux.

_ Elle peut vous accompagner dans ce processus, quels que soient vos choix. Elle est habituée à voir des cas comme le votre vous savez. Un cancer, c'est toujours un bouleversement. »

Regina tourna légèrement la tête vers lui. Ce n'était pas un regard froid. C'était… un regard fatigué.

« Vous pensez que je ne suis pas stable, c'est ça ?

_ Non, trancha-t-il. Mais sachez qu'elle est disponible si vous avez besoin de parler. »

Elle le fixa une seconde de plus, puis hocha la tête. C'était un oui silencieux, ou un « je verrai », ou peut-être juste un remerciement muet. Elle-même ne le savait pas vraiment.

Regina se leva, plus solennellement.

« Merci, docteur. »

La brune lui serra la main, puis quitta le bureau à son tour. Lorsqu'elle se retrouva dehors, la coccinelle jaune de la sauveuse l'attendait. Emma pianotait ses doigts sur le volant. Elle avait l'air furieuse.

Regina décida donc de faire mine de ne rien remarquer. Elle s'avança, puis ouvrit la portière pour s'asseoir sur le siège passager.

Lorsqu'elle ferma après s'être installée, elle tourna légèrement son regard vers l'arrière, tellement blindé que le coffre pouvait à peine se fermer.

« Ta voiture est dans un sacré bazar. »

Emma tourna brutalement son regard vers la brune.

Elle n'avait pas le droit de… de faire comme s'il ne s'était rien passée. Pas après ça. Pas après avoir refusé de se faire soigner et de s'assurer un putain d'avenir !

« C'est quoi ces sacs ? finit-elle par lui demander. »

Emma ne répondit toujours pas.

« Emma ?

_ Sérieusement ? la coupa la blonde, la voix tendue. L'état de ma caisse, c'est ça ton sujet ? »

Regina se figea.

« Je ne vois pas ce que tu veux dire. »

Emma la regarda alors, les yeux brillants, la colère au bord des lèvres.

« Tu viens de refuser une opération qui pourrait te sauver la vie, et tu me parles d'un putain de tas d'affaires à la con ?

_ Emma… »

Soudain, la blonde sortit du véhicule. Elle ouvrit violemment son coffre et retira sans cérémonie les dix pauvres cabas, remplis de vêtements et de papiers en tout genre. Elle les balança sur le trottoir sous le regard ahuri des patients qui observaient le spectacle, choquée.

Puis, elle revint derrière le volant.

« On rentre. »

Emma démarra en trombe, laissant tout ça derrière elles sans même attendre de quelconques protestations.

Regina ne répondit rien. Prostrée, elle se contenta de s'enfoncer dans son siège en regardant le paysage.

Le silence dans l'habitacle n'avait jamais été aussi pesant.

Même… même lorsqu'elle était partie, même lorsque la malédiction de Peter était revenue, quand Henry avait ingurgité ce maudit chausson aux pommes, jamais encore l'ambiance n'avait été aussi tendue entre elles.

Lorsque Emma arriva jusqu'au manoir, elle se gara en un crissement de pneus désagréable. Puis, elle sortit de la coccinelle en claquant la portière violemment et Regina s'empressa de la suivre.

« Emma ! l'appela-t-elle, un poil agacée cette fois. »

Arrivée devant le perron, la blonde se tourna soudain vers elle, les yeux injectés de colère.

« T'as déjà pris la décision avant même qu'on en parle ! Tu t'étais déjà dit non, hein ? T'avais prévu de faire la fière. De faire la Regina Mills qui maîtrise tout ! »

Regina recula un peu son visage, surprise. Puis, elle inspira profondément.

« Je sais ce que je fais, Emma. »

Emma la fixa. Puis elle secoua la tête.

« C'est justement ça qui me fout les nerfs. Tu sais ce que tu fais. Et tu le fais quand même ! »

Emma sortit ses clés et ouvrit la porte un peu trop brusquement. Lorsque Regina referma derrière elle, la blonde jeta un coup d'oeil au porte manteau.

Très bien. Henry n'était pas rentré.

« Putain ! explosa-t-elle. T'es en train de te foutre en l'air là, tu le sais ça ?! s'emporta Emma en pointant son index sur elle. »

Regina haussa les sourcils, mais sa voix resta mesurée.

« Je ne me fous pas en l'air. J'ai pris une décision. Que tu ne comprends pas, visiblement.

_ Non, je ne la comprends pas ! hurla Emma en s'avançant. Parce que tu veux vivre, non ? Parce que tu te bats depuis des mois, et là, tu baisses les bras juste avant la ligne d'arrivée ?

_ C'est toi qui crois qu'il y a une ligne d'arrivée, répondit Regina, les yeux brillants.

_ Il y en a une ! La tumeur a régressé, la chimio fonctionne, cria-t-elle. Tu ne peux pas lâcher maintenant, merde !

_ Tu crois que crier va me faire changer d'avis ? Tout ce que tu fais, c'est me rappeler que je suis seule, encore une fois, face à ça ! »

Emma la fixa, blessée.

« Tu crois vraiment que t'es seule ? murmura-t-elle, la voix étranglée. Tu crois que je serais là si c'était le cas ?

_ Tu es là, Emma. Mais tu n'es pas dans ma peau ! »

La voix de Regina partit dans les aiguës, à cause de l'émotion. Et elle se détestait pour ça. Alors elle finit par soupirer, puis se pinça l'arête du nez.

« Qu'est-ce que tu veux ? souffla-t-elle. Que je me roule par terre en hurlant ?

_ Je veux comprendre, appuya Emma.

_ J'ai refusé une opération. Point. C'est mon droit.

_ Ton droit de crever, ouais ! »

Regina secoua négativement la tête. Elle voulut se sauver, mais Emma se mit en travers de sa route en un regard dissuasif.

« Regina, gronda-t-elle.

_ Ne me fait pas la morale, Emma, accusa la brune. Je n'ai pas à te demander la permission pour décider de mon corps.

_ Mais t'as pas le droit de faire ça en prétendant que c'est rien ! hurla Emma. Tu veux mourir, c'est ça ? Tu veux t'éteindre avec ta silhouette parfaite et ton rouge à lèvres impeccable ?! »

Regina explosa.

« Tu crois que c'est une question de coquetterie ?!

_ Pour quoi d'autres ?! s'emporta la sauveuse. Tu refuse de t'enlaidir ! Mais merde, ton apparence passe après ta santé. Ce n'est pas ce qui te définie ! grimaça la blonde.

_ Bien sûr que si ! hurla-t-elle soudain. »

Son cri claqua dans la pièce. Emma laissa échapper une expiration désabusée.

« Alors quoi ? finit-elle par demander. Tu veux qu'on te jure qu'on t'aimera quand même ? Bordel, c'est ridicule.

_ Mais personne ne m'aimera, Emma ! hurla-t-elle à son tour, les yeux écarquillés, la voix au bord de la folie. Personne ne l'a jamais fait avant ! Pourquoi tu crois que ce serait différent maintenant ? »

Emma sentit son dos se crisper et ses mains se serrer. Elle ne répondit rien, préférant se taire au risque d'être encore plus mauvaise.

« Je suis la Méchante Reine, grogna-t-elle entre sa mâchoire serrée en s'approchant d'elle.

_ Tu ne l'es plus.

_ Je suis la Méchante Reine, je serais toujours la Méchante Reine ! Personne ne veut de moi. Personne ne m'a jamais vraiment voulue alors imagine ce que ça deviendra quand ce sera pire ! »

Regina fit un pas et fixa son regard dans le sien.

« Je ne veux pas devenir un monstre, dit-elle, la voix tremblante d'un mélange de rage et de désespoir.

_ Tu n'es pas un monstre, supplia Emma.

_ C'est ce que tu pense maintenant, parce que je ressemble encore à quelque chose. Mais on verra ce que tu en dira, quand je serais pleine de… cicatrices, et qu'il me manquera un sein. Voire pire encore : les deux ! »

Emma s'approcha, jusqu'à ce que son visage ne soit plus qu'à quelques millimètres à peine du sien et qu'elle sente chaque syllabe sur sa peau.

« Tu es désirable. Tu l'étais hier. Tu l'es maintenant. Et tu le seras après. »

Le souffle de Regina se bloqua dans sa gorge. Alors, elle ferma les yeux. Son menton tremblait. Elle voulait à tout prix que Emma ne la voit pas comme ça, mais elle n'y parvenait pas.

« Je ne peux pas, souffla-t-elle.

_ Celui qui ne te voudra pas sera le pire des crétins.

_ Personne ne me voudra dans ce corps.

_ Tu seras toujours Regina Mills. Tu pourrais porter ta couronne à poil, sans seins, le monde se prosternerait quand même. »

Un rire nerveux et étranglé s'échappa de Regina.

« Je crois que tu te trompe Emma et que tu me balance de belles paroles pour que…

_ Qu'est-ce que je dois faire pour que tu me crois ? murmura-t-elle.

_ Je ne sais pas, souffla Regina en baissant les yeux. Rien. Tu ne peux rien faire. »

Emma tendit sa main tendrement, puis prit la sienne, mais Regina garda son regard fuyant.

Cette fois, elle ne pouvait plus prononcer quoique ce soit. Elle chercha à croiser les bras devant sa poitrine, mais Emma l'en empêcha.

« Je te vois, Regina. »

Enfin, la brune osa affronter son regard. Mais c'était difficile.

« Tu es bien la seule dans ce cas, répondit-elle amèrement.

_ Je ne suis pas la seule. Henry. Snow. Même ta foutue voisine qui t'apporte des muffins dégueulasses. Les gens t'aiment.

_ Les gens aiment ce qu'ils voient. Pas ce que je suis.

_ Et moi ? »

Regina ferma les yeux.

« Toi, ça ne compte pas, tu veux sauver tout le monde. Tu confonds l'amour avec ton complexe de super-héroïne. »

Emma secoua la tête en laissant échapper un rire sans joie.

« Donc t'es en train de me dire que depuis tout ce temps, je ne t'aime pas vraiment, mais que je ne vois que le potentiel à sauver ? »

Regina détourna le regard. Et Emma comprit qu'elle venait de taper juste. Elle aurait pu,.. aurait dû se vexer. Mais il n'en fut rien.

Elle fit un pas de plus vers la reine, le regard perçant.

« Tu veux que je te dise un truc ? murmura Emma. »

Lentement, Regina leva ses yeux vers elle.

« Personne ne pourrait faire ce que j'ai fait pour toi. Personne. Tu crois que c'est à la portée de n'importe qui d'avoir pris cette dague à ta place ? Tu crois qu'il y en a un autre qui traverserait un putain de monde parallèle pour essayer de te ramener pour un simple « potentiel » ? Non. »

Regina laissa échapper une légère expiration désabusée mais Emma la retint par la main.

« Je l'ai fait pour toi. Et je le referais. Les yeux fermés. Et le fait que je sois la sauveuse n'a rien à voir la dedans. »

Regina continua de la fixer, interdite.

« Alors ouais, bon courage à la prochaine personne qui te croisera et essaiera de t'aimer. Franchement, bon courage. Parce que je suis pas certaine que quelqu'un t'aimera autant que moi. C'est franchement mon seul tord dans toute cette histoire. »

Emma fit un pas de plus.

« Je veux que tu reste en vie, je veux… »

Regina tressaillit. Elle baissa les yeux. Elle n'arrivait pas à respirer. Emma elle, soupira de dépit.

« Imagine un peu si c'était moi… Ose me dire que tu ne ferais pas tout pour me convaincre de continuer. »

Emma venait sans le savoir, de toucher un point sensible.

Alors, Regina se détourna entièrement et Emma la vit passer une main sur son visage.

« C'est ça le problème Emma, répondit Regina d'une voix étranglée. Je… j'ai déjà été capable de te laisser partir. »

Emma déglutit difficilement.

« Pourquoi ? demanda la blonde en une voix à peine audible.

_ Parce que… parce que je t'aimais trop pour te retenir, finit par lâcher la brune en un sanglot étouffé. »

Emma sentit son cœur faire une embardée.

Elle s'approcha plus encore. Les pleurs silencieux de la brune n'étaient audibles que par elle. Alors, elle finit par passer ses mains autour d'elle et se coller son torse à son dos en posant sa joue sur ses omoplates. C'était quitte ou double. Regina aurait tout aussi pu s'éloigner et l'envoyer sur les roses après un geste pareil, mais à ce stade, Emma avait l'impression qu'elle n'avait plus rien à perdre.

Pourtant, Regina n'en fit rien.

Pire encore, elle se retourna, comme dans l'idée de le faire, de la repousser gentiment mais son visage se retrouva dans son cou et Emma la serra plus fort encore. Alors, elle en fit de même.

Sans même y penser, la sauveuse ferma les paupières. Le temps semblait suspendu. Les larmes de Regina lui mouillaient la nuque et son parfum se collaient doucement à elle. Emma sentit les bras de Regina s'enrouler encore plus fort autour de son cou. Elle avait l'impression d'avoir toujours voulu ce moment, sans jamais avoir oser l'envisager une seule seconde. Leurs cœurs battaient à l'unisson, l'un contre l'autre à travers leurs poitrines et c'était comme… comme si on venait de leur retirer une épine du pied, en quelque sorte.

« Je t'ai manqué, souffla Emma. »

Regina se contenta de hocher la tête en silence. Et bêtement, Emma sourit. Au milieu de toute cette tristesse et ce désespoir, elle y trouvait autre chose.

D'un geste commun, elles se redressèrent légèrement. Leurs visages n'étaient plus qu'à quelques millimètres à peine l'un de l'autre. Et aucune des deux ne sut ce qui leur prit lorsque leurs bouches se rejoignirent.

C'était un baiser si simple, et pourtant si fort à la fois. Leurs lèvres étaient pressées les unes contre les autres avec une intensité rare. Il n'y avait rien de… sensuel, ni de sexuel, rien d'amoureux. Juste un besoin urgent. Une évidence.

Il cessa pourtant vite. Et Emma reprit la brune dans ses bras dans l'instant.

« J'ai jamais manqué à personne moi, glissa-t-elle d'un ton un peu malicieux. »

Regina leva les yeux au ciel malgré ses larmes et son nez rouge qu'elle reniflait toutes les deux secondes.

« Bien sûr, balança-t-elle en passant le plat de sa main sous ses narines pour calmer ses sanglots. »

Emma rit un peu puis, serra la taille de la reine pour l'amener contre elle et poser sa bouche de nouveau, furtivement sur la sienne. Regina posa sa main sur sa joue et la regarda en souriant, son pouce faisant des vas et viens sur sa joue.

« Je ne veux pas te perdre. C'est moi l'égoïste peut-être, mais je ne veux pas vivre avec avec cette idée, prononça Emma en fronçant les sourcils. »

Regina soupira. Elle dévia son regard sur le côté et secoua la tête.

« T'as dis que tu aurais détruit le monde entier pour moi.

_ C'est différent. Je suis la championne du monde pour tout détruire, ça n'aurait pas été si compliqué que ça.

_ Regina… »

La brune marmonna dans sa barbe et retrouva le regard suppliant de la sauveuse.

« C'est déloyal, souffla-t-elle.

_ Qu'est-ce qui est déloyal ? Tu veux que je m'ampute des seins moi aussi ? Ne me tente pas, je serais capable.

_ Non. C'est ton regard le problème.

_ Je n'ai aucun regard.

_ Bien sûr que si. Tu as ces… yeux de merlans fris insupportables, désigna Regina. »

Emma leva les sourcils, feintant la surprise. Même si elle savait, au fond d'elle, exactement de quoi parlait la reine.

« On en parlera plus tard, lâcha-t-elle. »

Emma se contenta de cette réponse, qui n'était plus ce même non catégorique qu'avant. Elle lui sourit alors en hochant la tête. A sa surprise, la reine prit sa mâchoire entre la main et posa furtivement ses lèvres sur les siennes avant de s'en aller.

Chapter Text

Chapitre 8.

« Si j'avais su que j'aurais pu t'embaucher pour faire du ménage depuis le début »

Emma sursauta, puis se retrouva pour fusiller gentiment la brune du regard. Celle-ci s'était glissé derrière elle, et la regardait à présent d'un air malicieux.

« Aucune chance, tu serais restée derrière mes fesses tout ce temps, à vérifier que le cirage de ton vieux pupitre soit bien passé. Autant dire qu'on aurait fini par se crêper le chignon toi et moi. La t'es juste trop fatiguée pour me tomber dessus, ironisa la sauveuse. »

Regina pouffa un peu, puis contourna Emma pour venir s'asseoir en un rebond sur la machine à laver. Ses pieds étaient nus, et elle portait cet ensemble short-débardeur qu'elle ne gardait que lorsqu'elle restait au manoir et qui remontait sur ses cuisses de part sa position.

« Tu n'avais pas rendez-vous pour ce projet de… centre commercial ou je ne sais quoi ? demanda Emma en penchant la tête.

_ Ça a été annulé, répondit la reine en s'appuyant sur ses bras derrière elle. »

Emma s'approcha du panier et reprit une serviette, l'air de rien. Elle ne regarda pas Regina, mais elle savait exactement où elle se trouvait dans la pièce. C'était devenu une habitude, de la sentir tou près.

« Qu'est-ce que tu fais ? demanda la brune, les jambes se balançant légèrement dans le vide.

_ Une machine, et en toute franchise, je voulais profiter de ton absence pour faire un tri. »

La sauveuse replia la serviette.

Regina s'appuya davantage sur ses bras, juste assez pour étirer sa silhouette, sans forcer d'un mouvement naturel… Ou calculé… Ou les deux à la fois.

« Le tri ? Où ?

_ Dans cette pièce dans laquelle tu ne me laisse pas mettre les pieds. »

Un silence suivit la déclaration de la sauveuse. Emma s'autorisa enfin un regard. Juste un. Et Regina, immobile cette fois, la fixait déjà.

« Et en quel honneur ?

_ En l'honneur que j'ai récupéré mes affaires et que j'ai besoin d'autre chose que de deux pauvres étagères.

_ Ce n'est pas un débarras, répliqua Regina. C'est une pièce fermée. Et elle va le rester. »

Regina haussa un sourcil. Puis, elle riva ses yeux plus bas.

« Tu as oublié un t-shirt dans le fond du panier, souffla-t-elle, le ton neutre. »

Emma cligna des yeux. Puis elle sourit, du coin des lèvres.

« Merci. »

Elle se pencha, ramassa le t-shirt.

« Alors ? finit par insister la sauveuse en repliant le vêtement sur elle.

_ Il n'y a rien à voir. Juste… des vieilleries.

_ Raison de plus pour y faire un tri.

_ Non.

_ Ok, qu'est-ce que tu peux faire en échange ? Te… masser les pieds ? balança Emma en désignant ses pieds nus qui continuaient de la narguer.

_ Me masser les pieds ? répéta Regina, un poil incrédule. »

Sans attendre, la sauveuse s'agenouilla et prit un de ses pieds pour le presser entre ses doigts. Regina la regarda faire, la bouche ouverte.

« Ton obstination n'a visiblement aucune limite, souffla la reine.

_ S'il te plait, bouda Emma en posant son menton sur ses orteils. «

Regina soupira, un vrai soupir, celui qui trahit l'agacement mêlé à une affection mal dissimulée.

« Tu veux négocier l'entrée d'une pièce verrouillée à coups de massages de pieds ? »

Emma haussa les sourcils, posant doucement le pied de Regina sur sa cuisse.

« J'ai déjà négocié la fin d'une malédiction avec moins que ça.

_ Et moi j'ai déjà enfermé des gens pour moins d'insolence, répliqua Regina, mais sa voix était étrangement douce. »

Elle se pencha légèrement en avant, le dos toujours appuyé contre le mur, ses cheveux retombant sur une épaule.

« Tu pourrais au moins me dire pourquoi, marmonna Emma en lâchant enfin son pied. »

Un silence s'installa. Les jambes de Regina cessèrent de se balancer dans le vide.

« Parce que.

_ Super. Vraiment. Très convaincant, ce "parce que".

_ Ce n'est pas à toi de décider quelles pièces de ma maison sont ouvertes ou non, répondit simplement Regina.

_ Sauf que maintenant que j'y vis, ça devient un peu aussi ma maison. »

La brune leva cette fois haut les sourcils en la jaugeant puis croisa les bras sur sa poitrine.

« Voyez-vous cela.

_ Peut-être que tu caches juste une vieille collection de poupées flippantes, ou je sais pas… une cave à vin, ou ta réserve personnelle de chocolats.

_ Je n'ai aucune réserve personnelle.

_ Ça, ça m'étonnerait vu la boite que j'ai ressorti de sous ton lit la dernière fois quand j'ai passé l'aspirateur. »

Soudain, le teint de la brune blanchit à vu d'oeil.

« Quelle boite ?

_ La verte. »

Regina ouvrit la bouche, à deux doigts du malaise.

« Relax. Je ne l'ai pas ouverte, mais je pourrais si je sens que tu me cache quelque chose.

_ C'est une menace ? demanda-t-elle enfin en la jaugeant. »

Regina soupira profondément, se leva de la machine, mais resta figée une seconde. Emma croisa les bras, joueuse, mais patiente. Elle avait tout son temps.

« Je finirai par l'ouvrir, tu sais.
_ Tu ne trouveras pas la clé.
_ Tu crois que ça m'a arrêtée quand j'étais shérif ? Une fois je suis rentrée en douce dans ton garage. »

Regina leva les yeux au ciel. Elle se détourna, mais cette fois, Emma la suivit d'un pas.

« Un petit tour. Promis. Je garde les mains dans les poches.
_ Tu n'as même pas de poches.
_ Alors je les garderai derrière le dos. »

Regina soupira. Emma posa la panière par terre et passa son bras sur sa taille pour l'amener vers elle.

« Après le chantage, la menace, et la négociation, voici la corruption, lui glissa la reine en posant sa main sur son épaule.

_ T'as oublié la flatterie. Genre, t'as de superbes pieds Regina, j'aimerai les masser plus souvent. »

La brune ne put s'empêcher de laisser échapper un rire, et Emma ne réalisa qu'à peine que ce son faisait battre son coeur un peu plus fort.

Elle passa son nez près de sa nuque et posa sa bouche là, juste sur sa joue.

« S'il te plait, lui dit-elle, la voix étouffée contre son visage.

_ Non. »

Emma remonta puis lui donna un baiser à la commissure de ses lèvres. Puis, sur les siennes, un baiser cette fois qui ressemblait au battement d'ailes d'un papillon.

« Emma, gronda doucement Regina en secouant la tête.

_ Oui ?

_ C'est privé. Et… un peu honteux.

_ Tu commence à me faire peur, balança Emma en reculant un peu son visage. »

De nouveau, Regina pouffa. Elle finit par reculer, quittant à regrets ses bras. Puis, elle se tourna et avança jusqu'à la porte près de sa chambre, close par une serrure dorée. Elle soupira, puis prit la clé qui était cachée dans un vase juste à côté.

Elle ouvrit alors la porte en grand et soupirant en désignant l'intérieur.

« Voilà. Contente ? »

Emma ouvrit en grand la bouche. Lorsqu'elle fit un pas, la lumière s'alluma avec douceur pour faire apparaître des dizaines et des dizaines de robes somptueuses… Des robes qui appartenaient à un autre temps, où elle n'était plus que l'Evil Queen.

« Oh wow. »

Regina avança dans le grand dressing et baissa les yeux en rougissant.

« Je ne sais même pas pourquoi j'ai gardé tout ça… »

Emma passa machinalement sa main sur les tenues soigneusement rangées sur des cintres. Les matières étaient si nobles, entre velours, soie, et véritable pantalon en cuir. Elle effleura des doigts une longue cape rouge et noire pourvue de véritables plumes.

Puis, elle attrapa le cintre et leva la robe devant elle en plissant les yeux.

« Franchement… y a pas à dire. Tu savais te saper pour foutre les jetons. »

Elle la tourna vers Regina, qui avait à présent les bras croisés, l'air à mi-chemin entre l'embarras et l'amusement.

« Tu avais une préférée ? »

Regina ouvrit la bouche, puis la referma. Elle s'avança, et fronça les sourcils en parcourant ces tenues, qu'elle n'avait pas revu elle-même depuis très longtemps.

Elle en sortit un long manteau aux motifs délicats, surmonté de manches longues et d'un col somptueux en strass.

« Tu veux pas la mettre ? demanda Emma pensivement en observant le vêtement.

_ Tu es dingue ? souffla Regina en la dévisageant.

_ Que je sache un peu ce que ça faisait tu vois ?

_ Tu as déjà rencontré l'Evil Queen je te signale.

_ Oui mais là c'est différent. »

Emma en sortit une, rouge au large décolleté lui aussi, décoré de beaucoup de pierres. Elle était accompagnée d'une veste cintré rouge et noire.

« J'ai tué un membre de ma garde dans cette tenue, balança machinalement Regina en levant un sourcil.

_ Stylé.

_ Ce n'est pas ce que la plupart des gens disaient en me voyant arriver.

_ Ouais ou alors ils osaient pas. »

Regina pouffa un peu.

« Allez, vas-y, essaie. Pour moi. Juste une. »

Regina leva les yeux au ciel, puis elle baissa les bras, dépitée.

« Tu es insupportable.

_ Merci. »

Regina grogna de nouveau, puis s'éclipsa sans même que Emma s'en rende compte. La sauveuse était trop concentrée sur la garde robe face à elle. Combien y avaient-ils de tenues la dedans ? Une cinquantaine, au moins !

« Un miracle que je rentre encore dans cette chose, marmonna Regina en revenant. »

Lorsque Emma se retourna, sa bouche manqua de tomber bêtement par terre. Elle retint son souffle et fixa Regina de la tête au pied avec un espèce de sourire admiratif.

« Quoi ? demanda la brune en la jaugeant.

_ J'en reviens pas. »

Emma s'approcha et la tira par la taille. Regina ne put s'empêcher de glousser et Emma passa une main tout le long de sa robe, effleurant les bijoux, tombant le long de son sein jusqu'au bas de la tenue.

« Ça te va à merveille, dit-elle en touchant la matière du jupon. »

Regina retrouva alors pleinement le sourire et passa ses mains derrière son dos en levant un peu le menton. Elle se pinça la lèvre inférieure et lui lança un regard flatté qu'Emma ne remarqua qu'à peine tant elle avait le sien fixé sur sa silhouette.

« Tu devrais la porter plus souvent.

_ Je vais terroriser tout le monde là dedans.

_ Bon, essaie en une autre et cette fois, je me cache les yeux. »

Emma posa ses mains devant ses paupières closes et Regina rit un instant. Puis, elle se tourna et se saisit d'un espèce de manteau à la fourrure bleue accompagné d'un pantalon en cuir.

Elle s'éclipsa pour le mettre, puis revint dans la pièce et toqua sur l'épaule d'Emma qui ouvrit les paupières en se tournant lentement vers elle.

Emma posa dramatiquement sa main sur sa poitrine en retenant son souffle et en ouvrant en grand les yeux.

« Ok celle ci est somptueuse, insista Emma. »

Cette fois, la sauveuse ne put ignorer le sourire jusqu'aux oreilles de Regina. Elle la fit tourner sur elle-même, puis toucha la fourrure de ses doigts. Un miroir non loin d'elles renvoya le reflet de la reine et d'un geste, Emma se posta derrière elle en posant ses mains sur sa taille dessinée.

« C'était pour monter à cheval, dit Emma en fixant leurs reflets dans le miroir.

_ Exactement, répondit Regina en se tournant légèrement vers elle.

_ Cependant… »

Emma se recula, puis observa la tenue d'un air concentré. Elle posa son menton sur son poing, et plissa les yeux.

« Je préfère l'autre. »

Regina s'arrêta instantanément de sourire.

« Vraiment ?

_ Oh. Je n'aurais pas du dire ça. »

Regina rit de nouveau en la voyant grimacer. Puis, Emma se cacha de nouveau les yeux.

« Allez une dernière ! Mais la meilleure ok ?

_ Vous me mettez la pression Miss Swan, gronda Regina.

_ Ne m'appelle pas Miss Swan, répondit Emma en la fusillant du regard tout en entrouvrant légèrement les doigts. »

Regina lui sourit, et Emma replia sa main. Lorsqu'elle retrouva la vue, elle fut surprise d'y découvrir la brune dans une robe moulante, loin des extravagances connues par sa mère et la plupart des femmes dans la Forêt Enchantée.

Emma avait le souffle coupée et se contenta de hoqueter en passant une main sur sa manche, le long de son bras.

« C'est du velours, souffla la blonde. »

Des arabesques noires en dentelles lui couvraient le décolleté ainsi que la taille.

« C'est celle que je préfère, lui glissa Regina en un léger sourire.

_ Je comprends pourquoi, lui répondit Emma en lui prenant le bras avec élégance.

_ Vraiment ? souffla-t-elle.

_ Si t'avais pas été l'Evil Queen, on aurait franchement pu te confondre avec un ange descendu du ciel, balança Emma en un rire nerveux.

_ Ou le diable, ironisa Regina. »

Emma leva les yeux au ciel, pour une fois.

« Ne dis pas ça, lui souffla-t-elle au creux de l'oreille en l'approchant de nouveau. Tu t'es vue ? »

La blonde posa sa main dans le creux de sa taille et la mit face au miroir de nouveau. Regina tourna lentement son visage vers elle et lui accorda un léger sourire.

« Qui a dit que tu avais besoin d'une paire de seins pour être sublime ? »

Regina laissa échapper un léger rire. Puis, elle baissa les yeux un instant, avant de les remonter une nouvelle fois vers elle.

« Merci, chuchota-t-elle. »

Un silence s'imposa subitement dans la pièce. Emma fronça les sourcils, puis posa sa main sur la joue de Regina. Ses doigts touchèrent lentement sa mâchoire et elle s'approcha pour l'embrasser… Comme elle le faisait étrangement depuis des jours.

Sans que ça n'ait jamais été ambiguë.

Jamais…

Emma se détacha une seconde, puis baissa les yeux sur sa bouche. Regina posa sa main sur la sienne, encore sur son visage. Elle se tourna vers Emma dont l'autre main suivit le mouvement pour se retrouver dans le creux de ses reins.

Aucune des deux ne recula. Leurs visages s'étaient à peine éloignés et pourtant, ils étaient si proches qu'il ne fallut qu'une impulsion de l'une comme de l'autre pour que leurs bouches se retrouvent.

Seulement cette fois, ce baiser n'avait rien de chaste, rien d'une caresse ni d'un geste banal. La lèvre d'Emma vint capturer celle inférieure de Regina et l'aspira, manquant de la mordiller. Regina laissa échapper un soupir de bien être en se laissant faire, et Emma supporta alors son corps fondre dans ses bras. In extremis, la reine s'accrocha à son cou. Emma appuya plus encore son baiser avant de se détacher, un peu plus haletante.

Regina la fixa, le souffle rapide et le regard perdu. Elles restèrent ainsi quelques secondes supplémentaires avant que la sauveuse ne capture sa bouche de nouveau. Et cette fois, elle l'entrouvrit en même temps qu'elle. Sa langue effleura le bord de ses lèvres, et Emma grogna d'un son étouffée lorsque Regina de même.

Elle serra alors plus encore la brune par la taille, comme pour l'empêcher de s'échapper et enfin, lorsque Regina bascula un peu plus la tête, sa langue rencontra la sienne. Elle laissa entrer la sauveuse, tout en laissant lentement tomber ses défenses.

Regina se pendit littéralement à sa nuque avant que ses doigts ne s'entortillent dans sa chevelure blonde.

Les doigts d'Emma se resserrèrent autour de la dentelle de la robe. Leurs langues se frôlèrent, se testèrent, comme deux lames qui s'évitent d'abord, puis s'unissent dans un glissement parfaitement ajusté.

Il n'y avait plus rien d'innocent dans leur geste.

Regina soupira doucement contre sa bouche, et ce souffle fit chavirer plus encore la sauveuse. Sa main traça une ligne imaginaire dans son dos, jusqu'à ses hanches où elle l'attira plus fort contre elle.

Regina se laissa faire, sans résister. Mieux encore, elle y répondit avec une lenteur maîtrisée et leur baiser gagna un peu plus en intensité.

Leur rythme s'accorda, lent, mais assuré, profond sans être précipité.

Les mains de Regina migrèrent vers le visage de la sauveuse. Et elle sentit ses doigts caresser ses joues. C'était si bon, si doux et si intense à la fois.

Soudain, la porte d'entrée claqua et elles se séparèrent en sursaut.

« Les mamans ? Vous êtes là ? »

Emma se racla la gorge et fit un pas en arrière avant de se détourner avec une rougeur équivoque sur les joues.

« Tu… sens le chocolat, bafouilla-t-elle sans réfléchir. »

Regina ouvrit soudain la bouche, ne sachant que répondre avant que son fils ne débarque dans la pièce.

« Oh… Oh. »

La brune déglutit en voyant son grand garçon la jauger bizarrement. Et vu son accoutrement, elle le comprenait.

« Tu… bordel mais qu'est ce que vous foutez ?

_ Henry, ton langage, répondit Regina d'un ton las. »

La brune sortit de la pièce avec élégance et Henry haussa les sourcils. Emma elle, resta un instant dans la pièce.

Pour le reste de la journée, elle parvint à éviter habillement de croiser la reine en devinant sa présence dans chaque pièce de la maison. Mais cela ne pouvait pas durer éternellement.

Alors, une fois le soleil couché, Emma réalisa son erreur en jetant un coup d'oeil à sa batterie.

8%.

Et son chargeur était… Il était de l'autre côté du lit de Regina, là où elle dormait depuis plusieurs jours. En toute innocence. Soit disant pour « garder un oeil sur elle ». De dépit, Emma soupira en se massant le front.

Puis, elle se leva d'un bond en s'appuyant sur ses cuisses et monta lentement les marches de l'escalier. Lorsqu'elle arriva devant la porte de sa chambre, fermée, Emma hésita un instant.

Résignée, elle finit par entrer à pas feutrés. Elle avait toujours été discrète, pour ne pas alerter Henry entre autre.

La lueur chaude que la lampe de chevet diffusait habituellement n'était pas allumée. Regina était dos tourné, apparemment endormie. Alors, Emma s'avança à tâtons dans la pièce, jusqu'à atteindre le lit. Elle le contourna discrètement, et chercha son chargeur qu'elle brancha sur son téléphone.

Puis, elle sentit la tension dans les épaules de Regina. Et son souffle.

Elle ne dormait pas.

Un instant, Emma hésita à rester. Elle aurait pu repartir. Elle aurait dû le faire. Mais à la place, elle déglutit, puis remit une mèche de cheveux derrière son oreille. Elle resta debout une seconde de plus, puis finit par s'asseoir au bord du lit.

Regina ne bougea pas. Et le silence continua à régner lourdement.

Lentement, Emma ôta son jean pour être plus à l'aise et glissa ses jambes sous la couette avec précaution. Le matelas s'affaissa légèrement sous son poids.

La sauveuse observa ainsi le plafond durant de longues minutes.

Puis, elle se tourna, sauf que Regina en fit de même et elles se retrouvèrent face à face.

Leurs regards se croisèrent dans la pénombre. Le regard de Regina s'arrondit de surprise et Emma laissa échapper un sourire à la fois mal à l'aise et désolé.

« J'avais oublié mon chargeur. »

Regina acquiesça sans un mot. Puis, elle se tortilla dans les draps. Elle sembla chercher une position plus confortable mais c'était peut-être aussi une manière d'éviter le silence. Ou de le meubler.

« Tu ne dors pas ? murmura la blonde. »

Regina secoua la tête en rougissant.

« Tu veux qu'on parle ? demanda Emma d'une voix à peine audible.

_ Je… je ne sais pas. »

Regina déglutit, puis recula de quelques millimètres. Elle se mordit la lèvre, et trifouilla un peu le bord de son oreiller avec ses ongles.

« Je… commença Emma. J'ai pas envie que ça devienne bizarre. Et en même temps… c'est déjà bizarre. »

Lentement, Regina leva ses yeux vers elle de nouveau.

« Tu es vraiment venu à cause de ton chargeur ? demanda Regina à voix basse.

_ Oui… et non. »

Regina se retroussa les lèvres, puis la fixa en silence.

« En fait, je croyais que tu dormais et… j'ai hésité à faire demi tour, avoua Emma.

_ Pourquoi tu ne l'as pas fais ? »

Emma releva les yeux, le cœur cognant un peu trop fort.

« Parce que j'en avais pas envie. »

Regina déglutit elle aussi.

« Et… et maintenant ? demanda-t-elle en un léger rire nerveux. »

Leurs souffles se mêlèrent et Emma glissa son regard vers sa bouche.

« Maintenant, j'ai pas envie de repartir non plus, dit-elle. »

Regina laissa échapper un soupir un peu plus fort. Emma la regarda, puis se mordit l'intérieur de la bouche. Sa main s'avança pour se poser sur la sienne et elle la serra, juste un peu.

« Tu devrais dormir, lui glissa Regina. »

Mais leurs doigts s'entrelacèrent.

« Toi aussi tu sais. »

Regina sourit d'un air un peu mélancolique. Emma amena sa main sur sa bouche et embrassa lentement ses doigts. La brune les bougea à peine, comme si elle cherchait à s'agripper à ce contact inattendu.

« J'ai du mal à comprendre ce qu'on est en train de faire, murmura la reine en la regardant continuer ses attentions. »

Emma releva les yeux, sans lâcher ses doigts.

« Moi aussi. »

Regina soupira en s'enfonçant dans son oreiller. Elle sentit le corps d'Emma se rapprocher un tout petit peu du sien. Leurs jambes se frôlèrent à peine sous les draps. Un courant d'électricité silencieux traversa Emma. Regina, elle, sembla retenir son souffle.

Puis, tout doucement, Emma tendit la main pour frôler une mèche de ses cheveux, la repoussant derrière son oreille. Ses doigts restèrent là un moment, à caresser la courbe de sa joue. Regina ne bougea pas.

« Tu veux que je m'en aille ? demanda finalement la blonde. »

Regina ouvrit la bouche, mais aucun son n'en sortit.

La blonde glissa sa main de la sienne vers son bras, jusqu'à l'épaule nue qui dépassait du drap. Sa peau était tiède. Elle sentit le frisson qui la traversa.

« Emma… l'avertit Regina sans grandes convictions pour autant, son appel ressemblant plus à une supplication. »

Mais elle était déjà trop proche, et son nez frôla le sien. Leurs souffles se mêlèrent à nouveau.

La main d'Emma pressa l'arrière de la tête de Regina et elle pencha son visage pour mieux capturer sa bouche. Leurs lèvres se retrouvèrent avec douceur et leur arrachèrent un gémissement commun.

Lorsque sa bouche s'entrouvrit, Emma attira un peu plus la brune contre elle. Sa main se pressa contre sa taille et Regina manqua de basculer sur elle. A la place, elle se rattrapa in extremis, posant une de ses mains à plat à côté de la sauveuse qu'elle surplombait. Leur baiser se fit ainsi plus profond, plus chaud.

La langue de Regina effleura la sienne dans un soupir tremblant, et Emma se sentit brûler. Le drap froissé entre elles s'écrasa sous leurs mouvements.

Regina pencha à son tour son visage, puis enfonça sa langue plus profondément encore contre celle de la femme sous elle. Son souffle se bloqua quand Emma effleura ses côtes du bout des doigts.

Elles s'embrassaient avec une lenteur dangereuse, presque douloureuse.

Machinalement, Regina remonta sa jambe nue contre elle et la main d'Emma glissa jusqu'à sa cuisse, bien trop près de ses fesses. Leurs corps semblaient parler à leur place.

Emma rompit le baiser. Leurs lèvres restèrent à peine séparées. Elle ferma les yeux.

« Si on continue, je…

_ Désolée, articula Regina en touchant du bout de l'index sa lèvre inférieure. »

Sa respiration était hachée et sa peau brulante. Emma remonta sa main de l'arrière de ses jambes jusqu'à ses fesses, puis son dos. Regina portait une courte nuisette en soie qui était remontée plus que de raison sur ses hanches. Elle avait même cru sentir le bord de sa petite culotte.

Regina recula un peu pour l'observer et Emma laissa son regard s'attarder sur son corps. Elle passa sa langue sur ses lèvres. Son décolleté était si plongeant.

La reine remua un peu, et se positionna lentement à califourchon sur elle. Elles se jetèrent un regard troublée.

Emma avait conscience qu'elle devrait de nouveau, tout stopper. Mais à la place, sa main navigua sur son corps, remontant de fil en aiguilles jusqu'à l'orée de sa poitrine.

Regina la regarda faire en déglutissant.

Puis, son pouce glissa sur sa robe et effleura son téton érigé sous le tissu. Regina gémit, et son corps se cambra.

« Emma… murmura-t-elle une nouvelle fois. »

La blonde répondit en caressant doucement sa poitrine, son pouce ne cessant ses vas et viens langoureux et Regina ferma les paupières en soupirant.

La sauveuse se redressa, puis glissa sa bouche dans le creux de son cou. Elle la goûta, l'embrassa là, juste sous l'oreille. Regina frissonna, arquant légèrement les hanches.

Emma sentit ses doigts s'agripper à ses cheveux, son souffle devenir plus irrégulier. Elle l'embrassa encore, sur la clavicule, puis sur la ligne de sa mâchoire, avant de revenir chercher sa bouche.

C'était si lent et langoureux.

Regina bascula sur le côté, emportant Emma avec elle dans un mouvement doux mais irréversible. Elles se retrouvèrent enchevêtrées, allongées face à face, leurs jambes mêlées sous les draps. De nouveau, Emma caressa ses fesses, cette fois sans aucune gêne. Ses doigts traçaient des cercles paresseux contre sa peau nue, comme pour mémoriser chaque courbe, chaque frisson.

Puis, elle se détacha.

« On devrait vraiment dormir, trembla-t-elle en riant nerveusement.

_ Oui, répondit Regina sur le même ton en se reculant de quelques centimètres. Oui tu as raison. »

Regina amorça un geste pour se détacher.

« Juste… prononça rapidement Emma. »

Regina battit des cils vers elle et s'interrompit dans la seconde.

« Oui ? murmura la brune.

_ Une… une dernière fois. »

La brune la fixa soudain et vit son regard troublé et si empreint de désir à la fois.

« Juste une, prononça difficilement la sauveuse.

_ Une dernière, acquiesça Regina à voix basse. »

Regina gémit instantanément lorsque leurs bouches se retrouvèrent une énième fois. Elle remonta de nouveau sa jambe contre elle et les caresses de la blonde se firent plus appuyées. Elle la pressa contre elle, fort et appuya plus encore ses lèvres contre les siennes.

Cette fois, la passion avait prit le dessus sur la langueur et Regina se sentit presque partir lorsqu'elle sentit les doigts de la blonde serrer sa fesse avec intensité. Pire encore, sa paume remonta sur sa poitrine et elle en fit de même avec un de ses seins. En réponse, Regina mordilla sa lèvre inférieure. Puis leurs langues se taquinèrent jusqu'à presque sortir de leurs bouches pour mieux se caresser. C'était si… indécent.

Leurs respirations s'emmêlèrent, hachées et erratiques et ce n'est que lorsque les hanches de la brune se mirent à onduler toute seule que Emma mit fin rapidement à leur baiser.

« Ok, ok on arrête, déglutit Emma. »

Regina se recula en hochant la tête, prenant conscience elle aussi qu'elles jouaient beaucoup trop avec le feu.

Emma se retrouva sur le dos, et posa sa main sur sa poitrine, comme si cela pouvait calmer les battements de son coeur. À côté d'elle, Regina ne disait rien. Mais dans l'obscurité, leurs souffles agités parlaient pour elles.

« Désolée, articula difficilement la reine. »

Emma se tourna lentement sur le côté, ses cheveux retombant en cascade sur l'oreiller, et retrouva le regard de Regina, encore brûlant.

« Pour être honnête, c'est moi qui devrait m'excuser.

_ Pourquoi ? demanda Regina d'une petite voix.

_ Parce que je pourrais t'embrasser toute la nuit comme ça… mais je ne crois pas que ce soit une bonne idée. »

Regina laissa échapper un léger rire, à la fois flatté et amusé.

« En effet. »

La reine s'arrêta un peu, puis se passa une langue sur la lèvre inférieure en fixant celle d'Emma. Tombant de nouveau sur son regard envieux, Regina se racla la gorge et se recula pour se retourner.

Emma la regarda, puis hésita. Enfin, elle finit par se blottir dans son dos. La brune sursauta, puis ferma les paupières d'aise sans que la sauveuse ne le remarque.

« Bonne nuit, lui chuchota Emma au creux de l'oreille. »

La main de la brune glissa sur celle d'Emma qui était serrée sur son ventre. Elle avait senti son souffle chaud sur sa peau.

« Bonne nuit Emma. »

Chapter Text

Chapitre 9

Emma sirotait distraitement un café de bon matin au Granny's. Elle était… fatiguée, mal coiffée, et visiblement dans un entre-deux. Hook s'installa en face d'elle, sans lui demander si la place est libre.

« T'es bien matinale. »

Lentement, la blonde remonta son visage vers le pirate.

Oh elle n'avait pas envie de le voir. Pas ce matin. Ni les autres, d'ailleurs.

Elle avait encore trop de trucs qui se bousculaient dans sa tête.

D'une part, elle avait encore l'impression de sentir les baisers de Regina sur sa bouche… Son corps… Son parfum, et le gout du chocolat sur sa langue et…

« Qu'est-ce que tu veux ? grogna la sauveuse. »

Hook soupira, dépité.

« Ecoute, t'étais pas obligé d'aller jusque là.

_ Jusque là quoi ?

_ Débarrasser toutes tes affaires du Jolly Rogers. »

Emma serra la mâchoire.

« Je pensais qu'on était une équipe. Une famille. Je me suis battu pour ça. J'ai même essayé d'accepter certaines… bizarreries, balança-t-il.

_ Bizar… Tu parles de quoi là ? demanda Emma, sur la défensive. »

Il haussa les épaules.

« Cette proximité soudaine avec Regina. »

Emma se pinça les lèvres, puis tourna son visage vers le mur.

« Bon, alors voilà… balança Hook, un peu nerveux. Je sais qu'elle est malade.

_ Quoi ?! explosa la sauveuse.

_ Henry a fini par me le dire.

_ C'est une plaisanterie ? hurla la blonde en clignant des yeux. »

Hook grimaça. Emma ignorait encore si le forcing venait de lui pour tenter de comprendre sa présence prolongée à Storybrooke, ou alors Henry qui voulait y mettre un terme. Mais elle n'aimait pas ça.

« Henry n'a rien fait de mal, Swan. Il avait l'air inquiet. J'ai juste posé une question et il a répondu. »

Emma serra la mâchoire.

« Je ne la déteste pas, tu sais. Enfin… je devrais peut-être. Mais là, ça va loin. T'es carrément parti de chez nous pour emménager avec elle. T'as pété les plombs ? »

Emma soupira, puis ferma les paupières en se massant le front.

« Je te connais, tu sais… T'as fait pareil avec moi à l'époque. Et avec Neal aussi. »

Vivement, la blonde se tourna vers l'homme face à elle.

« Je peux savoir de quoi tu parles ? siffla-t-elle. »

Hook soupira, puis s'enfonça dans sa chaise.

« Elle va mourir, et toi… tu joues à la sauveuse.

_ Regina ne va pas mourir, gronda Emma en serrant les dents.

_ Peut-être pas ce soir, ni demain, mais un jour et j'ai pas envie de… vivre avec une sorte d'épée de Damoclés au dessus de la tête jusqu'à ce que ça arrive. »

Emma se mordit la langue, puis serra le poing.

« Killian, balança-t-elle en un rire sans joie. Est-ce que tu crois que je m'amuse, là ?

_ Non.

_ Je suis venue pour aider Regina à traverser cette épreuve, et j'irais jusqu'au bout. Je suis devenue la ténébreuse pour elle, je suis capable d'aller encore plus loin, est-ce que c'est suffisamment clair pour toi ?

Hook ne répondit pas. Il se contenta de hausser les sourcils d'un air las. Presque méprisant.

Emma continua, d'une voix plus sèche.

« Tu sais ce que ça fait, de la voir lutter pour se lever ? De l'aider à tenir debout, de faire semblant que tout va bien pour qu'elle garde un peu de fierté ? »

Hook baissa les yeux. Mais ce n'était pas de la compassion.

« Je sais ce que c'est que de veiller sur quelqu'un, ouais, répondit-il. Je l'ai fait pour toi. Quand tu allais mal. Quand tu ne savais même plus qui t'étais. »

Emma grimaça.

« C'est pas la même chose.

_ Non, c'est vrai. Parce que moi je t'aimais vraiment. Elle, elle t'apprécie juste maintenant que tu es disponible pour elle, tu vois. »

Emma sentit son souffle se bloquer. Puis elle se pencha en avant, les coudes sur la table.

« Je t'interdis de dire ça.

_ Ah ouais ? Pourtant, elle t'as laissé partir de la ville non ? Et avec le sourire si je me souviens bien ! »

Emma se mit à rire. Et Hook n'aimait pas ça.

« Tu veux que je te dise ce que je pense ? demanda-t-elle en se pinçant l'arête du nez.

_ Franchement, je crois pas…

_ Je pense que t'as juste peur pour ta petite personne, comme d'habitude. »

Le pirate se redressa, croisa les bras, plus crispé.

« Tu m'accuses de quoi au juste ? De souffrir ? D'être laissé sur le carreau quand t'auras terminé ton numéro de martyr auprès de la méchante reine repentie ? »

Emma siffla entre ses dents.

« Tu sais ce qui est triste ? C'est que t'arrives même pas à voir à quel point t'es minable, là. Regina est en train de se battre. Et toi, t'es là à compter les jours en espérant que je revienne pleurer dans tes bras.

_ Tu crois que t'es la seule à pouvoir souffrir ? À avoir peur de perdre quelqu'un ? Tu crois que je ressens rien depuis que tu t'es barré ?

_ Oui et bien si tu veux que je revienne, c'est pas de cette façon que tu vas y arriver. De base, je suis venue ici pour la soutenir. Parce qu'elle était seule !

_ Elle avait son fils.

_ Il viens d'avoir 18 ans !

_ Et alors ? »

Hook prit une inspiration. Puis, il s'avança en s'accoudant sur la table d'un air concerné.

« Ecoute. Quand on s'est mit ensemble, tu étais perdue, brisée, incapable de te regarder en face. Et bizarrement, Regina t'a jamais récupérée à ce moment-là. Elle était trop occupée à te reprocher d'avoir ramener la femme de son mec. »

Emma se figea, les poings serrés sur la table.

« T'as pas le droit de dire ça. Tu mélanges tout.
_ Non, toi tu refuses de voir que tu répètes les mêmes schémas. Tu t'accroches à elle maintenant parce que t'as besoin de te sentir utile. T'as toujours eu besoin de ça pour aimer quelqu'un : qu'il soit en miettes.

_ Ruby ! »

Emma se tourna vers la serveuse et lui demanda tacitement l'addition. Car elle sentait que si elle restait une seconde de plus ici, elle allait finir par le tuer.

« Tu vas regretter ça ma chérie. T'es en train de tout sacrifier pour une femme dont tu sais pertinemment qu'elle est en train de mourir. Tu t'en rends compte au moins ?

_ Arrête. Arrête, arrête, arrête ! »

Ses cris instaurèrent un silence pesant dans tous le restaurant. Ruby arriva à leur hauteur, mais ralentit ses pas, ne sachant pas comment lui donner la note sans s'en prendre plein la figure elle aussi.

La louve n'avait jamais vu Emma dans cet état. Hook recula un peu son visage, surpris. Elle ne lui avait jamais crié dessus. Jamais. Même pas lorsqu'il était devenu le ténébreux.

« Je dis juste… la vérité, souffla-t-il. »

Emma attrapa l'addition que Ruby, prudente, avait fini par déposer à côté d'elle. Elle jeta quelques billets sans même vérifier le montant, puis se leva lentement.

Ses jambes tremblaient à peine. Elle se battait pour garder la tête haute. Sa voix, en revanche, était tranchante comme un rasoir.

« Ta vérité, tu peux te la mettre où je pense.

_ Emma, je ne te reconnais plus.

_ Moi non plus, explosa la sauveuse en tapant son poing sur la table. Regina a un putain de cancer, et toi tout ce que tu trouve à dire c'est qu'elle va crever et que je ferais mieux d'abandonner pour être avec toi ?! Va te faire foutre Killian ! »

Le silence qui suivit fut assourdissant. Même les couverts cessèrent de tinter.

Hook la fixait, abasourdi, incapable de répondre. Il cligna lentement des yeux, comme s'il venait de recevoir un coup qu'il n'avait pas vu venir.

Ruby fit un pas en arrière, instinctivement.

Emma, elle, resta droite. Les poings serrés, le souffle court, les joues rouges.

« Je reste avec Regina. Que ça te plaise, ou non. Et je… Je ne veux plus te voir ! »

En rage, la blonde se retourna, ne laissant pas l'opportunité à Hook de répondre, bien qu'il ait ouvert la bouche et levé la main.

Emma se tourna vers Ruby dès qu'elle fut arrivé à sa hauteur, les yeux encore hagards.

Elle recula d'un pas, puis se tourna vers Ruby.

« Tu diras à Granny que je suis désolée pour le vacarme. »

Et sans un mot de plus, elle sortit.

xXx

Emma n'eut même pas le cran de retourner au manoir, vide à cette heure, ni chez ses parents avec lesquels elle avait promis de déjeuner.

A la place, elle avait poussé la porte de la mairie… Elle l'avait même fait un peu trop fort car le claquement avait raisonné dans le hall vide.

Elle inspira profondément, referma derrière elle, et s'accorda quelques secondes, front posé contre le bois. Ses tempes pulsaient. Son cœur cognait. Elle avait l'impression que son propre corps tremblait encore de ce qu'elle venait de vivre.

Elle traversa le couloir d'un pas rapide. Les talons de ses bottes résonnaient contre le sol. Sa secrétaire n'était pas là, fort heureusement.

Sans frapper, Emma ouvrit alors la porte du bureau de Regina, les poings serrés. Et la brune elle, leva les yeux, surprise.

« Emma ? »

La blonde referma la porte derrière elle et resta un instant immobile, les yeux posés sur la reine.

Regina était en train d'écrire quelque chose. Sa main s'immobilisa au-dessus du papier. Elle fronça légèrement les sourcils en détaillant Emma : ses joues rouges, son regard noir, son souffle encore irrégulier.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? s'inquiéta-t-elle rapidement. »

Emma avança d'un pas. Puis un autre, jusqu'à se retrouver face à elle. Seul le pupitre les séparait. De dépit, la blonde posa ses mains sur le bureau et s'y appuya, comme si elle était capable de le renverser d'une seconde à l'autre.

« Regina j'en peux plus. Aide moi sinon je vais péter les plombs, souffla-t-elle en baissant la tête, histoire de tenter de calmer ses nerfs. »

Regina se leva à son tour. Elle contourna son bureau sans réfléchir et se posta à ses côtés.

« Assieds-toi. Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »

Emma secoua la tête. Elle ne s'assit pas. Elle serra les mâchoires, lutta, mais ne put s'empêcher de serrer les dents.

« Killian. Et Henry. Enfin non. Surtout Killian. Mais Henry lui a parlé. Et... putain, Regina. »

Elle déglutit, puis tourna sur elle-même, cherchant un point d'ancrage dans la pièce.

« Il a tout balancé. Ta maladie. Tout. »

Regina ne dit rien. Elle ne bougea même pas.

« Je suis allée au Granny's, soupira Emma. Je voulais juste un café, bordel. Et il s'est pointé, il m'a dit que j'allais trop loin. Puis, il m'a sortit que ce que je faisais ne servait à rien puisque t'allais mourir.

_ Oh…

_ Il a aussi dit servi un discours à la mort moi le noeud sur le fait que t'étais pas là quand j'allais mal et je… J'ai explosé ! »

Regina prit une inspiration, qu'elle bloqua dans sa gorge. Emma se tourna vers elle pour la regarder, alors que la main de la brune était juste au dessus de son épaule, sans oser la toucher entièrement.

« Regina, je crois que j'ai jamais crié comme ça, murmura-t-elle. »

La voix de la sauveuse s'étrangla et elle finit par s'écrouler sur le siège qui était près d'elle, complètement dépitée. Regina resta à ses cotés, et soupira.

Elle devait avoir une discussion sérieuse avec Henry.

Mais en attendant…

Machinalement, la reine baissa les yeux vers le corps d'Emma, recroquevillée. Elle ignorait comment s'y prendre… Alors, elle passa une main sur son dos, puis son épaule. A son toucher, Emma sembla un peu se détendre et laissa échapper une expiration difficile.

« Ne t'inquiète pas, murmura-t-elle. Tu sais comment fonctionne Hook… Il est maladroit.

_ J'en ai rien à foutre de sa maladresse. »

Cette fois, Emma se mit à renifler. Machinalement, elle passa le plat de sa main sous ses joues et remarqua que des larmes coulaient, sans même qu'elle s'en rende compte. C'était un mélange de rage et de tristesse trop contenues.

« Il a peur de te perdre, souffla Regina. Moi aussi j'aurais peur à sa place. »

Emma releva les yeux vers elle. Et cette fois, ce n'était pas de la colère qui se lisait dans son regard.

« Je sais pas comment tu fais pour lui trouver encore des excuses. »

Regina rit un peu, sans joie. Elle haussa les épaules, et soupira.

« Peut-être parce que… hé bien, que je t'aime et que je sais que tu tiens à lui. »

Lentement, Regina fronça les sourcils dans le vide en fixant le mur face à elle.

« On ne choisit pas toujours les armes les plus justes quand on tiens à quelqu'un. »

Machinalement, Emma soupira, puis entoura la taille de la brune qui sursauta. Elle ne s'habituerait jamais entièrement au contact.

Mais Emma enfouit son visage sur son abdomen. Ses bras serraient ses hanches et, après un soupir, Regina enlaça sa tête en posant sa joue juste au dessus. Emma ferma les paupières, encore bouleversée.

« Je suis pas faite pour encaisser tout ça… J'ai pas été faite pour perdre les gens que j'aime. »

Regina pouffa un peu, sans se défaire de sa position.

« Personne n'est fait pour ça, mais je vais m'en sortir. Et puis, tu pourras retourner chez toi. »

Emma déglutit difficilement.

« Et… souffla Regina. Et tout redeviendra comme avant. »

Emma sentit sa gorge se serrer et son estomac se nouer. Sa respiration se coupa un instant et elle se redressa un peu.

« Comme… comme avant ? répéta Emma en bafouillant un peu. »

Regina rougit, puis baissa les yeux sur le sol. Elle se décala de quelques centimètres, à peine, mais Emma le sentit.

Alors lentement, elle se leva et glissa sa main le long de sa taille pour la laisser reposer dans les creux de ses reins.

Son visage ne se trouva qu'à quelques centimètres de celui de Regina. Elle la fixa et leurs nez se frôlèrent. Emma sentit le souffle chaud de Regina caresser ses lèvres.

Elles n'étaient qu'à un souffle l'une de l'autre, mais la peur que cela dérape prenait le pas.

« Je veux pas que ça redevienne comme avant, murmura la blonde. »

Regina hocha à peine la tête. Leurs nez se frôlèrent à nouveau.

Regina s'approcha à peine, le menton levé.

« Moi non plus… finit-elle par lui chuchoter. »

Emma inclina le visage. Puis un léger retrait. Puis un frôlement de front.

Leurs nez se croisèrent, se frôlèrent, à gauche, à droite, comme deux pôles aimantés qui ne savaient plus s'ils devaient s'attirer ou s'éviter.

Leurs souffles s'accrochaient dans l'espace entre elles. Régulier. Trop. Et quand Regina inspira un peu plus fort, Emma sentit sa propre cage thoracique se contracter.

Elle voulait l'embrasser. Et Regina, elle, tremblait à l'idée de le faire.

Le silence entre elles vibrait.

Emma n'osa pas bouger. Et ce fut Regina qui, du bout de ses doigts, effleura la mâchoire de la blonde. Juste là.

Elles semblaient suspendues dans cette presque-étreinte, si bien que lorsqu'on toqua à la porte, aucune des deux ne se recula.

Emma ne bougeait plus. Regina non plus. Son regard allait de la bouche d'Emma à ses yeux. Elle aurait pu se pencher.
Elle aurait pu l'embrasser.
Mais elle ne le fit pas.

Emma, elle, se pencha d'un millimètre. Puis se ravisa.
Leurs nez se frôlèrent de nouveau.

La tension entre elles était si dense, c'était presque plus intime qu'un baiser.

« Tu ne réponds pas ? lui murmura Emma. »

Elles se fixèrent un instant. Regina ne répondit pas. Emma sentait la chaleur qui émanait de la brune, la tension dans ses épaules, la façon dont sa respiration soulevait à peine son buste.

Elle avait l'impression d'entendre son cœur battre.

« Ça ne doit pas être important, rit nerveusement la reine en un souffle.

_ Regina ? »

C'était la voix de Mary Margareth.

Mais toutes deux semblaient incapable de détacher leurs regards l'une de l'autre. Regina était presque tentée par l'idée de laisser Snow entrer sans se défaire de la prise d'Emma, tant cela lui semblait insupportable de le faire.

« C'est ma mère, murmura-t-elle d'une voix inaudible alors que sa bouche semblait cette fois, à deux doigts de toucher la sienne.

_ Mmh, elle… commença la brune avant de se racler la gorge. Elle doit se demander où tu es.

_ Je devais déjeuner avec elle. »

Sa main serra sa taille, juste un peu plus et cela suffit pour arracher une expiration de délice à la brune.

« Tu devrais peut-être… aller lui ouvrir, souffla Regina, même si sa voix manquait de toute conviction. »

Emma ne répondit pas.

Son regard glissa un instant vers la porte. Puis revint aussitôt vers elle. Toujours ce même souffle suspendu.

« Je peux aussi rester encore une minute, murmura-t-elle. »

Regina hocha très légèrement la tête, les yeux fixés sur les lèvres d'Emma, comme si elle n'arrivait plus à penser. Leurs lèvres s'effleurèrent presque, et un frisson parcourut l'échine de Regina. C'était tout juste assez suffisant pour qu'elle sente à quel point Emma la voulait.

Oh elles en avaient envie, si fort que s'en était effrayant.

Puis, de nouveau, la porte toqua et la brune ferma les yeux.

« Tu devrais vraiment… y aller, répéta Regina dans un souffle. »

A son tour, Emma les ferma, juste une seconde. Et elle rouvrit les paupières.

« Je reviens, souffla-t-elle. »

Quand elle recula enfin, leurs corps protestèrent en silence. Regina se détourna entièrement, puis posa le plat de sa main sur sa joue d'un air peut-être un poil catastrophée de l'effet qu'elle venait de vivre.

Lorsque Regina rouvrit les yeux, elle croisa son reflet dans la vitre du bureau. Ses joues étaient colorées et son regard troublé.

Elle ressemblait à quelqu'un d'autre.

Non.

Elle ressemblait à elle-même. Mais à une version… qu'elle avait oubliée.

Emma quant à elle, se retrouva devant la porte. Mais ses mains tremblaient tellement, qu'elle dut prendre une seconde supplémentaire pour se remettre d'aplomb.

« Bon sang… murmura-t-elle d'un rire nerveux. »

Machinalement, Emma passa une main dans ses cheveux pour y remettre de l'ordre.

Lorsqu'elle ouvrit la porte, Snow avait le poing pendu en avant, prête à toquer voir à tambouriner pour la troisième fois consécutive.

« Emma ! s'exclama-t-elle, surprise. Tu es là, je te cherchais partout. »

La blonde lui accorda un sourire de façade, mais ne put cacher sa gêne pour autant. Snow le remarqua et plissa les yeux vers elle.

« Ça va ?

_ Ouais ! Parfaitement. Ça va super. »

Son ton était un peu trop enthousiaste pour être honnête. Et ses joues, toujours rougies, trahissaient autre chose que la température ambiante.

Snow pencha la tête, l'air suspicieux. Pour autant, elle ne dit rien. Elle soupira, puis secoua la tête.

« Tu avais oublié qu'on devait déjeuner ensemble ? »

Emma grimaça.

« Un peu, ouais. Je suis désolée. Je voulais juste… passer dire bonjour. Et le temps a filé. »

Snow tourna le regard et vit Regina en retrait, en train de rassembler ses pensées, debout derrière son bureau.

« Oh Regina, souffla Snow, surprise. Je ne t'avais pas vue.

_ Bonjour Mary Margaret, répondit la maire, parfaitement polie. »

Son ton était neutre, presque trop. Elle n'avait pas bougé. Elle attendait que la scène passe ou que… l'air redevienne respirable, peut-être.

Une sorte d'ambiance gênante s'imposa alors dans la pièce, sans que Mary Margareth ne comprenne pourquoi.

Emma avait les bras désormais croisés devant sa poitrine, comme si sa… présence était importune. Snow fronça les sourcils.

« Tu n'as pas l'air d'avoir la tête au déjeuner, marmonna-t-elle.

_ Si, si. J'arrive. Je… juste, je termine avec Regina. Deux minutes. Ça te va ? »

Snow les regarda toutes les deux, puis son regard à elle s'arrêta.
Elle ne dit rien, mais quelque chose passa sans que quiconque ne sache vraiment ce que c'était.

« Oui… Bien sûr. Je t'attends dehors. »

Puis elle sortit.

Lorsque Emma se retourna vers Regina, elle laissa échapper un très long soupir soulagé. Et la brune lui adressa un léger sourire, le rouge aux joues avant de dévier son regard rempli de pudeur sur ses dossiers.

Super, voilà qu'elle n'arrivait même plus à la regarder en face… Quelle catastrophe.

« Du coup, je… commença Emma en faisant un pas.

_ Tu ? »

Emma glissa son regard sur la brune et se tortilla un peu les doigts.

« On… devrait parler à Henry. »

Regina se contenta de hocher la tête, toujours sans trouver le cran de plonger ses pupilles dans celles de la sauveuse.

« On en parlera avec lui ce soir.

_ Bien, répondit Emma. »

Puis, Emma se balança d'un pied à l'autre comme une stupide adolescente et se détesta pour ça.

« Bien, bien, répéta-t-elle avec gêne. »

Regina pinça les lèvres, puis, dans un élan discret, elle remit une mèche de cheveux derrière son oreille d'un geste qui, sur elle, paraissait presque trop humain.

Emma l'observa faire, puis détourna aussitôt les yeux.

« Je vais… »

Elle fit un geste vague vers la porte.
Regina hocha la tête, sans un mot. Toujours concentrée sur ses papiers. Ou du moins, elle faisait mine.

Emma recula d'un pas. Puis d'un autre.
Mais avant d'atteindre la poignée, elle s'arrêta.

« On se voit… tout à l'heure ?

_ Oui.

_ Je veux dire, avant que Henry ne revienne, répondit Emma, une fois encore nerveusement. »

Regina leva les yeux. Emma la regarda, et un espèce d'éclair passa entre elles.

« Pour… pour discuter de ce qu'on devrait lui dire, ajouta la sauveuse en déglutissant. »

Regina rougit, puis baissa de nouveau le regard sur son stylo.

« Oui, oui bien sûr, répondit-elle la voix chevrotante.

_ A ce soir alors.

_ A ce soir, répéta Regina. »

Emma sortit. Et cette fois, la porte se referma doucement derrière elle.

Chapter Text

PRÉPAREZ-VOUS car je vous concocte une autre fic juste après celle-ci (ouais j'ai complètement craqué mon slip). Je la sortirais dès que j'aurais fini la publication de Disease qui est déjà terminée depuis un petit moment !


Chapitre 10

Le manoir était plongé dans une semi-pénombre en cette chaude soirée. Lorsque Regina était arrivée, elle avait remarqué la coccinelle jaune d'Emma déjà garée dans l'allée. Alors elle avait prit une longue inspiration pour se donner du courage avant d'entrer chez elle.

Elle remarqua qu'il régnait dans la maison un silence confortable.

Après s'être débarrassée de sa paire d'escarpins, non sans un soupir de soulagement, Regina vit la lumière du petit salon allumée. Elle hésita à entrer, car elle savait exactement qui s'y trouvait… Mais elle ne pouvait pas faire l'autruche, surtout sous son propre toit.

Alors, lorsque la brune pénétra dans la pièce, c'est sans surprise qu'elle vit Emma assise sur le canapé. La blonde tenait un verre à moitié vide dans les mains. Elle en fixait le fond, comme s'il allait l'aider d'une quelconque manière. Alors, Regina se racla la gorge et Emma sursauta presque.

« Regina, souffla-t-elle en se levant. »

La brune lui accorda un sourire gêné et continua d'éviter son regard… Ce qui était nouveau. Depuis la petite scène de cet après midi, une partie d'elle n'osait plus le faire.

« Qu'est-ce que tu bois ?

_ Oh. Rien d'interessant, balaya la sauveuse. Je me cherche juste un peu de contenance pour réfléchir à ce que je vais bien pouvoir dire à notre fils. »

Regina hocha la tête, sans rien dire de plus. Et Emma finit par vite poser son verre sur la commode à côté d'elle.

« Il faut qu'on lui parle, dit-elle en retournant sur le sofa. »

Regina laissa échapper une longue expiration. Elle vint prendre place à ses côtés et se laissa peu à peu couler contre le dossier.

« Je sais, dit-elle en fixant le mur face à elle.

_ Pourquoi est-ce qu'il a été raconté ça à Hook ? souffla Emma, encore scandalisée en se tournant un peu vers elle.

_ Je suis sûre qu'il ne pensait pas à mal, trancha la brune.

_ Dans ce cas, il n'aurait pas du me cacher ça à moi !

_ C'est différent pour toi, il avait peut-être peur de ta réaction. »

Emma secoua la tête, dépitée. Et elle était en colère, aussi.

« Je me suis dis qu'on pouvait l'attendre… Je sais pas, assises sur la table du salon avec un air ultra sérieux, mais je trouvais que ça faisait un poil solennel, balança Emma en s'appuyant en avant sur ses genoux. »

Regina laissa échapper un léger soupir amusé.

« Légèrement, oui. »

Regina croisa les bras, un sourire las au coin des lèvres.
Emma, elle, haussa les épaules.

« Ok. Donc pas autour d'une table. Pas dans sa chambre, non plus. Et je refuse qu'on lui balance ça dans la voiture, genre au feu rouge. »

Regina rit doucement.

« Tu plaisantes, mais je suis certaine que tu y as pensé très sérieusement. »

Emma l'observa du coin de l'œil.
Elle adorait ce rire-là. Celui qui n'était pas forcé. Celui qui trahissait un relâchement rare chez la brune.

« Tu sais, il faut peut-être juste… être honnêtes, finit-elle par dire. Lui dire qu'on aurait aimé qu'il garde ça pour nous. Et que ce n'est pas rien. Que c'est grave. »

Regina hocha lentement la tête. Son regard, fixé sur le vide, s'était fait plus profond. Plus tendre aussi.

« Et que ça m'a blessée, ajouta-t-elle. »

Emma la regarda.
Ses doigts, posés sur son genou, hésitèrent. Puis ils bougèrent. Et enfin, Emma posa définitivement sa main sur la cuisse de la reine.

« Je suis désolée, dit Emma avec une sincérité effarante.

_ Tu n'as pas à l'être, ce n'est pas de ta faute. »

Regina passa une main las sur son visage et Emma l'observa avec un regard préoccupé.

« Tu devrais aller te coucher, lui glissa-t-elle. Tu es crevée, je le vois.

_ Je vais bien, répondit Regina, peu convaincue pourtant. Je suis… juste un peu fatiguée. »

Un silence s'imposa entre elles avant que Emma ne soupire.

« Tu veux que je monte avec toi ? demanda-t-elle avec douceur. »

Regina ne répondit pas tout de suite.

Elle détourna un peu les yeux. Puis revint vers elle. Elle hésitait, Emma le savait.

« S'il arrive, on l'entendra. Va savoir à quelle heure il décidera de pointer le bout de son nez. C'est pourtant pas faute de lui avoir dit, mais je pense qu'il doit bien se douter que je l'attends au tournant. »

Regina hésita encore. Puis, elle se mordit la lèvre et acquiesça enfin au bout de quelques secondes. Elle se leva et Emma la suivit. Sur le chemin de l'escalier, elle effleura le bas de son dos sans même y penser.

Regina entra la première, sans même allumer les appliques. Elle se dirigea directement vers le lit, lentement, comme si chaque pas devenait un peu plus lourd. Emma referma la porte derrière elles. Puis, elle retira sa veste et la déposa avec soin sur le fauteuil près de la coiffeuse.

« Tu veux que je te laisse te changer ? demanda la sauveuse. »

En guise de réponse, Regina s'assit au bord du lit. Elle prit une longue inspiration, comme si elle devait se convaincre que tout allait bien.

« Je… j'ai juste besoin de m'allonger un petit moment. »

Emma s'approcha d'elle, soucieuse. Elle s'agenouilla et posa ses mains une fois encore sur ses jambes.

« Tu es sure que ça va ? »

Regina hocha la tête, se voulant convaincante tout en gardant son regard fuyant.

Emma soupira de nouveau.

« Bon allez, je vais t'aider à te déshabiller.

_ Ne fait pas l'idiote, je suis quand même encore capable de faire ça.

_ Tu es vraiment têtue, je t'ai déjà vu à poil je te signale, marmonna Emma. »

Regina pouffa un peu, puis réalisa que c'était vrai. Elle se laissa machinalement guider par les gestes d'Emma qui se contenta de l'aider à se débarrasser de son pantalon.

« Tu veux que je reste, cette nuit ? demanda-t-elle. »

Quelle question idiote, songea Regina sans trouver le cran de le dire à voix haute.

« Pourquoi tu ne resterais pas ? lui demanda la brune en fronçant les sourcils. »

Emma rit un peu, puis contourna le lit. Regina la regarda faire, les yeux plissés.

« J'en sais rien moi, balança la sauveuse en déboutonnant son jean à son tour. On sait jamais, vaut mieux que je m'assure que tu sois d'accord.

_ Eh bien, c'est très galant de ta part, mais je crois que c'est un peu tard pour te rétracter maintenant que tu as commencé.

_ Ha ha ha, lâcha Emma d'un ton cynique en prenant place à ses côtés. »

Le lit grinça à peine sous son poids.

Emma tira doucement le drap sur elle, le coin calé jusqu'au ventre, et croisa les bras derrière sa tête, les yeux au plafond. Regina se positionna sur le flanc et la fixa en un soupir.

« Tu me dis si ça ne va pas ok ?

_ Je vais bien. »

Un silence s'imposa entre elles durant de longues minutes. Emma plissa les yeux dans l'obscurité, plongée dans ses pensées. Puis, soudain, elle se redressa un peu. Regina qui ne dormait pas, la jaugea, surprise.

« Quoi ?

_ Je viens de réaliser… Il ne te reste plus qu'une séance de chimio. Non ?

_ Oh euh… oui. La semaine prochaine. Mais avant d'y mettre définitivement un terme, on doit s'assurer qu'elles étaient suffisantes.

_ Tu devrais fêter ça, affirma Emma. »

Regina leva les yeux au ciel.

« Fêter quoi ? marmonna-t-elle. Le dernier jour où j'aurais une paire de seins sous mon nez ? »

Regina venait de se retourner sur le dos d'un geste las. Emma, elle, se tourna vers elle, puis cligna des paupières plusieurs fois.

« Quoi ? bafouilla la sauveuse.

_ Je te signale que ce n'est pas encore fini.

_ Tu… »

Emma se redressa encore, interloquée.

« Tu vas accepter ? murmura-t-elle. »

Regina la regarda, puis ouvrit la bouche, avant de la refermer, hésitante.

« Eh bien, je… J'y ai bien réfléchi. Et… et j'ai changé d'avis. Je vais faire l'opération. »

Emma la fixa, bouleversée. Regina elle, ne remarqua pas cela, mais rougit en baissant les yeux.

« C'est à cause de ton regard de merlan fris, finit-elle par répondre en haussant le menton avec une sorte de fausse fierté. »

Emma ouvrit la bouche, soufflée.
Mais aucun mot n'en sortit.

Pas tout de suite.

Elle resta là, appuyée sur un coude, à fixer Regina comme si elle la découvrait pour la première fois. Elle ne savait pas quoi dire. Elle ne savait même pas si elle devait dire quelque chose.

Et puis, elle sourit. Juste un peu.

Un sourire immense et fragile.

Regina, elle, détourna les yeux en soupirant.

« Arrête. Tu vas encore faire cette tête… cette tête que je supporte pas. »

Emma rit, tout bas et elle se rapprocha, juste un peu.

Ses doigts effleurèrent la couverture entre elles. Puis le bras de Regina.

« Quelle tête ? murmura-t-elle. Celle de quelqu'un qui est fière de toi ? »

Regina secoua la tête, comme si Emma venait de dire quelque chose de totalement absurde.

Alors, la sauveuse s'approcha, puis vint poser son menton sur l'épaule de Regina en l'admirant.

« Celle de quelqu'un qui t'aime ? souffla-t-elle dans l'ombre. »

Regina tourna alors lentement le regard vers elle.

« Tu sais que ça ne sert plus à rien de me flatter ? »

Emma lui sourit et Regina sentit son parfum près d'elle. Puis, leurs regards s'accrochèrent et le coeur de la reine sembla s'arrêta un léger instant.

« C'est pas flatteur, j'ai un coeur magique, répondit Emma en une moue boudeuse avant de s'éloigner un peu. »

Regina rit cette fois franchement et la sauveuse, avec impulsivité, l'agrippa par la taille. Regina retomba alors sur son corps et la regarda à son tour, accoudée au dessus d'elle. Elle se mordait la lèvre en souriant, ce que Emma trouvait particulièrement adorable.

« On fait une drôle de paire toi et moi tu sais, lui glissa Regina en touchant son visage du bout des doigts.

_ Qu'est-ce que tu veux dire ? lui demanda Emma en une aspiration en fixant inconsciemment sa bouche.

_ Tu es née pour sauver, aimer et moi je suis l'irrécupérable vilaine de l'histoire. »

Emma fronça doucement les sourcils, sans cesser de la regarder. Elle pencha la tête, comme pour mieux l'étudier.

« Tu sais ce que je vois, moi ? demanda-t-elle.
_ Dis-moi. »

Regina avait murmuré. Elle n'avait pas bougé. Sa main était toujours posée sur la joue d'Emma.

« Je vois la seule personne qui m'a fait me sentir à ma place. »

Regina s'arrêta alors instantanément. Elle glissa ses doigts sur la bouche d'Emma pensivement comme si elle voulait la faire taire, ou peut-être juste s'assurer que ces mots avaient bien été dits. Sa poitrine était écrasée sur celle d'Emma et leurs bustes se soulevaient à cette même allure, vive et profonde.

« Je t'aime Emma, souffla Regina, le regard fixé sur sa bouche. »

Ses mots étaient d'une telle douceur qu'Emma sentit son coeur se gonfler. Elle se redressa alors un peu. Elle lui adressa un regard furtif, comme pour lui demander tacitement l'autorisation. Regina accepta en un léger mouvement en avant. Emma soupira alors et captura sa bouche.

Son baiser était simple, et si tendre que Regina ferma les paupières. Elles se quittèrent à peine. Puis, leurs lèvres se retrouvèrent encore une fois, un peu plus longtemps cette fois.

Puis encore.
Et bientôt, leurs bouches ne se quittèrent plus.

Les mains d'Emma se glissèrent dans le dos de Regina, sans chercher à aller plus loin. Elle voulait juste la garder contre elle, l'avoir là, dans ses bras, avec cette chaleur et ce frisson qu'elle sentait à travers la peau.

Regina se repositionna un peu, ce qui arracha un soupir de bien être à la blonde. Emma profita de ce léger mouvement pour resserrer un peu plus son étreinte. Sans même réfléchir, elle descendit une main dans le creux de ses reins, traçant du bout des doigts la ligne douce qui allait jusqu'à sa hanche.

Le drap glissa un peu sur leurs peaux chaudes.

Elles n'étaient plus tout à fait face à face, mais plus proches que jamais. L'une contre l'autre, le poids de leurs corps s'ajustait en silence.

Puis, leur baiser cessa et toutes deux déglutirent.

« Désolée, murmura Emma. »

Un frisson secoua la brune. Elle se mit à caresser son visage pensivement.

« Embrasse-moi encore, chuchota la brune. »

Emma leva un regard brulant que Regina lui rendit. Sans un mot, la sauveuse glissa ses lèvres un peu plus bas, juste sous l'oreille de la brune qui ferma lentement les paupières. Chaque baiser qu'elle déposait semblait faire vibrer quelque chose de plus profond, quelque chose d'enfoui depuis trop longtemps. Elle ne faisait que l'embrasser… mais c'était déjà suffisant pour que Regina se tende légèrement.

Inconsciemment, elle lui offrit sa gorge et lorsque Emma y posa sa bouche, Regina soupira d'aise. La main d'Emma glissa alors sur sa silhouette et le long de son corps.

La blonde releva la tête, juste un peu. Elle observait la gorge de Regina, cette ligne tendue, vulnérable, offerte. Elle la toucha de nouveau, du revers de la main cette fois, et remonta sur le côté de sa poitrine, sans encore la saisir. Puis elle resta là… en suspens.

Emma jeta un dernier regard vers Regina, dans l'attente de quelque chose. Un accord, peut-être.

Alors, la reine prit cette main, que la sauveuse n'osait descendre pour le faire à sa place et l'invita tacitement à explorer son corps.

A bout de quelques secondes, Regina se recula, juste assez pour la regarder faire et Emma en fit de même.

Toutes deux observèrent alors sa paume aller et venir, remontant de son flanc jusqu'à son ventre. Regina sentait ses jambes nues épouser celle de la blonde alors qu'elle était légèrement tournée sur le côté.

« Tu trembles, lui glissa Emma d'une voix chevrotante. »

Regina sourit à peine. Les mains de la sauveuse caressaient l'arrière de ses jambes et Regina ferma les paupières, juste pour mieux apprécier son contact.

Emma se redressa un peu, puis sa bouche s'approcha de son oreille.

« Qu'est ce que tu veux que je fasse, lui murmura-t-elle en touchant ses fesses. »

Regina, les paupières toujours closes, se retint de ne pas gémir comme si c'était sa première fois. Mais son souffle, lui, s'était coupé.

« Je veux… »

Sa voix se brisa. Elle était incapable de le formuler. Elle aurait presque pu s'évanouir, là tout de suite.

Dans un mouvement à peine perceptible, Emma remonta une des jambes de la brune qui se laissa faire, pour la faire glisser contre sa cuisse.

Emma gardait une respiration calme en apparence, mais son ventre se contractait sous la tension. Regina, elle, était contre son flanc. Juste contre. Sa cuisse nue se pressait tout doucement contre la hanche d'Emma. Son souffle effleurait à peine sa clavicule.

Quand elle retrouva ses pupilles, ces dernières transpiraient de désir.

« Moi aussi, murmura enfin Emma. »

La brune laissa échapper un léger, très léger gémissement. Imperceptiblement, sans s'en rendre compte, Emma pressa un peu une de ses fesses. Alors, presque sans y penser, elle se mit à bouger. Juste un mouvement lent et mesuré, un frottement délicat de son bassin contre la cuisse tendue d'Emma. Pas pour provoquer. Pas tout à fait.

Emma tourna le visage vers elle, mais elle ne dit rien. Sa main effleura l'épaule dénudée de Regina, glissa sur son bras, remonta jusqu'à sa nuque.

Un soupir. Puis un second.

Regina recommença. Sa respiration s'accéléra légèrement, tandis que son front se posait contre celui d'Emma, comme pour s'excuser sans mots. Elle se frottait lentement à sa cuisse, le rythme régulier, contenu, presque douloureusement tendre.

Puis elle s'arrêta soudain en réalisant ce qu'elle faisait.

Ensemble, elles rouvrirent les yeux. Emma elle, n'hésita plus et se tourna légèrement vers elle pour appuyer son genou dans son entrejambe, ce qui arracha un soupir plus fort à la reine.

« Comme ça ? »

Regina hocha la tête en retenant un nouveau gémissement. Alors, Emma la serra un peu plus et manqua de planter ses ongles dans sa chaire.

« Bouge sur moi. Encore.

_ Emma… commença à protester Regina. »

Elles se fixèrent. Et dans le regard d'Emma transpirait une lueur de défi.

Regina manqua de flancher. Sans même parvenir à se raisonner, elle ondula de nouveau doucement sur elle, le corps complètement en feu. Emma sentit ce contact, chaud et direct, et sa respiration se coupa une seconde. Elle tourna à peine la tête. Leurs bouches étaient proches. Trop. Le souffle de Regina s'écrasait contre sa joue.

Son bassin suivit un rythme discret, juste assez pour créer cette tension brûlante entre elles. Elle frottait l'intérieur de sa cuisse contre la hanche d'Emma avec une pudeur presque douloureuse. Comme si elle avait honte de combien elle en avait besoin. Et pourtant, elle ne s'arrêtait pas.

Emma la regardait faire. Ses yeux rivés sur ce visage troublé, offert à quelques centimètres du sien.

Elle leva la main, toucha la hanche de Regina. Juste là. Pour la guider, ou la retenir, elle-même ne savait pas.

« Viens là… souffla-t-elle enfin, dans un murmure rauque. »

Alors Regina, dans un souffle coupé, se redressa. Doucement. Elle passa une jambe par-dessus elle. Et dans un glissement fluide, presque solennel, elle se retrouva à califourchon sur le corps d'Emma Swan.

Regina était là, au-dessus d'elle, les cuisses ouvertes, le bassin posé avec justesse, mais elle ne bougeait plus. Ses mains aux ongles si parfaits étaient posées sur le torse de la sauveuse. Son regard descendait lentement sur le visage d'Emma, puis sur sa gorge, ses épaules. Elle semblait… ailleurs. Concentrée.

« Continue, lui glissa Emma. »

Regina cligna des yeux vers elle, troublée.

Alors elle recommença. Un mouvement, si lent, qu'Emma le sentit dans tout son corps. Ses hanches dansaient à peine, cherchant un contact plus profond, mais toujours voilé par la fine couche de tissu entre elles. Puis le drap retomba, pile au dessus de ses fesses, ce qui en dévoilait un peu plus.

Emma posa les mains sur ses cuisses, l'encaissant à peine. Elle la regardait comme si elle n'avait jamais rien vu de plus beau. Ses doigts remontèrent, frôlant les hanches, puis les flancs. Elle ne touchait pas plus haut. Pas encore.

Regina haletait maintenant, le dos légèrement cambré, les yeux mi-clos.

« Tu es tellement belle, souffla Emma, ses yeux parcourant ses courbes. »

Regina s'enhardit. Elle ondula un peu plus vite. Juste un peu. Sa culotte frottait contre celle d'Emma, leurs corps trop proches, trop habillés encore, mais déjà tellement synchrones.

La blonde avait peur qu'elle vienne la, tout de suite. Elle n'avait pas envie que ce soit si rapide. Alors, elle se redressa en fixant ses lèvres et Regina se pencha en faisant de même. Sa bouche trouva celle d'Emma, et ce baiser-là fut brûlant, profond, presque douloureux.

Emma remonta une main sur sa nuque et l'attira plus fort. Leurs corps se pressaient maintenant à chaque mouvement. C'était lent. Envoûtant. Sensuel à en perdre le souffle.

Ça l'était tant qu'Emma dut mettre fin au baiser en s'écrasant sur le matelas.

Les prunelles plongées dans les siennes, elle remonta et caressa son dos, ses reins, puis ses omoplates jusqu'à jouer avec la fermeture arrière de son soutien gorge. Regina gémit, le souffle chaud.

Il y avait une sensualité sans pareille et surtout, une excitation certaine à garder son regard sur son visage pendant que sa main se perdait sur sa peau.

Emma dégrafa alors une seule attache. Le tissu se relâcha un peu plus contre la peau de Regina, mais elle ne le retira pas. Elle resta là, encore vêtue, juste un peu. Regina dut s'arrêter une nouvelle fois tant elle avait peur de jouir sur place.

Les doigts de la blonde s'arrêtèrent sous le tissu du soutien-gorge. Ils n'y entrèrent pas. Ils l'effleurèrent seulement. Du bout des phalanges, elle caressa la courbe que le tissu dessinait.

Regina frissonna. Son ventre se contracta.

Emma releva un peu le buste, juste assez pour glisser son nez contre le creux entre ses seins encore couverts. Elle respira là, bouche entrouverte.

Ses mains vinrent ensuite lentement cueillir le bas du soutien-gorge. Pas pour l'enlever. Pas encore.

Elle le toucha du bout des doigts. Et remonta, à l'extérieur du tissu, paumes à plat. Ses pouces vinrent caresser l'endroit exact où les tétons de Regina pointaient si fort sous son dessous.

Regina ne bougeait plus. Ses hanches s'étaient immobilisées. Ses cuisses serrées autour des flancs d'Emma, elle la regardait céder à elle. Les mains d'Emma remontèrent enfin et enveloppèrent sa poitrine. Complètement. Ses paumes l'emplirent, lentement, et ses pouces tracèrent un cercle léger contre la peau.

Regina ferma les yeux. Un soupir d'extase glissa de ses lèvres. Elle bascula légèrement plus en avant, offrant tout le poids de son buste aux mains qui la tenaient.

Regina était toujours à califourchon, toujours au-dessus, mais elle ne dominait plus rien.

Les pouces de la blonde recommencèrent à bouger. Ils dessinaient de larges cercles autour de ses seins, alternaient la pression, remontaient parfois jusqu'à la naissance de ses clavicules avant de revenir.

Et les gémissements de Regina devinrent des murmures.

Emma glissa ses mains de sa poitrine à sa taille, puis à ses hanches. Elle la soutenait à peine. Comme si elle n'osait plus rien brusquer.

« Continue de bouger, lui intima-t-elle en fixant sur elle un regard brûlant. »

Et Regina reprit de nouveau. Ses mouvements étaient cette fois amples. Puis, de plus en plus assurés au fil des secondes, jusqu'à ce que Emma la rejoigne en se frottant à elle un peu elle aussi.

« Emma, gémit-elle. »

La blonde leva un peu les yeux. Elle la regardait faire.

C'était presque un spectacle, en effet, mais un spectacle intime. Peu à peu, elles dansaient ensemble, dans cette lenteur brûlante. Leurs souffles s'échauffaient, cadencés, presque synchrones.

Les mains d'Emma s'étaient posées sur les cuisses de Regina, puis sur ses hanches.

Regina soupira, la nuque basculée en arrière. Elle continua de bouger contre elle, se frottant à son bassin avec une lenteur quasi calculée.

Un frisson intense les parcourut en même temps.

La blonde posa de nouveau ses lèvres sur sa peau tiède. Sa respiration était hachée et elle semblait aussi excitée, voire plus encore que la brune sur elle.

Puis, elle lécha de manière indécente son cou et Regina se sentit presque partir.

D'un geste lent, elle s'accrocha pourtant à elle et Emma en fit de même pour ne pas cesser ses caresses buccales. Elle embrassa sa clavicule, puis glissa une main sur sa nuque, attirant doucement Regina de nouveau vers elle.

Elles s'embrassèrent encore. Plus lentement cette fois, mais plus profondément.

S'en fut vite trop et Regina se détacha. Elle encadra le visage de la blonde de ses mains. Comme pour fixer l'instant.

« Encore, lui murmura la brune. »

Emma glissa ses doigts ensuite sur sa hanche, puis toucha le bord de son string.

Regina soupira, puis laissa sa main se perdre aussi sur le torse de la sauveuse. Ses gestes étaient calculés et elles s'observèrent se découvrir l'une l'autre.

Les mains de Regina glissaient sur elle comme on explore un trésor ancien.

Ses doigts s'attardaient sur la peau nue, sur les lignes de ses clavicules, sur la courbe douce de sa poitrine. Elle en retraça les contours du bout des ongles, si lentement qu'Emma ferma les yeux.

Puis Regina se pencha. Elle déposa un baiser, puis un second, juste là, au creux de son cou.
Un souffle plus bas, un frisson plus haut.

Elles s'embrassèrent à nouveau, longuement.

Leurs langues se retrouvèrent dans un rythme languide et mouillé.

Un gémissement trembla entre leurs lèvres.

Emma bascula la tête en arrière dans un soupir rauque. Ses mains trouvèrent les hanches de Regina, qu'elle serra à peine, comme si elle avait peur de briser quelque chose.

Mais Regina continuait, toujours aussi lentement et parfaitement ancrée à elle.

Elle recommença à onduler sur elle, d'un mouvement circulaire et retenu, en un va-et-vient lent, un balancement maîtrisé.

Chaque rotation éveillait un peu plus leurs corps.

Emma ouvrit les yeux pour la regarder. Elle était envoutante.

Regina gardait les siens mi-clos, la bouche entrouverte. Elle mordit légèrement sa lèvre inférieure, prise dans une vague qu'elle n'essayait même plus d'arrêter. Sa respiration était chaude, bruyante, saccadée. Elle s'ancrait de plus en plus contre Emma. Son bassin glissait avec une régularité troublante, et la lenteur qu'elle imposait rendait tout plus intense. Plus profond.

Leurs regards se retrouvèrent une nouvelle fois.

Emma n'osa pas parler.

Elle aurait pu. Elle aurait voulu, mais il y avait quelque chose dans les yeux de Regina, ce mélange de vulnérabilité et de feu, qui lui coupaient les mots avant même qu'ils ne montent à ses lèvres.

Alors, elle se contenta de respirer contre elle.

Et Regina bougea encore.

« Continue, lui glissa la sauveuse en un léger regard pourtant, si profond. »

Regina gémit plus fort et prit appui sur le ventre d'Emma. Elle s'enfonça encore plus doucement sur elle, et sentit que s'en était presque trop alors que le dernier tissu qui les séparait n'avait même pas été retiré.

Son dos se cambra légèrement, ses cheveux glissèrent le long de sa nuque, ses seins frôlèrent à peine sa peau. Regina bougea comme si elle était seule, arrachant un murmure rauque à la blonde.

Regina ouvrit ses yeux et sourit légèrement. Elle ne s'arrêta pas et fit de son corps une offrande.

Haletante, Emma la regardait comme si elle était en train de rêver. Regina attrapa ses mains et les entrelacèrent.

« Vas y encore, lui glissa la sauveuse. »

Regina garda son regard dans le sien, et gémit un peu plus bruyamment. Elle prit ses doigts emprisonnées entre les siens et les passa sur ses seins. Lorsqu'elle commença à titiller ses tétons, Regina se cambra un peu plus en laissant tomber sa tête en arrière. Sa culotte s'humidifia et Emma ne put que le sentir à travers la sienne qui était d'ores et déjà collée à sa peau.

« Ne t'arrête pas, supplia Emma. »

Emma pressa son sein et Regina s'appuya plus encore sur elle en un gémissement, cette fois très sonore. La blonde glissa son autre main sur sa fesse qu'elle serra tout aussi fort et sur laquelle elle appuya en rythme.

Et sans prévenir, Regina accentua la cadence.

Son bassin vint rouler contre le sien, plus vite, plus fort. Toujours dans ce même mouvement fluide, ondulant, mais avec une assurance nouvelle. Sa poitrine rebondissait légèrement à chaque appui et Emma n'arrivait plus à penser.

Ses mains remontèrent le long de ses côtes, comme pour l'ancrer contre elle, pour l'accompagner, pour se perdre un peu.

« Regina… gémit-elle, d'une voix, à peine audible. »

La brune ne répondit pas. Elle continua à bouger sur elle, à s'enivrer de cette friction, de ce plaisir qui gonflait entre leurs deux corps. Elle frottait son centre contre elle avec une telle régularité que les soupirs devinrent de véritables gémissements, à peine contenus.

Rapidement, Emma ne put s'empêcher d'elle aussi, soulever légèrement le bassin, comme si se coller à elle était devenu vital. Elles se regardèrent de si près qu'il n'y avait plus de distance à franchir.

Emma sentait son dos coller un peu au drap tant la chaleur de leurs corps montait, emprisonnée sous les mouvements constants de Regina.

Toujours à califourchon, la brune roulait lascivement du bassin, frottant son sexe contre le sien, encore couvert de ce mince tissu de coton. Emma attrapa soudain ses hanches et la guida sans même y penser, laissant ses doigts s'enfoncer dans sa peau. Et Regina laissa sa tête tomber en arrière, les cheveux glissant le long de son dos. Un soupir rauque lui échappa. Ce son seul fit se contracter le ventre d'Emma.

Leurs respirations se mêlaient, entrecoupées, irrégulières.

Chaque pression devenait peu à peu aussi insupportable que la précédente. Ses reins se pliaient avec précision, suivant un tempo qui accélérait encore imperceptiblement.

Emma ferma les yeux une seconde, puis les rouvrit. Le tissu entre elles était trempé.

Leur culotte formait une barrière infime mais sensiblement douloureuse, électrisante.

Chaque frottement réveillait une vague de chaleur qui remontait dans leurs ventres, le long de leurs colonnes vertébrales, jusque dans leurs mâchoires serrées.

Regina bougea à nouveau, cette fois plus bas, plus ancrée et un gémissement guttural s'échappa de la sauveuse.

La brune, haletante, se cambra légèrement.

Le coton humide collait désormais à leurs sexes, épousant la forme de leurs lèvres et rendant chaque mouvement plus glissant, plus intense et précis.

Elles étaient l'une contre l'autre, juste séparées par ces deux malheureux morceaux de tissu qui glissait, épousait, frottait, pressait.

Emma agrippa soudain ses hanches et riva son regard sur leurs deux entrejambes. Chaque passage du bassin de Regina envoyait des ondes dans son antre. Elles étaient toutes deux au bord de la limite, tout en y restant volontairement. C'était… délicieusement insoutenable. Et chacune avaient presque peur de la violence que cela représenterait lorsqu'elles finiraient par se débarrasser de leurs dessous.

Chaque mouvement était plus appuyé, plus désespéré.Regina s'agrippait à ses bras, parfois à ses épaules, comme pour rester connectée, comme pour ne pas céder trop vite.

Instinctivement, Emma toucha alors du bout des doigts la hanche de la brune, et suivit le bord de son dessous.

Elle n'avait jamais rien vu d'aussi beau.

Regina s'arrêta, son bassin suspendu, juste au-dessus d'elle.

Et Emma, très lentement, glissa ses doigts dans sa culotte.

Pas pour la retirer, mais pour la soulever, juste assez.

Ses doigts passèrent entre la peau et le coton, et elle sentit aussitôt la chaleur de Regina lui sauter au visage.

« Oh mon dieu, ne put s'empêcher de laisser échapper Regina en fermant les yeux, le sourire aux lèvres. »

Le souffle de la brune se coupa net. Un frisson la parcourut de la nuque au bas ventre. Elle planta ses ongles dans les épaules de la sauveuse, incapable de contenir le moindre mouvement. Emma, elle, gardait les yeux ouverts. Elle voulait la voir. L'entendre. La sentir basculer contre sa main.

Alors elle s'enfonça plus loin, jusqu'à sentir les lèvres intimes de Regina contre sa paume. Elle la caressa alors, passant ses doigts dans ses replis, sentant chaque détail, chaque recoin. Regina posa son front contre le sien, haletante.

Elle bougeait à nouveau, très lentement, contre la main d'Emma. Puis, elle plongea la sienne et pressa sa paume sur celle d'Emma, un peu plus fort, juste là.

Regina la regarda et Emma comprit. Elle se mit à suivre le rythme qu'elle lui imposa et la brune se mordit la lèvre en aspirant son air.

Emma la regardait faire.

Elle la regardait se prendre, là, sur elle, contre elle et c'était d'une décadence folle.

Les deux femmes respiraient à l'unisson et cette main qu'elles partageaient, nichée entre les jambes de Regina, devenait le point central de tout.

Regina finit par relâcher ses doigts.
Elle n'avait plus besoin de guider, Emma avait compris.

Alors elle reprit seule. Et Regina bougea plus vite.

« Oui, gémit-elle de plus en plus fort. »

Le lit se mit à grincer. Emma sentit ses muscles trembler autour de sa paume. Ses doigts n'avaient jamais été aussi humides.

Regina gémissait maintenant à chaque souffle, incapable de rester silencieuse. Emma sentit son propre souffle devenir instable.

« Encore, la supplia Regina. S'il te plaît encore. »

Emma n'aurait pas pu s'arrêter, même si elle l'avait voulu. Elle accéléra à peine, juste ce qu'il fallait pour suivre le rythme du corps qui s'arquait sur elle. Regina roulait des hanches plus fort, et sa main libre s'était glissée dans la nuque d'Emma, comme pour l'agripper, la supplier de la suivre jusqu'au bout.

Le bassin de Regina roulait toujours contre elle, insistant, suppliant, affamé.

La chaleur, l'humidité, et cette pression contre sa paume. Tout excitait Emma. Tout.

Et Regina. Bon sang, Regina sur elle, ses cuisses puissantes encadrant ses hanches, son ventre tendu qui tremblait au-dessus du sien, ses soupirs, ses gémissements. C'était au delà de ses forces. Ses hanches bougèrent, sans prévenir. Elle n'avait plus conscience de ce qu'elle faisait… ou plutôt, tout était devenu instinct.

Elle se frottait. Contre elle. Contre ses draps. Contre ce feu qu'elle ne savait plus étouffer. Elle serrait même ses cuisses entre elles d'un geste désespéré.

Et Regina, qui ne perdait pas une miette, baissa les yeux sur elle. Sur ses joues rouges. Sur ses sourcils froncés. Sur sa bouche entrouverte.

Emma gémit. Pas fort. Juste ce qu'il fallait pour que Regina sente vibrer sa propre excitation à travers tout son corps.

Et Emma… Emma sentait son bas-ventre se tordre, se contracter, frémir de plus en plus vite. Elle n'avait presque rien fait pour elle-même, mais Regina, son odeur, son corps, sa peau, sa voix, sa façon de la regarder et de gémir, d'avoir envie d'elle, tout la poussait vers cette limite qu'elle n'avait jamais atteinte aussi vite.

Elle allait venir. Elle aussi. Et ça… Regina l'avait parfaitement compris.

Elle se mit rapidement à haleter à la même cadence que la blonde.

Regina allait venir dans sa main. Là, tout de suite. Emma le savait. Elle l'entendait. Elle le voyait dans ses yeux, dans la tension de ses bras, dans ce « oui » presque soufflé dans sa bouche.

Et elle n'avait jamais vu quelque chose d'aussi beau que cette femme, à califourchon sur elle, fiévreuse, sur le point de jouir.

Ses doigts se refermaient un peu plus fort sur les draps, son dos arquait presque à l'unisson avec le mouvement de Regina au-dessus d'elle. Le souffle d'Emma était saccadé, rauque, comme si chaque bouffée d'air lui coûtait quelque chose.

Et puis, ses lèvres s'entrouvrirent.

« Regina je vais… souffla Emma, presque contre la bouche de la brune. »

Sa voix tremblait, se coinçait dans sa gorge. Il n'y avait aucun cri, juste cette déclaration étranglée, ce secret murmuré entre deux battements de cœur.

Regina ne ralentit pas. Au contraire, elle s'en nourrit.

Elle se pencha plus près, sa joue effleurant la sienne, son souffle brûlant contre son oreille.

Emma tenta de reprendre le contrôle, mais c'était trop tard. Sa main glissa sur la hanche de Regina pour s'y accrocher, presque désespérément.

« Je vais… »

Encore, cette voix tremblante. Comme un aveu. Comme une dernière tentative pour rester présente.

C'était en train de rendre Regina complètement folle. Elle ne cessait de retenir son orgasme, pour simplement avoir le plaisir de l'atteindre avec elle.

Ce serait si bon. Regina bascula légèrement la tête en arrière, les lèvres entrouvertes. La respiration d'Emma s'accéléra.

Son clitoris était si gonflé, elle était au bord… tellement au bord.

« Oui, Emma… Oui je, je… éclata-t-elle. »

Emma sentit sa tête se brouiller.

Oui… Regina…

Elle allait…
Elle allait…

« J'suis rentré ! »

Soudain, Emma et Regina se figèrent. Leurs yeux s'ouvrirent en grands, catastrophés.

« Bordel Henry ! murmura Emma, paniquée. »

Sans réfléchir, Regina se leva d'un geste et se rua sur le sol. Emma en fit de même et tomba à la renverse en ramassant son jean pour l'enfiler.

Les pas du garçon se firent entendre dans les escaliers et le coeur des deux femmes se mit à battre encore plus vite.

Non, non, non !

« Va dans la salle de bain, lui dicta soudain Emma en la poussant en avant. »

Regina se redressa et se rua tout juste à temps pour se précipiter dans la pièce sans réfléchir. A peine un quart de seconde plus tard, Henry ouvrit brutalement la porte de la chambre et cligna des yeux vers sa mère.

« 'Man ? Qu'est-ce que tu fais là ?

_ Ta… ta… »

Regina grimaça, dos à la porte. Elle avait encore l'entrejambe en feu, les mains tremblantes et le souffle court.

« Ta mère m'a vomi dessus ! »

Les yeux de la brune s'arrondirent et elle dut se retenir pour ne pas éclater de rire.

« Quoi ?

_ Des effets tardifs de sa chimio. Et toi alors ? T'as vu l'heure ?! Non mais t'as idée de combien de temps on t'a attendu ta mère et moi ?! »

Et voilà qu'elle passait sa frustration sur son fils.

Ce n'était peut-être pas très réglo, certes… Mais bon.

« J'étais chez… chez Violet, déglutit Henry, apeurée soudain par la rage de sa mère qui ne contenait plus sa voix.

_ Mais j'en ai rien à foutre de chez qui t'étais ! Et Killian ? »

Henry ouvrit la bouche, bêtement. Et Emma se pencha soudain pour ramasser des livres laissé au pif sur la table de chevet.

« Qu'est-ce qui t'as pris, gronda-t-elle en lui balançant un roman de Jane Austen à la figure »

Henry se protégea de l'assaut avec ses mains.

« 'man !

_ de balancer la maladie de ta mère, continua-t-elle avec le dernier tome d'Harry Potter.

_ Mais !

_ A, dit-elle en explosant un exemplaire du Larousse. Ce, prononça-t-elle en lui jetant sa chaussure dans les cotes. Débile ?! hurla-t-elle enfin. »

Depuis sa position, Regina se pinça l'arête du nez d'un air dépité. Dans la chambre, Emma, elle, continuait de s'agiter comme une démente.

« Mais de quoi tu parles ? Aïe !

_ Killian, il sait ! T'as balancé ! Ta mère m'a vomi dessus. Tu me prends pour qui ? Une cible mouvante ?! »

Henry ouvrait la bouche, refermait, reculait, les yeux ronds comme des pièces d'or.

« Tu m'as grillée HENRY ! Je veux dire, elle allait… on allait… NON, TU SAIS QUOI ? Non. Tu sais pas. Mais moi si. Et je vais m'en souvenir. Très. Très. Longtemps ! »

Elle lança une chaussette en boule sur lui avec une intensité qui aurait réveillé David de son sommeil le plus profond. Puis, elle se mit à poursuivre son fils dans toute la maison qui criait comme une vraie fillette poursuivi par le Grinch du haut de ses 18 ans bien tassés.

Regina, dans la salle de bain, soupira longuement. Elle aurait pu tout aussi bien sortir de cette pièce et exploser Emma pour ses méthodes éducatives franchement limites, mais elle n'était toujours redescendue qu'à moitié, sa culotte était dans un état lamentable et elle n'avait clairement pas le courage de s'y pencher.

Alors, elle s'avança dans la pièce et s'assise sur le bord de la baignoire d'un air boudeur, en attendant qu'Emma ait fini sa crise. Les cris continuèrent quelques minutes.

Puis, plus rien.

Regina plissa le regard, et tendit l'oreille.

Elle entendit la porte d'entrée claquer et se redressa un peu. Elle vit une minute plus tard à peine, la porte de la salle de bain s'ouvrir brusquement pour laisser apparaître une Emma enragée.

« Qu'est-ce que tu as fais ? bondit Regina en se relevant. Tu as perdu l'esprit ? »

En deux enjambées, Emma s'avança vers elle et lui prit le visage en un grognement rude pour l'embrasser, comme si sa vie en dépendait. Regina poussa un souffle court, surprise, mais répondit immédiatement, comme si elle n'attendait que ça, là, depuis des heures, depuis des jours… des années.

Emma la souleva sans prévenir. Les jambes de Regina s'enroulèrent autour d'elle par pur réflexe.

Sa main manucurée tenait sa mâchoire alors que sa langue s'emmêlait à la sienne.

Emma la fit tourner, une fois, puis deux… puis elle la plaqua contre la porte d'un geste aussi ferme que précis. Leurs bouches se dévoraient.

Emma la voulait. Elle la voulait tellement. Pourtant, elle ralentit la cadence. Regina aussi, jusqu'à ce que la sauveuse quitte sa bouche pour poser son front sur le sien.

Elle était encore si… si bouleversée.

« Désolée, je… J'ai peut être été un peu vive. »

Regina rit un peu. Sans rouvrir ses paupières, elle passa sa main sur sa joue. Puis, ses jambes redescendirent lentement de la prise de la sauveuse.

Lorsque Emma rouvrit les paupières, elle se rendit compte pour la première fois depuis des années qu'elle était légèrement plus grande qu'elle. Ce qui était un constat complètement débile et hors de propos.

« On devrait aller se coucher, suggéra la brune à voix basse. »

Emma hocha la tête. Une seconde. Puis deux.

Puis elle prit sa main et referma ses doigts avec précaution sur elle.

Ensemble, elles quittèrent la salle de bain. L'une à moitié nue, l'autre encore habillée. C'était un duo bien étrange.

Regina se glissa sur le lit sans un mot, lentement. Elle se cala contre l'un des oreillers et Emma vint se coller à son main passa autour de sa taille et elle enfouit son visage dans ses cheveux en prenant une grande inspiration.

Regina soupira. Elle hésita quelques secondes… et sa main alla finalement chercher celle d'Emma. Elles s'enlacèrent les doigts dans le noir. Leurs souffles s'accordèrent, tout doucement. Puis elles tombèrent dans les bras de Morphée.

Chapter Text

Chapitre 11.

Regina se réveilla ce matin là au bruit des oiseaux et de la circulation. Ses paupières papillonnèrent et elle mit quelques secondes à remettre de l'ordre dans ses pensées.

Durant la nuit, elle n'avait pas vraiment bouger ou alors très peu.

Regina entendait encore la respiration profonde de la blonde dans son dos et son bras reposait désormais mollement sur son flanc.

Regina elle, prit une profonde inspiration alors que les souvenirs de la veille remontaient peu à peu à la surface.

Elle n'avait pas prévu cela. Et elle était assez sure que Emma n'avait pas calculé ce qui était arrivé non plus.

La brune grimaça. Voilà qui les mettait dans une position délicate.

Regina baissa la tête vers son entrejambe et cligna des yeux, surprise.

Elle avait oublié de se changer. Ce n'était pas son genre… D'autant plus qu'elle avait tellement mouillé d'excitation que le coton de sa culotte maintenant sèche lui collait désormais désagréablement à la peau.

A ce constat, Regina ferma les paupières. Machinalement, ses doigts vinrent effleurer son entrejambe. Elle étouffa un soupir puis s'arrêta soudain pour surveiller la respiration d'Emma.

Elle dormait toujours.

Quand elle y repensait… La situation était un peu folle, non ? A bien y réfléchir…

Regina se mordit la lèvre et tourna un peu la tête, puis retourna sur son oreiller en déglutissant.

Elle avait encore sur elle la trace de ce qu'elles n'avaient pas osé finir. Un reste de chaleur, de frottements et de frustration presque douloureuse.

C'était ridicule, indécent… Et pourtant, son corps, lui, n'en avait cure.

Regina soupira, puis laissa sa main redescendre doucement entre ses cuisses. Son souffle se fit plus court, mais elle l'étouffa contre l'oreiller. Elle n'osait pas bouger, à peine respirer.

Ses doigts glissèrent sur le tissu de sa culotte, lentement, juste assez pour réveiller sa tension. Elle ferma les yeux. Elle ne cherchait pas vraiment l'orgasme. Elle voulait juste faire taire ce feu lancinant qui refusait de s'éteindre.

Peu à peu, elle mouilla de nouveau et sa propre main ne s'embrassa pas de cérémonie pour plonger sous le tissu et trouver le chemin de son clitoris. Regina déglutit, puis soupira en caressant son majeur autour de son bouton.

Derrière elle, Emma ouvrit lentement les yeux.

Elle ne comprit pas tout de suite ce qui l'avait tirée du sommeil. Le frottement d'un drap ? Une tension dans l'air ? Ou simplement l'instinct.

Dans tous les cas, sa tête était encore embrumée et l'odeur de Regina lui collait à la peau.

Lorsqu'elle ouvrit enfin les paupières, ce qu'elle vit en premier fut la nuque de la reine. Puis le frémissement léger de ses épaules. Et enfin… le rythme irrégulier de sa respiration.

Emma ne bougea pas. Ses yeux s'écarquillèrent très légèrement. Et lorsqu'elle vit le léger rythme que son bras faisait, elle comprit. Alors, sa bouche s'entrouvrit de choc.

Elle voulait la tuer ou quoi ?

Elle eut beau se le répéter et se dire qu'elle ferait mieux de signifier son réveil, elle n'arrivait pourtant pas à détourner le regard.

Le drap se soulevait imperceptiblement à chaque micro-mouvement du bassin de Regina. Elle devina, plus qu'elle ne vit, ce que ses doigts faisaient sous le tissu tendu de la couverture. Et elle l'entendit à peine retenir un autre soupir avant de l'étouffer contre l'oreiller.

Son corps cognait si fort dans sa poitrine qu'elle avait peur de tourner de l'oeil. Elle était tout bonnement… fascinée.

Surprise, oui.

Mais surtout hypnotisée.

Regina était vraiment une femme… une femme exceptionnelle, un peu fragile aussi à sa façon et ce matin, perdue dans une bulle de désir qu'Emma n'avait jamais imaginé effleurer de si près.

Regina retint un mouvement de bassin alors que ses doigts passaient lentement entre ses lèvres.

Elle n'avait aucune idée que Emma entendait, voyait et ressentait tout. En fait, à son tour, la blonde sentit une chaleur lui grimper dans le ventre. C'était irrationnel, violent, presque honteux.

Elle ferma un instant les yeux, pour ne pas basculer.

Puis elle les rouvrit, incapable de se détacher de la vision de cette femme qu'elle pensait connaître, et qu'elle découvrait autrement.

Pourtant, Regina eut soudain un doute. Elle s'arrêta net en sentant la respiration d'Emma un peu plus lourde sur son épaule nue.

Son bras venait de bouger d'un millimètre à peine sur elle.

Regina ne bougea pas. Mais son cœur, lui, s'arrêta net.

Emma était réveillée.

Derrière elle, elle se mouvait légèrement, comme si elle cherchait une position plus confortable.

Mais elle sentit à son tour sa main frôler sa chute de rein. Sauf que… C'était le haut de ses phalanges. Et que ces doigts n'étaient pas tournés vers elle.

Regina cessa un instant de respirer.

Emma… elle… Non. Non, elle n'oserait pas.

Et pourtant, elle entendit ce frottement subtil, accompagné de ce minuscule souffle que seul un oreiller étouffé pouvait produire.

Emma se touchait. Derrière elle. Maintenant.

Et elle faisait semblant de dormir.

Sa main toujours entre ses cuisses, mais immobile, une chaleur sourde pulsait à ses tempes. Que faire ? Elle pourrait la confronter, mais Emma ne l'avait pas fait avec elle.

Elle avait au moins eu cette… galanterie, si on pouvait appeler ça ainsi.

Regina ferma les yeux. Son sexe pulsait maintenant très fort et son antre se pressait impatiemment. Arrêter maintenant, ce serait une véritable torture. Une de plus.

Alors… Au lieu de ça, elle recommença à bouger ses doigts. Doucement.

Emma répondit comme une réponse silencieuse, un écho à son mouvement. Regina gardait les yeux fermés, le visage tourné vers son oreiller, comme si elle dormait encore. Mais sa main, elle, ne mentait pas. Elle s'était remise en mouvement, plus sûre d'elle, plus pressée aussi. Elle effleurait son intimité avec une régularité qui faisait trembler ses cuisses.

Et derrière elle… Emma suivait.

La blonde regardait tout avec des yeux mi clos. Elle ne pouvait pas s'en empêcher. Après tout, elle n'aurait jamais cru voir ça un jour. Et puis, il y avait quelque chose dans la façon dont Regina se touchait qui la rendait complètement dingue.

Une sorte de retenue peut-être ? Comme si elle cherchait juste à apaiser quelque chose. Même dans ce genre de moment, la reine gardait toujours cette sensualité, cette aplomb qui n'appartenait qu'à elle. Mais ses soupirs trahissaient un abandon certain et que dire, de son bassin qui commençait à effectuer un micro va et viens.

Elle ne le contrôlait même pas.

Emma sentit son ventre se contracter de désir, c'était brut et cru. Sa propre chaleur s'éveillait brutalement, une vague sourde, presque douloureuse, entre ses jambes.

Elle ne savait même pas à partir de quand sa propre main s'était retrouvé dans sa culotte. Elle n'avait pas réfléchi. C'était comme si son corps avait décidé seul, comme si le simple fait de regarder Regina suffisait à déclencher ce besoin primaire.

Lentement, ses doigts touchèrent son bouton, et elle baissa les yeux jusqu'à son postérieur avant de se maudire sur trente générations.

Elle était… elle était juste… Magnifique.

Emma fit glisser ses doigts plus bas, cherchant le point où la tension devenait presque douloureuse et se tendit. Elle garda les yeux ouverts et bougea à peine le bassin, une pression légère contre les fesses de la brune.

Regina se stoppa une seconde et Emma sut, qu'elle savait elle aussi.

Elles allaient surement faire semblant. Alors… alors au diable la logique, au diable la sagesse.

Emma ne regarda soudain plus que ça : l'ondulation millimétrée du bassin de Regina, son dos qui se creusait à peine, le léger frisson qui courait sur sa peau. Elle n'aurait jamais cru qu'un silence pouvait être aussi bruyant.

Sa respiration se fit vite moins maitrisée. Emma aspira son air, tout près de son bras. Regina, elle, inspira lourdement avant de glisser pour réajuster sa position, non sans relever un tout petit peu la tête. Les fesses de Regina vinrent se presser un peu plus franchement contre sa cuisse, comme si c'était un accident.

Un « accident ».

Ça ressemblait plutôt à une espèce d'offrande, songea la blonde. Une délicieuse offrande.

Un frisson brutal remonta dans le dos d'Emma. Ses doigts se crispèrent, s'enfonçant plus profondément dans la moiteur de son short. Elle s'obligea à ne pas gémir. Mais elle déplaça sa main libre, celle qui ne la touchait pas, et la posa, très lentement, contre la hanche de Regina.

Regina ferma les yeux, et le fit plus fort encore quand les doigts de la sauveuse se mirent à serrer sa peau, la serrer fort. Elle sentit les mouvements de sa main dans son dos se faire un peu plus raide et sa respiration se hacher.

Son corps y répondit aussitôt.

Elle appuya un peu plus ses fesses contre ses hanches, comme pour suivre le rythme. Elle écarta les jambes, juste un peu et traça des cercles amples autour de son clitoris. Rapidement, son bassin chercha délibérément le contact avec la sauveuse, s'appuyant en arrière.

Emma s'accrocha au drap de sa main libre, ses dents plantées dans sa lèvre inférieure.

C'était insoutenable.

Elle raffermit son propre mouvement, accélérant un peu. Elle était proche. Trop proche.

Et elle sentit que Regina l'était aussi.

Le corps de la brune commença à tressaillir doucement contre le sien, ses jambes se pressèrent, et ses mouvements se firent plus erratiques. Elle étouffa un gémissement dans son oreiller, à peine audible, mais Emma l'entendit.

Elle entendit tout.

Ce fut suffisant pour qu'elle bascule.

Son ventre se contracta, et son orgasme déferla sans prévenir, secouant son corps contre celui de Regina. Elle ferma les yeux, haletante, essayant de ne pas faire de bruit, mais un soupir rauque lui échappa quand même.

Et dans ses bras, Regina suivit.

Son corps se tendit, brusquement et elle crut voir des milliers d'étoiles à travers ses paupières closes. C'était explosif, sa tête bouillonnait et elle avait l'impression qu'un véritable feu d'artifice venait d'éclater.

Son dos se cambra, juste un peu et un étranglement certain s'échappa de sa gorge.

Sa respiration était si essoufflée qu'il n'y avait plus aucun doute sur ce qu'il venait de se passer. Puis, elle s'effondra, là, à bout de souffle.

Regina resta immobile de longues secondes, sa main encore figée dans son entrejambe. Elle était… épuisée. Elle n'avait que rarement jouis comme ça, juste avec… ses doigts.

Elle était encore allongée, dos à Emma, la couverture remontée jusqu'à sa taille, les cheveux en bataille et la respiration à peine revenue à la normale.

Un instant, elle réfléchis à comment s'y prendre pour se défaire de cette situation qui était… eh bien, encore plus gênante que la veille.

Regina se mordit la bouche en grimaçant. Elle inspira lentement, puis prit une minute pour se recentrer.

Elle bougea, un peu.

Calmement, elle se mit à soupirer, puis se repositionna. Elle roula sur le dos, tout doucement. Lorsqu'elle se tourna entièrement, elle s'attendait à ce que Emma se soit retournée elle aussi. Autant dire qu'elle ne sut que sursauter lorsqu'elle tomba sur les pupilles de la blonde qui la regardait… bizarrement.

Emma, quant à elle, cligna des yeux comme si elle venait vraiment de se réveiller. Elle se sentait idiote. Elle aurait du en profiter pour se tourner, mais non !

Elle ouvrit la bouche, bêtement.

« Salut, lâcha-t-elle dans un soupir gêné. »

Emma se mit immédiatement à rougir. Regina elle, haussa un sourcil. Elle prit quelques secondes, puis déglutit.

« Bonjour. »

Naturellement, la reine reprit juste sa position, sur le dos cette fois, bras croisés sous la poitrine, le regard fixé au plafond comme si de rien n'était.

Emma se passa une main dans les cheveux, mal à l'aise.

« Bien dormi ? »

Regina ferma les yeux un instant. Un soupir très lent s'échappa de ses lèvres.

« Parfaitement. »

Un nouveau silence tomba, plus gênant encore.

Emma resta là, quelques secondes. Elle sentait toujours la chaleur de Regina sur ses cuisses, et la honte douce, moite, d'un acte qu'elle n'avait techniquement pas commis… mais que son corps, lui, avait très bien enregistré.

Elle risqua un regard vers Regina.
La brune ne bougeait pas. Son expression était indéchiffrable.

Alors Emma fit ce qu'elle savait faire de mieux dans les moments émotionnellement périlleux : fuir.

« Je vais… euh… je vais dans la salle de bain, marmonna-t-elle en repoussant les draps comme si de rien n'était. »

Elle se leva avec un naturel surjoué, tendu comme un fil.
Ses jambes étaient légèrement flageolantes, mais elle camoufla ça sous une pirouette de désinvolture en attrapant au passage son t-shirt posé sur le fauteuil.

« A moins que tu…

_ Non, ça ira, répondit rapidement Regina d'un ton mal à l'aise. J'irais… après. »

Elle lui adressa un sourire poli. Une fois encore, Emma rougit. Alors, elle se retourna et fonça dans la pièce en tenant fermement ses vêtements sur sa poitrine.

Une fois seule, Regina tourna enfin la tête vers l'oreiller vide.
Elle fixa un instant la marque laissée par Emma.
Puis elle laissa tomber sa tête en arrière, ferma les yeux.

« Bordel, souffla-t-elle, dépitée. »

xXx

Le bureau était petit, impersonnel, mais étrangement chaleureux.
Des étagères derrière le pupitre débordaient de livres classés par couleurs. Regina remarqua un paquet de mouchoirs posé sur le bureau.

Elle était assise sur un des deux fauteuils moelleux qui tentaient désespérément de dire "vous êtes en sécurité ici. »

Sauf qu'elle n'était pas du tout en sécurité.

Assise droite comme une flèche, les mains croisées sur ses genoux, Regina fixait un point sur le mur, comme si elle espérait que son regard devienne suffisamment laser pour brûler un trou dans le plâtre et s'évaporer par là.

Pourquoi diable était-elle venue ici ? C'était ridicule.

Au moment même où elle s'apprêtait à se lever pour s'en aller, le docteur entra dans la pièce. C'était une femme, une très belle femme.

Elle avait cette même blouse blanche que le reste de ses collègues, hormis qu'elle était ouverte sur un ensemble tailleur plutôt classique. Ses talons étaient hauts et ses cheveux noirs reposaient en boucles sur ses épaules.

« Madame Mills, sourit-elle. »

Et soudain, la brune se sentit ratatinée sur sa petite personne.

Il était trop tard pour partir, sans doute.

Sans un mot, Regina fixa la doctoresse s'installer sur son siège derrière son bureau. Puis, elle s'avança en croisant les mains avec un sourire poli.

« Je pensais vous voir plus tôt ici.

_ En vérité, j'ai hésité à repartir, marmonna la reine en croisant les bras sur sa poitrine.

_ Vous êtes là maintenant, reprit doucement la psychiatre, en prenant un carnet qu'elle n'ouvrit même pas. C'est ce qui compte. »

Regina ne répondit pas.
Elle posa les yeux sur le paquet de mouchoirs posé à côté de la tasse de café fumante de la psy. Elle avait soudain très chaud sous son chemisier.

« On peut commencer simplement, si vous voulez, proposa la femme d'un ton neutre. Par exemple : comment vous vous sentez aujourd'hui ? »

Regina souffla du nez, un petit rire sans joie.

« C'est ça, votre méthode ? Je vous dis que je vais bien, vous me croyez et je peux m'en aller ? »

La psychiatre ne se démonta pas.

« Ce serait dommage, je n'ai même pas encore sorti mes crayons de couleurs. »

Regina releva les yeux. Un mince sourire fendit ses lèvres malgré elle.

« Vous êtes plus impertinente que je l'aurais cru.

_ On me le dit souvent. »

Un silence s'installa. Moins hostile, cette fois cependant.

« Alors, répéta la psychiatre, comment vous vous sentez aujourd'hui, Regina ?

_ C'est… dur à dire, soupesa la brune. En fait, c'est le docteur Morel qui m'a parlé de vous.

_ L'oncologue.

_ Oui, souffla-t-elle.

_ Vous avez un cancer. »

Regina hocha la tête d'un air plus sérieux, puis baissa les yeux.

« Vous allez rire mais… dit-elle en triturant ses doigts autour d'un mouchoir en tissu qu'elle tenait. Je crois que ce n'est même pas pour ça que je suis venue vous voir. »

La médecin émit un léger rire en se laissant couler sur son siège. Puis, elle tapotant son stylo sur sa feuille.

« Vous allez rire, mais la plupart de mes patients ne me parlent même pas de ce sujet. »

Regina leva un sourcil, surprise.

« Un cancer, c'est un bouleversement. Ça remet en question beaucoup de choses sur notre façon de voir la vie. »

La brune hocha la tête, pensive.

« Cela peut perturber beaucoup de dynamiques, quelles qu'elles soient. »

Regina se mordit la lèvre, puis déglutit.

« J'ai couché avec une femme. »

La psychiatre ouvrit la bouche, puis la referma, un peu surprise. Regina leva la tête. Autant foncer droit dans le lard.

« En fait, on n'a pas… vraiment coucher ensemble, bafouilla-t-elle. »

Puis, Regina soupira et se massa le front en s'appuyant sur l'accoudoir de son fauteuil.

« Oh seigneur… murmura-t-elle, les paupières closes. »

La psychiatre abandonna son stylo puis hocha lentement la tête en reprenant contenance.

« Je vois, souffla-t-elle. »

Elle ne notait rien, ne fronçait pas les sourcils, ne faisait aucun de ces petits gestes qui mettaient Regina hors d'elle quand elle avait affaire à des gens qui pensaient la comprendre.

« Vous… aimeriez m'en dire plus ? osa-t-elle demander en plongeant son regard dans le sien. »

Regina soupira à nouveau, lasse, posant ses coudes sur ses genoux et se penchant légèrement vers l'avant, les mains croisées devant elle comme si elle attendait une confession… d'elle-même.

« Je ne vais pas vous mentir. Lorsque j'ai reçu ce diagnostic pour mon cancer, je… je me suis sentie… »

Regina sembla chercher ses mots.

« Perturbée ? finit par suggérer la jeune femme face à elle.

_ Soulagée. »

La médecin fronça les sourcils en avançant les roulettes de son fauteuil de bureau.

« Je n'allais pas très bien, argumenta Regina. J'avais le moral en berne depuis le départ de cette… »

Regina ouvrit la bouche, puis la ferma. Elle ignorait si la psy devant elle la connaissait. Surement, de nom en tout cas. Mais Storybrooke était une petite ville, mieux valait ne pas trop en dévoiler.

« femme, finit-elle par conclure.

_ Son départ ? nota la docteur.

_ Elle a du s'en aller. Nous avons vécu de nombreuses choses elle et moi et puis, Emma s'est mariée et…

_ Vous voulez parler d'Emma Swan. »

Regina ouvrit la bouche, puis se tendit sur son siège.

« Je sais que vous êtes perplexe, mais je suis soumise au secret médical, comme tous mes confrères. Ce qui se dit dans ce bureau reste et restera à jamais entre nous. »

Regina la regarda. Elle hésita un court instant, fixa le mur, puis… finit par soupirer.

« Oui. Oui, c'est de cette… Emma, dont je parle. »

La psychiatre hocha la tête, nullement perturbée par cette annonce.

« Si j'ai bien compris, Mademoiselle Swan est partie à la suite de son mariage.

_ Exactement. Elle a quitté Storybrooke. Son rôle de sauveuse devenait trop lourd à supporter. »

Regina fronça les sourcils, puis elle se racla la gorge nerveusement et baissa les yeux en trifouillant de nouveau ce morceau de tissu entre ses mains.

La psychiatre laissa le silence peser dans son bureau, un silence visiblement nécessaire à Regina pour retrouver toute sa tête.

« Ça a du être difficile à vivre, finit-elle par dire.

_ Pardon ? demanda Regina en levant subitement la tête.

_ Pour vous. Vous vous côtoyiez depuis la toute première malédiction qui nous a amené ici. Mademoiselle Swan faisait partie de votre vie. Elle vous a vu… évoluer. Et vous aussi. »

Regina déglutit. Elle laissa échapper un sourire loin d'être joyeux, puis sentit sa gorge se nouer. Alors, elle baissa de nouveau les yeux. Sauf que ces derniers commencèrent à lui bruler, alors elle rit nerveusement en hochant la tête.

« On se connait depuis longtemps, oui.

_ Vous avez été seule durant de nombreuses années.

_ Oui et je tenais à cette solitude. Jusqu'à Henry. Et… Emma. Son arrivée en ville… Seigneur, on s'est détesté immédiatement. »

Regina rit, cette fois avec un peu plus de sincérité. Elle se souvenait de ces instants où elles se bouffaient le bec toutes les deux, et même du moment où Emma lui avait balancé son poing dans la figure.

« Après nous avons du porter secours à Henry, qui avait été enlevé par Peter. Il est devenu notre… fils. Nous avons trouvé notre équilibre de cette façon. Au milieu du chaos, de toutes ces malédictions et monstres en tout genre. »

Regina avait un sourire léger sur les lèvres. Puis, elle hocha la tête, et retrouva de nouveau le silence. Peu à peu, un air plus sombre se dessina sur ses traits et son regard se perdit dans le vide.

« Et puis elle s'est mariée, murmura-t-elle. »

La psychiatre nota mentalement le changement de ton dans la voix de la brune et pencha la tête en se laissant couler contre le dossier de son siège.

« Vous avez l'air contrariée par cette nouvelle.

_ Moi, contrariée ? rit nerveusement Regina. »

La psychiatre hocha la tête vers elle en souriant, sans jugement. Alors, Regina soupira un peu.

« Disons que… c'était surprenant, c'est tout.

_ Comment ça ?

_ Emma Swan est une femme très vive, qui tient à sa liberté. Elle n'est pas du genre à… s'engager. »

La docteur hocha la tête, sans commenter.

« J'étais heureuse pour elle, vraiment, insista Regina.

_ Et pourtant, vous êtes ici avec moi, ce matin.

_ Ça n'a rien à voir avec son mariage, trancha la brune.

_ D'accord. Allez-y dans ce cas, je vous écoute. »

Regina soupira. Puis, elle se posa quelques secondes, et reprit son récit.

« Je soulignais juste le fait qu'elle est partie. Nous avons vécu une autre malédiction, et puis nous l'avons surmonté. C'est tout.

_ Oui, sauf que la dernière fois, Mademoiselle Swan n'était pas là.

_ Oui… Oui en effet.

_ Comment l'avez-vous vécu ?

_ Vécu quoi ?

_ Une malédiction, un énième changement… Sans elle. »

Regina haussa les épaules, lasse.

« Mal… murmura-t-elle. Je suppose.

_ Vous supposez ?

_ Oui.

_ Madame Mills, je, commença la docteur.

_ Elle me manquait. »

Sa voix venait d'enfin livrer cet aveu, sans détour. La brune releva soudain les pupilles, brillantes de rage.

« Voilà. Vous êtes contente ? »

La psychiatre soupira et Regina se racla la gorge en se repositionnant sur son siège. Elle savait que sa colère cachait autre chose… La médecin elle, resta plutôt impassible. Elle fronça les sourcils, soucieuse alors Regina détourna le regard une nouvelle fois.

« Elle me manquait, répéta-t-elle une nouvelle fois d'une petite voix. »

C'était quelque chose qu'elle n'avait jamais dit, à personne. Regina ferma les paupières puis serra son mouchoir, plus fort. Et le silence qui s'en suivit lui accorda assez de confiance pour continuer.

« Quand elle est partie, quand elle a traversé ce portail, le lendemain à peine, j'avais déjà l'impression de la voir… partout, bafouilla-t-elle. Sa voiture près de l'immeuble de ses parents, sa veste en cuir posée sur un siège, dans le bureau du shérif. Et… »

Regina renifla, puis serra encore le tissu dans sa poigne.

« Et ? osa demander la psychiatre d'une petite voix.

_ Et j'avais l'impression d'être la seule dans cet état ! explosa un peu la brune. Snow, sa mère, David, Henry, pourquoi ? Pourquoi est-ce que j'avais l'impression qu'on était en train de… de m'arracher le coeur, que son absence me faisait si mal ? Alors que le monde entier allait si bien ! »

La médecin laissa échapper une moue compatissante.

« Bref, trancha Regina. Ensuite, on m'a diagnostiqué mon cancer et me voilà, balança la reine avec nervosité sur un ton se voulant désinvolte, bien que sa voix était encore étreinte par l'émotion. »

De nouveau, ce silence.

Regina serra le poing, puis déglutit.

« Et comment avez-vous pris la nouvelle ?

_ Disons que ce n'était pas aussi… difficile que je le pensais. »

Un silence. Regina leva lentement les yeux.

« C'est pour cette raison que j'ai dis que ça m'avait soulagé… Au moins… je n'avais plus aucune excuse pour cacher le fait que j'allais mal. »

La psychiatre finit par sortir le capuchon de son stylo pour noter quelque chose.

« Je crois que Henry l'a même compris avant moi, lâcha-t-elle en fronçant les sourcils dans le vide.

_ Pourquoi pensez-vous ça ?

_ Parce que c'est lui qui a appelé Emma, pour la prévenir de la situation. »

De nouveau, la doctoresse acquiesça.

« Même si je lui avais interdit formellement de le faire, marmonna-t-elle, encore contrariée.

_ Vous ne vouliez pas que Emma ait vent de votre diagnostique ?

_ Ni Emma, ni ma soeur, ni personne, lâcha Regina. Je ne voulais pas qu'on ait… pitié de moi, ce genre de choses. Les traitements contre le cancer sont toujours un peu impressionnants et incertains. Connaissant Emma, elle… »

Un silence, de nouveau.

« Elle ? chercha à creuser une fois encore la médecin.

_ Elle aurait cherché à tout faire pour m'aider et je ne voulais pas qu'elle revienne pour de mauvaises raisons.

_ Vous pensez que votre cancer est une mauvaise raison ?

_ Bien sûr, affirma Regina sans sourciller. »

La psychiatre fronça les sourcils, interloquée.

« Vous ne… pensez pas qu'elle aurait aimé être tenue au courant de votre état ?

_ Il y a une différence, entre ce que Emma veut et ce dont elle a besoin.

_ Madame Mills, rit un peu la docteur, mal à l'aise. Si je puis me permettre, je pense que ce n'est pas à vous d'en décider. »

Regina haussa les sourcils, défiante. Mais la médecin ne se démonta pas pour autant.

« Comme vous l'avez souligné, vous étiez proches. Mais vous ne pouvez pas contrôler tout ce qui gravite autour des gens à qui vous tenez. Qui vous dit qu'Emma n'avait pas besoin d'entendre l'existence de votre cancer ?

_ Parce que, soupira longuement Regina en agitant sa main dans les airs. Elle serait venue, elle aurait exercé son… complexe de la sauveuse sur moi en essayant de tout régenter pour m'alléger, ce qu'elle a justement fait et elle aurait foutu sa vie en l'air.

_ Mademoiselle Swan a foutu sa vie en l'air ?

_ Etant donné qu'on a presque couché ensemble la nuit dernière, oui, gronda Regina. »

La psychiatre ne dit rien, se contentant de noter quelques mots sur son papier.

« Vous avez dit que vous aviez presque, couché ensemble ? »

Regina la foudroya du regard.
Mais il n'y avait aucun sarcasme dans les yeux de la doctoresse. Juste… une attention douce. Une invitation à continuer.

Alors la brune se laissa tomber un peu plus dans le fauteuil, le dos désormais moins droit, les épaules affaissées.

« Rien ne s'est vraiment passé, murmura-t-elle. Du moins, pas au sens… classique du terme. »

Regina se frotta le front, puis ferma les paupières une nouvelle fois.

Chaque fois qu'elle repensait à ce moment, elle était… dépitée.

« Nous avons eu un problème avec notre fils. Emma voulait le confronter le soir-même et j'étais fatiguée. Alors nous sommes parti nous coucher.

_ Ensemble ?

_ J'ai fais un malaise il y a plusieurs semaines, et depuis, Emma trouvait judicieux de rester, la nuit, au cas où. »

La doctoresse hocha la tête, pensivement.

« Vous êtes donc allé vous coucher.

_ Exactement. Emma a insisté pour m'aider à me déshabiller, ce que je trouvais plutôt ridicule car, eh bien, je suis encore capable de le faire seule. Mais… peu importe. Nous discutions, et j'ai laissé échapper que j'acceptais la mammectomie que le docteur Morel m'a vivement suggéré de faire.

_ Vous devez donc vous faire opérer pour vous faire retirer la poitrine.

_ Je n'ai pas encore de date, mais oui. J'avais refusé en premier lieu car je vivais mal l'idée de me faire charcuter ce qui me restait de féminité, mais… Emma a pété les plombs, elle était bouleversée. Et je ne voulais pas lui faire ça. »

Regina se racla la gorge, puis baissa la tête.

« D'accord, approuva la psychiatre d'une voix neutre. Et ensuite ?

_ Ensuite… elle était… heureuse. Et je lui ai dis que je l'aimais. »

Lentement, Regina leva les yeux pour jauger la réaction de la docteur, mais celle-ci n'en eut toujours pas.

« Ne vous méprenez pas, c'est… quelque chose que nous avons commencé à faire régulièrement depuis plusieurs semaines.

_ Vous dévoiler vos sentiments ?

_ A l'initiative d'Emma, oui. En fait… elle disait qu'elle en avait assez de cette distance entre nous.

_ Et cela vous convenait ? De vous… dire que vous vous aimiez ? »

Regina ouvrit la bouche, puis la ferma. Elle n'y avait même pas réfléchi, pour être honnête.

« Oui, finit-elle par réaliser. Oui, cela me convenait. »

La psychiatre approuva une nouvelle fois en un sourire amical.

« La vie est courte après tout, et… cela me faisait du bien, à moi aussi. Je n'ai pas l'occasion de dire souvent ces… mots.

_ Vous lui avez donc dit de nouveau que vous l'aimiez après avoir accepté l'opération.

_ Tout à fait.

_ Puis ?

_ Puis… on s'est embrassé. »

Regina se racla la gorge, de plus en plus mal à l'aise en gigotant sur place.

« C'est quelque chose que nous faisons aussi… régulièrement. »

La médecin leva cette fois les sourcils, surprise.

« Vous embrasser… ?

_ Sur… la bouche, bafouilla Regina.

_ Oh. »

La psychiatre plissa les yeux avant de réfléchir.

« Eh bien, finit-elle par dire… Ce n'est pas quelque chose de commun. Vous en conviendrez. »

Regina ouvrit la bouche pour amorcer un argument… qu'elle ne trouva pas. Alors, elle resta coite un petit moment, puis finit par fermer la mâchoire avant de grogner.

« Ça se fait, parfois, répondit la reine avec une sorte de fierté mal placée.

_ Oh. Vous le faites avec d'autres personnes ? s'intéressa la médecin.

_ Non, s'offusqua Regina.

_ Alors ce n'est pas vraiment dans vos moeurs. »

Regina se mordit l'intérieur de la bouche.

« Et Mademoiselle Swan ? Est-ce que c'est… un geste qu'elle fait souvent avec d'autres proches autour d'elle ? »

Regina se racla la gorge.

« Pas que je sache. »

La psychiatre hocha de nouveau la tête et reprit ses notes, ce qui eut le don d'agacer particulièrement la brune.

« Comme je le disais, ça se fait, pour… témoigner de son affection, lâcha Regina en haussant le menton.

_ D'une mère à son enfant, oui. Ou dans une relation sentimentale, mais j'avoue ne pas avoir encore rencontré cette tendance dans une relation amicale. Est-ce que c'est quelque chose que vous faisiez aussi avec Henry quand il était petit ?

_ Bien sûr que non, reprit Regina, d'un ton évident. Henry est mon fils.

_ Emma est votre amie. »

Regina plissa les yeux vers la psy. Voilà qu'elle se sentait piégée.

Magnifique.

« Bref. Cette fois, ça a dérapé.

_ Dans quel sens ?

_ Nous nous sommes embrassés, mais… ce n'était pas comme d'habitude, éluda Regina. C'était plus… plus…

_ Intime ? »

Regina rougit, puis hocha la tête.

« Ensuite, vous avez… ?

_ Fait ce qui s'apparente à des préliminaires, finit par balancer Regina. »

La psychiatre reprit son écriture, cette fois avec un regard un tout petit peu plus rond. Sans un mot, elle continua d'acquiescer. Et soudain, Regina regretta. Elle aurait tué pour savoir ce que cette… professionnelle en pensait.

Parce que elle… elle en était mortifiée.

« Ce n'était pas prémédité, c'est un peu arrivé comme ça, trembla-t-elle nerveusement.

_ Oh eh bien, vous vous dites que vous vous aimez, vous vous embrassez, vous êtes dans un lit, une chambre fermée avec personne dans la maison. Je ne dirais pas que c'est quelque chose qui ressemble à un accident, ou peut-être que je me trompe. »

Elle allait la tuer, elle et sa… blouse absolument abominable.

« Et qu'est-ce qui vous a empêché d'aller jusqu'au bout ?

_ Qui vous dit qu'on n'a pas été jusqu'au bout, siffla Regina, cette fois agacée.

_ Vous m'avez parlé de préliminaires. »

La brune ne s'attendait pas à aller aussi loin dans les confessions. Elle grogna de gêne, les rouges en feu.

« Henry a débarqué comme un cheveux sur la soupe au manoir.

_ Oh.

_ Alors j'ai été me planquer dans la salle de bain comme une adolescente, et Emma lui a balancé l'équivalent de la moitié de ma bibliothèque à la figure en lui demandant où il était passé.

_ Je vois… »

C'était… extrêmement gênant.

« Je suppose que vous n'en avez pas reparlé. »

Lentement, Regina leva sa tête vers la doctoresse et grimaça.

« En fait… on a dormi ensemble dans ce même lit le soir-même. »

La psychiatre ne put s'empêcher de laisser échapper sa surprise. Ce qui fit encore plus grimacer Regina.

« Oh, d'accord, bafouilla-t-elle. Vous avez dormi donc ?

_ Oui, en tout bien tout honneur.

_ Bien.

_ Jusqu'à… ce matin. »

Regina eut l'impression de s'enfoncer dans des sables mouvants, et que chaque pas l'immergeait plus encore.

Quelle catastrophe.

La médecin, elle, resta silencieuse. Mais son regard plongé dans le sien semblait dans l'attente qu'elle développe.

« On s'est… réveillé. Non. Non en fait, je me suis réveillée, bafouilla Regina.

_ Vous vous êtes réveillé, dans le même lit qu'Emma.

_ C'était mon lit et Emma était derrière moi, précisa la reine.

_ D'accord.

_ Et… et il est possible que d'une manière ou d'une autre, j'ai… »

Regina se mit à agiter ses mains, mais la psychiatre ne semblait pas comprendre.

« J'ai… Je me suis… »

Regina baissa alors ses mains et tenta de désigner ses cuisses d'une série de gestes agacés.

La médecin plissa les yeux en ne comprenant toujours pas, avant que son regard s'illumine un peu.

« Oh. Vous vous êtes masturbé. »

Regina se frappa le visage avec sa main et en profita pour s'y cacher.

« Oui, c'est ça, oui, marmonna-t-elle, sa voix étouffée dans sa paume.

_ Et Emma ?

_ Elle dormait derrière moi… Enfin, elle a dormi trois minutes avant de se réveiller plutôt.

_ Elle vous a découverte ?

_ Elle m'a suivi, répondit Regina d'une voix sombre. »

La brune se leva soudain, incapable de rester debout tant elle avait honte.

« C'est, c'est extrêmement gênant, rit-elle avec nervosité en se mettant à faire les cents pas sans oser regarder la psy en face.

_ C'est assez humain vous savez.

_ Vous vous masturbez souvent avec vos copines vous ? »

Sa voix venait de transpirer d'agacement et la psy se ratatina cette fois sur sa chaise.

« Madame Mills, si vous voulez mon avis, je… ne crois pas que Emma soit votre amie. »

Regina s'arrêta enfin pour la regarder.

« Elle n'est pas non plus votre famille. Ni une amante. Vous et elle êtes… »

La psychiatre resta en suspens, puis son regard se perdit un peu plus haut. De longues secondes de silence s'égrainèrent avant que Regina finisse par laisser tomber ses bras le long de son corps.

« Arrêtez de vous fatiguer, même moi au bout de plus de quinze ans je n'ai toujours pas réussi à mettre un mot dessus, finit-elle par l'interrompre en marmonnant. »

De lassitude, Regina s'écroula de nouveau sur le fauteuil. Elle se passa une main sur la bouche, d'un air concentré et d'une gravité extrême.

« Et… comment vous vous sentez vis à vis de cela ?

_ Extrêmement mal, conclut Regina, un ton en dessous.

_ Vous avez eu l'occasion d'en parler ?

_ Vous voulez rire ? rit Regina. Elle s'est… enfuit dans les toilettes en faisant mine de n'avoir rien fait et moi, je suis parti travailler sans même lui adresser la parole. »

La psychiatre plissa les yeux. Elle ne semblait pas vraiment approuver mais… eh bien c'était leur façon de faire.

Et c'est tout, songeait Regina.

« Et que comptez vous faire pour la suite ?

_ J'en sais rien moi, aller me plaquer dans un trou de souris en attendant la fin du monde, balança la brune en haussant les épaules. »

Un silence.

« Non ?

_ Si vous êtes venu me voir pour cette raison, c'est que vous avez bien envie de faire quelque chose.

_ C'est… possible, admit Regina en un éclair de fierté mal placée. »

La médecin continua de la fixer, dans l'attente.

« Oui, je voudrais bien mais j'ignore quoi lui dire, finit par lâcher la brune.

_ Pourquoi ne pas commencer par en parler avec elle ?

_ Parce que ça rendrait tout trop réel

_ Ça l'est déjà, souligna la doctoresse.

_ Peut être. Enfin… je suppose que les choses seraient un peu moins compliquées s'il n'y avait pas Henry dans l'équation, soupesa Regina.

_ Henry votre fils ? »

La brune acquiesça.

« Henry est grand, non ?

_ Il vient d'avoir 18 ans, lui répondit Regina en un sourire affectueux.

_ Bien. Mais je ne comprends pas vraiment ce que sa présence a à voir entre vous.

_ Il n'approuve pas. »

La psy leva un sourcil et Regina soupira.

« Enfin… je pense. Il a confronté Emma lorsqu'il nous a entendu nous dire que nous nous aimions en lui disant d'arrêter ça.

_ Et que lui a-t-elle répondu ?

_ Je l'ignore. Non, je suppose puisque nous n'avons pas arrêté. Mais depuis c'est un peu tendu. Henry passe de moins en moins de temps au manoir.

_ Ce n'est pas forcément une mauvaise chose. Après tout, il entre dans la vie adulte.

_ Oui je sais qu'il faut lui donner de l'espace, mais… je ne veux pas entamer quelque chose qu'il désapprouverais.

_ Madame Mills, avez-vous toujours requis la permission de votre fils dans vos relations ? »

Regina ouvrit la bouche, puis la ferma.

« Oui, enfin… Je crois. Je veux dire, il a son mot à dire et…

_ Non, trancha la psychiatre. »

Regina cligna des yeux, un peu coite.

« Vous pensez qu'il a son mot à dire dans vos relations personnelles ? demanda la psychiatre, calmement.

_ C'est mon fils, exposa Regina en toute évidence. Il compte. Son avis compte.

_ Bien sûr, approuva la médecin. Mais est-ce que son avis doit guider vos choix intimes ? »

Regina resta silencieuse, un peu abasourdie. Et troublée.

« Je ne dis pas que ce qu'il ressent est sans importance, poursuivit-elle. Mais vous semblez porter un poids qui ne devrait pas entièrement vous appartenir. »

Regina fronça les sourcils.

« Vous pensez que je me sacrifie.

_ Je dirais plutôt que vous semblez craindre de vous autoriser à vivre quelque chose pour vous-même. Et que cela semble lié à votre rôle de mère. »

Regina pinça les lèvres. Elle s'était redressée légèrement dans le fauteuil, plus sur la défensive.

« Vous avez dit que Henry avait confronté Emma, continua la doctoresse. Que cela avait été tendu. Mais vous n'avez pas dit ce que vous, vous aviez ressenti à ce moment-là. »

Regina prit le temps de réfléchir. C'était quelque chose auquel elle n'avait pas pensé.

« Je ne sais pas, murmura-t-elle. De la honte, je suppose. De la colère. Je me suis sentie… prise en faute. Comme si j'avais fait quelque chose de mal. »

La psychiatre hocha lentement la tête.

« Et c'était mal ? »

Regina soupesa la question, puis se mordit la lèvre.

« Je ne sais pas.

_ Henry a reproché à Emma de vous dire qu'elle vous aime et de se rapprocher de vous.

_ Il a peur que je souffre.

_ Oui, mais ce n'est pas la question que je vous ai posé Madame Mills, répondit la psychiatre en un sourire amical. »

Regina se gratta nerveusement les doigts. Puis elle finit par soupirer.

« Est-ce que c'était mal, selon vous ? réitéra la jeune femme face à elle avec douceur.

_ Non… non, je ne pense pas. »

La médecin lui accorda de nouveau un sourire encourageant.

« Est-ce que vous vous sentiez mieux après cette barrière que vous avez baissé avec Mademoiselle Swan ?

_ Oui, admit Regina.

_ Dans ce cas… »

Regina ouvrit la bouche, puis grimaça de nouveau.

« D'accord, mais cela ne résout pas notre problème.

_ Quel problème ? souligna la médecin.

_ Eh bien, tout d'abord, nous prenons soin de nous éviter. J'y ai bien réfléchi et… vous savez, cette histoire est compliquée. Emma est la fille de Snow et David, elle est de surcroit elle aussi la mère d'Henry. Nos… étiquettes respectives compliquent énormément les choses. Et puis, il y a… Hook.

_ Killian Jones, son mari.

_ Vous connaissez bien le dossier à ce que je vois, marmonna Regina en s'appuyant sur son genou d'un air boudeur. »

La psychiatre rit un peu, puis dessina des arabesques avec son stylo sur un coin de sa feuille.

« Il semblerait que Storybrooke soit le paradis de tous les métiers en lien avec les traumatismes et les maladies mentales vous savez. »

Cette fois, ce fut à Regina de rire, un peu amèrement.

« Je ne vous le fais pas dire, chuchota-t-elle, plus pour elle-même.

_ Tout le monde connait plus ou moins les histoires de chacun. Storybrooke est une petite ville. Nous en discutons régulièrement avec un de mes confrères, le Dr Hooper, mais je crois que vous devez le connaître, je me trompe ? »

Regina hocha la tête, silencieuse.

« Killian Jones est donc un pirate qui a aidé votre mère à venir ici, si ma mémoire est bonne.

_ Elle l'est. Il nous a aussi accompagné lorsque nous étions à Neverland pour porter secours à Henry.

_ Puis, Emma et lui se sont rapprochés.

_ Exactement.

_ Quand est-ce que cela s'est passé ? »

Regina ouvrit la bouche, puis remonta le fil de l'histoire.

« Lorsqu'elle a retrouvé Neal, son premier amour, reconstitua-t-elle. Ou plutôt, lorsqu'elle la perdu une nouvelle fois.

_ Et à cet instant, que se passait-il pour vous, de votre côté ?

_ Ma mère est morte. Et puis j'ai rencontré Robin, mais une fois encore… les choses ont été un peu compliquées. Je vous passerais les… détails sordides autour de lui, de ma soeur et de Marianne sa femme, que Miss Swan a eu la bonté d'âme de ramener alors que nous nous fréquentions et qu'il se croyait veuf depuis de nombreuses années. Honnêtement, cette histoire mériterait une thérapie d'au moins une dizaine de séances, plaisanta-t-elle.

_ Robin… des Bois ?

_ Oui, grimaça Regina. Et je constate que sa réputation le précède. »

Regina soupira de lassitude. Décidément, elle avait le chic pour s'enticher de véritables problèmes sur pattes.

« Oh non, c'est juste que… je me souviens de lui, souligna la jeune femme en gardant son regard dans le vide.

_ Oui et bien, il est mort lui aussi, balança Regina d'un ton dépité en se laissant tomber contre son siège.

_ Arrêtez-moi si je me trompe mais… »

Regina s'intéressa soudain à ce que la jeune femme commença à émettre. Alors, elle s'appuya de nouveau sur ses jambes en lui accordant toute son attention.

« Oui ?

_ Robin des Bois était un voleur.

_ Oui, répéta Regina, qui commençait à être suspicieuse.

_ Emma et lui partagent donc ce trait commun. »

Que voulait-elle faire passer comme message au juste ?

« Et il croyait en vous, si je ne m'abuse. Il n'avait pas peur de la méchante reine.

_ Grand dieu non !

_ Tout comme Emma. »

Regina croisa les bras sur sa poitrine, agacée.

« Et il était blond, oui, comme Emma. Je peux savoir ce que vous cherchez à me dire ?

_ Rien, répondit la psychiatre en un sourire de façade. Je constatais juste qu'au même titre, Monsieur Jones était un pirate redouté et craint qui a trouvé sa rédemption en venant en aide à Mademoiselle Swan, que lui aussi, était en guerre avec quelqu'un qui lui a volé son premier amour puis qu'il lui a pardonné et a trouvé la paix de cette façon. »

Regina plissa les yeux.

« Et n'a-t-il pas les cheveux bruns également ?

_ Ecoutez, commença Regina en se levant de nouveau. »

La psychiatre observa sa patiente recommencer de tourner en rond. Elle souriait… pas avec une once de sincérité, mais plutôt avec une désinvolture certaine.

« C'est ridicule, d'accord ? balança-t-elle en mettant ses mains devant elle.

_ Qu'est-ce qui est ridicule ?

_ Ce que vous insinuez.

_ Je n'insinue rien. »

Regina finit par claquer ses mains à plat sur son bureau, le regard noir.

« Vous êtes en train de me dire à demi-mot qu'Emma et moi avons trouvé des substituts l'une de l'autre. »

La psychiatre ne broncha pas. Elle resta parfaitement calme, les mains jointes, le regard posé sur Regina comme si de rien n'était.

« C'est vous qui le suggérez, répondit-elle posément.

_ Oh, vous êtes insupportable, grogna Regina en se détournant d'un pas brusque, les bras toujours croisés. »

Elle se mit à arpenter la pièce, dos à la médecin.

« Vous vous êtes déjà demandé pourquoi vous réagissiez ainsi ? poursuivit doucement cette dernière.

_ Parce que c'est absurde ! s'exclama la brune. C'est… c'est de l'interprétation de bas étage ! Emma n'a rien à voir avec Robin. Et moi je ne suis pas… »

Regina s'interrompit.
Ses mots s'étranglèrent dans sa gorge.

Regina grimaça. Elle aurait préféré une protestation, un refus net, quelque chose pour la contrer. Mais elle ne trouvait rien à dire de plus que ce « non » qu'elle savait fragile.

« Vous parlez beaucoup de ce que vous ressentez aujourd'hui, mais très peu de ce que vous ressentiez, à l'époque. »

Regina pinça les lèvres, mal à l'aise.

« Disons que je ne suis pas venue pour parler du passé.

_ Notre passé influence nos actions futures.

_ Certes… Mais disons que… ce n'est pas très agréable à revisiter, murmura Regina en se rasseyant. »

La psychiatre observa Regina baisser les yeux, désarmée.

« Je vous crois… Mais vous y revenez souvent. »

Un silence.
La psychiatre reprit, d'un ton neutre.

« Emma et vous, vous aviez un lien. Unique, apparemment. Est-ce qu'à un moment donné, ce lien aurait pu évoluer différemment, si les circonstances avaient été autres ? »

Regina haussa les épaules, presque boudeuse.

« Peut-être. Je ne sais pas…. Je n'y ai jamais songé.

_ Pourquoi cela ?

_ Disons qu'à l'époque, je n'étais pas très disponible émotionnellement.

_ Vous n'étiez pas prête, souffla doucement la médecin. »

Elle laissa planer un silence.

« Et Emma ? Était-elle prête, à votre avis ? »

Regina mit un moment avant de répondre. Elle repensait au moment où Emma lui avait tendu la main pour lui dire qu'elle pouvait être son amie, lorsqu'elle l'invitait à des fêtes dans lesquelles personne ne voulait d'elle. Et lorsqu'à Neverland, elle avait décidé de son propre chef qu'ensemble, ils pouvaient être autre chose. Une famille.

« Parfois… je crois qu'elle l'était. »

Regina plissa les yeux dans le vide. Puis elle baissa les yeux de honte en se remémorant ces moments où sa magie avait foutu le camp, et qu'elle, était trop occupée à bouder parce qu'Emma avait eu le malheur de ramener Marianne… L'ex-femme de Robin. Un sacré hasard, maintenant qu'elle y repensait.

« Peut-être que je ne lui ai pas laissé d'espace dans ma vie à ce moment là. »

La psychiatre acquiesça, toujours aussi calme.

« Et ensuite, elle s'est engagée avec quelqu'un d'autre, acheva-t-elle.
_ Oui, répondit Regina, plus sèchement. »

La doctoresse ne releva pas le ton.

« Est-ce que c'était une punition pour vous ? Ou une manière pour elle d'avancer ? »

Regina réfléchit. Puis secoua lentement la tête.

« C'était… la suite logique. Elle a fini par se tourner vers quelqu'un qui était là, simplement. Hook était déjà à ses pieds, elle n'avait qu'à lever le petit doigt. »

Un léger sourire triste étira ses lèvres.

« Moi, je lui opposais tout. Tout le temps.

_ Et quand vous étiez enfin prête, fit la psy d'un ton plus bas, elle n'était plus seule. »

Regina ne répondit pas.
Mais son regard venait de s'assombrir.

« Avez-vous déjà pensez à la raison qui vous a poussé à la laisser tranquille à cet instant précis de votre vie ? »

Regina releva les yeux.

Elle ouvrit la bouche, hésita, puis reprit la parole.

« Je ne voulais pas gâcher ce qu'elle avait. Elle semblait heureuse. Et moi, je ne me sentais pas… digne de tout bousiller. Car c'est ce que je fais, vous savez… J'ai cassé beaucoup, beaucoup trop de choses. Daniel… Puis, Robin… »

Un silence.

« Pourtant… la mort de votre ancien compagnon n'était pas de votre ressors.

_ Non, souffla Regina, encore attristée. Mais il s'est jeté sur moi pour me sauver, comme… »

Regina se stoppa soudain, catastrophée. Elle releva son regard et la psychiatre acquiesça. Elle resta figée, la gorge serrée, les lèvres entrouvertes comme si elle avait oublié comment les refermer.

« …comme Emma l'a fait. Plusieurs fois, acheva la brune. »

La psychiatre ne répondit pas. Elle attendait.

« Robin est mort à cause de moi, reprit Regina. Enfin… pour moi. »

Elle déglutit.

« Et Emma… elle aurait pu mourir pour moi aussi. Elle l'a fait, en fait. Elle a pris la pire noirceur du monde sur elle.

_ Que pensez-vous de ce geste ? Car que je me souvienne, Mademoiselle Swan s'est saisi de la dague du ténébreux pour vous sauver.

_ Oui.

_ Pourquoi ? Elle aurait pu vous sauver un million de fois autrement.

_ Je me souviens encore de cette tempête autour de moi et… et cette magie qui essaie de me prendre, répéta Regina, les yeux dans le vide. »

La psychiatre lui laissa l'espace nécessaire.

« Emma m'a regardé. »

Regina secoua la tête, désabusée.

« Et elle a plongé sa main et a prit la dague… sans réfléchir. »

Enfin, Regina cligna des yeux vers la doctoresse, perdue.

« Vous pensez que c'était un acte d'amour ? »

La jeune femme ouvrit la bouche, mal à l'aise.

« Vous savez, je ne suis personne pour donner de telles intentions aux actes d'autrui. Mais cela ne ressemble pas à quelque chose que l'on ferait pour quelqu'un qui n'occupe pas une forte place.

_ Mais je ne peux pas la laisser faire ça, lâcha Regina en fronçant les sourcils.

_ Ne l'avez vous pourtant pas aussi déjà fait pour elle ?

_ Que voulez-vous dire ?

_ En allant en enfer. »

La psychiatre s'avança vers Regina qui fixa un regard rendu brillant vers elle.

« Vous avez été en enfer pour elle, ce n'est pas rien. Si ? »

Regina ouvrit la bouche, puis sentit son regard s'embrumer. Cette fois, elle ne put le contrôler, avant qu'une larme silencieuse dévale sa joue. Elle s'empressa de la sécher en reniflant, mal à l'aise.

La jeune femme lui tendit alors un mouchoir que Regina accepta.

« Désolée. Je ne voulais pas… pleurer.

_ Vous n'avez rien à prouver ici, répondit simplement la psychiatre. »

Après un silence doux et respectueux, Regina prit une grande inspiration, laissant son regard flotter un instant dans la pièce.

« Alors… alors ce rapprochement était peut-être la suite logique finalement, finit par acquiescer Regina. »

Le psychiatre hocha la tête en lui accordant un mince sourire compatissant.

« Mais qu'est-ce que je peux faire maintenant ? Je veux dire, bafouilla-t-elle. Je ne suis pas prête ! Je dois bien trouver une solution à tout ça. Mais il y a Snow, et David, Henry, Emma n'a sans doute même pas réfléchi à un quart de…

_ Madame Mills, la calma la psychiatre. Tout le monde n'est pas obligé de crier sur tous les toits que son coeur s'emballe un peu pour quelqu'un à l'instant où ça arrive, rit-elle avec douceur. »

Regina sentit ses mains trembler encore un peu.

« Ce que vous ressentez ne vous oblige à rien, poursuivit-elle. Ni à prendre une décision, ni à justifier ce qui vous traverse. »

Regina la regarda, toujours un peu haletante, comme si cette phrase venait de faire tomber un poids.

« Vous avez le droit de ressentir, sans plan d'action immédiat. Vous avez même le droit… de ne pas savoir quoi faire, aujourd'hui. Et aussi demain. »

Regina secoua lentement la tête, l'air presque étonnée.

« Vous savez, je m'attendais à ce que vous me disiez de tout remettre à plat. De parler à Henry, à Emma, à tout le monde…

_ Et auriez-vous été prête à le faire ? demanda la médecin sans relever le ton.

_ Absolument pas, répondit Regina du tac au tac, les bras croisés. »

Elles partagèrent un sourire, cette fois, complice. Le tout premier.

« Alors ce ne serait pas thérapeutique, conclut la psy. Ce serait de la précipitation. Or, ce n'est pas ce que vous cherchez.

_ Un comble pour quelqu'un qui a un cancer à un stade avancé, marmonna-t-elle.

_ Cela ne vous empêche pas de vouloir faire les choses bien. C'est très sain, au contraire. »

Regina la dévisagea. Elle ? Saine ? Elle avait l'impression de planer dans la 4ème dimension.

« Alors… je ne suis pas obligée de le dire à qui que ce soit.

_ Non.

_ Je peux… laisser les choses se faire, comme ça, écouter mes envies sans avoir de compte à rendre ? »

La doctoresse lui lança un sourire complice.

« Vous pouvez, confirma-t-elle. »

Elle posa doucement son carnet, le referma sans un bruit.

« Vous êtes libre, Madame Mills. Alors, ne vous encombrez pas d'attendre la validation de qui que ce soit lorsque vous entreprenez quelque chose qui vous fait du bien et qui est fait dans le respect de chacun. »

Regina la fixa un moment, sans répondre.

Puis elle hocha lentement la tête.
Une fois.
Comme un accord silencieux avec elle-même.

Regina récupéra son sac posé à côté du fauteuil, sans se presser.

« Je… je suppose que je pourrais revenir, souleva-t-elle. »

Elle marqua une pause. La psy se contenta de la fixer.

« Pas chaque semaine, évidemment, ajouta-t-elle en levant les yeux au ciel. »

La psy sourit, amusée.

« Vous pouvez venir quand vous estimez en avoir besoin. »

Regina esquissa un sourire, presque timide.

« Merci, souffla-t-elle, en se levant. »

Et sans attendre de réponse, elle sortit.

Chapter Text

Bonsoir tout le monde ! Comme je pars en vacances demain, je vous met un petit chapitre. J'essaierais de trouver le temps de poster durant les deux prochaines semaines. Gros bisous à tous


Chapitre 12.

Emma secouait nerveusement sa cuisse, assise sur ce banc près du port. Ses yeux étaient pressés sur ses paumes et la brise la rendait frileuse.

Elle en avait affronté, des tempêtes, mais alors de cet acabit : jamais.

Plus tôt ce matin là, elle s'était en quelque sorte, enfuit du manoir, incapable de conjuguer avec la présence de Regina partout, et surtout, de l'éventualité de la recroiser dans la journée d'une manière ou d'une autre.

Elle n'avait pas pris sa voiture. Elle n'avait même pas pris son téléphone avant de partir, juste ses clés et ses pensées en vrac.

« Henry avait raison, se répéta-t-elle intérieurement en boucle. »

La pensée la heurta comme une pierre en pleine poitrine.

Et si c'était vrai ? Et si ce matin, ce moment silencieux, brûlant, impensable, n'avait été qu'un… un glissement malsain ? Un abus de faiblesse ? Regina venait de sortir de chimiothérapie. Elle était fatiguée. Fragile. Et elle, qu'est-ce qu'elle avait fait ? Elle s'était frottée à elle en feignant de dormir.

Putain.

« J'ai merdé, souffla-t-elle à personne. »

Elle sentit ses yeux s'embuer, mais elle ravala tout. Elle n'avait pas le droit de craquer. Pas pour ça. Pas après ce qu'elle venait de faire.

Emma se leva d'un bond.

Elle ferait mieux de… partir. Elle ne méritait pas de l'aider, d'être là, dans sa vie. Alors qu'elle fit un pas pour annoncer sa décision et boucler ses affaires, Emma s'arrêta instantanément.

D'accord, mais… mais comment ferait-elle pour gérer les taches ménagères ? Et qui veillerait sur elle après ses séances ? Et son opération ? Elle ne pouvait quand même pas la laisser toute seule !

Emma réalisa qu'elle avait beaucoup appris… Bien plus que n'importe qui. Comme le fait qu'un gant mouillé d'eau froide sur son front posé tout pile au bon moment pouvait faire des miracles, qu'elle ne supporterait plus de multiples odeurs, qu'elle détestait… les haricots verts et le clafoutis à la cerise que sa foutue mère s'évertuait à lui ramener tous les dimanches. Qui mangerait cette horreur à sa place, si elle partait ?

Et… et qui continuerait d'aller voler du tiramisu pour elle en parvenant par miracle à ne pas se faire pincer pendant que Granny était en train de faire une véritable enquête sociale dans toute la ville pour trouver qui lui piquait des trucs dans son frigo ?

Emma ferma les paupières, dépitée. Puis, elle les rouvrit, catastrophée.

Et Hook ?!

Elle n'arrivait même pas à formuler ce qu'elle pourrait lui dire.

Il avait toujours senti quelque chose. Il avait eu raison. Elle l'avait laissé dans le flou pendant des mois, et voilà ! Elle ne pouvait même pas se raccrocher à l'excuse de l'infidélité. Parce que… c'était pire.

Emma secoua la tête, comme pour se dégager de ses propres pensées.

Elle avait besoin de bouger. Rester figée là, avec ce poids dans la poitrine, c'était en train de la rendre complètement zinzin.

Alors elle marcha… Longtemps, sans regarder où elle allait vraiment.

« Shérif Swan ? »

Emma se figea.
Elle leva les yeux. C'était Madame Greenfield, l'ancienne prof de biologie du lycée. Elle tenait un cabas plein de légumes. C'était la prof préférée d'Henry, elle l'avait vu plusieurs fois, aux réunions, avec Regina.

Emma ouvrit la bouche bêtement. Elle n'eut même pas à coeur de la rectifier lorsqu'elle l'avait nommé par son ancien grade. Techniquement, Emma n'était plus shérif depuis longtemps…

« Vous allez bien ? Vous avez une drôle de tête. »

Emma força un sourire puis la regarda enfin.

« Oui. Je… juste une journée un peu longue, bâcla-t-elle. »

La femme hocha la tête, avec ce regard vaguement compatissant qu'Emma détestait tant.

« Il paraît que Regina est malade. »

Emma resta interdite. Les nouvelles allaient vite.

« Je suis contente que vous soyez là pour elle. »

Puis, Madame Greenfield reprit avec un léger sourire se voulant réconfortant.

« Tout le monde ne l'aurait pas fait, vous savez. Pas après… tout ce qu'on a vécu ici. »

Un silence.
Emma acquiesça, gênée.

« Bonne journée, murmura-t-elle. »

Et elle repartit.
Emma la fixa, complètement paumée.

Même les gens qui ne savent rien lui disaient qu'elle était… admirable alors qu'elle avait juste envie de s'enterrer.

Merveilleux.

Lorsque Emma repassa devant le manoir, elle hésita une seconde. La voiture de Regina n'était pas là… Alors, elle soupira et décida de retourner au chaud.

Il ne manquerait plus qu'elle se chope un virus et qu'elle la contamine.

Le système immunitaire de Regina était bien trop fragile pour se le permettre.

Lorsque Emma entra dans l'entrée réchauffée, elle soupira d'aise.

Cette maison… Elle n'avait pas menti. Elle se sentait chez elle ici, plus que n'importe où d'autres.

Machinalement, elle trifouilla la poche de sa veste sur le porte manteau pour y trouver son portable.

Elle ne s'attendait à rien, elle voulait juste voir l'heure qu'il était.

Sauf qu'une notification était apparue depuis une quinzaine de minutes.

Et Emma manqua de reprendre son souffle.

« Tu es où ? »

Emma fixa l'écran de son téléphone, avant de soupirer. Trois mots. Pas de ponctuation. Aucune émotion apparente. C'était bien du Regina tout craché. Emma relut le message encore, et encore.
Puis elle ferma les yeux.

Un soupir long et tremblant s'échappa de ses lèvres.

Elle hésita, un instant… Deux, tout au plus. Car elle réalisa que Regina pouvait avoir besoin d'elle. Et elle ne pouvait pas se permettre de merder en se fourrant la tête dans le sable.

Elle ne pouvait plus le faire, maintenant.

« Je suis rentrée, tapota-t-elle. »

Emma s'arrêta et hésita à rajouter quelque chose.

« Je suis désolée. »

Elle effaça.

« Si tu veux que je parte… »

De nouveau, elle l'effaça.

A la place, Emma appuya sur envoyer à propos de l'emplacement où elle se trouvait, ni plus, ni moins.

Puis, elle serra son téléphone entre ses mains. Une petite voix était en train de lui glisser qu'elle allait le regretter amèrement. En fait, Emma songea à fuir. Mais lorsqu'elle se retourna, elle manqua de tomber à la renverse.

Regina était la. Et elle lui avait foutu une trouille bleue.

« Bordel, jura Emma en sursautant.

_ Pardon, je ne voulais pas te faire peur, souffla la brune en croisant timidement ses bras dans le dos. »

Emma s'appuya sur la console près d'elle et posant sa main sur sa poitrine. Puis, elle fit un geste las de la main vers la brune. Elle ne vit pas qu'elle venait de faire un pas vers elle, timidement.

« Tu étais déjà là ? lui demanda la blonde. »

Regina hocha la tête, sans la quitter des yeux.

« Pas très loin. Je suis restée dans le jardin un moment. »

Emma fronça légèrement les sourcils.

« Pourquoi ? Il fait un froid de canard dehors. »

Regina baissa les yeux, puis haussa les épaules, comme si elle-même ne savait pas exactement.

« Je voulais… voir si tu répondrais. »

Emma serra les lèvres, un peu plus perdue encore.

« Et si j'avais pas répondu ?

_ Alors je serais restée dans le jardin, souffla Regina. »

Elle eut un sourire très bref.

« C'est pas un très bon plan, je sais. »

Emma baissa les yeux à son tour. Elle croisa les bras sur sa poitrine, puis trifouilla ses chaussures pensivement.

« En fait, je voulais… commença Regina. Je voulais te remercier.

_ Me remercier ? répéta Emma en levant enfin son regard vers elle, perplexe.

_ Tu es restée, souffla la brune. »

Puis, elle lui accorda un sourire, sincère.

« Je te mentirais si je te disais que j'étais pas à deux doigts de prendre mes jambes à mon cou, mais… j'avais pas envie d'encore tout gâcher avec ma lâcheté. »

Regina rit un peu, puis secoua la tête.

« Si toi tu es lâche, alors je n'ose imaginer ce que tu dois penser de moi. »

Emma plissa les yeux, puis sourit un peu.

« Je croyais que tu n'aimais pas les flatteries. »

La reine rit de nouveau. Un peu de légèreté lui faisait du bien.

« J'espère que tu n'as pas pris froid en allant te planquer sous ton pommier, marmonna Emma en la dépassant pour se rendre dans le salon et aller chercher un plaid. »

Regina leva les yeux au ciel, puis la suivit. Une fois arrivée dans la pièce et avoir pris la couverture rangée dans un coffre, Emma se retourna vers elle, puis posa le tout sur ses épaules.

« Non, promis maman, laissa Regina trainer juste près d'elle.

_ Si tu m'appelle encore une fois comme ça, je te tue. »

Regina rit de nouveau.

Puis, la main d'Emma glissa sur ses épaules, effleurant le cou de la reine. Elle frémissait encore, même si elle faisait tout pour repousser cette chaleur qui prenait place au fond de son estomac.

« A propos de… de ce matin, commença Emma en un chuchotement. »

Regina murmura un chut en posant son index sur sa bouche. Elle regarda ses lèvres, puis ses yeux. Son souffle ne se trouvait qu'à quelques centimètres du sien.

« Ne dit rien, lui glissa-t-elle tout bas.

_ Mais si Henry… S'il…

_ Henry n'a pas à être au courant. »

La paume de la brune se posa sur sa joue. Elle s'avança entièrement vers elle et prit la main d'Emma pour la poser là, dans les creux de ses propres reins, comme elle le faisait de temps en temps. Et qu'elle n'osait plus faire.

« Je veux pas avoir l'impression de profiter de toi, chuchota la sauveuse.

_ J'ai un cancer, mais j'ai encore toute ma tête, lui répondit Regina tout bas en frôlant son nez, alors que sa bouche jouait avec la sienne sans la toucher. »

Emma ferma les yeux, comme pour mieux absorber la sensation de ce souffle contre ses lèvres.

« Qu'est-ce qu'on va faire, finit-elle par dire, la gorge nouée.

_ Que veut-tu qu'on fasse ? demanda Regina qui passa tendrement sa main sur ses cheveux en admirant son visage, fascinée alors que pourtant, Emma grimaçait, tiraillée par ce conflit intérieur qui ne s'arrêtait pas.

_ S'il te plait ne me pose pas cette question. »

Regina sourit un peu contre elle. Sa bouche la frôlait, de si près. Les doigts d'Emma remontèrent doucement contre la hanche de Regina, s'arrêtant à mi-hauteur, dans une hésitation brûlante.

« D'accord alors, on va se comporter… commença Regina.»

Elle serra un peu les cheveux de la blonde et Emma soupira en fermant les paupières. C'était une véritable torture.

« Comme les deux adultes pleinement conscientes de leurs actes que nous sommes. »

Puis, la sauveuse ouvrit les yeux. Elle réalisa que Regina était encore plus proche d'elle qu'elle ne le pensait, et que son regard lui envoyait un éclat malicieux.

« Et consentantes, se permit-elle d'ajouter.

_ Un peu que je suis consentante. »

Regina n'eut même pas le temps de rire lorsque Emma la prit sensuellement contre elle et entrouvrit directement sa bouche contre la sienne.

Sa main se posa là, sur sa joue, juste pour supporter l'assaut.

Emma pencha la tête et son échine s'électrisa lorsque sa langue rencontra celle de la reine.

Le baiser n'avait jamais été aussi lent.

Leur langue s'explorait, avec cette sorte de douceur désespérée.

La main d'Emma glissa derrière la nuque de Regina, ses doigts se mêlant à ses cheveux avec précaution, presque comme une prière. Puis leurs lèvres se séparèrent. Elles étaient essoufflées.

Emma déglutit, encore plus perdue et Regina venait de se coller à elle avec une telle envie.

« J'ai jamais voulu… enfin…

_ Chut… Tu ne fais rien de mal… Rien, lui chuchota Regina en effleurant son nez de son index. »

Puis, pour la première fois, ce fut à elle d'être à l'initiative d'un second baiser, encore plus profond que le premier si ce n'était encore possible. Emma la serra fort contre elle, puis prit une inspiration avant de presser sa langue contre la sienne avec une intensité sans pareille.

Regina bougea la sienne, juste un peu, puis la caressa en arrachant un gémissement involontaire à la sauveuse.

Elle était décidée à ne pas arrêter ce baiser cette fois, quitte à s'évanouir sous le manque d'oxygène.

C'était bien trop bon.

Leurs lèvres ne cessaient de se chercher, de se reprendre, de s'effleurer à nouveau, comme si chaque retour valait une délivrance.

Emma gérait mal. Très mal.

Son ventre se contractait. Son bassin se tendait malgré elle, et sa main serrait la taille de la brune, de plus en plus fort.

Regina, elle, ne la lâchait pas. Elle la tenait par la nuque d'une main ferme, ses doigts enfoncés dans ses mèches blondes, ses ongles effleurant parfois la peau.

Leur baiser devenait plus profond, plus humide, plus intense. C'était ce genre de baiser qu'on donne quand on veut… faire l'amour avec la bouche seule.

A cette pensée, Emma crut flancher. A la place, elle laissa échapper un soupir qui vibra contre la langue de Regina. Elle y répondit par une pression plus lente encore, enroulant sa propre langue avec une précision presque cruelle.

Leur salive se mêlait langoureusement, et Emma recula d'un centimètre à peine. Sa bouche était toujours collée sur celle de Regina alors qu'elle haletait.

« Tu vas me tuer, lui glissa-t-elle en un rire nerveux. »

Regina sourit, sans se défaire de sa position.

« Je te laisse respirer dans deux minutes. »

Puis, Regina reprit leur baiser là où elle l'avait laissé. Chaque mouvement de langue devenait plus lent, plus mouillé, plus intime.

Emma ne pensait pas avoir déjà été embrassé de cette façon, un jour dans sa vie. Jamais. Et Regina elle, ralentit le rythme, encore et encore.

Ses lèvres se posaient, se retiraient, revenaient, s'ouvraient à peine, puis reprenaient Emma avec une langueur qui donnait le vertige. Leurs torses s'effleurèrent, pressés juste ce qu'il fallait, assez pour sentir les cœurs cogner l'un contre l'autre.

Regina gémit soudain dans sa gorge, très bas et Emma ouvrit presque un oeil, surprise. Elle pensait être… la seule des deux à se sentir aussi troublée.

Pourtant, tout en Regina lui montrait le contraire.

Lentement, la main de la brune monta sur son ventre, et ses mains se posèrent simplement là, en dessous du débardeur d'Emma, sur sa peau nue et tiède. Emma frissonna violemment.

Ses paumes étaient froides, mais son contact électrisant. Elle arracha alors un long soupir à la brune, qui colla un peu plus sa bouche contre la sienne, comme pour la punir de l'effet qu'elle lui faisait.

C'est avec des lèvres tremblantes qu'elles se séparèrent de nouveau, juste un peu, pour reprendre leur souffle.

« C'est si bon, laissa échapper Emma sans même réussir à contrôler ses mots.

_ Oui, souffla Regina contre elle. »

Puis, ce fut à la sauveuse de s'emparer de sa bouche. Encore. Ce fut cette fois un peu plus rapide, un peu plus… fiévreux. Puis, elle se recula une nouvelle fois, enivrée.

« Henry ne doit pas savoir, dit-elle avec un peu plus de conviction.

_ Tais-toi. »

Lorsque Regina se précipita de nouveau sur elle, Emma bascula un peu en arrière.

Le bas du canapé cogna contre ses mollets et elle se laissa à moitié tombé en travers du sofa. Elle cueillit Regina au vol qui ne sembla même pas se préoccuper de sa nouvelle position, tant cette continuité de ce baiser s'étirait, jusqu'à apparaître comme vital. Le plaid était balancé à moitié au sol. Et de toute façon, elles n'en avaient pas besoin, car leurs deux corps bouillonnaient littéralement l'un contre l'autre.

Emma se recula un peu afin que Regina prenne pleinement place sur elle et posa par erreur sa main sur la télécommande qui alluma la télévision toute seule.

Regina rit contre sa bouche lorsque le son des informations contrasta avec le silence ambiant du manoir, et Emma pressa sa taille, encore plus fort.

Regina captura sa lèvre inférieure en la mordillant légèrement, puis la sonnette de l'entrée retentit et elle s'écroula sur la sauveuse, dépitée.

« Oh pour l'amour du ciel, ils veulent pas nous foutre la paix tous ! »

Regina rit contre elle, son nez fourré près de son cou. Elle posa sa main sur sa joue, puis déposa de furtifs baisers près de l'oreille de la blonde alors qu'un sourire réellement amusé étirait sa bouche.

« Chut, lâcha Regina en gloussant.

_ Quoi chut ? Non mais merde à la fin, faut toujours qu'on soit interrompu par quelqu'un j'en ai ras le bol ! balança Emma en désignant la porte de sa main, ignorant presque la reine qui continuait d'embrasser la ligne continue de sa mâchoire. »

Regina contint un nouveau rire contre elle.

« C'est pas croyable, j'ai l'impression qu'on vit dans une sitcom de merde, râla Emma entre ses dents.

_ Tu veux que j'aille ouvrir ? demanda Regina en continuant de déposer de minuscules baisers derrière son oreille.

_ Tu veux encore plus m'énerver ? »

Regina rit franchement cette fois, un éclat chaud contre sa peau. Puis, elle embrassa de nouveau Emma qui oublia une micro seconde son agacement… jusqu'à ce que la sonnette retentisse de manière insistante.

Emma leva les yeux au plafond et prit Regina par les épaules pour l'éloigner d'elle, cette fois bel et bien énervée.

« Ok. Très bien. Voilà. Le monde a décidé que j'étais pas autorisée à ça. C'est clair. maintenant ! Très limpide ! »

Elle tapota les fesses de Regina, doucement.

« Debout, Sa Majesté. C'est l'heure d'aller jouer à la femme respectable. »

Regina grogna. Un son étouffé, presque plaintif, qu'Emma sentit vibrer jusque dans sa poitrine. Elle se retira d'elle en un mouvement gracieux, puis se retrouva debout et croisa les bras devant elle d'un air autoritaire. Emma elle, se redressa à son tour, puis lui fit face avec une grimace.

« Tu vas me le faire regretter toute la journée, hein ? »

Regina glissa ses lèvres à la commissure de sa bouche, et y déposa un dernier baiser, plus tendre

« Absolument, se contenta-t-elle de dire. »

Emma rit malgré elle. Regina s'en alla, mais lui renvoya un sourire en se retournant un peu.

« Et tu aura l'amabilité d'effacer cette… chose sur ton visage, répondit-elle en mimant un geste de la main sur sa bouche.

_ Cette chose ? Quelle chose ? »

Emma se précipita devant le seul miroir de la pièce et son regard s'arrondit d'effroi devant la demi tonne de rouge à lèvres qui était étalée un peu partout sur elle.

Elle entendit Regina émettre un léger rire de malice et fusilla du regard sa silhouette qui partait de la pièce en un déhanchement sensuel avant de se saisir d'un mouchoir pour réparer les dégâts. Emma frotta ses lèvres avec le tissu, grognant contre son propre reflet.

« Bordel, Regina, on dirait que je me suis battue avec une palette Sephora ! »

Elle tenta tant bien que mal de remettre un peu d'ordre à son apparence. Sa bouche picotait, sa respiration était encore saccadée, et ses cheveux… n'en parlons pas. Elle se redressa brusquement lorsqu'elle entendit la porte d'entrée s'ouvrir.

Puis… la voix.

« Regina. Je… Salut. »

Emma se figea.

Le miroir en face d'elle refléta un mélange fascinant d'horreur et de résignation. Elle inspira profondément, fit un pas vers la porte du salon, s'arrêta.
Son cœur battait à tout rompre.

Hook était dans l'entrée.

Chapter Text

Chapitre 13.

Regina ouvrit la porte, puis cligna des yeux en voyant la silhouette du pirate se tenir devant elle.

Il avait l'air… gêné. Après l'avoir scruté un peu, Regina prit une inspiration, puis lui offrit son sourire le plus poli.

« Hook, dit-elle simplement. »

Elle s'écarta pour le laisser entrer. Il lui jeta un regard, pas très franc, pas très ouvert non plus. Regina quant à elle s'effaça sans commentaire.

« Emma est là, ajouta-t-elle. Je suppose que tu es venu pour la voir. »

Le pirate hocha la tête, mal à l'aise.

Il n'était jamais entré dans ce manoir, en dépit de tout ce qu'ils avaient pu traversé. Mal à l'aise, il n'osa regarder plus la reine qui quitta la pièce momentanément.

Emma quant à elle, apparut discrètement dans l'encadrement de la porte de la cuisine qu'elle venait de pousser et dans laquelle la brune avait amené son mari.

« Killian ! lâcha Emma en se raclant la gorge, mal à l'aise. Tout va bien ? »

Le pirate se retourna. Il manqua de sursauter face à sa nouvelle coupe de cheveux plus courte, à laquelle il n'avait toujours pas eu le temps de s'accoutumer.

Alors il lui rendit un sourire un peu crispé.

Quand elle passa à côté de lui furtivement, Killian nota malgré lui son parfum, qui n'était pas celui de d'habitude. Plus piquant, plus… Regina, en fin de compte.

« Je venais juste prendre des nouvelles. »

Hook était resté figé sur place, les mains croisées dans le dos, observant Emma parler de banalités avec une certaine nervosité polie.

Ils discutèrent quelques instants, de Henry, de la météo, de la routine de la ville. Hook se montrait courtois, mais distrait. Emma répondait posément, poliment. La conversation était plutôt banale… Surtout parce que le pirate évitait à tout prix les sujets sensibles tels que « tu rentre quand ? », ce qui aurait mis assurément sa femme en rogne.

Doucement, la porte de la cuisine s'ouvrit de nouveau et Regina passa sa tête dans l'entrebâillement en grimaçant.

Emma se retourna alors vers elle en s'arrêtant au milieu de sa phrase.

« Désolée. »

La brune entra dans la pièce, vêtue cette fois d'un pull un peu ample en cachemire anthracite et d'un jean sobre qu'elle avait enfilé car elle crevait de froid. Ses cheveux, attachés à la va-vite plus tôt, avaient été relâchés, juste un peu, et retombaient désormais avec une forme de négligence étudiée.

« J'ai retrouvé la boîte de tilleul au fond du placard, annonça-t-elle.

_ Hallelujah, souffla Emma. »

Regina passa derrière Emma pour aller vers la cuisine, mais sa main toucha son dos en passant. Emma se figea, comme si un courant venait de lui traverser la colonne vertébrale.

Hook le remarqua, mais Regina elle, ne sembla pas y prêter attention.

Elle sortit deux tasses. Tel un automate, la blonde la suivit jusqu'au plan de travail, se postant non loin, appuyée du coude, la tête légèrement penchée.

Elle ne la quittait plus des yeux.

« Tu es revenue pour longtemps ? demanda Hook. »

Emma ne l'entendit même pas.

Regina avait remonté ses manches, et la sauveuse la fixait en silence, les lèvres entrouvertes. Elle la regardait verser l'eau bouillante avec cette attention presque exagérée, comme si chaque geste était hypnotisant. Elle la regardait comme si elle n'avait jamais vu Regina faire du thé de sa vie.

Hook cligna des yeux.

« Emma ? rappela-t-il, un brin agacé.

_ Hmm ? Oui ? Pardon.

_ Je disais… tu restes à Storybrooke ?

_ Ah. Oui. Enfin. Je… je sais pas trop. On verra. »

Elle n'avait même pas tourné la tête vers lui. Son regard glissait du creux de la nuque de Regina à la façon dont elle soufflait doucement sur sa tasse.

Lorsque Regina se retourna, son regard était fixé sur les mugs et elle ne remarqua toujours pas les yeux dévorants d'Emma qui la fixaient. Innocemment, elle s'approcha d'elle et lui tendit une tasse.

Son regard trouva le sien, et elle lui offrit un sourire sincère qu'Emma lui rendit. Puis, leurs doigts se frôlèrent autour du thé fumant, un peu trop longtemps.

« Merci, souffla la blonde. »

Regina inclina la tête avec un sourire doux. Hook serra un peu la mâchoire. Et puis, la reine se tourna enfin vers lui.

« Tu veux du thé, Killian ?

_ Non merci, répondit-il, acide.

_ Dommage, dit-elle, un éclat malicieux dans le regard. »

Sans un mot de plus, Regina disparut dans la pièce voisine. Emma la suivit du regard, hypnotisée.

Son profil se découpa un instant dans l'encadrement de la porte : la nuque dégagée, les cheveux flous, le pas lent. Regina avança dans le salon qu'elle laissa ouvert, puis s'installa sur le canapé, et Emma constata qu'elle avait un visu sur son profil d'ici, juste un peu.

La brune se saisit d'un livre et étala ses jambes en entamant sa lecture.

Hook se racla doucement la gorge. Aucun effet.

« Emma ? »

Elle cligna des yeux. Sa tête bougea à peine.

« Mm ?

_ Je te disais… je vais passer encore quelques jours en ville.

_ Mh. »

Elle porta machinalement sa tasse à ses lèvres, sans boire.

Son regard était toujours rivé vers la pièce d'à côté.

Hook se redressa un peu. Il glissa ses mains dans ses poches, puis les ressortit, puis reposa la sienne sur le bord du plan de travail.

« J'ai vu ta mère hier et elle m'a dit que…

_ Tu crois qu'elle a froid ? coupa Emma brusquement sans le regarder. »

Hook la dévisagea, déconcerté.

« Qui ça ?

_ Regina. »

Elle se tourna enfin vers lui. Son regard était flou, absent.

« Elle est fatiguée. Elle est toujours un peu frileuse après ses traitements. »

Puis, comme si elle venait de se souvenir qu'il était là, Emma finit par cligner des paupières et sembla enfin remarquer sa présence.

« Tu disais ? »

Hook ne répondit pas par rien d'autre qu'une expiration agacée.

Il vit Emma reposer sa tasse, traverser la pièce à pas feutrés, et disparaître dans le salon à la suite de Regina, sans un mot.

Et lui resta là, seul dans la cuisine, la main suspendue au-dessus de la tasse qu'on lui avait laissée par politesse. De là où il était, il voyait à peine l'angle du canapé, la lumière du salon filtrée par la porte entrouverte. Mais c'était assez pour entrevoir la silhouette d'Emma qui venait de s'approcher de la reine.

A son arrivée, Regina leva un peu la tête et lui adressa, toujours ce même sourire qu'il n'avait, de souvenir, jamais entrevu chez cette « reine des glaces » comme il la nommait dans sa tête. Regina offrait toujours un rictus lorsqu'elle s'adressait au monde, distant, controlé.

Face à Emma, il n'en était rien. Son sourire était chaud, inattendu, et doux.

En réponse, la blonde avait incliné la tête, les lèvres entrouvertes, et ce regard… Hook n'avait jamais vu ce regard sur elle. Jamais. Pas même quand elle le regardait lui.

Emma effleura un pan du plaid de ses doigts, puis s'assit au bord du canapé, pas tout à fait collée à Regina, mais pas loin non plus.

La sauveuse sembla lui dire quelque chose. Regina leva les yeux vers elle, fronça le nez, rit en secouant doucement la tête. Et Emma se redressa, comme si ce rire avait suffi à lui réchauffer l'échine.

Hook ne pouvait entendre ce qu'elles disaient. Un instant, les doigts d'Emma effleurèrent le bras du canapé, si proches de celui de Regina que Hook crut les voir se toucher. Mais elles ne se touchèrent pas.

Ce n'est que lorsque Regina posa sa joue sur l'accoudoir pour fixer Emma à son tour qu'il trouva la force de détourner les yeux. Il attendit une minute, deux tout au plus.

« Elle va s'allonger un peu. »

Hook sursauta, surpris par le retour de sa femme. Emma elle, posa sa tasse dans l'évier, sans en dire d'avantage.

Puis, elle ouvrit un placard au hasard.

« Vous avez toujours été comme ça, toutes les deux ? demanda Hook d'un ton presque neutre. »

Emma s'immobilisa, puis se tourna vers lui en fronçant les sourcils, perdue.

« Comme ça quoi ? »

Un silence. Hook eut un rire léger, mais sans aucune chaleur.

« Laisse tomber. »

Il se détourna, comme s'il n'avait rien dit. Emma le dévisagea, sans répondre, puis retourna à sa tâche en songeant que son mari avait une attitude étrange.

Après un moment, Hook posa sa tasse, qu'il n'avait toujours pas touchée, et se tourna vers la porte.

« Bon… je vais te laisser. J'ai encore des affaires à régler au port. »

Emma hocha la tête. Elle avait finalement commencé à faire la vaisselle en nettoyant la théière que Regina avait amené un peu plus tôt.

« D'accord. Tiens-moi au courant, si t'as besoin de quoi que ce soit, balança-t-elle sans un regard vers lui.

_ Ouais. »

Il attrapa son manteau posé sur le dossier de la chaise. Avant d'ouvrir la porte, Hook se retourna une dernière fois vers sa femme, mais celle-ci ne sembla même pas remarquer son départ.

Alors, il émit un grognement agacé, et s'en alla. Emma quant à elle, revint doucement dans le salon, sans relever quoique ce soit.

Toujours étalée sur le canapé, un plaid sur les jambes, Regina avait cet air concentré sur son livre et semblait totalement absorbée.

Emma s'installa tout près, juste assez pour ne pas la gêner, et alluma la télévision. Elle baissa immédiatement le son.

Puis, un silence confortable s'installa.

La main d'Emma vint se poser sur les jambes de la brune qui ne le remarqua qu'à peine. Du moins, c'est ce que la blonde croyait, jusqu'à ce qu'elle sente les doigts de Regina contre les siens.

Elle venait de ôter sa main de la page pour l'étirer doucement vers elle. Alors Emma, le regard toujours rivé vers l'écran, laissa ses doigts s'ouvrir un peu. Regina les saisit, sans un mot, toujours absorbée par sa lecture.

Leurs mains se mêlèrent pensivement, presque machinalement. Doucement, paume contre paume, elles commencèrent même à jouer. Leurs doigts glissaient les uns contre les autres, s'accrochaient, se repoussaient avec lenteur, comme une danse discrète. Parfois, Emma pressait un peu. Regina répondait sans lever les yeux.

La brune était toujours concentrée sur sa lecture. Son regard balayait les lignes avec lenteur, ses sourcils légèrement froncés. Rien ne semblait l'atteindre. Et pourtant, ses doigts continuaient de bouger en un entrelacement distrait, une caresse, presque involontaire. Parfois, son pouce dessinait des cercles dans le creux de la main d'Emma, comme si ce contact était une évidence.

Et quelque part, à cet instant… il l'était.

xXx

Le Granny's avait été redécoré pour l'occasion. Des feuilles d'érable en papier, des bougies aux senteurs de cannelle, et un buffet garni de plats typiques du Thanksgiving local. Snow et David avaient mis la main à la pâte, littéralement, et tout le monde était invité.

Emma n'avait pas prévu de rester longtemps. Mais Regina, étrangement, avait proposé de venir. Et Emma… avait simplement acquiescé.

Il y avait du monde, des éclats de voix, des rires, un vieux tourne-disque qui grésillait parfois, branché sur une playlist moderne bricolée par Henry et Ruby.

Assise derrière une banquette au fond du restaurant, Regina voyait son reflet sur le fond de son verre. Elle souriait bêtement… Peut-être parce que cela faisait des lustres qu'elle n'avait pas assisté à un événement mondain.

Emma en avait profité pour passer la soirée avec ses parents, leur fils… Et cela rendait la brune étrangement joyeuse. Elle n'aimait pas l'idée de l'accaparer avec sa santé.

Regina prit une inspiration, puis se redressa.

Elle vit devant elle des guirlandes automnales pendre entre les poutres, des citrouilles miniatures border le comptoir et des gâteaux s'empilaient derrière la vitrine. Une décoration tchip à souhait…

Elle parierait très cher sur l'idée que Snow ne soit clairement pas étrangère à la déco.

A cette pensée, elle rit un peu, puis se laissa couler contre son dossier, non sans un soupir. Un instant plus tard, elle sentit la banquette s'affaisser un peu et le cuir émettre un son désagréable.

« T'as vu ça ? murmura Emma en désignant Snow et David qui riaient, au milieu de Granny, Henry, Ruby, et encore beaucoup d'autres gens. Ça faisait longtemps qu'ils ne s'étaient pas laissés aller. »

La sauveuse venait de s'asseoir naturellement à côté d'elle. Regina sourit doucement. Un sourire vrai, et sincère.

« J'espère que tu n'es pas trop fatiguée, lâcha Emma en se tournant vers elle, soucieuse.

_ Un peu, mais je suis contente de faire autre chose que des allers-retours entre l'hôpital, le manoir et la mairie. »

Puis, Regina plissa les yeux et scruta la salle du restaurant.

« Hook n'est pas là ? releva-t-elle.

_ Nope.

_ Pourquoi ?

_ J'en sais rien, il a pas voulu venir. »

Emma haussa les épaules comme si ça n'avait aucune importance, puis retourna à sa conversation. Killian n'avait jamais aimé ce genre d'événement de toute façon.

« Il aurait pu faire un effort quand même, marmonna Regina en s'accoudant sur la table d'un air boudeur, le regard rivé sur les gens en train de discuter. Ça fait un moment que nous ne vous êtes pas vu.

_ Bof. Tu sais, il faut bien créer du manque à un moment donné.

_ Oui, enfin le manque met un peu de temps à venir si tu veux mon avis, grogna la brune. »

Emma s'approcha alors de son oreille d'un air complice.

« C'est sur que ce n'est pas comme toi qui pleurait au bout de 24 heures après que ta Emma chérie ait décidé de s'envoler. »

Regina se recula un peu, et la fixa avant de rire.

« Je n'ai pas pleuré, marmonna-t-elle, le menton levé.

_ Menteuse. »

Emma but une gorgée de son soda, le regard brillant d'amusement. Regina, elle, roulait des yeux, mais son sourire ne la quittait pas.

Autour d'elles, les voix s'élevaient, familières et rassurantes. Un vieux slow grésilla légèrement dans les enceintes, avant que ne résonne un morceau au tempo plus moderne, suave, et inattendu.

A son plus grand désarroi, Emma vit ses parents se mettre à danser au milieu de la piste en entrainant quelques personnes et grogna de mécontentement.

« Oh non, ils vont pas s'y mettre. »

Regina le remarqua et pouffa un peu.

« Oui, cet amour dégoulinant est aussi pénible à regarder pour toi que moi. Ça a un côté rassurant ceci dit puisque je ne suis pas la seule à le remarquer. »

A son tour, la brune plongea son nez dans sa boisson chaude. Emma elle, s'appuya un peu plus sur la table en grimaçant.

« Faut toujours qu'ils fassent ça c'est pénible. »

Emma grommela, le menton dans la paume, les yeux fixés sur Snow et David qui dansaient au milieu du Granny's, rayonnants et en parfaite harmonie, comme si personne d'autre n'existait.

Regina les observa à son tour, puis souffla sur sa tasse.

« Moi qui pensait que ma malédiction les aurait calmé.
_ Tu parles, ils sont comme ça depuis que je suis née. Enfin… depuis que je suis revenue, techniquement. »

La brune hocha la tête, le regard flottant.

« Tu crois qu'ils se rendent compte qu'ils volent tout l'espace visuel de la pièce ?
_ Absolument pas, et c'est bien ça le drame. »

Regina étouffa un rire, l'œil rieur. Autour d'elles, la fête suivait son cours. Henry discutait avec Ruby près du buffet, Archie s'était lancé dans une démonstration passionnée sur les traditions de Thanksgiving avec Belle, et les guirlandes de feuilles d'automne frémissaient doucement sous le souffle du chauffage.

L'avantage, c'est que personne ne remarquait leur présence là, juste au fond de la pièce.

Emma tourna la tête vers la scène. Les danseurs formaient de petits groupes. Il n'y avait rien de formel, rien de trop romantique. Juste une envie collective de se mouvoir doucement, de profiter de la musique et de la chaleur humaine.

Sans réfléchir, la blonde posa sa main sur la table, tout près de celle de Regina. Enfin, elle finit par la regarder et retourna sa paume. Regina lui sourit tendrement. Elle posa alors sa main sur la sienne et leurs doigts s'enlacèrent.

Emma se contentait de rester là, offerte et Regina serait ses phalanges entre les siennes avec une telle douceur.

Un léger frisson parcourut son bras et Emma plissa les yeux en le remarquant.

« Tu veux qu'on rentre ? murmura-t-elle. »

Mais Regina secoua lentement la tête, sans un mot. Elle se sentait bien.

Fatiguée, mais bien.

« Non. Mais lève toi, je vais me chercher un autre café. »

Emma se décala de la banquette pour se lever et Regina en fit de même. Elle tenta de la contourner, mais la blonde l'en empêcha en pressant une main ferme sur sa taille. Regina se retrouva alors presque dans ses bras et recula son visage pour la regarder, perplexe.

« Nope, lui balança juste Emma en un sourire goguenard.

_ Qu'est-ce que tu fabrique encore ? marmonna Regina en levant les yeux au ciel. »

Emma leva un sourcil et la fit balancer doucement. Alors Regina arrondit le regard en ouvrant la bouche, parée d'un sourire à moitié amusé, à moitié outré.

« Non, finit-elle par lui dire en tentant de se soustraire à elle.

_ Oh allez ! »

Emma la retint un peu. Puis elle s'avança jusqu'à son oreille.

« Personne ne va le remarquer.

_ Tu te comporte comme une gamine, tu le sais ? »

La voix de la chanson s'éleva, hypnotique.

Emma se contenta de la fixer avec un air malicieux sur le visage. Puis elle la fit de balancer une nouvelle fois contre elle, comme si elle prenait ça pour un défi. Regina leva une nouvelle fois les yeux au ciel.

Alors Emma prit sa main et l'éloigna pour la faire tourner sur elle même avant de brusquement la ramener contre elle. Regina ne put s'empêcher de rire, son nez presque collé contre celui de la blonde. Elle appuya sa main sur son épaule et laissa Emma les guider. Ce n'était qu'un balancement innocent, presque imperceptible.

Regina soupira, faussement résignée, mais ne fit rien pour s'éloigner.

Leurs corps restèrent proches, bercés par le tempo, qui ressemblait plus à un bercement qu'à une véritable danse.

Emma baissa un peu la tête. Leurs souffles se mêlaient, discrets, intimes alors qu'elles gardaient leurs pupilles plongées l'une dans l'autre.

« Si on continue comme ça, je vais oublier que je suis censée râler, murmura Regina. »

Emma rit de nouveau et Regina le sentit sur sa propre bouche. Elle laissa échapper un petit sourire en coin. Un soupir échappa à Regina, léger, à peine audible puis elle pencha la tête et posa presque son menton sur celui d'Emma tout en gardant son regard dans le sien.

« Tu sais que je ne suis pas très bonne danseuse, murmura-t-elle pour détourner l'instant.

_ Tu pourrais me marcher sur les pieds que je t'en remercierais. »

Regina rit doucement et glissa ses bras autour du cou de la sauveuse.

Au milieu de la piste, Snow s'arrêta soudain de danser.

Elle venait de lever les yeux. Son regard se posa sur leur duo, au loin, sur la façon dont elles ne semblaient entendre que la musique et ne voir qu'elles-mêmes. Et surtout, sur leur proximité.

Elle recula légèrement d'un pas, incertaine. David tourna la tête vers elle.

« Quoi ? demanda-t-il doucement.

_ Regarde, souffla-t-elle. »

David suivit son regard.

Et ses sourcils se froncèrent, lentement avec un soupçon de stupeur.

Snow croisa son regard. Et d'un même mouvement, ils comprirent.

Mais ni Emma, ni Regina ne virent leur réaction. En fait, à l'inverse, Emma se pencha plus encore sur Regina et glissa de nouveau sa bouche près de son oreille.

« C'est drôle. Cette chanson me fait penser à toi. »

Regina cligna des yeux en penchant la tête.

« Pourquoi ? souffla-t-elle en un rire nerveux.

_ Ecoute. »

Regina plissa les yeux, puis tendit l'oreille. Alors, Emma profita de son inattention pour s'approcher d'elle d'un regard mutin.

« If the world was ending, I'd wanna be next to you, lui chanta-t-elle à voix basse, presque amusée. »

Regina gloussa en s'accrochant plus encore à son cou.

« Tu aurais pu me dire que tu étais en vérité, une grande romantique, lâcha Regina avec sarcasme en arrondissant excessivement le regard pour signifiait son humour.

_ Merde. Je suis démasquée. »

Regina rit encore, et Emma la refit tourner sur elle-même avant de la reprendre encore plus fort qu'avant, juste avant que le second refrain ne reprenne. Puis elle répétèrent cette phrase en chantant l'une contre l'autre, amusée, comme si le monde entier n'existait pas autour d'elles.

Regina sourit doucement, puis posa une main sur sa joue. Son pouce se mit à faire de lent va et viens sur elle et elle reprit une mine un peu plus sérieuse. Son regard se plongea alors dans le sien, intensément.

« Je t'aime, lui murmura-t-elle tout bas en fronçant les sourcils. »

Emma resta un instant silencieuse, retrouvant une moue moins légère elle aussi. Elle pencha machinalement son visage contre sa main et lui glissa un léger sourire en coin.

« On a dit que c'était moi la grande romantique. »

Regina laissa échapper une bref expiration amusée par le nez. Puis, elle continua de caresser son visage. Ses pupilles scrutèrent ses traits avec attention jusqu'à ce que son pouce s'attarde quelques secondes sur sa lèvre inférieure, juste un peu.

« J'ai menti, murmura-t-elle. »

Emma se redressa un peu, puis fixa sa bouche elle aussi. La musique s'emballa un peu, et son coeur aussi.

« Je crois que c'est à ce moment là du film où les deux héros s'embrassent en général. Avec… un feu d'artifice en fond ou un truc du genre. »

Regina continua de garder ses yeux sur ses lèvres.

« Ce n'est pas une musique de film, chuchota-t-elle avec sérieux. »

Emma leva soudain les yeux au ciel.

« Je sais, c'était pour l'image, balança-t-elle, lasse. »

Elle parvint à ôter un énième rire de la gorge de Regina qui n'arrivait pas à détacher son regard de ses lèvres.

Au loin, Snow vint attraper Henry par la manche et celui ci glissa son regard vers elles avant de lever les yeux au ciel.

Emma recula à peine pour observer Regina. Son regard glissa sur ses cils, sa bouche, le creux de son menton.

Puis elle sourit, presque avec mélancolie.

« Je suis désolée pour ce que je t'ai fait, souffla-t-elle sans même vraiment réfléchir.
_ Tu m'as fait danser. Je te pardonne, répondit Regina en étouffant un rire. »

Mais leurs yeux s'étaient déjà recroisés, trop longtemps. Alors Emma déposa un baiser. Mais pas sur la bouche.

Juste là, à la commissure, dans cet endroit flou entre la joue et la lèvre. Regina ne bougea pas. Pas même un souffle.

Puis, elle ferma doucement les yeux.

« Tu es trop bonne avec moi, lui glissa-t-elle. »

Regina gloussa. Lorsque Henry arriva à leur hauteur, Emma se détacha à peine d'elle, comme si elle ne faisait rien de mal.

Ce qui était le cas, d'une certaine manière.

Son bras resta alors dans le creux de rein de Regina et celui de la brune s'accrocha à son épaule alors qu'elles se tournaient d'une même personne vers leur fils.

« Henry ! lâcha la reine, ravie. »

Le garçon leur lança un regard hésitant, balayant la proximité de ses deux mères, le bras d'Emma posé sans la moindre gêne dans le creux du dos de Regina, et le sourire franc de cette dernière, un sourire qu'il n'avait pas vu depuis des mois voire plus encore.

Il plissa les yeux, mais ne dit rien. Il ne voulait pas tout gâcher.

« Vous passez un bon moment ? demanda-t-il, vaguement ironique sans le vouloir. »

Emma le fixa, puis haussa un sourcil moqueur.

« Pourquoi, on a l'air de se battre à coups de fourchettes à tarte ? balança Emma sans réfléchir. »

Regina rit un peu en se pinçant doucement les lèvres. Elle tourna sa tête pour regarder Emma avec une sorte de lueur dans le regard et la blonde ne le remarqua même pas. Pourtant, chaque fois qu'elle le faisait, elle s'éloignait un peu plus de la réalité.

Henry les observa un instant. Puis baissa les yeux vers leurs mains encore entremêlées, et leva les yeux au ciel. Il ne fit pas de commentaire. Pas tout de suite.

« Y'a de la tarte à la citrouille, annonça-t-il simplement. Granny a dit que vous pouviez vous servir tant qu'il en restait. »

Emma échangea un regard avec Regina. Cette dernière lui répondit par un rictus entendu.

« On arrive, lui répondit-elle. »

Henry partit devant. Et elles restèrent encore une seconde en retrait… juste une seconde de plus.

Regina passa lentement sa main contre celle d'Emma pour la retenir au niveau de sa hanche avant qu'elle ne s'éloigne pour de bon.

« Tu sais… tu ne danses pas si mal pour une shérif, lui chuchota-t-elle à l'oreille. »

Emma rit doucement, et elles s'éloignèrent ensemble, comme si tout ce qui venait de se passer n'était rien.

Chapter Text

Chapitre 14

Le trajet du retour s’était fait dans un silence complice. L’une à côté de l’autre dans la voiture, les visages étaient encore échauffés par la chaleur du Granny’s, par la musique, et le bon repas qu’elles avaient ingurgité.

Lorsque le manoir apparut au détour de la rue, Regina soupira un peu, lasse mais sereine.

« Henry a encore réussi à se débrouiller pour ne pas rentrer avec nous.
_ Oui, je commence sérieusement à me poser des questions, répondit Regina sans pour autant une once d’inquiétude.
_ Ouais bah je crois que c’est inutile vu le regard qu’il lançait à cette fille qu’il a invité durant la soirée. »

Regina, qui venait de fermer la portière de la coccinelle, se figea soudain. Puis elle se tourna vers elle, mi choquée mi catastrophée.

« Attend, tu crois que… ?
_ Je sais pas, balança Emma en haussant les épaules. Mais il a l’air de bien l’aimer. »

Emma rentra au manoir d’un pas serein. Regina un peu moins.
Lorsque la sauveuse se tourna vers elle et vit son air soucieux, elle soupira de lassitude.

« Regina, souffla-t-elle. C’est un grand garçon.
_ Oui, marmonna la brune.
_ Ça va il va pas tourner comme moi et la mettre en cloque avant de se barrer tout en la laissant en prison.
_ Qu’il fasse ça un peu pour voir, marmonna la reine. »

Emma pouffa de rire. Regina se débarrassa de son long manteau et soupira en dégageant le col de son pull. Elle s’était vêtue de cette chose uniquement parce qu’elle détestait l’idée que quelqu’un puisse lui poser des questions sur sa chambre implantable. Et en plus, elle avait toujours du mal à conjuguer avec sa perte de poids, bien que l’arrivée d’Emma soit parvenue à un peu inverser la tendance.
Seulement, elle crevait de chaud et c’était pire ici. Car Emma était devenue complètement paranoïaque et montait le niveau des radiateurs par peur que quelqu’un se chope la crève.

« Je vais me changer, marmonna-t-elle. »

Regina commença à monter sans bruit à l’étage. Emma elle, acquiesça, un sourire tranquille au coin des lèvres.

« Tu veux du thé pendant ce temps ? cria-t-elle depuis la cuisine.
_ Une infusion, lui répondit Regina assez fort pour qu’elle l’entende. »

Emma se saisit de la bouilloire sans attendre. Elle la lança, puis s’appuya contre le plan de travail. Ses pensées vagabondaient encore, et la musique de tout à l’heure semblait résonner en écho dans son crâne.

Elle ouvrit un placard, sortit deux tasses, sans vraiment y penser.

Elle n’aimait pas vraiment ces trucs, mais elle avait appris à conjuguer avec. Emma entendit des pas dans le couloir, mais ne releva pas immédiatement la tête.

Regina franchit alors la porte de la cuisine, un peu ailleurs

Elle avançait d’un pas souple, comme si elle s’était simplement levée au beau milieu de la nuit pour se chercher un verre d’eau. La nuisette noire qu’elle portait était d’un satin fluide, bordée de dentelle, et s’arrêtait bien au-dessus du genou. L’échancrure sur la poitrine en révélait juste ce qu’il fallait pour troubler irrémédiablement quiconque posait les yeux sur elle.

Un peignoir à peine noué glissait sur ses épaules, et sa peau pâle, parsemée de quelques ombres de cicatrices, ressortait encore davantage sous les lumières chaudes de la cuisine.

« C’est bon ? demanda-t-elle en passant avant de venir à côté d’Emma pour se saisir de sa tasse habituelle. »

Emma se retourna enfin vers elle, puis ouvrit la bouche pour répondre. Mais aucun son n’en sortit. Elle ne clignait même pas des yeux. Etait-elle… morte ? Ou alors ce serait une prévision du paradis… Elle ne savait pas trop.

Elle chercha à lui répondre, mais sa voix s’étrangla dans sa gorge à la place.

« Tu veux du miel dans ton thé ? demanda Regina d’un ton parfaitement détendu en s’approchant du placard. »

Regina, elle, continua sans y prêter attention, tournant légèrement le dos en se mettant sur la pointe des pieds pour attraper un pot. Son peignoir s’ouvrit un peu plus, révélant la courbe de son dos, sa nuque dégagée, la finesse de ses jambes.

Emma faillit renverser une tasse.

Elle toussota et leva les yeux pour arrêter cette torture.

« Euh… oui. Enfin. Je crois. Je sais plus. Oui. Du miel. Ou pas. Comme tu veux. »

Regina se retourna, pot à la main, et leva un sourcil en la voyant ainsi figée, le regard planté sur le plafond.

« Est-ce que tu vas bien ? »

Emma hocha la tête avec un enthousiasme peu convaincant.

« Oui bien sûr, pourquoi ça n’irait pas ? couina Emma.
_ Je ne sais pas. Tu es… bizarre, marmonna Regina en faisant couler la cuillère de miel dans son thé fumant. »

Regina, se mit à siroter tranquillement une gorgée de thé avant de lui tourner le dos. Le peignoir avait glissé un peu plus, dévoilant son épaule.

Emma, elle, se rattrapa de justesse à la table en s’asseyant, comme si le simple fait de rester debout en présence de cette nuisette était une tâche trop complexe pour son système nerveux.

Elle ouvrit une nouvelle fois la bouche, puis la ferma avant de plisser les paupières. Si ce fichu peignoir glissait encore d’un centimètre…

Regina se retourna au même instant, et fronça les sourcils de la voir assise de cette façon.

« Tu ne vas pas me dire que tu as faim j’espère, gronda-t-elle un peu.
_ Faim ? Moi ? Oui. Enfin non, je veux dire, peut-être, bafouilla la blonde. »

La brune leva les yeux au ciel. Pieds nus, elle se dirigea vers le frigo et Emma la suivit du regard, à deux doigts du malaise. Sauf que la reine se pencha pour chercher quelque chose plus bas et cette fois, Emma crut vraiment en mourir.

Elle se tendit en arrière sur sa chaise tout en fixant le postérieur de Regina et manqua de tomber à la renverse au passage. Elle tenta toutefois de faire bonne figure lorsque Regina se retourna et cette dernière n’y vit que du feu.

Elle lui posa un yaourt sous le nez en haussant un sourcil, amusé.

« Je ne sais même pas comment tu fais, souffla-t-elle en un sourire léger. »

Elle ne lui offrit pas l’opportunité de répondre et se retourna pour ouvrir un placard. Regina fouilla sans se presser, en chantonnant presque, très doucement. Un vieux air de rien du tout. Emma serra les mâchoires.

Elle allait devenir folle.

« Je ne t’ai jamais vue aussi calme, dit-elle, pour combler le vide. Ça change. »

Emma haussa les épaules, toujours sans rien répondre. Elle chercha à se précipiter sur son infusion, sauf qu’elle se brûla au passage.
Pour autant, elle ne bougea pas d’un iota, même pas pour balancer un « aïe ».

Regina revint s’asseoir sur l’un des tabourets près du bar, sirotant ce qui lui restait de sa boisson chaude, le dos bien droit, son regard balayant la pièce comme pour ne surtout pas le poser sur la sauveuse. Mais elle sentait cette tension. Elle la sentait dans l’air, comme une charge statique qui refusait de retomber.

Et cela avait le don de particulièrement l’énerver. Alors elle attendit quelques minutes avant de serrer les dents.

« Tu comptes m’ignorer toute la soirée ou tu veux qu’on commence tout de suite à s’envoyer des textos d’une pièce à l’autre ? »

Emma sursauta, presque imperceptiblement. Elle secoua la tête.

« Non, c’est pas… j’étais juste dans mes pensées.
_ Ah, se contenta de répondre Regina, un peu acide. Eh bien, ça a l’air passionnant. »

Emma se pinça les lèvres en silence.
Regina croisa les jambes. Elle fit tourner son verre dans sa main. Son pied tapota le pied du tabouret. Elle compta mentalement jusqu’à trois avant de poser la question suivante, plus froide.

« Est-ce que j’ai dis quelque chose ? »

Emma leva les yeux, confuse.

« Quoi ? Non !
_ Ecoute, je me targue de bien te connaître et je sais détecter quand tu te comporte de manière inhabituelle.
_ Tout va bien, grogna Emma.
_ Tu vois ? Tu es à deux doigts de me balancer un reproche. Ok, qu’est-ce que j’ai fais ? »

Regina afficha une mine irritée. Elle se mit à la fusiller du regard en posant ses deux mains sur le comptoir… Ce qui était encore pire, finalement. Emma leva les deux mains devant elle comme pour calmer un incendie invisible.

« Rien ! Vraiment, rien. T’as rien fait.
_ Alors pourquoi t’as cette tête ? insista Regina. On dirait que tu veux disparaître sous la table. »

Emma ouvrit la bouche, mais son cerveau semblait n’avoir rien de cohérent à proposer. Elle avait envie de lui dire que c’était le cas, mais pas pour les raisons qu’elle pouvait s’imaginer. Autant dire qu’elle se retint juste à temps.

« C’est… c’est juste que… euh… »

Ok, cette fois, elle était vraiment en rogne.

Regina serra les poings. Emma le remarqua et en fit de même.

« Oh et puis, qu’est-ce que ça peut bien te faire, balança-t-elle en se levant brusquement.
_ Ce que ça me fait, c’est qu’après, tu vas faire la gueule pour quelque chose que j’aurais dis sans m’en rendre compte.
_ Oh sérieux Regina, t’exagère. Tu fais toute une histoire de rien, grogna-t-elle. »

Ok.
Ce n’était peut-être pas la bonne chose à dire, ça.

« Oh mais pardon d’exister, répondit Regina avec un rire sec. Je suppose que j’aurais dû me contenter d’aller dormir au lieu de venir boire un thé. »

Regina se leva. Alors, d’un bond, Emma contourna le ilot central et sans réfléchir, lui saisit la taille pour l’amener à elle.
Regina en eut le souffle un peu coupé tant son élan était fort et celui d’Emma tremblait entre ses lèvres.

Ce n’est qu’à cet instant que Regina remarqua sa poitrine qui se soulevait à une cadence peu naturelle.

« T’as décidé de descendre habillée comme ça, met toi à ma place, grogna Emma, un peu agacée à son tour.
_ Habillée comment ? demanda Regina en fronçant les sourcils.
_ Ne me dit pas que je dois te le dire en plus. »

Regina afficha une mine surprise. Elle baissa ensuite son regard sur sa nuisette, puis pencha un peu la tête. Enfin, ses paupières clignèrent un peu.

« Quoi, ça ? balança-t-elle, abasourdie.
_ Oh Regina, je t’en prie hein !
_ Là, c’est toi qui exagère, répondit la brune en la reculant un peu. »

Emma jeta un léger coup d’oeil à son décolleté, puis leva ses yeux en posant ses mains sur ses hanches d’un air dépité. Regina l’observa faire, complètement perdue.

« Emma. Je ne sais pas dans quel monde tu vis, mais j’ai le corps d’une… personne en fin de vie. Alors, arrête tes âneries. »

Emma fronça soudain les sourcils en baissant vite sa tête vers elle.

« Quoi ?
_ Eh bien, je suis… pleine de cicatrices, j’ai dix kilos de moins et je ne porte même pas de maquillage alors pour l’amour du ciel, souffla-t-elle en laissant tomber ses bras le long de son corps. »

Emma la fixa, complètement ahurie.

« Personne ne voudrait de moi dans un tel état, ça dépasse l’entendement, souffla Regina en secouant la tête avant de chercher à la contourner pour s’éloigner d’elle. »

Emma agrippa sa taille tout juste à temps pour l’empêcher de fuir. Regina fronça les sourcils vers elle, comme si elle ne comprenait pas.

« Je ne comprends pas de quoi tu parle, finit par souffler Emma, perdue.
_ Ne fais pas semblant s’il te plait.
_ Mais je ne fais pas semblant, répondit la blonde avec un peu plus de douceur dans son ton. »

Regina pencha la tête, comme si elle tentait de décrypter quelque chose. Elle voyait que Emma était sincère avec elle, là, à cet instant. Mais une partie de son cerveau refusait cette idée car elle la trouvait improbable.

« Non vraiment. Je veux dire, pour moi, il n’y a aucune différence entre avant et maintenant.
_ Mais enfin… »

Regina finit par croiser les bras sur sa poitrine, un peu fâchée encore, mais aussi déstabilisée.

« Emma. Tout le monde le dit.
_ Oui, je sais, Henry, Ruby, pas mal de monde m’ont glissé qu’ils espéraient que tu ailles bien car ils voyait que tu changeais, mais j’avoue que je ne vois pas en quoi. Je veux dire, à part le fait que quand je suis revenue tu paraissais fatiguée. Mais ça va mieux depuis non ? »

Regina leva les sourcils, interloquée.

Non mais de quoi lui parlait-elle ? Bien sûr, elle avait reprit un kilo ou deux, mais ça s’arrêtait là. C’était même pire : elle avait carrément perdu ses cheveux. Il y avait les subterfuges pour le camoufler, et c’était assez réussi elle devait l’avouer, mais quand même. Cela lui était même arrivée de se balader au manoir avec un foulard.

Mais il était vrai que… même lorsque c’était arrivée, Emma ne semblait jamais le remarquer.

« Tu ne le vois vraiment pas, constata Regina, surprise.
_ Si je te dis que non. Mais enfin c’est dingue ça, moi je trouve que tu es toujours la même qu’avant. »

Regina plissa les yeux en la jaugeant, comme on scruterait un animal inconnu au bataillon.

« Quoi ? marmonna Emma en grimaçant.
_ Vous êtes une espèce avec une sorte de mutation génétique Miss Swan ?
_ Wow. »

Regina lui offrit soudain un sourire franc et amusé.

« Ça fait bizarre de t’entendre m’appeler de cette façon, plaisanta Emma. »

A son tour, Regina rit un peu. Elle baissa la tête, puis la remonta au bout de quelques secondes avant de prendre une inspiration.

« Alors… alors tu ne mens pas.
_ Je ne vois pas pourquoi je mentirais. Je peux te jurer sur ce que j’ai de plus cher que je te vois telle que tu as toujours été, c’est à dire la même que celle qui m’as ouverte la porte la première fois que je suis venue en ville. »

Regina acquiesça. Puis, elle baissa de nouveau ses yeux sur sa nuisette et enfin, la fixa.

« Je comprends mieux pourquoi tu tirais cette tête alors, rit-elle un peu.
_ Merci de ta compassion. »

Regina rit pleinement cette fois. Emma soupira, puis la prit dans ses bras.

Elle se souvenait de la première fois qu’elle l’avait fait. C’était presque au même endroit et Henry était entrée dans la cuisine comme un boulet de canon. Elle s’était éloignée d’elle d’un bond comme si elle avait été prise en flagrant délit d’un crime grave.

« J’aime t’entendre rire, chuchota-t-elle pour elle-même. »

Regina ferma les paupières puis sourit. Elle se sentait tellement bien, surtout quand Emma lui disait ce genre de choses. Puis, la blonde tourna son visage dans son cou et ferma les yeux à son tour.

« J’aime aussi ton parfum. »

Regina rit un peu de nouveau. Emma se redressa un peu et la fixa avec un brin de fierté.

« Quoi ? Tu savais que les molécules qui composent un parfum n’auront pas le même résultat sur une personne que sur une autre ? Je crois que c’est une histoire d’acidité ou quelque chose comme ça.
_ Tu me donne un cours sur la parfumerie ?
_ Non je te fais un compliment. Regina, t’as vraiment un super PH de peau. »

Regina rit plus franchement et Emma grimaça.

« Ok je l’avoue, c’était un peu nul comme compliment, admit-elle, amusée elle aussi.
_ Non, c’était… »

Regina pencha la tête et sembla perdu dans ses réflexions quelques secondes.

« Inédit je dirais.
_ Ça c’est sur qu’on te la jamais faites, celle là, affirma la sauveuse en hochant la tête. »

Regina éclata de rire, alors Emma la prit de nouveau dans ses bras avec encore plus de force.

« Arrête de rire j’ai envie de te bouffer. »

Regina ne s’arrêta que quelques secondes plus tard, gardant encore un peu ce sourire amusé alors qu’elle sentait le nez de la blonde naviguer dans le creux de son cou. Elle posa sa main sur l’arrière de sa tête et se laissa aller un peu plus.

« Tu as vraiment le chic pour me sortir des choses totalement improbables.
_ Quoi ? C’est mon langage de l’amour, marmonna la sauveuse contre sa peau.
_ De l’amour ? releva Regina, avec encore ce rictus amusé. »

Emma recula un peu son visage, puis plongea son regard dans le sien.

« Oui, souffla-t-elle. »

Puis, elle lui offrit un sourire aussi fier que sincère.

« J’ai aussi lu un truc là dessus, lâcha la blonde en fronçant les sourcils pour rajouter un peu de sérieux à ses propos.
_ Oh, vraiment ? demanda Regina avec amusement, la voix légèrement suraiguë.
_ Ouaip. C’est une espèce de valve de sécurité dans le cerveau pour empêcher le trop plein d’émotions. Une fois j’ai éclaté de rire pendant un enterrement tu sais, marmonna-t-elle.
_ Quoi ? releva Regina en un éclat amusé.
_ J’te jure. »

Regina sourit d’amusement en se mordant la lèvre inférieure. Puis elle posa son bras sur l’épaule de la sauveuse et s’y accouda en l’admirant. Emma elle, la regarda tout aussi intensément, un rictus léger sur les lèvres. Sans le réaliser, elle engageait un balancement hypnotique, comme ce qu’elle avait fait au restaurant.

Puis, sa main dévia sur la joue de la brune. Elle la caressa un peu et Regina ferma les paupières, la respiration courte.

« J’ai envie de te faire l’amour, murmura pensivement Emma. »

Soudain, Regina ouvrit les paupières.

Et Emma réalisa ce qu’elle venait de dire sans réfléchir. Alors, son regard s’arrondit et elle manqua presque de reculer, choquée par ses propres mots.

« Quoi ?
_ Euh, pardon, je… »

Regina releva les deux sourcils et Emma plissa les yeux en abandonnant l’idée de se sauver.

« Désolée. Parfois, mes… mots dépassent mes pensées. La valve… de sécurité, tu te souviens, balança Emma nerveusement en secouant sa main près de sa tête, comme si elle perdait la boule. »

Mais il était trop tard.
Ses mots s’étaient insinués dans sa tête et Regina n’entendait plus rien d’autres que cela.

Lui… faire l’amour.

Elle se mit à décortiquer ces termes, comme s’ils sonnaient différemment. Elle n’arrivait pas à détacher ce mot-là.

Emma n’avait pas dit “coucher avec”. Pas “s’envoyer en l’air”. Pas même “se donner”. Non.

Faire. L’amour.

C’était une construction presque étrange, comme un langage, comme quelque chose que l’on fait pour témoigner de l’amour.
Se témoignaient-elles de l’amour ?

Oui… Après tout, oui. Regina réalisa qu’elle aimait Emma. Qu’elle l’aimait, vraiment, comme elle ne pensait pas l’aimer.

Lentement, Regina leva les yeux vers elle, sans un mot. Et ce qu’elle lut dans son regard la désarma encore un peu plus.
Ses pupilles ne transpiraient pas de ce désir brut qu’elle avait pu lire dans de nombreux regards. Ce n’était pas de la convoitise ou de la passion. Non.

Cet éclat ressemblait à une supplique douce, presque timide. Emma ne voulait pas de son corps comme un trophée. Elle voulait s’y blottir. Elle voulait s’y exprimer.

Elle voulait lui faire l’amour pour dire je t’aime autrement. Regina inspira doucement.

« Tu as dit… faire l’amour, répéta-t-elle d’une voix basse. »

Emma resta figée, les lèvres entrouvertes, comme si elle craignait d’avoir tout gâché.

« Oui, balbutia-t-elle. Je… Je ne voulais pas dire ça comme ça, je voulais juste que tu comprennes que je… »

Mais Regina leva la main, lentement, pour poser deux doigts sur sa bouche.

« Non. Ne t’excuse pas. »

Regina prit un instant pour reprendre contenance. Ses mains tremblaient et elle se sentait bizarre. Puis, elle inspira et prit la main d’Emma.

Elle recula sans regarder où elle allait et Emma se laissa porter, les sourcils froncés.

« Qu’est-ce que tu fais, murmura-t-elle. »

Elles arrivèrent jusqu’au salon en quelques pas à peine. Puis, Regina s’approcha de nouveau d’elle et posa sa main sur sa joue, le visage si proche du sien que son regard était fixé sur ses lèvres.

« Tu as dis que je n’avais pas changé ? »

Emma se contenta de secouer négativement la tête, sans un mot.

« Toi non plus, chuchota-t-elle avec une sincérité désarmante à son oreille. »

Regina prit alors ses mains pour les amener au noeud de son peignoir. Puis, elle fixa son regard dans le sien.

« Déshabille-moi, lui murmura-t-elle. »

Sa demande n’avait rien d’une injonction. C’était… une invitation.

Emma resta figée un instant. Elle baissa les yeux sur ses doigts autour du satin de son peignoir. Regina en fit de même, puis la regarda une nouvelle fois et Emma put lire cette vulnérabilité, qu’elle n’avait encore jamais vraiment vu chez elle.

Elle avait vu Regina sous tous les angles : en colère, en rage, cherchant à se venger, se repentir, elle l’avait vu au sommet de sa gloire tout comme la tête entre les jambes en train de vomir ce que son corps n’arrivait plus à supporter. Mais jamais encore, elle n’avait vu cet éclat chez elle. Avec personne.

Ses doigts effleurèrent les siens sur le noeud de son peignoir. Elle s’arrêta un instant, pour s’assurer qu’elle ne rêvait pas. Regina ne bougeait pas, ses lèvres entrouvertes, son souffle léger contre le sien. Elle attendait.

Emma baissa les yeux. Elle dénoua le tissu avec une lenteur presque douloureuse. Pas par peur. Mais pour honorer le geste. Pour qu’il compte. Le peignoir glissa doucement des épaules de Regina, caressa ses bras, et tomba sans bruit au sol.

La nuisette, elle, ne dissimulait pas grand-chose. Mais Emma n’y porta même pas attention tout de suite. Elle releva les yeux. Ce qu’elle voyait, c’était le visage de Regina. Sa fragilité mêlée à sa dignité. Sa force retenue. Son regard brillant. Et son corps… présent, offert, sans jamais être forcé.

Regina resta un instant face à elle. Elle cligna des yeux, le souffle court. Puis, ses mains montèrent sur les épaules d’Emma, la naissance de sa mâchoire et le dessus de sa poitrine. Elle penchait la tête, les yeux fixés su ses paumes qui la parcourait.

« Assieds-toi, chuchota-t-elle de nouveau en la regardant de nouveau. »

Elles reculèrent à peine jusqu’au canapé. Emma s’assit, encore un peu sonnée et Regina se recula d’un pas. Puis deux.

Ses mains passèrent dans son dos et elle se défit lentement de son vêtement. Elle avait conscience qu’elle ne portait en dessous qu’une culotte très transparente, et rien d’autre.

Emma sentit son souffle se couper et elles se fixèrent de nouveau, sans que la sauveuse ne descende ses yeux sur son corps. Regina avait son souffle entrecoupé, essoufflée malgré ses gestes lents. Elle ne s’était que rarement mise nue face à quelqu’un. Et maintenant que son corps avait tant changé…

« Tu ne peux pas encore me dire que tu me vois… comme avant. »

Emma sentit sa respiration difficile. Sans répondre, elle se leva un tout petit peu pour prendre la brune par la taille et l’amener sur elle.
Regina se laissa guider et machinalement, la blonde posa sa paume sur sa joue pour l’embrasser avec douceur. Ses lèvres tremblaient sur les siennes autant que ses doigts. Alors elle se détacha d’un centimètre à peine, fébrile.

« Bordel je t’aime… »

Regina sentit son souffle s’accélérer. Et Emma céda.

« Je t’aime tellement, gronda la sauveuse en se jetant sur elle. »

De nouveau, la blonde l’embrassa, avec un peu plus fièvre cette fois et Regina gémit dans sa bouche. Avec lenteur, Emma décala ses cheveux sur le coté et descendit ses lèvres le long de son oreille, jusqu’à son cou et sa gorge. Mais ce n’était pas encore assez. Elle peinait presque à imaginer que quoique ce soit ne soit jamais assez.

D’un geste, elle la souleva et la retourna pour l’allonger sur le sofa. Regina se laissa faire comme une poupée de chiffon. Son souffle se coupa lorsqu’elle pressa sa main derrière la tête de la sauveuse et l’observa, en train de naviguer ses lèvres sur sa peau avec une telle… dévotion.

Les mains d’Emma ne savaient plus où s’arrêter. Elles glissaient lentement sur la peau nue, chaude et frémissante de Regina, sans jamais chercher à posséder, seulement à effleurer et apprendre.

Ses lèvres suivaient le même tracé : elles longeaient sa clavicule, s’attardaient sur la courbe de son épaule, pressaient doucement une cicatrice ancienne. Là, juste là, elle la baisa si doucement que Regina ferma les yeux et laissa sa tête reposer complètement contre l’accoudoir.

Emma s’y attarda.

« Tu es tellement belle.… là. »

Ses doigts remontèrent un peu, juste au-dessous de sa poitrine.

« Et là aussi. »

Regina ne bougea pas. Elle respirait fort, les bras posés de chaque côté de son corps, comme si elle avait peur que le moindre geste rompe l’équilibre fragile de l’instant.

Emma, elle, poursuivait avec la lenteur d’une prière. Elle passa sa main sur sa hanche nue, puis la fit glisser sur le côté de sa cuisse.

« Et là, c’est criminel. »

Regina laissa un souffle tremblant et amusé s’échapper de sa bouche avant qu’un frisson ne la parcourt.

Et Emma se figea enfin, son front posé sur son ventre, les bras passés autour d’elle comme si elle voulait l’envelopper tout entière.

Regina rouvrit les yeux, très lentement. Sa main vint chercher les cheveux de la blonde, qu’elle écarta de sa nuque en un geste aussi tendre que précis. Puis, du bout des doigts, elle glissa sur sa joue et la releva légèrement vers elle.

« Viens, souffla-t-elle. »

Emma remonta aussitôt et Regina la reçut entre ses bras. Mais cette fois, elle ne resta pas passive.

Ses doigts effleurèrent les bretelles du débardeur de la blonde. Elle les frôla une première fois… puis une seconde. Emma entrouvrit les lèvres, surprise de ce renversement si subtil. Regina leva les yeux vers elle, incertaine, mais décidée.

Elle n’ôta pas le tissu tout de suite.
Elle le regarda.

Ses mains étaient douces, mais tremblaient un peu. Elle frôla la naissance de sa poitrine sans chercher à aller plus loin.

Elle la regardait avec cette concentration nouvelle, comme si elle voulait, elle aussi, prendre soin. Comme si l’embrasser ne suffisait plus.

« Fais moi l’amour Emma, la supplia-t-elle dans un souffle à peine murmuré en plongeant ses iris dans les siennes. »

Emma sentit son coeur s’arrêter une micro seconde. Elle eut peur d’en faire une attaque.

Regina, nue sous elle, avec ce regard, en train de lui demander ça, c’était trop… trop beau, tout simplement.
Alors, elle s’avança lentement et reprit sa bouche en inspirant. Leurs langues se caressèrent avec tendresse, Regina eut presque envie d’en sangloter. Elle s’accrocha à son cou comme à une bouée de sauvetage, pendant que son dos se soulevait du canapé. Et alors, Emma comprit enfin ce que cela voulait dire, d’aimer vraiment quelqu’un.

Elle avait cru aimer. Mais rien n’équivalait à ça. Rien.

Et pourtant, elle l’aimait depuis toujours. Cela ne lui faisait aucun doute maintenant. Lentement, Emma mit fin au baiser, tout juste car c’était… trop, un peu trop.

Regina soucieuse, posa sa main sur sa joue en penchant la tête.

« Qu’est-ce que tu as ? lui demanda-t-elle tout bas. »

Emma soupira, puis posa son front sur le sien.

« J’arriverais plus jamais à survivre sans toi. »

Le pouce de Regina traçait de petites caresses tout près de sa mâchoire. Emma avait presque envie de pleurer, c’était idiot. Puis, son nez se pressa près du sien, comme si elle allait l’embrasser tout en se retenant tout juste à temps.

« Je savais, je le savais depuis le début, chuchota cette fois Emma avec la gorge nouée, incapable de se retenir.
_ Chut, lui chuchota Regina en lui caressant le visage. »

Emma laissa échapper une ou deux larmes, puis ferma les yeux très fort avant de l’embrasser avec tout autant d’intensité.

Un baiser. Puis un second, un troisième, toujours plus bref, mais plus fort à chaque fois. Bientôt, ce fut une série de baisers fougueux qui s’échangèrent entre elles, presque impulsifs.

Regina se laissa transporter par la passion et la suivit, en une série de gémissements étouffés. Elle entrelaça ses doigts entre les siens et la tira encore un peu plus contre elle, sa jambe remontant contre elle. Regina sentit la ceinture de son jean cogner contre le fin tissu de sa culotte, c’était presque douloureux, mais elle n’en avait rien à faire.

« Je t’aime, lâcha-t-elle entre deux baisers. »

Puis, Emma reprit sa bouche. Et Regina le répéta dès qu’elle le pouvait.

« Arrête de le dire, grogna-t-elle en la prenant par la taille. »

A sa surprise, Regina sursauta lorsque Emma la souleva. Elle se mit debout. Regina entoura sa taille de ses cuisses et Emma la fixa comme la huitième merveille du monde.

« Sinon je te bouffe, balança-t-elle enfin en fronçant les sourcils. »

Regina éclata de rire et l’embrassa, cette fois avec le sourire aux lèvres. Sa main se pressa à l’arrière de sa tête alors qu’elle la surplombait de sa hauteur. Puis, elle recula un peu son visage.

« Non, répondit Regina en lui touchant le nez.
_ Non ?
_ Je continuerais à te le dire, lui glissa-t-elle d’un air de défi en levant le menton. »

Emma grogna, puis la fit descendre pour mieux se glisser dans son dos et la prendre par la taille.

« C’était pour aller dans la chambre plus vite, lui dit-elle en posant son menton sur son épaule. »

Regina rit et avança, puis elle se retourna pour l’embrasser une nouvelle fois. Et elle mirent de très longues minutes à remonter les escaliers de cette façon.

Regina poussa la porte de sa chambre avant de l’embrasser de nouveau, et de la prendre par la main pour la tirer plus à l’intérieur.
Puis, Emma inspira son air dans son cou, désarmée.

« On est vraiment en train de le faire, murmura-t-elle pour elle même. »

Regina ferma les paupières d’aise. Puis elle se pencha un peu plus vers elle.

« Si tu ne veux plus dis le moi, lui glissa-t-elle avec une sincérité désarmante.
_ Bien sûr que si. »

Puis, la brune redressa un peu son visage pour plonger ses pupilles dans les siennes.

« Je te veux depuis bien trop longtemps, laissa échapper la sauveuse. »

Regina sentit son souffle se couper. Elle gémit et Emma l’embrassa de nouveau avec passion.

« C’est vrai ? lui demanda Regina d’une voix chevrotante avant de sentir le bord du lit cogner l’arrière de ses jambes.
_ Ouais mais on était trop occupées à se battre dans la réserve de l’hôpital pour ça. »

Emma fit tomber Regina sur le lit et monta sur elle.

« Tu te souviens, c’est cette histoire de langage de l’amour. »

Regina gloussa et se laissa porter par elle en travers du matelas. Puis la bouche de la blonde vint lui offrir des multiples baisers appuyés, le long de son cou d’abord, puis de sa gorge jusqu’à sa poitrine. Regina la regarda faire en soupirant de plaisir.

Emma se redressa vers elle, juste un peu.

« Tu me fais confiance ? lui demanda-t-elle avec malice, son visage tout près de sa poitrine. »

Regina hocha vivement la tête. Sa main vint dans ses cheveux, pour mieux caresser ses traits. Puis, Emma vint glisser ses lèvres dans son décolleté d’abord. Sans la lâcher des yeux.

Regina se tortilla sur elle même en un soupir qui fit descendre la sauveuse plus bas. Son regard s’attarda sur ses lèvres qui jouaient avec sa peau, se rapprochant peu à peu de son mamelon. Lorsque sa langue en traça le contour, Regina laissa son dos retomber sur le lit en un gémissement qu’elle ne tenta même pas d’étouffer.

Emma fit glisser sa langue sur l’un de ses seins, puis sur l’autre, avec sensualité et langueur.

Regina en avait le souffle brisée et ne pouvait plus que murmurer.

« Continue… »

Lorsque la blonde grogna, elle le sentit sur sa bouche et s’arqua contre elle un peu plus.

« Emma, gémit-elle alors que son bassin commençait à onduler dans le vide. »

La blonde releva la tête, haletante, les cheveux en bataille, les joues rouges, le regard noir de désir.

Impulsivement, elle se redressa et attrapa sa cuisse pour la remonter fermement contre sa hanche. Regina frémit violemment, la respiration saccadée. Elle se redressa à demi sur ses coudes, cherchant sa bouche à l’aveugle. Emma l’embrassa avec une urgence nouvelle, presque brutale, leur baiser humide, affamé, gorgé de tension et de désir retenu trop longtemps.

Regina se mit à se frotter contre son jean. Et Emma se sentit presque partir en imaginant la tache d’humidité qu’elle y laisserait.
Elle se redressa, Regina en fit de même et avec une nouvelle sorte d’empressement, l’aida à se débarrasser de son haut en le passant au dessus de sa tête.

Regina se rua de nouveau sur ses lèvres une fois fait, et ensembles, elles déboutonnèrent le jean d’Emma avec fougue.

Leurs gestes étaient précipités. Presque maladroits.

Rapidement, Emma envoya valser son pantalon plus loin.

Regina bascula en arrière, en entraînant de nouveau la blonde sur elle. Leurs poitrines s’écrasèrent, leurs jambes nues s’entremêlèrent et ce contact suffit à leur arracher un soupir commun, bas, tendu. Leurs ventres, leurs cuisses, leurs souffles… tout se confondait. Il n’y avait plus de vide entre elles. Plus rien à retirer… ou presque.

« Enlève ta culotte, grogna Emma contre sa bouche. »

Sans réfléchir, Regina se contorsionna pour le faire. Emma s’exécuta aussi avec son shorty. Elle avait besoin de la sentir la, tout contre elle.
Ce n’était encore jamais arrivé. Sauf que chaque centimètre de sa peau lui hurlait ce besoin désormais, elle brûlait tant elle la voulait.

Lorsque ce fut fait et qu’elle s’écroula de nouveau sur elle, Emma ne bougea plus.

Elle était là, complètement étendue sur Regina, et pourtant incapable du moindre mouvement. Tout en elle hurlait de la toucher, de la prendre, de la faire s’abandonner… mais elle n’y arrivait pas.

Le simple fait d’avoir son corps nu contre le sien l’avait figée, comme frappée.

Regina ne dit rien. Elle sentit cette tension en elle, dans ses bras, dans son souffle court. Alors elle se contenta de refermer ses mains dans le dos d’Emma, lentement, et de la garder contre elle.

Elle était aussi bouleversée qu’elle.

Désormais, leurs peaux se collaient. Leurs poitrines se soulevaient en rythme. Elles étaient là, ventre contre ventre, cuisse contre cuisse, gorge contre gorge.

Puis, Emma bougea juste assez pour poser ses lèvres sur sa clavicule. Et elle y resta, à l’écouter respirer, à sentir la chaleur de sa peau, le goût salé de ses cicatrices, à sentir ses pulsations. Elle ne pleurait pas, non. Mais elle était sur ce fil-là.

« Regina, souffla-t-elle. »

La brune ferma les paupières, soufflée elle aussi par tout ce qui la traversait à l’heure actuelle. Ça n’avait rien à voir avec tout ce qu’elle avait toujours connu.

« C’est… c’est… répéta la brune. »

Elle n’arrivait pas à finir sa phrase. À la place, Regina glissa une main dans ses cheveux, lui caressant doucement la nuque, puis le haut du dos pendant qu’Emma inspirait profondément.

« T’as pas idée de ce que ça me fait, murmura Emma, ébranlée. »

Le souffle de Regina était rapide et saccadée.

« C’est… normal tu crois ? »

Regina émit un rire nerveux.

Elle n’en avait aucune foutue idée, son corps n’avait jamais été aussi en feu de toute son existence. Elle n’arrivait même pas à aligner une pensée après l’autre.
Alors, ses doigts effleurèrent sa colonne vertébrale et Emma tressaillit.

« J’ai jamais ressenti ça, lâcha enfin Emma en posant son front sur sa clavicule. »

Toujours sans bouger, la main de Regina vint migrer dans ses cheveux. Puis, elle tourna la tête, juste assez pour la regarder.

« Moi non plus, finit-elle par répondre en un murmure près de sa tempe. »

Emma se tourna vers elle. Leurs regards s’absorbèrent l’un dans l’autre.

« Bouge sur moi, l’implora la reine. »

Emma posa une de ses mains sur l’oreiller, juste à côté de la brune. Elle descendit une main le long de son flanc, lentement, puis d’un geste plus ferme, elle écarta sa cuisse pour venir se coller à elle.

Le contact les fit sursauter toutes les deux.

Peau contre peau, sans rien entre elles. Leur chaleur se propagea en une onde fulgurante, comme un courant électrique.

Emma se mit ensuite à se frotter à elle, doucement. Elle agrippa son autre main sur l’une de ses fesses qu’elle serra, fort. Ses pupilles étaient plongées dans les siennes et elle fixa chacune des réactions, chaque soupir arraché à sa gorge, chaque battement de cil.

Regina la fixa elle aussi avec admiration. Puis de doux soupirs sortirent de sa gorge.

Emma posa brutalement ses lèvres sur les siennes pour la faire taire. Contre sa bouche, elle gémit, grogna presque, et la pressa plus fort. Leurs seins se frôlèrent, puis s’écrasèrent l’un contre l’autre dans un frisson qui leur fit perdre le nord.

Puis Emma se redressa légèrement, ses cuisses calées de part et d’autre des hanches de Regina. Elle lui agrippa les poignets, juste ce qu’il fallait pour la sentir offerte et brûlante.

Regina se cambra un peu sous elle, comme pour la provoquer.

« Vas-y, souffla-t-elle, haletante. »

Emma grogna de nouveau, et se pencha pour mordre doucement sa mâchoire, puis son cou, jusqu’à ce que Regina lâche un premier vrai gémissement, un de ceux qui font trembler les jambes.

Regina remonta soudain ses mains sur les omoplates d’Emma et la griffa sans même s’en rendre compte.

« Emma ! »

La blonde replongea sur sa bouche d’un air affamé et dévorant. Regina se cambra si fort, que ses reins se décolèrent du matelas. Puis, sa main écrasa la nuque d’Emma contre sa bouche.

En réponse, la blonde gémit contre sa gorge, puis descendit un peu, son souffle brûlant sur sa poitrine. Elle mordit, suçota, lécha, sans arrêt. Elle ne voulait plus entendre Regina gémir, elle voulait l’entendre implorer.

Et elle le fit….Son nom était prononcé entre deux gémissements désarticulés.

« Emma. »

« Encore. »

« Emma, oui, encore… »

La blonde n’arrivait plus à parler, sa respiration était trop saccadée, trop hachée. Elle traça une ligne, le long de son abdomen, jusqu’à la naissance de son pubis.

Regina passa sa main sur sa tête. Elle s’attendait à ce que Emma continue de descendre, et pourtant, la blonde se saisit de sa poigne et se mit à passer sa langue sur son poignet.

Régina ignorait qu’un telle geste pouvait avoir tant d’effets. Elle se cambra en gémissant. Puis, Emma continua, le long de son bras, à plusieurs points stratégiques : l’intérieur de ses cuisses, le pli de son coude et le creux de son cou. A chaque coup de langue, chaque baiser, la brune tentait de se coller plus encore à elle.

Et chaque gémissement, chaque souffle que Emma parvenait à lui arracher la rendait chaque fois plus pantelante.

La sauveuse se mit à trembler et s’arrêta un instant pour enfouir son visage dans le cou de la reine. Elle tremblait.

« Emma, l’appela Regina d’une voix douce. »

La brune caressa sa joue, du bout des doigts. Lentement, Emma prit une inspiration profonde.

« Oui ? tremblota-t-elle.
_ Tu es encore avec moi ? »

Emma laisse échapper un rire nerveux. Puis, elle hocha doucement la tête.

Elle était là, oui. Et c’était bien ça le problème.
Elle avait peur de ne pas survivre à ce qu’elle ressentait.

« J’ai mal au cœur, souffla-t-elle avec nervosité.
_ Tu veux arrêter ? demanda Regina, soudain inquiète.
_ Non. C’est pas ça. C’est juste… c’est trop. Trop bon. Trop… »

Puis, Emma releva son visage pour la fixer alors que Regina effleurait sa lèvre inférieure, hypnotisée.

« Trop toi, souffla la blonde. »

Un frisson violent secoua Regina.
Mais elle posa sa paume sur sa joue et Emma s’y blottit avec douceur.

« Je fais l’amour avec la sauveuse et son coeur magique, c’est normal. Je dois bien donner de ma personne, lâcha Regina en fronçant les sourcils. »

Emma rit et Regina aussi. Lorsqu’elle l’embrassa de nouveau, le sourire de Regina ne pouvait pas s’arrêter. Et lorsque Emma se détacha pour continuer de naviguer ses lèvres le long de son corps, elles se jetaient cette fois des regards plus complices. Regina lui lança un sourire amusé avant de se redresser sur les coudes.

« Tu as la pression maintenant, pas vrai ?
_ Tais toi, rit Emma entre ses jambes. »

Regina pouffa, et entrouvrit les jambes sous elle, sous ses mains qui la guidaient. Emma glissa lui agrippa l’arrière des jambes et les monta sur ses épaules avant d’embrasser le haut de son pubis.

Son sexe était chaud, humide et presque imberbe. Après une inspiration, Emma glissa sa langue, plus bas, de plus en plus, avant de poser juste sa bouche entre ses lèvres.

Regina se laissa retomber sur le matelas en serrant ses cheveux. Elle s’arqua en laissant échapper un gémissement très sonore.

Sa respiration ne ressemblait plus à rien. Emma ne la quittait pas des yeux. Elle voulait la voir réagir.

Elle l’embrassa doucement, puis un peu plus fort, et elle glissa la langue, un peu. Juste un peu. Regina en perdit le souffle.

Son bassin se souleva légèrement. Elle porta sa main à sa bouche pour étouffer un cri, mais Emma la saisit doucement et l’écarta.

« Non, souffla-t-elle en un murmure rauque. »

La voix de Regina se perdit lorsque la langue de la sauveuse lapa son bouton. Puis, elle s’enfonça en elle et le corps de Regina se redressa quelques secondes avant de retomber tout aussi lourdement.

Emma sourit avant de continuer de la lécher encore et encore, sa langue assurée prenant pleinement possession d’elle. Elle l’explora sous toutes ses coutures, de haut en bas, en elle, sur elle. Regina passa sa main sur son visage, puis s’arrêta pour regarder Emma entre ses jambes.

« Continue, lui murmura-t-elle en une supplique. »

Ce fut au tour d’Emma de gémir et Regina manqua de flancher en sentant sa voix vibrer contre son entrejambe. Mais Regina ne cessait de l’admirer, la bouche entrouverte et sa main désespérément accrochée au drap, l’autre sur son cuir chevelu.

« Vas y encore, soupira-t-elle. »

Lorsque Emma l’embrassa tout partout en remplaçant sa bouche par ses doigts, Regina se laissa une nouvelle fois retomber.

« Oh putain, jura la reine en riant cette fois sincèrement. »

La langue d’Emma retrouva son clitoris et glissa entre son bouton et l’entrée de son sexe, encore et encore.

« N’arrête pas, se perdit-elle. »

Rapidement, son bassin suivit le mouvement que Emma lui imposa. Alors la blonde pressa ses mains sur ses hanches, ses fesses, encourageant son déhanché contre elle. Le lit commença à grincer. Puis, Emma s’éloigna de quelques millimètres à peine.

Elle mouillait tellement, son sexe se serrait en écho à la voix et les suppliques de Regina.

« T’es en train de me rendre dingue, souffla-t-elle contre son clitoris. »

Regina passa une nouvelle fois sa main sur son visage, désabusée.

« Tu vas me faire jouir si tu continue, marmonna-t-elle dans sa paume.
_ Alors je continue, lui glissa Emma d’un ton malicieux. »

Regina ouvrit peu à peu les paupières. Elle avait la tête lourde… mais c’était si bon.
Elle cligna plusieurs fois des yeux et Emma attendit que son regard se perde dans le sien pour recommencer, sans la quitter.

Emma continuait, en douceur, en rythme. Sa langue dessinait des cercles, des vagues, parfois plus intenses, parfois plus lents. Elle prenait son temps. Et Regina s’y perdait.

Ses reins se soulevèrent, encore, et encore. Son souffle devint erratique. Ses mains agrippèrent plus fort les mèches blondes.

Elle ne parlait plus, ne pensait plus. Puis son nom… Regina répéta son nom, une fois, deux fois, entre en un murmure.

Elle y était. Elle allait jouir.

Emma agrippa ses fesses et le corps de Regina s’arqua tout entier. Une vague fulgurante traversant son bassin, son ventre, sa gorge, jusqu’à sa bouche. Ses cuisses se refermèrent sur les épaules de la sauveuse un instant, comme un réflexe, et elle cria, fort, cette fois, sans se retenir.

Emma assura son orgasme sans faiblir. Elle se redressa en l’admirant. Puis, sa main toucha sa poitrine avec douceur. Son coeur battait si fort…

Regina elle, semblait encore planer dans un autre monde. Ses yeux clos, elle se contorsionnait sur place, son visage se perdant dans l’oreiller sous sa tête.

« Emma, continua-t-elle de gémir, la voix à moitié éteinte.
_ Oui ? glissa la blonde avec sensualité en remontant le long de son corps. »

Ses lèvres continuaient d’embrasser sa peau, qui cette fois, perlait de sueur. Elle remonta le long de son corps, déposant ça et là sa bouche sur son ventre, ses flancs, l’orée de sa poitrine, son cou, et enfin, sa joue avant que Regina ne l’oblige presque à l’embrasser de nouveau. Elle gémit en sentant le gout de son sexe sur sa bouche et elle lécha sa langue avec avidité, sa main pressée sur l’arrière de sa tête.

Emma gémit à son tour à son geste en se laissant presque tomber sur elle, tant elle était soufflée par ce qu’elle était en train de lui faire. Cette fois, ce fut à Regina de forcer son geste, pressant son bassin pour que Emma vienne se coller à elle, tout juste entre ses jambes.
Son sexe parfaitement lubrifié se mit à glisser sur celui d’Emma qui du quitter sa bouche pour aspirer son air.

Regina se sentait encore si sensible qu’elle tremblait. De partout.

Mais elle continua malgré tout. Regina se recula un peu et baissa les yeux pour les river sur leurs deux sexe en contact. Emma s’accrocha au coussin derrière la tête de Regina en faisant de même et manqua de mourir sur place en la voyant les regarder avec envie.

Elle fixait ainsi ce spectacle, hypnotisée, excitée comme elle ne l’avait que rarement été de toute son existence.

« Regina, souffla Emma, la voix étranglée de plaisir. »

Et ce fut pire encore. La brune passa une main tremblante derrière la tête d’Emma. Le plaisir était en train de doucement revenir.

La blonde agrippa plus fermement les hanches de Regina, ses doigts s’enfonçant dans sa peau brûlante. Elle grogna, rauque, incapable de contrôler sa propre voix et accéléra le rythme sans même s’en rendre compte.

« T’es tellement mouillée, putain… »

Regina, haletante, renversa la tête en arrière, les doigts crispés sur les draps.

« Oui continue… »

Emma frotta encore plus fort, ses cuisses tremblant sous l’effort. Finalement, elle s’écroula entièrement sur elle. Regina se mordit la lèvre à sang et agrippa à son tour les fesses de la blonde pour lui imposer son rythme à elle, plus profond, plus lent, plus intense. Emma gémit bruyamment en se frottant fort et Regina glissa sa main pour la passer entre elles et la toucher.

Emma pressa sa propre poitrine et se recula de nouveau pour la regarder faire.

« Regi… Regina, manqua-t-elle de crier.
_ Oui, lui glissa-t-elle avec satisfaction, dis mon nom comme ça. »

Regina regarda son visage avec malice. Sa main reprit son mouvement contre elle, mais plus lent, plus joueur. Pas pour finir, mais pour la garder au bord, pour la voir se consumer.

Emma, les jambes tremblantes, sentit ses reins céder sous les assauts combinés des mains de Regina et de sa propre tension.

« J’en peux plus, gémit-elle, à bout de nerfs. »

Regina plaqua soudain Emma sur le matelas en inversant leur position. Elle baissa sa tête jusqu’à son sexe et planta sa bouche directement sur elle. Emma se redressa d’un coup en un cri jouissif. Elle s’accrocha tout juste à ses cheveux.

« C’est là, la guida-t-elle, au bord de l’explosion, juste là. »

Emma balança les cheveux de Regina sur le coté et décala son visage de quelques centimètres à peine. La langue de la reine fit tout le reste et Emma se tendit.

« Oh bordel je vais… Je vais jouir. »

Regina songea que si elle continuait comme ça, elle finirait par ameuter toute la ville. Pourtant, elle continua et un dernier coup de langue suffit pour faire basculer son amante au sommet du plaisir.

Emma hurla en pressant sa propre tête. Son corps entier implosa. Sa peau se hérissa, comme électrisée alors que son corps venait de se tendre en une seconde. Regina accompagna son orgasme avec délectation alors que la poigne de la blonde ne la quittait pas.

Puis, ses cuisses furent prises de spasmes absolument incontrôlables et enfin, Emma retomba sur le matelas, en nage, essoufflée, vidée.

Sa respiration peinait à reprendre une allure normale et sa main, posée là sur sa poitrine, semblait chercher à calmer les battement erratiques de son coeur, en vain.

Regina, le visage rougi, les lèvres humides, recula juste un instant pour la regarder. Ses mains glissèrent sur ses cuisses nues, ses hanches, ses flancs encore secoués. Elle la caressait pensivement et Emma ferma les paupières.

« Ok… ok. »

Regina pouffa un peu, puis vint se rallonger sur elle. Elle posa sa joue sur sa poitrine et ferma les paupières à son tour, bercée par le battement de son coeur. Elle souriait… bêtement. La main de la blonde se perdit sur la tête de Regina qu’elle caressait pensivement.

« C’était le meilleur coup de toute ma putain d’existence, balança Emma en ouvrant d’un geste les paupières. »

Regina explosa de rire dans sa poitrine et remonta pour venir poser ses lèvres le long de sa mâchoire.

« Quelle poète, gloussa la reine près de sa joue.
_ Désolée… Fallait que ça sorte. »

Regina rit un peu de nouveau. Emma se tourna vers elle et elle la regarda, le regard pétillant avant de l’embrasser avec bien plus de douceur.

« Je vais avoir des courbatures je crois, marmonna Regina contre sa bouche.
_ On devrait faire ça plus souvent. Tu sais, pour s’habituer. »

Regina sourit, puis elle ouvrit les yeux. Elle se mit à caresser son visage sous toutes ses coutures.

« Je t’aime, lui murmura-t-elle avec douceur alors que le plat de sa main caressait sa joue. »

Emma lui offrit un sourire sincère. A son tour, elle dégagea sa tempe. Puis, elle prit sa main et posa ses lèvres sur ses doigts.

« J’ai encore envie de te manger, balança soudain la blonde en fronçant les sourcils. »

Regina s’esclaffa et elles s’embrassèrent de nouveau avec complicité.

Chapter Text

Chapitre 15.

Assises l'une en face de l'autre au beau milieu du Granny's, Emma et Regina ne touchaient à rien. Ni à leur café, ni à leur assiette, ni même à leurs cheveux qu'elles auraient pu replacer nerveusement comme à leur habitude. Rien ne bougeait, sauf leurs yeux.

Emma la regardait.

Elle n'en revenait pas.

Elle avait passé la nuit avec elle.

Elle connaissait à présent les courbes de son dos, les inflexions de sa voix quand elle gémissait son prénom, la chaleur exacte de sa peau sous ses paumes. Et pourtant, ce matin, au Granny's, dans cette lumière presque trop banale pour un moment pareil, elle la redécouvrait.

Emma cligna des paupières, lentement, comme si elle n'osait pas rompre le charme. Elle avait l'impression d'être revenue au lycée, de vivre ce moment absurde où l'on tombe amoureux pour la toute première fois, sans savoir quoi en faire.

« Tu comptes me dévorer du regard toute la matinée ? demanda Regina d'un ton neutre, sans lever les yeux de sa cuillère qui touillait son café.

_ C'est juste que tu as toujours cette petite ride… juste là, dit-elle en effleurant sa propre tempe du bout de l'index. »

Regina cligna des yeux, surprise.

« Pardon ?

_ Elle est là quand tu me regardes comme ça. Tu sais, comme si t'étais pas sûre si tu voulais m'embrasser ou m'étrangler, balança Emma en s'accoudant à la table. »

Un sourire passa sur les lèvres de Regina. Il était discret, mais authentique.

« Et tu arrives à faire la différence ? demanda-t-elle doucement, un brin espiègle. »

Emma hocha la tête, un sourire en coin.

« Vous avez bien trop d'imagination, Miss Swan, soupira la brune en sirotant sa boisson. »

Emma pouffa un peu. Au loin, Ruby qui frottait ses verres, les observait en levant les yeux au ciel. Elle connaissait ces deux-là. Elle les avait vues se disputer, se protéger, coexister. Mais ça ? Cette manière de se regarder comme si elles étaient seules au monde… Non, ça, elle ne l'avait jamais vu. Ou peut-être uniquement sur les Charming.

Et franchement ? Ça lui fichait un drôle de frisson dans le dos de les comparer à ces deux-là.

Regina reposa sa tasse avec lenteur, ses doigts glissant sur la porcelaine comme si elle ne savait plus quoi faire de ses mains. Elle gardait les yeux baissés, mais son sourire restait là, accroché au coin de ses lèvres comme un aveu silencieux.

Emma s'apprêtait à dire quelque chose, elle ne savait même pas quoi, peut-être une bêtise, peut-être quelque chose de trop, mais elle n'en eut pas le temps.

Le regard de Regina se releva soudain, et doucement, comme si le geste lui échappait, elle tendit la main, du bout des doigts, vers l'encolure du sweat d'Emma.

« Tu as un… un truc, là, murmura-t-elle. »

Ses doigts frôlèrent à peine la clavicule de la blonde. Emma retint sa respiration. Elle était en train de frotter une trace de rouge à lèvres.

« Je crois que c'est moi qui l'ai mis, ajouta Regina, les joues s'empourprant imperceptiblement. »

Emma ouvrit la bouche, mais aucun son n'en sortit.

Et c'est à cet instant précis que la clochette de la porte tinta.

« Hey ! lança la voix de Henry, joyeuse, insouciante. »

Comme sous un coup de vent, leurs mains s'éloignèrent, les corps se redressèrent, les visages retrouvèrent leurs masques familiers.

Ruby, elle, détourna les yeux, un sourire pincé aux lèvres.

« Et sauve qui peut, murmura-t-elle pour elle-même en s'éloignant vers la cuisine.

_ Vous avez déjà commandé pour moi ? demanda Henry de son côté en tirant une chaise à lui. »

Emma hocha la tête, presque trop vite.

« Pancakes. Comme d'hab.

_ Nickel. »

Henry s'installa, et sortit machinalement son téléphone. Emma et Regina se jetèrent de nouveau un regard lourd de sens, sans un mot.

« Ça a été hier, après la soirée ? demanda-t-il sans relever ses yeux de son portable.

_ Parfaitement, finit par souffler la blonde en observant Regina. »

La brune laissa échapper un léger sourire sur le coin de sa pommette, créant une minuscule fossette qui faisait complément craquer Emma.

« Ah… ok. »

Emma continua de garder son regard dans le sien, sans un mot. Henry le remarqua et grogna. Puis, il finit par lever les yeux de son écran furtivement, et le spectacle auquel il fit face l'irrita particulièrement.

« Et sinon, vous m'expliquez pourquoi vous vous retenez de sourire comme des débiles depuis tout à l'heure ? »

Soudain, Regina perdit son rictus et se tourna vers son fils.

« Je te demande pardon ? «

Henry haussa les épaules sans lever les yeux, comme si ce qu'il venait de dire n'était qu'un commentaire innocent.

« Je sais pas. Vous avez une tête de gens… satisfaits. Trop satisfaits. Et qui font genre de rien. »

Emma blêmit légèrement. Regina se redressa dans sa chaise.

« Henry, je t'interdis ce genre de remarque, surtout en public.

_ Oh pardon, j'oubliais qu'on n'avait pas le droit de parler quand ça concerne vos petits secrets. »

Il releva enfin la tête, et dans ses yeux brillait autre chose. Pas de la curiosité…. Du reproche.

Emma fronça les sourcils.

« Qu'est-ce que tu veux dire par là ? demanda la blonde.
_ Que ça fait depuis ton retour que c'est comme ça. Tout le monde marche sur des œufs, et maintenant je débarque et je vous trouve à roucouler comme deux lycéennes au fond d'un café. »

Regina serra les dents, en commençant à grimacer pour cacher son agacement.

« Je peux savoir ce que tu sous entends exactement, Henry ? demanda-t-elle, doucement mais avec une fermeté glaciale. »

Le garçon haussa les épaules, tenta de faire passer ça pour de la nonchalance.

« Je sais pas. Que j'ai l'impression que vous me cachez quelque chose. C'est chiant. »

Emma releva les yeux, troublée.

« Henry…
_ Non mais ça va, hein, je suis pas débile. C'est bon, j'ai compris. »

Regina plissa les yeux. Mais Henry, sans se laisser démonter, se tourna vers sa mère biologique.

« Je suis censé dire quoi, moi ? Rien ? Faire genre que c'est normal que tu regardes ma mère comme si c'était déjà plus ta femme que l'autre abruti que t'as épousé ? »

Soudain, Regina se leva, si brusquement que sa chaise fronça sur le sol.

« Henry ! explosa-t-elle. »

Sa voix claqua, sèche et vibrante. Le silence dans le Granny's fut immédiat. Ruby s'arrêta net derrière le comptoir. Un type qui versait du sirop s'immobilisa, bouteille en main.

Henry lui, fixa sa mère, surpris par son ton.

Il se croirait de nouveau avoir huit ans et s'être pris la main dans le sac après avoir fait l'école buissonnière et insulté sa maîtresse.

« Tu n'as pas à parler à ta mère. Pas à elle, pas ici, et encore moins comme ça !

_ Mais c'est vrai, non ? répliqua Henry, piqué. Et sinon, il est au courant ou c'est un autre secret dans la pile ?

_ Ce n'est pas tes histoires, répondit Regina à la place de la sauveuse.

_ Ça me concerne ! se défendit Henry.

_ Non ! »

Soudain, le garçon se figea. Et Emma observa leur joute verbale en naviguant sa tête de gauche à droite, comme elle le ferait lors d'un match de tennis.

« Ce qu'Emma fait de sa vie ne te regarde pas. Pas plus que la mienne, gronda la brune, les dents serrées. D'ailleurs, c'est toi qui a été tenir au courant Hook de mon état de santé ? »

Emma ouvrit la bouche, comme pour intervenir, mais il ne valait mieux pas s'en mêler.

« Je l'ai bien dit à Emma, gronda-t-il.

_ L'intention n'était pas la même et tu le sais très bien. »

Henry secoua la tête, avec un rire désabusé.

« Visiblement, le fait que Emma t'ai balancé l'équivalent de quatre dictionnaires en trois volumes à la figure ne t'aura pas suffit, souffla Regina en se rasseyant.

_ Ah parce que tu étais au courant de ça en plus ?

_ J'étais là oui, et j'ai tout entendu, siffla-t-elle.

_ Ok donc tu l'a laissé faire, balança Henry en levant les mains devant lui.

_ Emma est ta mère autant que moi, si elle était en colère, c'est son problème, se défendit la brune. Moi aussi figure toi, j'étais en colère. Je n'arrive toujours pas à croire que tu as raconté l'existence de mon cancer au monde entier !

_ Je ne l'ai pas crié sur les toits ! J'ai tout dit uniquement à Killian quand il me l'a demandé c'est tout et j'ai fais ça parce que j'en avais ras le bol ! »

Regina se tut, les sourcils levés.

« J'ai demandé à 'man de venir pour m'aider, pas pour devenir ta coloc ! »

Emma prit une inspiration, sans savoir quoi lui répondre. Elle n'avait jamais vu Henry dans cet état…

« C'était censé être temporaire, pour m'épauler. Et maintenant ? Je me réveille et je me rends compte que vous avez changé les règles du jeu sans me prévenir. »

Regina secoua la tête, en désapprouvant. Mais son fils continua, imperturbable.

« Pourquoi c'est Ruby qui m'a dit que tu ne retournais plus chez toi ? demanda soudain Henry en se tournant vers Emma. Pourquoi c'est moi qui dois tout deviner, tout recoller ? J'étais censé partir trois jours, et ça fait des mois maintenant ! Putain, j'ai l'impression de devenir fou ! »

La voix d'Henry se brisa à la fin.

Regina prit une inspiration, les bras croisés sur sa poitrine comme si elle devait se maintenir.

« Henry, regarde-moi. Tu crois vraiment qu'on fait ça contre toi ? »

Le garçon évita de regarder sa mère. Il fixa la fenêtre à côté, où les passants marchaient, insouciants.

« Tu ne peux pas nous forcer à te rendre des comptes sur tout et n'importe quoi juste parce que tu te sens exclu. »

Henry baissa les yeux. Il eut un souffle court, presque une expiration tremblante. Il attrapa son sac et le passa sur son épaule sans un mot avant de s'en aller.

La clochette tinta. Puis plus rien.

Au bout de quelques secondes de silence, Regina laissa échapper une expiration fatiguée. Emma, elle, n'avait pas bougé. Les coudes sur la table, les doigts entrelacés, elle contemplait sa tasse devenue froide sans la voir.

« Je suis désolée, souffla-t-elle finalement. »

Ce n'était qu'un murmure, presque inaudible.

Regina détourna lentement la tête vers elle. Un muscle tressaillit dans sa joue.

« Ce n'est pas toi qui dois l'être. »

Emma releva les yeux. Dans ceux de Regina, il n'y avait pas de colère, pas encore, juste une immense fatigue couplée à une grosse tristesse.

« Ça va s'arranger, murmura Emma en posant sa main sur la sienne. »

Regina ferma les yeux un instant.

« Dis autre chose, s'il te plait. »

Emma fronça légèrement les sourcils.

« Tu veux que je dise quoi ?

_ Je l'ignore. C'est… c'est le bazar dans ma tête, finit par lâcher Regina en se passant les mains sur les tempes. »

Les paroles de son fils s'étaient insinués malgré elle dans son esprit et Regina se mit à s'embrouiller le cerveau.

« Je suis… perdue, bafouilla la brune.

_ Mais je suis paumée, moi aussi ! se défendît vivement Emma. J'ai envie d'être là mais je sais pas comment gérer.

_ Et concernant Hook ? releva Regina d'un ton acide.

_ J'ai pas encore parlé à Killian. »

Regina laissa un rire cynique sortir de son nez. Ce qui irrita particulièrement Emma.

« Quoi ? demanda la sauveuse en grognant.

_ J'en sais rien, Emma, devine, balança Regina avec agacement.

_ T'es drôle toi, tu as vu ma position ?! T'imagine pas ce que ça implique ce que tu me demande.

_ Ce que ça implique ? releva Regina, les yeux plissés.

_ J'ai passé la nuit avec toi et… Et j'ai envie de recommencer. »

Regina la fixa, puis prit une inspiration.

« Mais ? continua-t-elle à sa place, un brin agacée.

_ Mais je suis mariée et je peux pas faire ça… comme ça, sans penser aux conséquences ! Et tu imagine le bordel, que vont penser les gens ?! »

Regina souffla un air désabusé par le nez. Emma vit lentement sa main se dégager de la sienne et elle sentit une pointe lui transpercer le coeur, juste là.

« Je vois… murmura la brune.

_ Regina… »

La reine se tourna soudain vers Emma. Elle afficha un sourire, dénué de toute joie, et ses yeux étaient déjà embrumés.

« Non, j'ai compris, dit-elle en poussant sa chaise pour se lever tout en évitant son regard.

_ Tu ne… avança Emma en l'effleurant des doigts.

_ Ne me… touche pas, lâcha Regina en reculant tout juste à temps. Ou je hurle.

_ Regina, je t'assure que… »

La brune se retourna et prit son sac à son tour ainsi que sa veste. Emma la vit pourtant, passer une main sous ses yeux discrètement, et renifler par réflexe.

Puis, elle inspira doucement, comme… ravalant quelque chose.

« Bonne journée Emma. »

Sur ces mots, Regina s'en alla, le pas rapide et laissant une Emma derrière elle totalement impuissante et désemparée.

xXx

Emma soupira, les mains posées sur le volant de sa coccinelle.

Elle était garée sur le parking de l'hôpital depuis au moins… deux bonnes heures. Malgré leur accrochage, Emma n'avait pas eu à coeur de laisser Regina toute seule pour sa chimio. Alors depuis, elle guettait son arrivée là, comme une idiote, s'autorisant une partie d'Angry Bird tout en relevant sa tête de temps en temps.

Elle n'avait pas eu envie de lui envoyer un texto, trop peur de se faire rembarrer. Et… Et en plus, elle s'en voulait terriblement.

C'était idiot, mais elle avait été comme prise de court.

Sa question à propos de sa situation avec Killian n'était pas arrivée à un moment assez opportun, sans doute… Emma était à des années lumières de songer à lui, à eux. C'était peut-être idiot mais, depuis l'annonce du diagnostic, elle avait l'impression de vivre au jour le jour.

Nerveuse, Emma se mit à regarder sa montre, puis à soupirer. Regina aurait déjà du arrivée depuis vingt minutes.

Soit elle avait échappé à sa vigilance, soit elle avait annulé. L'un dans l'autre…

Emma grogna, puis sortit de sa voiture en claquant la portière.

Sans s'annoncer à l'accueil, elle avança au sein de l'hôpital qu'elle connaissait désormais par coeur.

Les néons blancs lui renvoyèrent l'inscription du service d'onologie, au deuxième étage.

Presque à reculons, elle en poussa la porte et se rendit au box habituel. A son grand soulagement, elle la vit tout de suite.

Regina était assise sur le même fauteuil que les autres fois, les jambes croisées et le port droit. Un foulard élégant entourait sa tête, d'où le fait qu'elle l'ait surement raté. Une perfusion était déjà plantée dans son bras. Elle avait une couverture jusqu'à la taille et un livre ouvert sur les genoux.

Emma soupira de soulagement, et seulement alors, Regina leva la tête. Son visage se ferma. Mais la blonde entra quand même dans la pièce et prit place sur son siège habituel.

La brune la suivit du regard, les yeux plissés.

Puis, elle ferma son livre et le posa sur la tablette sans un regard vers la sauveuse.

« Ce n'était pas la peine de te déplacer tu sais, ta présence n'est pas une dette, lâcha-t-elle avec amertume. »

Emma se tourna vers elle d'un air las. Pour autant, elle ne répondit rien.

La perfusion émettait un petit clic régulier, seul bruit dans la pièce à part les murmures du personnel médical derrière la vitre.

Le temps passait avec lenteur.

Trois heures. Trois heures à ne pas se parler, ne pas se regarder… Cela allait être long, très long. Emma se contenta de regarder le mur en croisant les bras sur sa poitrine.

Son portable n'avait plus de batterie de toute façon.

Regina, elle, restait droite. Elle n'avait pas rouvert son livre. Elle fixait un point invisible, le menton levé, comme si elle cherchait à ne pas exister tout à fait. Une vingtaine de minutes plus tard, elle eut un léger frisson. Pas grand-chose, juste une secousse de l'épaule, mais Emma la remarqua tout de suite.

Alors, sans un mot, elle sortit le thermos qu'elle avait ramené, en sortit un petit gobelet en métal et lui versa cette infusion qu'elle détestait tant.

Lorsqu'elle le posa près d'elle sans un seul mot ni un regard, Regina la regarda du coin de l'oeil. Elle s'en saisit, sans la remercier.

Puis, le silence retomba.

C'était complètement idiot, et puéril, elle en avait bien conscience. Mais c'était plus fort qu'elle.

Emma quant à elle, soupira en pressant l'arête de son nez.

Elle était tendue. En fait, c'était idiot, mais depuis la nuit dernière, le simple fait de se tenir dans la même pièce que Regina la mettait à fleur de peau. Alors, elle évitait de la regarder un maximum… Même si elle sentait son parfum, et qu'elle apercevait un morceau de peau de temps en temps.

Emma lui lança quand même un regard en coin. Regina fixait toujours son point imaginaire.
Alors la blonde prit une inspiration.

« Regina… »

La brune tourna lentement la tête, juste ce qu'il fallait pour l'intimider. Rien de plus. Emma se décomposa un peu. Elle ouvrit la bouche, puis prit son courage à deux mains.

« Je suis désolée pour tout à l'heure. »

Pas de réponse. Emma serra les mains entre ses genoux.

« J'ai été maladroite. »

Regina détourna son visage en haussant les épaules, comme si ça n'avait aucune espèce d'importance. Emma attendit, mais toujours rien… Pas un mot, ni un souffle. Pas même un soupir. Regina avait simplement détourné les yeux.

« Ça m'a fais de la peine de te voir pleurer.

_ Je n'ai pas pleuré, nia-t-elle d'un ton sec. »

Emma soupira. Elle passa une main pour lui caresser la nuque, mais la brune l'envoya paître en lui donnant une légère claque sur le bord de la main. Alors, Emma récupéra son bras.

« Je voulais pas te blesser, je te jure.

_ Et qu'est-ce que tu espérais au juste ? lui demanda la reine avec sarcasme en se retournant enfin pour lui offrir un sourire très hypocrite.

_ Profiter d'être avec toi comme je le fais depuis que je suis revenue, continua Emma en secouant la tête d'un regard insistant. »

Regina laissa échapper un rire sans joie tout en secouant la tête.

« Tu voulais quand même pas que je débarque chez mes parents dès le lendemain sans bague et en leur annonçant qu'on ouvrait un compte joint à la banque ? »

Elle ne put s'empêcher de rire, cette fois réellement amusée par l'image. Mais la brune se reprit juste à temps.

« Non.

_ Et tu te doute bien que je ne vais pas laisser les choses comme ça éternellement, si ?

_ Je l'ignore, finit-elle par répondre en levant le menton. Robin est bien retourné avec sa femme, lui. »

Cette fois, Regina plongea son regard dans celui d'Emma. Il était froid, maîtrisé, dénué de toute émotion. Emma leva les sourcils, surprise.

« Robin t'a fait l'amour comme ça, lui ? demanda la blonde, imperturbable. »

Regina détourna le visage aussitôt pour cacher le rougissement sur ses joues.

Touché.

« Peut-être. Qu'est-ce que tu en sais ? bafouilla-t-elle. »

Emma laissa échapper une expiration presque amusé. Elle continua de fixer Regina, qui devinait son regard brûlant sur elle sans même y faire face.

« Je le sais, c'est tout. »

D'un geste, Regina se retourna alors vers elle après s'être recomposé comme elle avait pu.

« Tu te prends pour qui, une déesse du sexe ? »

Emma plissa les yeux en se pinçant l'intérieur de la bouche. Elle se retenait de laisser échapper un sourire amusé. Alors, elle se mordit la langue à la place, mais cela se voyait quand même et Regina soupira, agacé en détournant de nouveau le regard.

« Il t'a fait l'amour où, lui ?

_ C'est pas une compétition.

_ T'as qu'à me répondre, balança Emma en haussant les épaules.

_ Dans mon… caveau, répondit Regina en tentant de rester droite et digne. »

Emma souffla par son nez un air consterné et moqueur à la fois, qui vexa encore plus Regina.

« Oh mais je te rassure, après il m'a baisé dans toutes les pièces de la maison, répondit-elle au tac au tac d'un ton provocateur.

_ Ouais c'est bien ça le souci. Il t'a baisé, répondit simplement Emma en lui envoyant un rictus défiant.

_ Pourquoi, t'en a pas envie toi ? demanda Regina. »

La brune haussa les épaules. Puis, elle déplia lentement sa jambe sous la couverture et la recroisa, plus haut.

Emma sentit son pied glisser, frôler sa cheville pour mieux remonter et s'arrêter à mi chemin. Agacée, Emma s'en saisit, et la ramena contre elle d'un geste brusque.

Etant à demi allongée sur une chaise comportant des roulettes, Regina sursauta de surprise lorsque sa jambe se retrouva presque sur Emma, à moitié à califourchon.

Son visage lui, n'était plus qu'à quelques centimètres du sien sans même qu'elle n'ai eu le temps de l'envoyer paître.

« Tu vas arracher la perfusion, lâcha la brune, imperturbable.

_ Eh bah j'appellerais une infirmière pour la remettre.

_ Oh oui, c'est sur qu'elles n'ont que ça à faire, balança Regina d'un ton cynique et méprisant.

_ T'as fini de me parler comme ça ? »

Regina ne répondit pas. A la place, elle inclina légèrement la tête, provocante, presque insolente.
Et très lentement, elle replia sa jambe sur la cuisse d'Emma.

La couverture glissa d'un cran.

Emma ne bougea pas.
Ses doigts se crispèrent sur l'accoudoir du fauteuil.

« Tu veux que je change de ton ? murmura Regina.

_ A quoi tu joue ? balança Emma, les yeux plissés. »

Regina laissa échapper un sourire, puis elle s'approcha. Elle prit sa mâchoire d'une main et tourna de force son visage pour glisser ses lèvres près de son oreille.

« Je ne sais pas, tu as l'air tendue, lui susurra-t-elle. »

Emma se tourna vers elle. Regina s'attendait à la voir déstabilisée, troublée, mais son regard se fit plus dur.

« Je n'aime pas quand tu fais ça. »

Regina blêmit un petit instant. Elle se recula un tout petit peu, comme si elle venait de se prendre une claque. Emma observa l'expression de son visage changer, et finit par soupirer.

« T'es blessée. Et t'as le droit. »

Regina changea de nouveau son regard, pour y laisser échapper un éclat de tristesse.

« Moi aussi j'aurais été blessée à ta place. »

Regina baissa les yeux sur ses mains, puis, tenta de reculer, mais Emma la retint à temps. Elle l'attira à elle un peu plus en pressant sa taille.

« Mais laisse moi du temps pour faire les choses correctement pour une fois… S'il te plait. »

Regina resta immobile. Elle sentait le pouce de la blonde tracer des cercles invisibles sur le bas de son dos.

La brune semblait lutter contre elle-même. Alors, Emma s'approcha un peu plus, et prit sa main en y caressant le plat.

« Il est nouveau ce foulard, je l'avais jamais vu, murmura la blonde pour changer de sujet.

_ C'est le plus cher que j'ai, je voulais le mettre pour te faire pitié, marmonna-t-elle. »

Emma éclata soudain de rire, et Regina sourit un peu en rougissant.

« Je suis sure que c'est vrai en plus, lâcha la sauveuse. »

Regina lui adressa un léger regard honteux ce qui fit encore plus rire la blonde.

« Tu ferais mieux de descendre ou tu vas te chopper une sacrée réputation si une infirmière passe par là, balança Emma en baissant les yeux sur elle.

_ Ils vont surtout penser que t'abuse d'une malade.

_ C'est toi qui est sur moi patate. »

Patate ?!

Regina grogna, puis plissa les yeux d'un air faussement noir. Elle reprit sa jambe et commença à se reculer pour retrouver sa place.

« C'est bien. Bonne fille. »

Et bêtement, Emma chercha à lui frapper les fesses ce qui était sans doute l'idée la plus idiote qu'elle ne devait jamais avoir eu depuis ses six derniers mois.

Son bras passa par inadvertance derrière le fil reliant la potence de chimio à la clavicule de la brune. Celui ci s'arracha soudain, et l'alarme de la perfusion se mit à biper alors que le liquide était en train de s'étaler par terre.

« Bordel, Emma ! explosa Regina.

_ Oh merde, pardon, pardon ! »

Regina se releva entièrement cette fois, et une infirmière arriva en trombe pour voir la catastrophe. Autant dire que Emma se recroquevilla comme une gosse prise en faute sur son siège.

L'infirmière relativisa en un soupir las.

Elle arrêta alors la machine, ramassa tout le bazar que cela avait causé avec des gants, des serviettes et déposa le tout dans un sac Dasri.

Puis, elle alla chercher une autre poche. Alors qu'elle était en train de repiquer la brune en recommençant tout le protocole, Regina remonta son regard et retint un fou rire devant le visage toujours aussi honteux de la sauveuse.

Lorsque l'infirmière quitta le box en leur recommandant de faire attention, Emma s'enfonça encore plus en se cachant à moitié le visage derrière sa paume. Une fois seule, Regina éclata de rire alors que la blonde continuait de crever de honte.

« Je suis officiellement la pire personne du monde. »

Mais Regina continuait de rire. Elle finit par s'essuyer le coin des yeux.

« Dire que tu es mon contact d'urgence. »

Emma entrouvrit les doigts pour la fusiller du regard et Regina en rit encore plus.

Chapter Text

Chapitre 16.

Regina était appuyée sur son bureau, dans un coin reculé du manoir.

Elle sentait son estomac se nouer et…

Soudain, la porte s'ouvrit et Emma se figea, la poignée encore dans la main.

« Ah bah t'es là. »

La brune grogna.

Elle aurait préféré être seule. Mais malheureusement, Emma ne l'entendait pas de cette oreille. Doucement, la blonde avança vers elle et passa sa main dans son dos.

« Tu devrais aller te coucher, il est trois heures du matin et tu dois être à neuf heures demain à l'hôpital. Tu vas être crevée. »

Regina prit une inspiration profonde. Elle finit par hocher la tête.

« Je voulais me laver. »

Emma lui adressa un sourire réconfortant.

« Tu peux, lui glissa-t-elle avec douceur.

_ J'ai peur d'effacer les marques, marmonna la reine. »

Emma lui glissa un léger rictus en coin se voulant tendre, mais Regina était trop préoccupée par sa peur pour s'en rendre compte.

« Tu veux que je t'aide ? »

La brune secoua la tête négativement, sans la regarder.

« Allez, chuchota Emma en lui prenant la main. Je viens avec toi au lit.

_ Le contraire m'aurait surprise, marmonna Regina avec cynisme.

_ Tu veux que je te laisse ? »

Sa question était sincère, et dénuée de toute ironie. Regina se mordit la joue, puis haussa les épaules nonchalamment en évitant son regard.

« Ok, ça veut dire non. »

Regina laissa échapper un bref soupir amusé. Elle ignorait comment Emma faisait pour la faire sourire dans un moment pareil. Emma la traina ainsi dans les escaliers, puis jusqu'à la salle de bain. Regina l'y suivit, sans enthousiasme.

« Hé, si t'as peur c'est pas grave et on va se coucher comme ça.

_ Ils m'ont dit que c'était pas la peine. Que ça s'effacerait un peu, mais qu'ils referaient tout demain. »

Sans répondre, la reine se débarrassa de son haut. Emma fixa les marques de feutre bleu dans son dos. Il y avait quelques flèches juste là, sous ses côtes et des traits de repaire sur son sein droit.

« J'espère que t'en as profité pour leur demander des nichons plus gros. »

Regina tourna brusquement la tête vers elle, arrondit les yeux… et éclata de rire. Un vrai. Un rire sincère.

Emma en profita pour hausser les épaules, faussement fière.

« Je veux dire, tant qu'à passer sur le billard, autant sortir avec du bonus.

_ Le bonus est censé m'être profitable à moi, pas à toi.

_ Autant faire d'une pierre deux coups, se contenta de répondre la blonde, les bras croisés dans le dos en train de se balancer sur ses pieds. »

Regina secoua la tête, puis s'assit doucement sur le bord de la baignoire.
Elle passa une main dans ses cheveux courts, un geste automatique, comme s'ils étaient encore longs.

Son rire s'éteignit peu à peu.

Un silence s'installa. Puis, elle baissa les yeux sur sa poitrine marquée.

« J'ai peur, laissa-t-elle échapper malgré elle. »

Emma leva les yeux vers elle.

Regina ne bougeait plus.
Ses épaules étaient raides et son regard fixé sur un point qu'elle seule voyait.

La blonde s'approcha, puis s'agenouilla à ses côtés en posant son menton sur son épaule.

« C'est normal. Moi aussi j'ai peur. Et Henry aussi. Regarde, il est tellement flippé qu'il ronfle dans la pièce à côté. »

Cette fois, la reine ne rit pas. Elle trifouilla ses mains. Emma elle, finit par pencher sa tête et blottir sa joue sur elle en la regardant.

« Ça va aller, tu verras.

_ Je vais avoir une cicatrice, souffla-t-elle.

_ Et alors ? Moi j'aime tes cicatrices. »

Regina se tourna lentement vers elle et lui adressa un léger sourire sincère. Soudain, la porte s'ouvrit et Regina eut tout juste le temps de mettre une serviette sur sa poitrine pour se cacher.

« Henry ! explosa-t-elle sur un ton rempli de reproches.

_ Vous m'avez réveillé, qu'est-ce que vous fabriquez ? marmonna le garçon à demi ensommeillé en se frottant les yeux.

_ Ta mère fait une crise d'anxiété, laisse la tranquille, balança Emma en se levant.

_ Emma, toujours dans l'exagération, répondit Regina d'un ton las en levant les yeux au ciel.

_ Bon, ça me rassure, je croyais que vous étiez en train de vous envoyer en l'air dans la salle de bain. »

Emma fixa son fils d'un air scandalisé et Regina manqua de s'étrangler. Puis, la sauveuse leva un sourcil et secoua la tête.

« Et tu te plains d'être traumatisé ?

_ J'ai dit je croyais, pas que je voulais savoir.

_ Et maintenant ? demanda Emma, le ton faussement innocent. »

Henry la fixa, puis tourna les talons en grognant.

« J'vais dormir dans le canapé. C'est plus sûr. »

Emma fixa la porte puis secoua la tête, désabusé.

« Il est bizarre ce gosse, finit-elle par lâcher à Regina. »

La reine rit un peu, même si l'envie n'était pas là.

« Après c'est pas faux tu sais, un orgasme, ça aide à trouver le sommeil, affirma Emma. »

Le rire de Regina un peu plus profond finit par la satisfaire, suffisamment pour qu'elle arrête d'activer son… « levier émotionnel ».

« J'ai pas la tête à ça, souffla la brune.

_ Je sais bien, c'était une plaisanterie. »

Puis, Emma s'approcha de nouveau.

« Ou pas, je suis toujours partante pour mettre un peu de fun tu sais, murmura Emma.

_ Tu as fini ?

_ Pardon. »

Mais la brune lui rendit un sourire sincère et aussi, touchée. C'était comme si Emma déployait tous les moyens de l'univers pour lui faire changer les idées et cela marchait… plus ou moins, bien sûr. Mais elle allait déjà un peu mieux.

D'un geste lent, Regina se redressa et éluda la douche pour se rendre dans sa chambre où Emma la suivit. Sans un mot, elle s'allongea dans le lit, sur le flanc et la blonde vint se blottir dans son dos, serrant ses bras autour de sa taille.

« Tu verras, tu t'endormiras sans même t'en rendre compte, lui souffla-t-elle à l'oreille. »

Regina soupira.

« Imagine si je me réveille pendant l'opération, balança Regina sans réfléchir, le regard dans le vide.

_ Trop risqué, ils se mangerons une boule de feu dans la gueule Je suis sure que c'est eux qui ont la pression d'opérer la grande reine des mondes réunifiés.

_ Je n'ai plus de magie, répondit la brune en fronçant les sourcils.

_ Regina, faut vraiment que je t'apprenne à avoir du second degré. »

La brune se tut en un soupir résigné. Elle ne dormirait pas, à moins de s'écrouler de fatigue. Alors elle resta la, allongée, le regard dans le vide et la tête pleine de pensées.

Un instant elle crut que Emma s'était endormie mais il n'en était rien.

Elle n'avait pas osé lui dire qu'elle aussi, était terrifiée.

Doucement, Régina tourna un peu sa tête puis se mordit la lèvre.

« Tu resteras… après ? chuchota-t-elle. »

Emma lui adressa un léger sourire sans qu'elle ne le voit.

« Bien sûr, répondit-elle avec naturel.

_ Non je veux dire… »

Régina cette fois, tourna entièrement son corps pour se retrouver sur le dos. Puis, elle riva ses yeux dans les siens, avec une étincelle hésitante et timide. Presque apeurée.

« Je veux dire tout court. »

Emma la fixa un peu troublée et perdue. Lorsqu'elle percuta ce que Régina sous entendait, elle leva les sourcils de surprise.

« Laisse tomber, marmonna la brune en se repositionnant dos à elle avec un grognement.

_ Hé, tu ne me laisse même pas répondre, souleva la sauveuse en un léger rire.

_ Parce que c'est pas la peine, répondit Régina avec cette fausse fierté habituelle. »

Emma leva les yeux au ciel.

« Et arrête de faire cette tête exaspérée.

_ Comment est ce que tu sais quelle tête je fais ? lui demanda la blonde alors que Régina lui avait tourné le dos.

_ J'ai un don. »

Emma s'approcha un peu plus doucement d'elle et posa son menton sur son épaule de nouveau.

« Il est nul ton don et il ne marche même pas.

_ Qu'est ce que tu en sais ?

_ S'il fonctionnait, tu aurais deviné que j'aurais dis oui, lui glissa-t-elle. »

Régina se retourna vers elle, surprise. Mais Emma affichait un espèce de sourire debile sur le visage qui la fit presque instantanément regretter de l'avoir regardé.

« Tu sais de quoi je parle au moins ?

_ J'ai dis oui.

_ Et qu'est ce que tu vas dire à tes parents, tu y as pensé ? demanda Regina en se redressant les coudes.

_ Je suis pas obligée de leur dire. »

Emma se tourna vers elle et se contenta de hocher la tête en retombant sur son oreiller. Régina plissa les yeux, suspicieuse.

« Donc ton plan c'est de continuer à rester ici en n'émettant aucun commentaire.

_ C'est exactement mon plan.

_ C'est un plan de merde. »

Emma ouvrit et ferma la bouche, coite.

« Ils vont me poser des questions.

_ Et bah on leur répondra que tu m'as embauché comme nouvelle… »

Emma fronça les sourcils, puis eut une sorte d'illumination.

« Comme nouvelle assistante !

_ Quoi ?

_ Les royaumes réunifiés sont trop compliqués à gérer seule. Franchement ne le nie pas, tu as besoin d'aide et puis, j'ai eu le temps de me familiariser avec la paperasse pour les quelques fois où je m'en suis occupée à ta place. »

Régina se pinça les lèvres, sans un mot. Emma, elle, s'enfonça un peu plus dans l'oreiller, les bras croisés derrière la tête.

« Tu sais, ça pourrait être crédible. Je suis ponctuelle, fiable, incroyablement sexy. Et je suis une génie du traitement de texte. »

Regina roula des yeux, mais elle souriait, juste un peu.

« Et si un jour on se dispute ? lança-t-elle.

_ Tu me licencies avec une lettre de recommandation impeccable.

_ Et si on fait l'amour dans mon bureau ?

_ Ce sera du harcèlement hiérarchique. Totalement inadmissible. »

Régina leva un sourcil, peu convaincue. Durant plusieurs secondes, elle ne dit rien, puis Emma se retourna vers elle.

« Tu avais prévu de faire l'amour dans ton bureau ? lui demanda Emma d'une petite voix.

_ Emma… gronda-t-elle.

_ D'accord, d'accord ! »

xXx

Regina cligna lentement des paupières, chaque battement de cil lui donnant l'impression d'avoir dormi une semaine dans du coton imbibé de médicaments. Une odeur désagréable envahissait son nez, elle avait la bouche pâteuse et sa gorge lui faisait un mal de chien.

Avant même qu'elle n'ait le temps de se rendre compte de la douleur qui lui irradiait la poitrine, la porte de sa chambre d'hôpital s'ouvrit a la volée.

« RÉGINA ! »

La voix d'Emma était affolée, précipitée, et bien trop forte pour le calme réclamé par l'écriteau à l'entrée.

Regina fronça à peine les sourcils. Elle voulut parler, mais seule un souffle râpeux lui échappa.

Emma traversa la pièce en deux enjambées sans attendre de réponse. Régina recula un peu son visage. Elle avait peur que cette idiote lui tombe dans les bras ou pire encore : qu'elle colle sa bouche sur la sienne.

« Snow ! David ! Mes parents ils… »

Regina papillonna des yeux, comme si elle avait mal entendu.

Emma prit une grande inspiration.

« Ils sont dans la salle d'attente ! »

La reine fronça alors les sourcils.

« Ils ont apporté des muffins. Et… un clafoutis aux cerises. »

Regina ferma les yeux. Puis elle lâcha, la voix rauque, à peine audible :

« Je préférerais une nouvelle tumeur.

_ Qu'est ce qu'on fait ? insista Emma, le regard rond. »

Deux fois.

Elles avaient failli se faire bêtement grillé deux fois, parce qu'elles ne contrôlaient absolument pas leurs gestes ni leurs mots. C'était devenu trop quotidien pour qu'une bêtise ne s'échappe pas à un moment ou à un autre.

Regina tenta de se redresser, mais une douleur vive lui traversa le torse comme une lame chauffée à blanc.

« Aïe.

_ Tu veux que j'appelle une infirmière ? s'affola Emma.

_ Non, je veux que tu me files un oreiller et que tu les fasses fuir à coups de noyaux de cerises ! explosa la brune. »

Emma s'exécuta pour l'oreiller. Mais elle hésita en fixant la porte.

« Ils m'ont vue entrer… Si je ressors, ils vont me mitrailler de questions. Snow avait cette tête, tu sais, la tête qui te dit qu'elle a préparé un discours intérieur depuis trois jours. »

Regina soupira longuement.

« Bien sûr qu'elle a préparé un discours. Elle a même sans doute imprimé des fiches. »

Emma fit les cent pas devant le lit, les bras croisés, les lèvres pincées.

« Et si on leur disait… je sais pas… que tu es sous sédation ?

_ Je suis sous sédation.

_ Bah voilà. Donc techniquement, on peut dire que tu n'as pas toute ta tête. »

Regina cligna des paupières vers elle, choquée.

« Tu veux leur mentir sur mon état neurologique ?

_ Tu préfères leur dire qu'on couche ensemble depuis trois semaines et que tu m'as appelée ton « assistante » à 3h du matin ? »

Le silence s'installa... Une seconde. Puis deux… trois.

« Bon. Appelle l'infirmière. On va dire que je suis en réanimation. »

Regina n'eut même pas le temps de répondre autre chose ni de remettre son masque de femme froide et parfaitement réveillée.

La poignée tourna doucement et une tête passa dans l'entrebâillement.

« Coucou ?… »

Emma se figea. Elle jeta un regard en biais à Régina complètement paniquée. Puis remarqua qu'il était trop tard.

Alors, elle tenta de s'appuyer sur le radiateur d'un geste nonchalant mais trébucha à moitié comme une idiote pour enfin, se redresser tout juste à temps. Snow quant à elle, entra avec un sourire maternel, le genre de sourire qui précède une intervention émotionnelle non sollicitée.

« Maman ! lâcha-t-elle avec nervosité. On t'avait dit de ne pas entrer, glissa Emma, la voix trop haute, trop nerveuse.

_ J'ai frappé, se défendit Snow avec innocence.

_ Tu as chuchoté c'est pas pareil, grogna Regina en tentant de se redresser. »

Sans le vouloir, sa voix avait sonné étrangement car elle avait gardé les dents serrés tout au long de sa phrase.

« Je voulais juste voir comment tu allais, murmura-t-elle, comme si le chuchotement annulait l'intrusion. »

Regina vit qu'elle tenait un plateau. Avec des muffins. Et un clafoutis.

De dépit, la reine ferma les paupières. Puis, la princesse se tourna vers Emma en clignant des paupières.

« Emma, tu n'étais pas censé aller voir Hook à cette heure ? »

Regina ouvrit grand les yeux et les tourna lentement vers Emma.

La blonde elle, se crispa. Sa mère avait définitivement le don de mettre les deux pieds dans le plat.

« En effet, tenta-t-elle de dire en gardant la face.

_ Oh, vraiment ? siffla Regina, énervée. »

Emma ferma les paupières.

Bien sur, elle ne lui avait rien dit, car elle ne trouvait pas cela pertinent de lui rajouter une angoisse supplémentaire en un moment pareil. Et bien évidemment, elle ne pouvait même pas s'expliquer.

La plaie.

« Oh, comprend la Regina, ça fait six mois que vous cohabitez toutes les deux. »

Snow s'avança, inconsciente vers la petite tablette à roulette pour y déposer son plateau. Regina elle, serra le poing et sentit la perfusion dans sa main lui tirer la peau.

« Tu vas rire maman, mais j'allais justement dire à Killian que ça risquait de s'étendre encore un petit peu, lança Emma sur un ton agacé. »

Puis, la blonde vint s'asseoir sur le bord du lit qu'occupait Regina, tout près de ses jambes. Discrétement, elle posa sa main sur la couverture, juste au dessus de son tibia et Regina se détendit un peu. En un geste, Snow se tourna vers sa fille, sourcils froncés.

« Mais enfin Emma, tu es consciente que ton mari va exploser ?

_ Regina sort tout juste du bloc, lâcha Emma avec suspicion.

_ Je sais. Et c'est très… attentionné de ta part de rester encore un peu, répondit Snow en posant une serviette propre sur le plateau.

_ Je peux partir si ça t'aide à dormir la nuit, ironisa la blonde, piquée. »

Regina baissa la tête pour cacher un sourire amusé avant de se reconstituer un peu. Emma elle, haussa le menton. Snow ajusta un muffin sur le plateau, puis haussa les épaules.

« Non, ce serait idiot. »

Puis, la princesse se tourna vers la brune encore alitée.

« Je suis contente que tu aille mieux Regina. »

Regina hocha la tête. Emma, malgré elle, jeta un coup d'œil vers elles.

« Et je suis aussi… soulagée que tu sois là pour elle, Emma. Depuis… un moment, ajouta Snow sans insister. »

Emma plissa les yeux, méfiante.

« Tu veux dire quoi ? »

Snow releva enfin la tête et offrit ce sourire, celui qu'Emma connaissait par cœur. Un rictus cordial, mais qui sous entendait trop de choses sans jamais les dire.

« Rien, répondit-le avec simplicité. »

Puis elle prit un muffin, le coupa en deux.
Et en tendit la moitié à Emma.

« Tu veux du clafoutis ? »

xXx

Emma arriva au manoir en jetant ses clés dans l'entrée. Puis, elle soupira avant de se débarrasser de sa veste en cuir.

« Tu es déjà rentrée ? »

Henry venait d'arriver dans l'entrée, ce qui avait arraché un sursaut à la sauveuse. Regina était encore à l'hôpital pour cette nuit, elle s'attendait à retrouver le manoir vide.

« Oh… ouais.

_ Mais t'es partie y'a pas un quart d'heure. »

La blonde se pinça l'intérieur de la bouche, puis émit un rire sans joie.

« Ouais…

_ Killian était pas censé t'attendre sur le Jolly Rogers ?

_ Il était pas là. »

Henry leva les sourcils, surpris.

« Il a… pris les voiles, balança Emma en s'avança pour éviter son fils. »

Henry la suivit dans la cuisine, les bras croisés.

« Il est parti en mer ? »

Emma ouvrit le frigo sans répondre, sortit un pot de yaourt et le referma aussitôt.

« Non. Il est juste… parti.

_ Vous vous êtes disputés ?
_ Non.
_ Vous vous êtes quittés ?
_ Pas… exactement. »

Henry la fixa, dubitatif.

Emma n'osa pas lui dire ce qu'il s'était réellement passé et pourtant… Pourtant tout était plutôt clair. Elle avait reçu ce sms, quelques jours avant la date de l'intervention. Hook lui avait donné une date, et une heure de rendez-vous. Et il lui avait dit que s'il ne la voyait pas, le message serait clair.

Emma s'étai résolu à s'y rendre, ne serait-ce que pour s'expliquer. Mais elle était restée dans la chambre d'hôpital, avec Regina sans regarder sa montre. Quand elle était arrivée, essoufflée à 20h18 au lieu de 20h15, le Jolly Rogers flirtait déjà avec l'horizon… Et elle avait retrouvé la bague de Hook sur le banc, juste en face de là où s'était amarré son bateau.

« C'est quoi "pas exactement" ? »

Emma s'adossa au plan de travail, le pot toujours dans les mains, les yeux perdus sur l'étiquette.

« C'est… compliqué. »

Après un long silence, Henry haussa un sourcil.

« Tu t'es barrée avant qu'il ait pu t'engueuler, c'est ça ? »

Emma leva lentement les yeux vers lui.

« Tu pourrais éviter de me psychanalyser, gamin. »

Henry rit un peu, le nez dans sa tasse qu'il avait abandonné un peu plus tôt.

« Je suis juste arrivée à la bourre.

_ Oui, ou alors tu l'as fait exprès. »

Lentement, le garçon leva son visage vers elle et Emma se contenta de le regarder, sans un mot.

C'était peut-être le cas, dans le fond…

Emma souffla et haussa les épaules. Elle posa le yaourt, toujours fermé, sur le plan de travail.

« Je crois qu'il en a eu marre de m'attendre.

_ Il avait qu'à venir à l'hôpital, répondit Henry. »

Emma le regarda, un peu surprise.

« Il aurait compris tout de suite, ajouta-t-il. »

Puis, lorsqu'il leva les yeux et tomba sur le regard à moitié coupable de sa mère biologique, un léger sourire presque nostalgique se tendit sur son visage.

« C'est là que t'étais. »

Emma le fixa encore un moment, puis elle baissa le regard.

« Ouais. C'est là que j'étais, murmura-t-elle pour elle-même. »

Après un silence, Henry termina sa gorgée et reposa sa tasse.

« Faudra pas que t'oublie de dire à 'man de foutre ton nom sur le bail. »

Emma rit un peu, sans se retourner vers son fils qui s'éclipsa sans un mot de plus.

Chapter Text

Epilogue

Le soleil s'était couché depuis longtemps, mais Emma n'avait pas allumé la lampe.

Pas cette fois.

Ce soir d'été était le même que ces trente dernières années. Il faisait doux, pas trop chaud, tout juste assez. Sur la table de chevet, il y avait un vieux mug fêlé, encore tiède. Le fond avait été tachée par le thé, car Emma n'avait eu de cesse de l'utiliser, tous les matins depuis des années.

À côté, une boîte à musique que Henry leur avait offerte un Noël quand il avait commencé à grisonner était posée.

Et sur le dossier du fauteuil, posé là sans soin, le cardigan préféré de Regina.
Celui qu'elle mettait quand elle avait froid, ou quand Emma rentrait tard et qu'elle voulait rester éveillée.

La maison était calme.

Emma entra dans la pièce à pas lents, comme à chaque fois.

Elle avait vieilli, elle aussi.

Ses cheveux étaient presque entièrement argentés, attachés en chignon maladroit.

Elle portait encore ses vieilles boots, les mêmes qu'on lui avait offertes après une cérémonie dans la Forêt Enchantée, il y a une éternité. Et sa veste en cuir rouge.

« Ça va ? murmura-t-elle en s'approchant. »

Regina, allongée, ouvrit un peu ses yeux et les baissa sur elle alors que l'ancienne sauveuse venait de s'asseoir sur le bord du lit.

« Tu as encore mis cette horreur.

_ Il faisait un peu froid dehors. »

Son souffle était court, mais ses paroles empreinte d'un sourire qui ne la quittait jamais plus vraiment, depuis le retour d'Emma.

« Et puis, tu es tombée amoureuse de moi dans cette veste, rajouta-t-elle.

_ Je t'ai détesté dans cette veste.

_ Elle était iconique.

_ Elle était rouge.

_ Donc ironique. »

Regina sourit de nouveau. Emma elle, défit ses gants et prit sa main. La peau était fine, tachetée, mais chaude encore.

« Où est-ce que tu étais ?

_ Dans le jardin. J'allais chercher le linge.

_ Tu devais vraiment faire une pause. »

Emma secoua lentement la tête en serrant sa paume.

« J'ai vu Henry ce matin, ajouta-t-elle après un moment. Il passe demain avec Hope. Ils t'embrassent fort. »

Regina hocha lentement la tête, les paupières à moitié closes.

« Elle a fait un dessin, précisa Emma. Toi avec une cape. Et un dragon. »

Regina laissa échapper un rire, léger et fragile.

Emma la regarda, longtemps.
Son visage avait changé aussi. Les rides avaient creusé ses joues, redessiné sa bouche.

Mais c'était toujours elle.
Toujours la même femme qu'elle avait voulu, attendue, crainte, détestée, sauvée, embrassée.

Ce serait toujours elle.

« Tu m'en veux ? demanda Regina, plus bas.
_ Pour quoi ? lui répondit Emma d'un ton doux.
_ La chimio… »

Emma baissa les yeux.

« Cette fois… J'ai dit non tout de suite. »

Emma acquiesça. Elle savait.
Elle avait pleuré seule, dans le jardin. Puis elle était revenue, sans un mot, s'allonger près d'elle.

« Je voulais pas qu'on recommence à courir après le temps, dit doucement Regina. Je voulais le vivre avec toi. »

De nouveau, la blonde hocha la tête, mais sentit son regard s'embrumer. Alors, Regina serra un peu plus sa main, comme elle le pouvait.

« Hé, chuchota-t-elle.

_ Je sais pas comment je vais vivre sans toi Regina. »

Puis, elle craqua. Emma pleura enfin, comme une enfant et Regina soupira en se blottissant contre sa cuisse.

« J'ai toujours cru que je finirais seule, sanglota la sauveuse. Sur un bateau. Avec un pirate. Alors que j'avais le mal de mer. »

La brune se redressa contre elle et sécha ses joues.

Emma marqua une pause, pour se reprendre. Elle déglutit, avalant comme elle le put ses émotions.

« Et puis… murmura-t-elle. Y'a eu toi. Et Henry. Et sa fille. Et cette maison. Et… la bibliothèque. Et les crêpes ratées. Et ta boite verte pleine de sextoy. »

Regina rit de nouveau.

« Et ce foutu canard jaune que t'as jamais voulu jeter. »

Emma rit à son tour, tout doucement.

« Je l'aimais bien moi ce canard, dit-elle pensivement.»

Un silence s'installa, plus long, cette fois. Puis, Regina posa sa main sur son visage.

« Emma… Ce cancer, souffla la brune, désemparée.

_ Ouais je sais…

_ Non. »

Regina se redressa un peu contre l'oreiller, juste assez pour s'appuyer sur son bras.

« C'est… c'est la meilleure chose qui me soit arrivée.

_ Qu'est-ce que tu raconte, marmonna Emma en secouant la tête.

_ Il m'a permis d'être avec toi. »

Emma cligna des yeux vers elle, le regard embué. Regina, le souffle plus court, lui sourit et Emma s'approcha pour glisser ses doigts contre sa joue à son tour.

« Tu vas rester ? lui chuchota la reine. »

Emma hocha la tête, sans réfléchir. Seulement, Regina prit sa main sur son visage et la serra, si bien que la sauveuse rouvrit les paupières vers elle.

C'était idiot. Elles avaient tant vieilli. Mais parfois, elle avait l'impression de la revoir, exactement comme elle l'était à l'époque.

« Non. Je veux dire… après, murmura Regina. »

Emma ouvrit la bouche. Elle aurait lui répondre avec son assurance légendaire… Mais aucun mots ne voulaient sortir.

Elle sentit les doigts de Regina se resserrer à peine autour des siens.

« Est-ce que tu le sais ? dit-elle d'une voix faible.

_ Quoi ?
_ Que je t'ai aimée. »

Emma la fixa longuement, puis hocha la tête. Mais sa voix était cassée, tremblante.

« Je le sais. Je l'ai su tous les jours. »

Regina ferma les yeux.
Un soupir s'échappa de ses lèvres. Presque un sourire.

« Alors ça va. »

Emma se concentra pour garder ses larmes pour elle. A la place, elle se pencha, posa son front contre le sien.

Elle sentit les cils de Regina, un dernier battement, presque imperceptible.

Et puis…

La main de Regina bougea une dernière fois.
Pas pour serrer la sienne.
Mais pour lui remettre une mèche derrière l'oreille.
Le même geste qu'elle faisait chaque fois qu'Emma s'agitait, chaque fois qu'elle pleurait en silence.

Ses doigts glissèrent à peine contre sa joue.
Trop faibles pour finir le mouvement.

Puis, dans un souffle brisé par l'épuisement, Regina chuchota quelque chose.
Un mot. Deux peut-être.

Trop bas pour être compris.

Emma ferma les yeux.

« Je sais… murmura-t-elle. »

Emma sentit une boule lui étreindre la gorge.

« Je te le promets. »

xXx

Le couloir de l'hôpital était vide, calme, propre.

Il y avait une odeur désagréable de dissolvant dans l'air.

Henry était assis dans un fauteuil de la salle d'attente, les mains croisées entre ses genoux.
Il n'avait pas bougé depuis qu'on l'avait appelé. Ella, enceinte d'au moins huit bon mois avant pourtant insisté pour rester avec lui. Hope, haute comme trois pommes était assise sur ses cuisses et battait ses jambes dans les airs en chantonnant.

Le médecin arriva, d'un pas mesuré. Il s'arrêta devant lui, le regard grave mais doux.
Un homme d'un certain âge. Il connaissait bien la famille.

« Monsieur Mills… Je suis désolé pour votre perte. »

Henry se leva d'un bond, et déposa sa fille à côté de sa femme. Il hocha lentement la tête, incapable de parler.

Le médecin hésita. Henry jeta un léger regard vers son épouse et sa fille. Ella lui envoya un léger hochement de tête, alors, le docteur posa sa main sur son épaule et l'éloigna un peu.

« Nous avons les résultats de l'autopsie préliminaire. »

Henry prit une inspiration difficile.

« Ce n'était pas une attaque, ni un problème chronique.

_ Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demanda-t-il, la voix tremblante.
_ Votre mère a été prise de ce qu'on appelle, une cardiomyopathie de Tako-Tsubo. »

Henry releva lentement les yeux.

« C'est une forme rare de… souffrance cardiaque aiguë. »

Le médecin déglutit, puis trifouilla pensivement son stylo.

« Elle se déclenche en général après une émotion violente. Une perte. Un choc affectif. »

Il marqua un temps, puis leva son visage vers l'homme face à lui.

« On appelle ça, parfois… le syndrome du cœur brisé. »

Henry prit une grande inspiration difficile. Trop difficile. Car ses yeux s'embrumaient tout seuls et ses mains tremblaient.

« Merci. »

Le médecin lui accorda un hochement de tête se voulant réconfortant. Mais une fois parti, Henry crut se liquéfier sur place.

Avec douceur, Ella s'approcha de lui.

« Ça va mon chéri ? »

Henry hocha la tête, mais sans trouver le pouvoir de sortir un seul mot. Alors, sa femme soupira et le prit dans ses bras. Et une fois seulement, il pleura, longtemps, et si fort qu'il cru redevenir un enfant pour la seconde fois.

Pour la première fois, le monde lui sembla vide… vraiment vide.

« Elle a tenu sa promesse Ella, dit-il entre deux sanglots. »

La jeune princesse passa une main sur l'arrière sa la tête de son époux, la gorge nouée.

« Qui ça ? chuchota-t-elle.

_ Emma… »

Puis, il se redressa vers elle et son regard se fixa dans les pupilles brillantes de sa femme.

« Elle est restée. »

FIN.